§2 Les faiblesses du système juridique de
l'OUA
Selon François BORELLA, pour conclure à
l'existence d'un système juridique d'une organisation
internationale, il faut au préalable identifier trois
types de phénomènes cohérents.
D'abord, il faut la présence d'un ensemble
d'organes et de procédures de décision, ensuite il faut
l'existence d'un corps de règles édictées et de
décisions prises ; et enfin il faut un ensemble de procédures de
sanctions.216
Pour analyser la faiblesse du système juridique de
l'OUA, nous entendons cheminer dans le sillage tracé par
François BORELLA.
Ainsi, dans un premier temps, apparaît-il utile de
relever d'une manière générale les travers contenus
dans la Charte.
Cela fait, nous allons, toujours dans la logique de
François BORELLA, mais en y incorporant quelques
éléments du raisonnement de Michel VIRALLY, nous pencher sur
les faiblesses des moyens juridiques dont disposaient l'OUA.
215 GONIDEC (P. F.), op. cit., p.
59
216 BORELLA (F.), Le système juridique de
l'OUA in AFDI 1971, p. 234
85
A. Les lacunes contenues dans la Charte
La Charte de l'OUA - comme nous avons eu à l'analyser
précédemment - fait
apparaître des objectifs et des principes ainsi que
l'existence d'organes et de procédures
de décisions.
Notre souci n'est pas de les décrire de nouveau.
Plutôt, nous entendons repérer certaines incohérences et
contradictions qu'ils recèlent.
Pour ce faire, nous subdiviserons d'une part les lacunes
liées aux objectifs et principes
et d'autre part celles liées à la structure de
l'OUA.
1. Les incohérences liées aux objectifs et
principes de l'OUA
Comme on a eu à le souligner précédemment,
l'OUA vise comme objectifs, entre
autres, la défense de la souveraineté,
l'intégrité territoriale et l'indépendance de chacun des
Etats membres (art. 2 de la Charte de l'OUA).217
Sur sa lancée, le même article précise
que pour atteindre ces objectifs « les Etats membres
coordonneront et harmoniseront218 leur politique
générale [...] »
Le choix de ces deux verbes a suscité chez la
plupart des experts de l'OUA, une certaine perplexité.
Pour Jean MFOULOU, il n'est donc pas question de rechercher
l'unité des Etats africains, de travailler à leur unification
mais uniquement de coordonner et d'harmoniser leurs différentes
politiques219 .
D'autres encore en tirent la conclusion que l'OUA n'est qu'une
simple organisation de coopération, et encore pas dans tous les
domaines ; la coopération est limitée à des secteurs
bien déterminés220 .
En outre, la Charte en son art. 3 énonce les
principes qui guideront les Etats membres pour atteindre leurs
objectifs.
Ces principes sont clairs en eux-mêmes mais nous ferons
notre commentaire sur trois des principes qui intéressent notre
argumentation.
217 Ici, nous nous limitons aux objectifs qui
intéressent notre argumentation.
218 C'est nous qui soulignons
219 MFOULOU (J.), L'OUA, triomphe de
l'unité ou des nationalités, Paris, L'Harmattan, 1986,
p.42
220 GAM (P.), « L'OUA », in
Revue juridique et politique, avril- juin 1966, Vol. 20, n° 2, p.
321
86
Pour le premier principe, il convient de constater que
l'OUA est une organisation internationale qui repose sur le principe
juridique et réellement appliqué de l'égalité
souveraine des Etats. A cet égard, elle occupe une place
singulière au sein de la famille des organisations
internationales.221
Cependant, si l'égalité souveraine des Etats
constitue la pierre angulaire du droit
international, la réalité politique est tout
autre : c'est l'inégalité des nations, de par la population, les
ressources géographiques et les nombreux autres facteurs qui
influent sur la puissance militaire et économique.222
Ainsi, au sein de l'OUA, l'inégalité
objective de puissance fondée sur la taille, la population, le
potentiel économique et militaire qui distingue l'Egypte de la Gambie ,
le Congo Kinshasa de la Mauritanie et la Fédération
Nigériane du Gabon, perdait sa résonance
qualitative.223
De plus, pour les défenseurs des droits de
l'homme, le principe de l'égalité souveraine des Etats
africains est un principe qui a été détourné
et confisqué par les détenteurs de la puissance
publique.224
Ainsi, pour Hocine AIT-AHMED, ce principe
s'applique indissociablement aux peuples, aux minorités et aux
individus qui en sont exclusivement « les véritables
destinataires et les seuls titulaires légitimes ».225
Il en résulte que l'appropriation de ce principe par
les Etats africains n'avait qu'un but : transférer à ces
derniers un pouvoir leur permettant de se soustraire au contrôle
international sur le sort des peuples dans les
réalités politiques, juridiques et institutionnelles de ces
mêmes Etats.226
Une autre remarque s'impose sur le principe de non
ingérence dans les affaires intérieures des Etats. Ce principe
garantit à chaque Etat une autonomie et une liberté totales en
matière de politique intérieure, en le mettant à
l'abri de l'intervention ou même de critiques de la part non seulement
d'un autre Etat mais aussi de l'organisation.
