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Le modèle américain d'accord de protection et d'encouragement des investissements 2004

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par Mohamed ABIDA
Faculté de droit et des sciences politiques de tunis - Mastère en droit 2005
  

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Paragraphe deuxième : L'investisseur personne morale :

La plupart des TBI conclus à travers le monde reconnaît, quant à leur champ d'application rationae personae, les personnes morales. Toutefois, la dénomination peut changer d'une « personne juridique » dans le modèle européen90(*) à la « compagnie » ou « entreprise » dans le modèle conventionnel américain. Ainsi l'article premier du nouveau modèle est de portée très large : il désigne toute entité à but lucratif ou non, privée ou publique incluant toute sorte de société, notamment les associations ainsi que les partnership.

Quoi qu'il en soit, la définition de l'entreprise dans le nouveau modèle américain ne présente pas un niveau de cohérence comparable à celui qui a été rencontré dans le cas des personnes physiques. Celle-ci retient deux critères à savoir la nationalité (A) et le contrôle (B).

A- Le critère de la nationalité :

L'article premier du modèle américain de 2004 retient le critère de l'incorporation pour déterminer la nationalité de l'entreprise. En effet, toute entreprise constituée ou organisée en vertu du droit applicable peut se voir reconnaître le statut de l'investisseur. Cette disposition trouve son fondement dans la théorie des pays du « Common Law » qui prend en considération le critère du lieu de l'incorporation de l'entreprise pour la détermination de sa nationalité. Ceci va à l'encontre de la théorie des pays du « Civil Law » et notamment le modèle européen qui retient le critère du lieu de la gestion de l'entreprise ou le critère du siège social.91(*)

Toutefois, ce critère n'apparaît pas à titre principal dans le nouveau modèle américain, le phénomène de la multi-nationalité des sociétés complique d'avantage le droit des investissements internationaux dans la mesure où il met en relation un Etat d'accueil et une société qui possède sa nationalité mais, qui est contrôlée par des personnes morales étrangères.92(*)

C'est pour cette raison que le nouveau modèle a fait appel au critère de contrôle pour écarter, voire diluer la nationalité juridique formelle de la société afin de déterminer le véritable lien d'allégeance existant entre une société de droit local et un autre Etat contractant.

B- Le critère de contrôle :

Dans le nouveau modèle, le contrôle est pris en compte dans la définition de l'investissement, l'article premier dispose que « investment means every asset that an investor owns or controls, directly or indirectly ».93(*)

On voit bien que la disposition s'étend à une variété considérable d'investisseurs, y compris les filiales ou les succursales de droit local contrôlées indirectement par l'entreprise mère. Il s'agit d'un élargissement de la notion d'investisseur qui permettrait de conférer à la personne morale une sorte de nationalité subsidiaire, fonctionnelle94(*) pour bénéficier des avantages de ce modèle. Cette disposition amène à une véritable dilution du critère du contrôle des personnes morales et la protection accrûe des investisseurs étrangers même lorsque leur allégeance avec l'économie nationale ou régionale est faible.95(*)

Ainsi, on est en droit de se demander si le critère de contrôle est qualifié par la notion de « la participation importante » ? Cette équivoque est mise en lumière par le fait que les rédacteurs ont volontairement négligé de définir la notion du contrôle étranger. En effet, est ce qu'on définit la notion du contrôle étranger par l'unique référence à l'actionnariat direct ou par d'autres critères tels que la nationalité des dirigeants de la société ? Est-ce que le contrôle doit être immédiat ou effectif ?

En réalité, le critère déterminant pour la qualification du critère de contrôle est celui de la détention d'une partie du capital social conférant un droit de vote, c'est-à-dire la référence à l'actionnariat direct. Il s'agit en effet de l'exercice d'une influence déterminante qui se traduit dans la part déterminante dans le processus de décision au sein d'une société. Le plus souvent, cette part est fonction de l'étendue de la participation financière et il convient de se demander si une participation ne devrait pas être supérieure à 50% pour que le contrôle puisse être qualifié de déterminant. Le nouveau modèle américain ne donne pas une réponse à cette interrogation.

