WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le droit de l'OMC dans le sillage du commerce des aéronefs civils

( Télécharger le fichier original )
par Simon TURMEL
Université Montesquieu Bordeaux IV - Master 2 Droit international 2006
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

1.1.3.2 Le Compte du Canada

Le second programme attaqué par le Brésil est le Compte du Canada. Le Brésil prétend que le programme Compte du Canada constitue, en soi, une subvention à l'exportation prohibée par les articles 3.1 a) et 3.2 de l'Accord SMC et qui est accordée à l'industrie canadienne des avions de transport régional. Le Brésil conteste également le programme du Compte du Canada, tel qu'il est mis en oeuvre. Un extrait du rapport annuel de la SEE de 1995 décrit de la façon suivante le Compte du Canada :

«Les fonds du Compte du Canada sont utilisés pour appuyer les transactions à l'exportation que le gouvernement fédéral jugent dans l'intérêt national mais qui, en raison de leur taille ou du risque qu'elles comportent, ne peuvent être appuyées par la Société pour l'expansion des exportations (SEE) au moyen de crédits à l'exportation ordinaires. Les transactions sont négociées, exécutées et administrées par la SEE au nom du gouvernement, et sont comptabilisées séparément dans les livres du Ministère des affaires étrangères et du commerce international (MAECI). Ces activités sont connues collectivement sous le nom de "Compte du Canada".»136(*)

Une transaction cherchant le support du Compte du Canada devra, avant d'être soumise au ministre du Commerce international, être examinée par la SEE afin de voir si elle peut être appuyée par celle-ci. C'est donc dans les cas où la capacité d'engagement de la SEE ne sera pas rencontrée qu'il y aura recours à ce compte. Le ministre du Commerce international examinera la transaction sur la base d'un certain nombre de critères137(*). Lorsque la transaction dépasse la somme de 50 millions $ CAN, la décision finale revient au Conseil des ministres. Un critère qui sera alors considéré pour déterminer si une transaction est dans l'intérêt national est « l'importance de la transaction pour l'exportateur ».138(*)

Selon le Brésil, le Compte du Canada existe dans le seul but de soutenir les exportations. Il en résulte que ce soutien est nécessairement subordonné aux résultats à l'exportation, ce qui est contraire à l'article 3.1 a) de l'Accord SMC139(*). Toujours selon le Brésil, un prêt accordé par le Compte du Canada pourra être concessionnel, donc accordé à des meilleures conditions que celles retrouvées sur le marché140(*). Il est clair, pour le Brésil, que les contributions financières accordées confèrent un avantage au sens de l'article 1 de l'Accord SMC. Le Brésil déclare également qu'aucune information sur le volume des financements accordés au titre du Compte du Canada pour le développement de la vente d'aéronefs de transport régional n'est disponible. Le Canada a déclaré que les informations demandées par le Brésil sont confidentielles et a refusé de les divulguer141(*).

Sans admettre que le Compte du Canada soit subordonné aux résultats à l'exportation, le Canada insiste sur le fait que l'aide accordée par ce compte ne constitue pas une subvention au sens de l'article premier de l'Accord SMC. De façon subsidiaire, le Canada allègue que toutes les opérations portées au Compte du Canada sont conformes au Consensus de l'OCDE en matière de taux d'intérêt. Elles bénéficient donc du refuge prévu au second paragraphe du point k) de la liste exemplative. Le Canada met également l'accent sur les lacunes dans la preuve du Brésil. Le Canada rajoute que le simple fait que des prêts puissent être accordés à des taux d'intérêt inférieurs à ceux du marché n'implique pas que de tels prêts ont été effectivement été accordés à des taux inférieurs. Or, le Brésil n'a pas fait la preuve de l'octroi de prêts à des taux inférieurs à ceux pratiqués par le marché.

