§2. Réaliser l'intégration politique et
économique du continent
L'un des objectifs de l'Union, énoncés
à l'article 3 de l'Acte constitutif est
d' « accélérer l'intégration politique
et socio- économique du continent ».
Outre que cet objectif, à l'instar des autres,
n'échappe pas à l'absence d'une quelconque date butoir, sa
réalisation fait émerger de nombreux et complexes défis
auxquels l'Union
ne peut se soustraire.
Ici, très brièvement, nous relèverons deux
défis que nous jugeons comme les plus importants.
Il s'agit, en premier lieu de l'intégration des
Communautés économiques régionales au sein de l'UA,
ainsi que d'assurer une meilleure participation populaire africaine.
323 L'organisation de la Société Civile
Africaine, Deux propositions pour l'autofinancement et
l'intégration
politique de l'UA, Yaoundé, mai 2002, p. 6
324 Ibid.
325 Idem., p. 7
131
A. L'intégration des Communautés Economiques
Régionales (CER) au
sein de l'UA
En 2006, il n'existe pas moins de 14 groupements régionaux
dans toute l'Afrique.
En effet, deux groupements ou plus dirigent actuellement le
processus d'intégration dans pratiquement toutes les
sous-régions.
De plus, beaucoup de pays appartiennent à plusieurs
groupements régionaux :
« Sur les 53 pays africains, 27 sont membres de 2 CER, 18
autres sont membres de 3
CER, 1 pays (la RDC) est membre de 4 CER et enfin seuls 7 pays
n'appartiennent qu'à une CER »326
Cependant, il convient de remarquer que les
résultats de ces CER sont plutôt minimes. Pour le Dr Kwam
KOUASSI, « (...) non seulement elles connaissent une
prolifération incessante, mais aussi surtout elles
poursuivent des objectifs quasi- similaires qui s'apparentent de plus
en plus à des duplications de mandat et de programmes
d'activités qui annihilent tous les efforts entrepris en matière
d'intégration
économique de notre continent »327
Pour faire face à ce problème de cacophonie
institutionnelle, des rencontres à plusieurs niveaux des
gouvernements des Etats membres ont été organisées dans le
cadre
de l'Union africaine.
En résumé, une première conférence
des ministres africains de l'intégration, tenue les 30
et 31 mars 2006 à Ouagadougou (Burkina Faso) sur
la rationalisation des CER avait émis des recommandations à
l'intention de la Conférence de l'Union.
Cette dernière réunie à Banjul (Gambie), du
1er au 2 juillet 2006 a décidé de suspendre
jusqu'à nouvel ordre la reconnaissance de nouvelles CER
à l'exception des huit
ci-après:
« 1. Communauté Economique des Etats de l'Afrique de
l'Ouest (CEDEAO);
2. Marché commun de l'Afrique de l'Est et de l'Afrique
Australe (COMESA) ;
3. Communauté économique des Etats de l'Afrique
centrale (CEEAC) ;
4. Communauté de développement de l'Afrique
australe (SADC) ;
326 World energy council, « Potentiel de
développement intégré de l'énergie au plan
régional en Afrique »,
www.worldenergy.org/wec-geis/publications/reports/afrique
327 Dr KOUASSI (R.), « Remarques d'ouverture de
la réunion d'experts de gouvernementaux sur la rationalisation des CER
», www.africa-union.org
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5. Autorité intergouvernementale pour le
développement (IGAD) ;
6. Union du Maghreb arabe (UMA) ;
7. Communauté des Etats Sahélo-Sahariens (CEN-SAD)
;
8. Communauté de l'Afrique de l'Est (CAE)
».328
Ainsi, cette décision apporte une réponse au
problème du foisonnement des CER. Toutefois, il ne serait pas inutile
que la Conférence de l'Union adopte et soumette à la
procédure de ratification le protocole sur les relations entre l'UA et
les CER.329
Ce protocole pourrait permettre d'établir une
connexion organique entre l'Union africaine, en particulier la
Commission, et les différentes CER.
B. Renforcer la participation de la population
africaine
La volonté affichée des Etats membres de
l'Union africaine, d' « accélérer
l'intégration politique du continent constitue une grande
originalité. Toutefois, l'OSCA
se fait l'écho d'un constat de vide fondamental
d'intégration politique dans le processus
de mise sur pied de l'UA et surtout qu'on ne peut pas
accélérer un processus qui n'existe pas.
En vérité pour combler ce vide, il faut
partir du postulat que l'intégration doit avoir une base
élargie et populaire : c'est-à-dire une union des
peuples.330
En effet, jusqu'à une époque récente la
politique d'intégration a été conçue et
réalisée principalement par les gouvernements et les
administrations nationales à l'exclusion d'autres acteurs.
Actuellement, il apparaît opportun et légitime d'envisager
d'associer l'ensemble du peuple africain.331
A cet effet, nous soulevons deux propositions pour relever ce
défi de renforcement de la participation populaire, comme ciment de
l'intégration politique du continent.
328 Décision relative au moratoire sur la
reconnaissance des Communautés économiques régionales
(CER), Assembly/AU/Dec.112 (VII), p. 1
329 Décision sur le Protocole relatif aux
relations entre l'UA et les CER, EX. CL/Dec. 227 (VII), p. 1
330 GESTIN (J. D.), « Intégration, mode
d'emploi », in Jeune Afrique /l'intelligent, n°2267
du 20 au 26 Juin 2004,
p. 60
331 Commission de l'Union africaine, Plan
stratégique de la Commission de l'Union africaine, mai 2004,
Document OUA, p. 76
133
D'une part, la participation populaire doit se
matérialiser par une plus grande importance accordée au
Parlement. A l'instar du Parlement européen, le Parlement
panafricain devrait non seulement récupérer le droit de
voter le budget de l'Union attribué actuellement à la
Conférence de l'Union, mais également partager avec elle
l'initiative des lois africaines.332
D'autre part, l'OSCA propose l'organisation du « premier
référendum panafricain »333 .Ce
référendum serait une voix démocratique par laquelle
les Etats membres de l'UA sont invités à renoncer à leur
droit de démissionner de l'Union, énoncé
à l'art. 31 de l'Acte constitutif.
Ce référendum proposé, si jamais il devait
être accepté par les Etats membres permettrait
à l'UA d'être une association indissoluble
d'Etats africains, avec une mission d'intégration politique
qui, en définitive, crée l'intégration territoriale du
continent.334
En même temps, il serait créé «
les conditions socio-psychologiques nécessaires pour hâter
l'avènement des Etats -Unis d'Afrique ».335
332 TSHIYEMBE (M.), «Difficile gestation de
l'Union africaine », in le Monde diplomatique, juillet 2002,
p.28
333 L'organisation de la Société Civile
Africaine, op. cit., p.14
334 Ibid.
335 Idem., p. 13
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