La définition élargie de la notion de contrôle direct et indirect permet aux actionnaires minoritaires comme étant des investisseurs privés de saisir les tribunaux arbitraux dans le cadre d'un arbitrage transnational. Pour certains, l'ALENA permet à un investisseur étranger ayant effectué un investissement mineur dans une entreprise dont le contrôle est détenu par des nationaux du pays où l'investissement a été effectué, d'entreprendre un recours contre le pays d'accueil, alors que les investisseurs majoritaires n'y auraient pas droit puisque seuls les investisseurs étrangers peuvent se prévaloir des recours prévus dans l'ALENA.96(*)

Dans certains cas, la part du capital était fixée de 17% de l'investissement effectué dans le pays hôte et aucune affaire jusqu'ici n'a cherché à fixer une limite inférieure de la part du capital pour qu'un investisseur puisse saisir les tribunaux arbitraux.97(*) Mieux encore, la sentence CMS c/Argentine98(*) est allée plus loin dans la protection des actionnaires minoritaires. En se fondant sur les termes du TBI conclu entre les Etats-Unis et l'Argentine, les arbitres consacrent pour la première fois, le droit pour un actionnaire étranger minoritaire d'une société de droit local victime d'un préjudice du fait de l'Etat hôte, d'en demander directement réparation devant le tribunal.99(*)

En outre, le critère de contrôle peut être qualifié par référence à la direction effective de la société. En effet, ce critère n'est pas exclusivement d'ordre financier, il peut être d'ordre administratif. Dans ce contexte, le nouveau modèle reconnaît aux investisseurs le droit d'employer les cadres supérieurs et spécialistes de leur choix, indépendamment de leur nationalité, et obligent les parties à leur accorder l'admission temporaire, en conformité avec leurs lois sur l'entrée des étrangers. C'est ce qu'on peut dégager de l'article 9 du modèle 2004.100(*)

Toutefois, l'alinéa 2 de cet article dispose qu'une partie peut exiger que les membres du conseil d'administration soient des ressortissants du pays d'accueil, à condition que cela ne nuise pas de manière significative à la gestion par l'investisseur de son investissement.

De cette disposition, on peut constater que les rédacteurs de ce modèle considèrent que le contrôle peut être qualifié non seulement par référence à l'actionnariat direct mais aussi et surtout par référence à la direction effective de la société.

En définitive, on a pu constater que, tant les rédacteurs de ce modèle que les sentences récentes du CIRDI avaient tendance à subjectiviser le contrôle étranger exercé sur une société. La liberté des parties pour définir elles-mêmes le terme contrôle étranger permet de mettre en avant l'importance de l'autonomie de la volonté dans le choix des critères de contrôle attributif de la nationalité étrangère à l'investisseur, à condition que cela ne conduise pas à des manoeuvres frauduleuses.101(*)

Quoi qu'il en soit, le statut de l'investisseur demeure toujours un statut préférentiel, l'article 8 du modèle ne permet pas aux Etats d'imposer des obligations de résultat aux investisseurs étrangers. Cette obligation doit être analysée selon certains auteurs sous l'angle des droits humains.102(*) Ce statut est le siège d'une grande richesse normative et de la naissance de nouvelles règles de fond qui « ont meublé le droit international des investissements ».103(*)

* 90 Par exemple, l'article premier parag 1 du modèle suisse utilise l'expression « entité juridique ».

* 91 Kuhn.w, « Pratical problems related to bilateral investment treaties in international arbitration », colloque «Investment treaties and arbitration», conference in Zurich, association Suisse de l'arbitrage, 25 janvier 2002, pp. 54-55.

* 92 Les entreprises multinationales soulèvent ainsi des problèmes de nationalité aussi bien en droit interne qu'en droit international. V ; Leben.Ch, « Le droit international des affaires, que sais je ?, sixième édition, mars 2003, pp. 54-62.

