§2. Les effets de la transformation de l'OUA en Union
africaine
« La succession constitue l'institution du
droit international qui assure la continuité des services
antérieurs en préconisant un type particulier de relations entre
les deux organisations, et de leur adaptation malgré la disparition du
prédécesseur ». 263
En réalité, les rapports entre le
successeur et le prédécesseur de même que le sort
réservé aux organes et aux fonctions de l'ancienne
organisation sont généralement stipulés dans le
Traité constitutif de la nouvelle organisation.
En ce qui concerne la transformation de l'OUA en UA, l'Acte
constitutif en son article 33 n'y fait allusion que d'une manière
lapidaire.
Aussi, est-il que le recours aux recommandations
du Secrétaire général et aux différentes
décisions de la Conférence s'avère judicieux pour
l'examen des effets de cette transformation.
Successivement, il sera question du sort du patrimoine, du
personnel, des traités et des
organes de l'OUA.
262 Déclaration de Durban en Hommage à
l'OUA à l'occasion du lancement de l'Union africaine, Assembly/AU/Decl.2
(I), p. 3
263 BASTID (S)., préface.Cf. RANJEVA (R.),
op.cit., p. XI
101
A. Le sort du patrimoine de l'OUA
Le sort du patrimoine de l'OUA a été
réglé, dans un premier temps, par la
décision AHG/Déc. 160 (XXXVI) prise à
Lusaka, sur la mise en oeuvre de la décision
du sommet de Syrte sur l'UA.
Dans son point 12, la décision de la
Conférence a autorisé le Secrétaire
général de prendre des mesures nécessaires pour le
transfert de l'Actif et du Passif de l'OUA.264
Par la suite, c'est le Conseil exécutif de l'Union
africaine réuni en sa 4ème session ordinaire à
Addis-Abeba en 2004 qui a définitivement réglé cette
question.
En effet, le Conseil exécutif, ayant pris note
du bilan de la Commission de l'Union africaine au 31 décembre
2002, avait décidé que « la somme de 90.129.639,00 Dollars
des EU (Actif) et la somme de 90.129.639,00 Dollars EU (passif, réserve
et solde de Fonds) sont les montants de l'Actif et du Passif que l'OUA
transfert à l'UA ».265
A travers cette décision, le Conseil exécutif
demande également à la Commission
« d'intégrer ces deux montants dans les livres
comptables à partir du 1er janvier
2004».266
Enfin, il convient aussi de souligner que, par la même
décision, la Conférence a autorisé le Secrétaire
général à continuer à utiliser le logo et l'hymne
de l'OUA jusqu'à
la conception de l'emblème ou des symboles de l'Union
africaine.267
B. Le sort du personnel de l'OUA
Autant le processus de transformation de l'OUA en Union
africaine fut un
processus long, autant le sort du personnel de l'OUA a
été réglé par voie de plusieurs
décisions.
Pourtant, il faut préciser d'emblée que le
personnel de l'OUA a été entièrement repris par l'Union
africaine tout en notant qu'il a dû être
redéployé.
264 Décision sur la mise en oeuvre de la
décision du sommet de Syrte sur l'Union africaine, AHG/Déc.
160
(XXXVII), p. 6
265 Décision sur le bilan de l'UA, Ex.
CL/Déc. 75 (IV), p. 1
266 Décision sur le bilan de l'UA, Ex.
CL/Déc. 75 (IV), p. 1
267 Décision sur la mise en oeuvre de la
décision du sommet de Syrte sur l'Union africaine, AHG/Déc.
160
(XXXVII), p. 6
102
En effet, le Secrétaire général
dans son rapport sur la mise en oeuvre de la restructuration
du Secrétariat général de l'OUA notait qu' « une
liste des fonctionnaires
à redéployer a été établie
[...]. Sur base de cette liste, une lettre a été
adressée individuellement à chaque fonctionnaire, le 9 août
2000, pour l'informer de son poste,
de son grade et de son échelon dans la nouvelle structure
».268
En outre, ce rapport estimait qu'après le
déploiement du personnel, quatre-vingts postes de la catégorie
professionnelle et de la catégorie des services
généraux étaient vacants, et donc qu'ils étaient
à pourvoir au cours de l'exercice financier 2000-2001.269
De ce qui précède, il ressort que la nouvelle
structure de l'UA a non seulement absorbé le personnel de l'OUA, mais
aussi qu'il restait encore quelques postes vacants,
à combler.
C. Le sort des traités de l'OUA
Comme nous l'avons déjà indiqué au cours de
notre exposé sur la contribution de
l'OUA au développement du droit international
africain, l'OUA a offert un cadre à l'élaboration et
l'adoption de 21 traités dont un bon nombre n'avaient pas encore
acquis
les ratifications nécessaires à leur
entrée en vigueur conformément au rapport du
Secrétaire général sur l'état des
traités de l'OUA.270
Pour analyser le sort des traités de l'OUA, nous ferons
recours à une étude sur la révision des traités de
l'OUA/UA effectuée en 2001. 271
En réalité, l'étude sur la révision
des traités a été consécutive à la
décision prise par le
Conseil des ministres de l'OUA,272 au cours de sa
71ème session ordinaire qui s'est tenue
à Addis-Abeba (mars 2000).
268 Rapport sur la mise en oeuvre de la
restructuration du Secrétariat général de l'OUA, Doc. OUA
CM/2190(LXXIII), p. 1
269 Rapport sur la mise en oeuvre de la
restructuration du Secrétariat général de l'OUA, Doc. OUA
CM/2190(LXXIII), p.1
270 Rapport du Secrétaire
général sur l'état des traités de l'OUA, CM/2143
(LXXI)
271 Etude sur la révision des traités
de l'OUA/UA, BC/OLC/23.17/32/Vol.1
272 CM/Déc. 551(LXX)
103
Sur base du rapport du Secrétaire
général sur l'état des traités de l'OUA, le
Conseil avait reconnu, la nécessité, d'examiner
systématiquement tous les traités de l'OUA en vue
d'établir leur pertinence et d'identifier ceux qui devraient
être mis à jour ou annulés, tout en identifiant les
domaines dans lesquels il faudrait la conclusion de nouveaux
traités.
En réalité, la révision des
traités de l'OUA a fait l'objet d'une procédure de
consultation, depuis le Bureau du Conseiller juridique, les directeurs des
départements
et services de l'OUA ainsi que les Etats membres dans cet
exercice de la révision.273
Enfin, de façon concrète et sur base de
cette étude sur la révision des traités conclus
sous l'égide l'OUA, le sort de ces derniers nous amène
à distinguer trois catégories :
- ceux qui devaient être gardés dans leur
état ;
- ceux qui nécessitaient une révision ;
- ceux qui n'ont pas été repris.
a. Les Traités qui devaient être gardés
dans leur état
Convention de l'OUA sur l'élimination du mercenariat en
Afrique ;
Convention de l'OUA régissant les aspects propres aux
problèmes des réfugiés
en Afrique ;
Charte culturelle de l'Afrique ;
Accord portant création de l'institut africain de
réadaptation ;
Charte africaine des droits de l'homme et des peuples ;
Protocole à la charte des droits de l'homme et des
peuples relatif à la création d'une Cour africaine des droits de
l'homme et des peuples ;
|
Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant
;
|
|
|
Traité faisant de l'Afrique une zone exempte d'armes
nucléaires ;
|
|
|
Convention de Bamako sur l'interdiction d'importer en
Afrique des
|
déchets
|
dangereux et sur le contrôle des mouvements
transfrontaliers et la gestion des
déchets dangereux produits en Afrique ;
Traité instituant la Communauté Economique
Africaine ;
273 La représentation de tous les Etats
membres à travers les Experts gouvernementaux dans l'exercice
de la
révision devait permettre à sauvegarder le
caractère conventionnel de la convention.
104
Protocole au Traité instituant la Communauté
Economique Africaine, relatif au
Parlement Panafricain ;
Convention de l'OUA pour la prévention et la lutte contre
le terrorisme ;
Convention de la Commission africaine de l'énergie.
b. Les traités qui ont été repris mais
qui nécessitaient une révision
Convention générale sur les privilèges et
immunités de l'OUA ;
Convention phytosanitaire pour l'Afrique ;
Charte africaine sur les transports maritimes. c. Les
traités qui n'ont pas été repris par l'UA
Protocole additionnel à la Convention
générale sur les privilèges et immunités de l'OUA
;
Convention interafricaine portant établissement d'un
programme de coopération technique ;
Constitution de l'Association des organisations africaines
de promotion du
Commerce ;
Convention portant création du centre africain de
développement des engrais.
D. Le sort des organes de l'OUA
Le sort des organes de l'OUA peut être
analysé à travers un examen des
dispositions de l'Acte constitutif et des
différentes décisions et rapports sur la transformation
de l'OUA en UA.
Ainsi, l'art. 5 de l'Acte constitutif énonce les organes
de l'Union qui sont au nombre de
neuf.
A la lecture des dispositions qui suivent l'art. 5, il
apparaît que la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement
de l'OUA devient la Conférence de l'Union, le Conseil des
ministres est remplacé par le Conseil exécutif et le
Secrétariat général de l'OUA devient la Commission de
l'Union.
De plus, les Commissions spécialisées sont
reprises par l'Acte constitutif, sous le nom
de Comités techniques spécialisés.
105
A ce niveau, il apparaît nécessaire de
signaler que certains organes de l'OUA
n'ont pas été prévus spécifiquement
dans l'Acte constitutif.
Il s'agit du Mécanisme de l'OUA pour la
prévention, la gestion et le règlement des conflits, du
Comité de libération, ainsi que des Institutions
spécialisées de l'OUA. Cependant, le Secrétariat
général de l'OUA avait identifié les lacunes
institutionnelles qui pourraient être dues à l'absence de
certaines structures de l'OUA dans l'Acte constitutif.
Précisément, dans son rapport, le Secrétaire
général notait qu' « il est évident en
dépit
de l'absence d'une disposition de l'Acte constitutif
concernant le Mécanisme pour la prévention, la gestion et le
règlement des conflits, que les objectifs du Mécanisme [...] sont
un aspect important des objectifs de l'OUA ».274
Pour répondre à cette préoccupation
du Secrétaire général, la Conférence avait
décidé d'incorporer le Mécanisme dans les organes de
l'UA275 , avant que cet organe ne soit finalement remplacé
par le Conseil de Paix et de Sécurité (CPS) après
l'entrée en vigueur de son Protocole.276
En ce qui concerne les Institutions
spécialisées, leur sort a été
réglé par la décision
AHG/Déc. 160(XXXVII) de la Conférence des Chefs
d'Etat et de gouvernement réunis
à Lusaka en 2001.
Par cette décision, la Conférence chargeait
le Secrétaire général de « procéder
à l'évaluation des Institutions spécialisées
de l'OUA existantes en vue de leur incorporation en tant
qu'Institutions spécialisées de l'UA ». 277
Enfin aucune décision, aucun rapport n'a fait
mention du sort du Comité de
libération.278
274 Cf. Rapport du Secrétaire
général sur la mise en oeuvre de la décision de Syrte sur
la création de Union africaine, Doc. OUA CM/2210 (LXXIV).
275 En effet, la décision AHG/Déc. 160
(XXXVII) de la Conférence avait décidé d' «
incorporer l'Organe Central
du Mécanisme pour la prévention, la gestion et le
règlement des conflits, en tant qu'organe de l'Union » tout en
demandant au Secrétaire général « de revoir les
structures, les procédures et les méthodes de travail de ce
Mécanisme ». Cf. Décision sur la mise en oeuvre de la
décision du sommet de Syrte sur l'Union africaine,
AHG/Déc. 160 (XXXVII), p. 3
276 Cf. Protocole relatif à la création
du CPS de l'Union africaine, article 22, 1°.
277 Décision sur la mise en oeuvre de la
décision du sommet de Syrte sur l'Union africaine, AHG/Déc.
160
(XXXVII), p. 4
278 Ici, il convient de signaler la rareté des
documents qui concernent les réalisations de cet organe. De plus, nous
n'avons eu accès à aucune source de documentation renseignant sur
son effectivité à l'occasion de la
transformation de l'OUA en UA.
106
Au bénéfice des remarques
précédentes, il ressort que la mise en place de l'UA a
été un processus à la fois
ponctuée par les différentes décisions au cours de
plusieurs sessions de la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement
de l'OUA et du Conseil des ministres et qui s'est étalé sur une
période de trois ans (1999-2002).
De plus, les effets de cette succession révèlent
le souci de sauvegarder les acquis de
l'OUA tant sur le plan fonctionnel qu'opérationnel dans le
cadre de la « Nouvelle Union africaine ».
Dans le droit fil des développements antérieurs, il
ne nous semble pas superflu de nous
attarder sur les organes de la nouvelle organisation
panafricaine.
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