221 MANIGAT (M.), « L'organisation de
l'unité africaine », in Revue Française de science
politique, avril 1971,
p. 85
222 FRIEDMAN (W.), De l'efficacité des
institutions internationales, Paris, A. Colin, 1970, p.58
223 KOUASSI (K.), op. cit. , p.
102
224 AIT-AHMED (H.), L'Afro fascisme : les droits
de l'homme dans la Charte et la pratique de l'OUA, Paris, L'Harmattan,
1980, p. 205
225 Idem., p. 201
226 Ibid.
87
C'est ainsi qu'à plusieurs occasions - si
pas toutes, l'OUA est restée muette, condamnée
à croiser les bras et à l'impuissance devant certaines
atrocités dont le continent a été le
théâtre227 car faut-il le souligner, les conflits
africains, les plus meurtriers et les plus tenaces ont été,
pour la plupart, des conflits internes.
Or, les principes de droit international qui concernent
directement la guerre civile sont très sommaires et de surcroît,
se trouvent limités par le principe de non
intervention.228
De plus Wolfang FRIEDMAN note que si « la non
intervention généralisée en cas de guerre civile est
théoriquement la solution la plus souhaitable, en pratique, elle
échoue invariablement lorsque des puissances étrangères
ont véritablement intérêt à ce que l'un
ou l'autre camp remporte la victoire ».229
Par ailleurs, le principe du respect de la souveraineté et
de l'intégrité territoriale
de chaque Etat et de son droit inaliénable à une
indépendance, est-il aussi ambigu ?
En effet, en sacralisant le droit inaliénable à une
existence indépendante, la Charte rend pratiquement impossible tout
regroupement politique d'Etats africains.
En fait, toute unification politique d'Etats africains violerait
les principes de l'OUA et
se retrouverait donc condamnée d'avance par cette
même organisation230 ; ce qui est paradoxal pour une
« Organisation de l'unité africaine »
En définitive, d'ores et déjà au niveau des
objectifs et des principes, la lecture de
la Charte de l'OUA nous fait entrevoir certaines lacunes de
taille qui malheureusement ont pesé sur son bilan.
Pourtant, l'examen de ces lacunes ne saurait s'arrêter
là, il faut ajouter les insuffisances qui ont caractérisé
sa structure.
227 MFOULOU (J.), op. cit., p. 45
228 FRIEDMAN (W.), op.cit., p. 67
229 Ibid.
230 MFOULOU (J.), op. cit., p. 46
88
2. Les lacunes structurelles
D'emblée, il faut souligner la
prépondérance absolue des Etats membres de
l'OUA au sein des organes de l'OUA. Aussi, les imperfections de
la structure trouvent- elles justement leur origine dans ce constat
préalable. En réalité, elles se manifestent par
le fait que la structure de l'OUA est non seulement
égalitaire mais aussi elle est hiérarchisée.
a. Une structure égalitaire
D'entrée de jeu, il faut rappeler que tous les Etats
membres sont représentés au
sein de la Conférence des Chefs d'Etat, du Conseil des
ministres et des Commissions spécialisées ; et que chacun y
dispose d'un pouvoir égal de vote.
Ainsi, il apparaît que l'égalité absolue
domine la composition des organes de l'OUA.
En effet, tout d'abord, les principaux organes de
décision et de direction de l'OUA sont pléniers. Et si le
Comité de libération était un organe restreint à
l'origine, son évolution - comme nous l'avons vu - a confirmé le
principe égalitaire.
Ensuite, le souci des Etats membres de l'OUA de veiller au
respect du principe égalitaire se traduit par les
atténuations qu'apporte la Charte en ce qui concerne les
inégalités résultant de l'existence d'organes
restreints.
Ces atténuations consistent premièrement, dans la
désignation par l'organe plénier des
membres des organes restreints. D'où, la
Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement élit le
Secrétaire général, les Secrétaires
généraux adjoints ainsi que les vingt et un membres de la
Commission de médiation.
Deuxièmement, ces atténuations se manifestent dans
la stricte limitation des
compétences de l'organe restreint.
A l'origine, la Charte de l'OUA conférait au
Secrétaire général un rôle « purement
»
administratif. Cependant, il convient de préciser que dans
l'évolution de l'organisation
les compétences du Secrétaire général
ont été étendues par la réforme de la Charte de
1979 ; bien qu' Edem KODJO, ancien Secrétaire
général de l'OUA, qualifie cette réforme de «
réformette ».231
231 KODJO (E.), préface chez JOUVE (E.),
op. cit., p. 11
89
Pareillement, la compétence de la Commission de
médiation s'étend «uniquement » aux litiges entre
Etats.
Enfin, nous sommes amenés à constater que
l'OUA ignore complètement le système des
responsabilités spéciales de tel Etat, et celui de
l'inégalité fonctionnelle statutaire, consacrées dans les
structures des autres organisations telle que l'ONU.232
La conséquence de cette situation apparaît
évidente : l'OUA traduit une certaine ambiguïté en tant
que centre autonome de décisions.
On observe également qu'il a été souvent
difficile - parfois impossible - d'imposer une discipline de groupe minimale
qui pouvait assurer la cohérence et la solidité de
l'organisation.233
C'est ainsi que des pays membres de l'organisation ont
fait cavalier seul dans des affaires où l'OUA avait pourtant
défini une position claire et bien arrêtée234
.
En définitive, il est clair que cette structure
égalitaire de l'OUA a renforcé la souveraineté des
Etats au détriment de l'organisation qui, en tant que sujet de
droit international, a vu sa capacité d'action fortement
réduite.
b. une structure hiérarchisée
La Charte de l'OUA débute par la formule
« Nous, Chefs d'Etat et de
gouvernement »235 tandis que dans son
article 8, elle dispose que la Conférence des
Chefs d'Etat et de gouvernement est l'organe suprême de
l'organisation.
Ainsi, le sommet de la hiérarchie des organes
de l'OUA est coiffé par la Conférence des Chefs d'Etat
et de gouvernement qui prend les décisions de
l'organisation en dernier ressort. Le Conseil des ministres est
responsable devant la Conférence des Chefs d'Etat et de
gouvernement tandis que le Secrétaire général est
directement responsable devant le Conseil des ministres.
232 BORELLA (F.), op. cit. ,p.235
233 JOUVE (E.), op. cit., p. 89
234 C'est notamment le cas de la Côte d'Ivoire
qui a violé l'embargo décrété par l'OUA à
l'égard de l'Afrique du
Sud de l'apartheid. Cf. BA (A.) et al., op. cit., p.
445
235 Ceci contraste sensiblement avec le « Nous,
peuples des Nations Unies. » de la Charte des Nations Unies
90
De la sorte, il apparaît que la structure de l'OUA est
non seulement caractérisée par une hiérarchie de type
pyramidal mais aussi qu'elle repose entièrement sur la Conférence
des Chefs d'Etat et de gouvernement.
En fait, comme le remarque Maurice GLELE, « la
Conférence est l'organisation elle- même »236 Il
en résulte que le bon fonctionnement de l'OUA dépendait
en dernière instance des Chefs d'Etat et de gouvernement.
A ce niveau, point n'est besoin de reprendre autant
l'exposé sur les pouvoirs de
la Conférence des Chefs d'Etat et de
gouvernement, que celui des principales manifestations de la
prééminence des Chefs d'Etat et de gouvernement.
Plutôt, nous allons dégager les conséquences de cette
primauté sur la capacité d'action de l'OUA.
En réalité, la première conséquence
est que la Conférence éclipse totalement le reste des organes et
devient omniprésente dans le fonctionnement de l'OUA.
Ainsi, le Conseil des ministres est réduit à un
organe de préparation et d'exécution des décisions prises
par la Conférence des chefs d'Etat.
Quant au Secrétariat général, le
Secrétaire général voit son rôle occulté par
l'apparition
du Président en exercice.
De plus, la Conférence des Chefs d'Etat et de
gouvernement est tentée de se subdiviser pour faire face aux
tâches qui incombent à l'OUA. Chaque année ou
à peu près, les Chefs d'Etat désignent certains
d'entre eux pour constituer un comité chargé de
résoudre telle ou telle autre question délicate.
La deuxième conséquence est que
Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement est un organe
lourd et solennel qui est surchargé de travail. Naturellement
préoccupés par les grandes questions politiques du continent, les
Chefs d'Etat et de gouvernement ont négligé les objectifs propres
de l'Organisation dans les domaines économiques, culturels et
techniques.
En outre, la vitalité de l'OUA pouvait se mesurer par le
nombre de chefs d'Etat présents
à la réunion de la Conférence des Chefs
d'Etat.
236 GLELE (M.), « Pour une OUA
opérationnelle », in Revue juridique et politique,
juillet-décembre 1985, Vol.
39, n° 3-4, p.830
91
Aussi, les Chefs d'Etat surchargés de tâches ne
peuvent pas toujours consacrer un temps suffisant à l'étude et la
discussion des dossiers dans le cadre d'une conférence annuelle ; sans
compter qu'à cet échelon ces dossiers sont vite
politisés même ceux qui ont un aspect technique.
Or, la pratique a révélé une certaine
négligence des Etats africains à l'égard des
différentes Commissions prévues par la Charte.
Enfin de compte, les lacunes contenues dans la Charte nous
auront permis de déceler les décalages entre la Charte et ses
ambitions d'une part, et les réalités politiques d'autre part.
B. La faiblesse des moyens juridiques
Comme bien d'autres organisations, l'OUA possédait
des moyens juridiques
qu'elle pouvait déployer à l'intérieur afin
de faire face à la sphère d'actions qui lui était
assignées.237
En réalité, les moyens juridiques mettent en
évidence l'étendue des pouvoirs de l'OUA
par rapport aux Etats membres.
Cela étant, nous tenons à préciser
qu'il ne s'agit pas de les décrire mais de dégager les
faiblesses qui ont caractérisé l'OUA dans la mise en action de
ces moyens juridiques - ou pouvoirs.
Précisément, en faisant nôtre la
classification de Michel VIRALLY, nous essayerons de
dégager de quelle manière l'OUA avait-elle le
pouvoir de décider (1) et celui de sanctionner (2).
237 Ici nous faisons référence aux
notions de pouvoir et de compétence déjà définies
dans le premier chapitre
92
1. Pouvoir de décider
Le fond du pouvoir de décider correspond au contenu
même de la compétence
normative de toute organisation internationale.238
Ainsi, le pouvoir de décider peut revêtir deux
formes : celle de l'acte unilatéral et celle
de l'acte conventionnel. Notre propos sera consacré aux
actes unilatéraux.
La Charte de l'OUA, en son art. 10, précise que la
Conférence des Chefs d'Etat
et de gouvernement prend ses
décisions239 à la majorité des 2/3
; mais en réalité - comme précédemment - il
faut distinguer deux types de résolutions : les résolutions
à usage interne et les résolutions à usage externe.
En effet, les premières ont réellement le
caractère de décision du fait qu'elles sont
obligatoires.
En revanche, les secondes qui ont la prétention
de dicter aux Etats membres leur conduite, tant sur le plan interne
qu'international, sont dénouées de toute force
obligatoire.
Précisément, pour reprendre l'expression de Pierre
François GONIDEC, l'OUA « peut
parler le langage de l'espoir et non celui du commandement
».240
En ce qui concerne les résolutions de l'OUA
à usage externe, deux traits ou plutôt deux lacunes les
caractérisent.
D'une part, c'est l'absence de rigueur dans
l'expression241 qui résulte du fait qu'elles
sont rédigées de sorte à ne heurter la
susceptibilité d'aucun Etat membre.
Mais il est clair - et ce n'est qu'un rappel - que si l'OUA
est le résultat d'un compromis elle ne saurait dans ses activités
rompre les précaires termes d'équilibre sur lesquels elle repose,
en adoptant des positions rigides.242
D'autre part, la répétition des mêmes
textes243 a indéniablement constitué un signe
de
faiblesse de l'OUA.
238 KISS (A.C.), « Principes
généraux et droit commun » in Organisations
régionales internationales, Recueil de
Cours, Fascicule II, Faculté internationale pour
l'enseignement du droit comparé, éd. Montchrestien, Paris,
1971,
p. 632
239 C'est nous qui soulignons
240 GONIDEC (P. F.), op. cit., p.
18
241 C'est nous qui soulignons
242 KOUASSI (K.), op. cit. , p.
198
243 C'est nous qui soulignons
93
En effet, l'OUA s'est retrouvée, à maintes
reprises, dans l'incapacité de définir une position claire
et ferme et surtout d'imposer une ligne de conduite précise et efficace
à ses Etats membres.
A titre d'exemple, les résolutions rappelant aux Etats
membres de s'acquitter de leurs obligations financières
démontrent de cette faiblesse.244
Subséquemment, la terminologie employée dans
les résolutions dénote plus encore de cette faiblesse. Dans
les résolutions de l'OUA, les formules comme « l'OUA invite,
exhorte, recommande, prie ; ou encore réaffirme,
réitère et rappelle »245 sont
fréquentes.
Enfin, ceci nous amène à terminer ce
point par cette réflexion de Kwam KOUASSI qui estime qu'en
parcourant les résolutions de l'OUA, « on a non seulement
l'impression mais aussi la conviction que cette dernière parle de
fumée sans allumer le feu [et qu'] elle cherche l'ombre sans
jamais planter d'arbre, l'ivoire sans tuer l'éléphant
».246
2. Le pouvoir de sanctionner
Le pouvoir de sanctionner est le corollaire logique du pouvoir de
décider mais,
en fait, il ne peut exister que dans la mesure où un
texte est juridiquement doté d'une force obligatoire.247
Ainsi, ici comme précédemment, il nous faut
distinguer les résolutions à usage interne et celles à
usage externe.
Cela étant, nous tenons à préciser que
notre propos se limitera à relever dans quelle mesure l'OUA a
usé de son pouvoir de sanctionner à l'égard des Etats
membres.
Tout d'abord en ce qui concerne les résolutions à
usage interne, du fait de leur caractère obligatoire, elles doivent
être contrôlées quant à leur exécution.
Cependant, la pratique au sein de l'OUA nous
révèle qu'à plusieurs occasions les violations de la
Charte n'ont pas été automatiquement assorties de
sanctions.248
De plus, aucune mesure d'exclusion n'est prévue par la
Charte.
244 On recensait, en 1988, pas moins de 14
résolutions allant dans ce sens. Ce sont notamment les
résolutions
AHG/Rés. 17 (I), AHG/ Rés. 39 (III),
AHG/Rés. 41 (II).
245 GONIDEC (P. F.), op. cit., p.
19
246 KOUASSI (K.), op. cit. , p.
199
247 GONIDEC (P. F.), op. cit., p.
20
248 L'exemple fréquemment cité est
celui des résolutions rappelant aux Etats membres de s'acquitter de
leurs contributions obligatoires. L'art. 23 de la Charte de l'OUA
précise que les « Etats s'engagent à payer
régulièrement leurs contributions respectives
».
94
Ensuite, à propos des résolutions à usage
externe, du fait de leur caractère non obligatoire, elles sont
évidement difficile à faire respecter.
Ainsi, le refus d'appliquer telle ou telle
résolution par un Etat membre, ne pouvait entraîner que la
réprobation ou la condamnation purement morale de la part de
l'organisation.249 Qui plus est, l'organisation pouvait
hésiter à pointer du doigt les Etats
qui dédaignaient d'appliquer les résolutions
qu'elle avait adoptées. Conclusion
Au terme de ce Chapitre sur la présentation
générale de l'OUA, nous pouvons en
dégager une synthèse qui s'articule sur 3
éléments généraux.
Tout d'abord, le bilan de la contribution de l'OUA a
ses « rayons et ses ombres ».
Mais faut-il le reconnaître, sa contribution a permis la
résolution de certains problèmes
de l'Afrique.
Sur le plan juridique, la contribution de l'OUA met en
évidence l'existence d'un système juridique, même si on
est vite amené à constater sa faiblesse.
Ensuite, les problèmes à traiter par l'OUA ont
changé de nature au fil du temps. Au début s'il s'agissait
essentiellement d'achever la libération du continent de la tutelle
coloniale ; à la fin du XXèmesiècle, cet
objectif qui était de nature à faire unanimité, est
complètement atteint.
Mais depuis les années 1990, l'Afrique se trouve
confrontée à des conflits intenses aussi nombreux que complexes
ainsi qu'à une marginalisation sur la scène internationale du
fait de son retard sur le plan économique.
Enfin, le dernier élément - mais non des
moindres - est que l'OUA s'est montrée démunie, car elle
s'est révélée inadaptée dans ses
structures et ses règles de fonctionnement.
Au total, tous ces éléments montrent que la Charte
de l'OUA nécessitait d'être révisée et
précisée pour adapter ses structures et améliorer son
fonctionnement.
Ainsi, l'OUA se trouvait conduite à repenser, à la
veille du XXIèmesiècle, sa structure et
son fonctionnement afin de mieux répondre aux besoins du
moment de l'Afrique.
C'est pourquoi la réforme de l'organisation panafricaine
et la révision de sa Charte sont devenus une exigence incontournable.
249 GONIDEC (P. F.), op. cit., p.
20
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