* 93 Italiques ajoutés. On retrouve cette disposition dans l'article 1117 de l'ALENA qui prévoit qu'une personne morale que l'investisseur possède ou contrôle directement ou indirectement peut entrer dans le champ d'application rationae personae de l'accord.

* 94 Amadio.M, op.cit. p. 115.

* 95Horchani. F, « Le droit international des investissements à l'heure de la mondialisation », précit.p. 383.

* 96 Bachand.R, « Les poursuites intentées en vertu du chapitre 11 de l'ALENA. Quelles leçons en tirer ? », Cahier de recherche vol.1 n°11, octobre 2001, p. 7, en ligne http: //www.unites.uqam.ca/gic.

* 97 Dans l'affaire Amco, Asia et Lecto, cette part atteignait les 100% des parts sociales. L'affaire AMT contre Zaïre l'appropriation du capital par des intérêts étrangers (américains) s'élevait à 55% ainsi que les affaires Holiday Inns et Clockner où la part du capital est fixé à 51%. V. Ben khelifa.R, « La compétence des arbitres dans la jurisprudence récente du CIRDI », mémoire de DEA, Faculté de droit et des sciences politiques de Tunis, 2001, p. 179.

* 98 CMS Gas Transmission Company c. République argentine, décision sur la compétence du 17 juillet 2003, J.D.I 2004, p. 236, observations de E.Gaillard.

* 99 Dans l'affaire Autopiste Concesionarda de Venezuela c/ la République de Venezuela du 27 septembre 2001, le tribunal arbitral s'est référé à l'actionnariat direct et non à son contrôle effectif ou ultime exercé par la société mère. Les faits de l'espèce relèvent qu'Aucoven, la filiale Vénuzulienne a 99% d'une société mexicaine, sollicitait du gouvernement vénézuelien l'autorisation du transfert de 75% de son capital à une autre filiale d'Emica, la société ICatech de droit américain. Le tribunal arbitral n'a pas soutenu les arguments de l'Etat vénézulien suivant lesquels le transfert des actions d'Aucoven à ICatech n'aurait rien à changer à ce que le contrôle réel aurait continué d'être exercé par la société mexicaine. Le tribunal se déclare compétent et qualifie le contrôle par référence à l'actionnariat direct d'Aucoven et en particulier à la volonté des parties de qualifier le contrôle. V. Teynier.E, « notion d'investisseur », in Gazette du Palais, chronique arbitrage et investissements internationaux, décembre 2004, pp. 3, 4.

* 100 L'article 9 intitulé « Senior Management and Boards of Directors » dispose que :

« 1. Neither Party may require that an enterprise of that Party that is a covered investment appoint to senior management positions natural persons of any particular nationality.

2. A Party may require that a majority of the board of directors, or any committee thereof, of an enterprise of that Party that is a covered investment, be of a particular nationality, or resident in the territory of the Party, provided that the requirement does not materially impair the ability of the investor to exercise control over its investment ».

* 101 Dans plusieurs affaires CIRDI, on a pu constater que la société mère procède à un changement artificiel de sa structure a fin de satisfaire au critère du contrôle. Ce changement se réalise par le biais d'une opération de transfert, à l'intérieur du groupe, de droits attachés à la qualité d'investisseur. Ainsi, la jurisprudence a dégagé deux conditions pour que ce transfert puisse se voir reconnaître des effets :

* le transfert ne doit pas constituer une fraude.

* le consentement de l'Etat à l'opération.

* 102 Bachand.R, Rousseau.S, « L'investissement international et les droits humains : Enjeux politiques et juridiques », journée de réflexion du conseil de droits et démocratie, 11 juin 2003, Ottawa, Canada, p. 21.

* 103 Horchani.F, « Le statut de l'investisseur étranger », colloque « l'étranger dans tous ses états », Faculté de Droit et des Sciences Politiques de Tunis, février 2005, Tunis.

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