Quant à la première allégation du Brésil voulant que le Compte du Canada constitue en soi une subvention à l'exportation prohibée, le groupe spécial adopte la même approche que pour la SEE. Ainsi, sur la base de la distinction entre le droit impératif et le droit facultatif, le groupe spécial réfute l'argument du Brésil selon lequel le Compte du Canada prescrit l'octroi de subventions à l'exportation qui seraient prohibées. Le Compte du Canada constitue plutôt un programme facultatif qui n'est pas, de par sa simple existence, illégal142(*).

La seconde partie de l'allégation du Brésil porte sur des transactions spécifiques qui ont eu lieues en application du Compte du Canada. Un communiqué de presse déposé en preuve par le Brésil tendait à démontrer que le Compte du Canada a été utilisé pour financer deux transactions relativement à la vente d'aéronefs civils. Ces deux transactions à l'exportation concernaient la vente d'aéronefs turbopropulsés Dash 8-300 à South African Express en 1995 et à LIAT en 1996. Le groupe spécial a demandé au Canada de lui fournir davantage de renseignements sur les modalités de ces deux financements accordés au titre du Compte du Canada. Le Canada a refusé en invoquant :

«Les informations demandées par le Groupe spécial sont des renseignements commerciaux confidentiels sensibles. Le Canada doit concilier son désir de communiquer au Groupe spécial des informations qui l'aideraient à statuer avec les intérêts commerciaux et les droits légaux des parties privées qui ne sont pas parties à ces différends.»143(*)

Suite à ce refus de communiquer les documents demandés par le groupe spécial, le Brésil a demandé à celui-ci de tirer «des déductions défavorables, considérant que les renseignements que le Canada refusait de communiquer étaient de nature à porter préjudice à sa position.»144(*) Sur la base de ce même communiqué de presse qui citait un haut responsable de Bombardier qui indiquait que «Bombardier avait utilisé le Compte du Canada pour le financement d'"un tout petit nombre de transactions", dans des conditions qualifiées de "voisines de celles du marché145(*) le groupe spécial déduit que les taux d'intérêts auraient pu être inférieurs à ceux du marché. Il y a donc lieu de présumer que le financement sous forme de crédit confère un avantage et constitue une subvention au sens de l'article premier de l'Accord SMC. La présomption ayant été établie, il appartenait alors au Canada de la réfuter146(*). Le Canada n'a pas avancé d'arguments relativement à la qualification au sens de l'article premier de l'Accord SMC ni à s'abriter derrière l'alinéa k) de la liste exemplative147(*). Le Canada n'a pas non plus renversé la présomption tirée par le groupe spécial à l'effet que ces transactions étaient subordonnées aux résultats à l'exportation. Le groupe spécial a donc conclu qu'en accordant ces subventions, le Canada était en violation de l'article 3.2 de l'Accord SMC148(*).

Le refus du Canada de fournir les renseignements demandés par le groupe spécial, notamment dans le cadre de ces deux transactions précédemment évoquées, n'a certainement pas facilité la tâche de celui-ci et l'a forcé à tirer des déductions défavorables de ce refus. Cette situation illustre ainsi la difficulté pour une partie d'avoir accès à des informations concernant des transactions spécifiques.

* 136 Ibid., par. 6.145.

* 137 Parmi ces critères, notons ceux relatifs à la teneur canadienne, les facteurs liés à l'intérêt national, etc.

* 138 Rapport du Groupe spécial, «Canada - aéronefs», WT/DS70/R, 14 avril 1999, par. 6.145.

* 139 Ibid., par 9.206.

* 140 Ibid., par. 6.145.

* 141 Ibid., par. 6.146.

* 142 Ibid., par. 9.213.

* 143 Ibid., par. 9.218.

* 144 Ibid., par. 9.219.

* 145 Ibid., par. 9.216.

* 146 Ibid., par. 9.225.

* 147 Ibid., par. 9.225.

* 148 Ibid., par. 9.231.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand