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Le droit de l'OMC dans le sillage du commerce des aéronefs civils

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par Simon TURMEL
Université Montesquieu Bordeaux IV - Master 2 Droit international 2006
  

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1.1.3.3 Partenariat Technologique Canada

Il s'agit d'un programme du Ministère de l'Industrie mis en oeuvre en 1996 et dont l'objectif visé était de «créer un véritable partenariat entre le gouvernement et les industries et ce, afin de partager le coût, les risques et le produit du capital investi de façon à simuler l'investissement et la croissance »149(*). Antérieurement au PTC, il y avait le Programme de productivité de l'industrie du matériel de la défense (PPIMD). Selon le Brésil, des subventions pour un montant d'environ deux milliards de dollars canadiens ont été accordées au secteur aérospatial dans le cadre de ce dernier programme. Ainsi, selon le Brésil, le «PTC s'intéresse explicitement à des "investissements remboursables dans certaines conditions" pour des projets aboutissant à la commercialisation d'un produit de haute technologie sur les "marchés d'exportation". »150(*) Le Brésil ne conteste pas les programmes PTC et PPIMD en tant que tel, mais plutôt leur application effective au secteur canadien des avions de transport régional et ce, depuis le 1er janvier 1995151(*).

De façon plus spécifique, le Brésil considère que le PTC transfère des fonds en faveur de certaines industries, dont l'industrie aéronautique civile, par le biais de redevances. Cela signifie, selon le Brésil, qu'il n'y aura un remboursement de ces fonds que dans la mesure où le programme ainsi subventionné rencontre un certain succès. Ces fonds confèrent donc un avantage à leur bénéficiaire au sens de l'article premier de l'Accord SMC puisqu'il n'encoure aucun risque152(*). En effet, si le projet échoue, les prêts n'ont pas à être remboursés. Selon le Brésil, le taux de rentabilité auquel le Canada s'attend est nettement inférieur à celui auquel pourrait s'attendre un investisseur commercial rationnel.

Le Brésil cite un certain nombre de projets qui auraient bénéficié de telles redevances. Un prêt de 87 millions $CAN aurait été consenti à Bombardier en 1996 pour le développement du CRJ-700 et ce prêt ne serait remboursé qu'à partir de la vente du 401è appareil153(*). Un prêt semblable aurait été accordé pour le développement d'un nouveau modèle du Dash 8 capable de transporter 70 personnes (le Dash 8-400). Or, la capacité de production du CRJ 700 ne serait que d'environ 25 appareils par année. Il est donc possible de soutenir, selon le Brésil, qu'il s'agit presque d'un don puisque le gouvernement canadien ne s'attend pas à être remboursé avant très longtemps. Le Brésil avance également que les contributions à Bombardier, à De Havilland ainsi qu'à Pratt & Whitney avaient des taux de rentabilité évalué entre 1,76 et 3,31% alors que le taux de rentabilité pour un investisseur commercial se situe plutôt entre 16,91 et 21,92%154(*).

Le Canada fait savoir, dans un premier temps, qu'il ne présente pas d'arguments sur le fait que les contributions constituent des subventions ou non. Les documents produits par le Canada visent plutôt à démontrer que les contributions ne sont pas subordonnées aux résultats à l'exportation au sens de l'article 3 de l'Accord SMC. Le Canada indique également qu'il n'est pas en mesure de présenter tous les documents demandés par le groupe spécial concernant le financement. Puisque le montant de la contribution est supérieur à 20 millions $CAN, l'approbation du Cabinet était nécessaire. Or, les documents sont contenus dans un Mémorandum du Cabinet protégé par le secret du Cabinet155(*). Le Canada prétend que les obligations de remboursement sont liées aux ventes et non aux bénéfices156(*).

Le groupe spécial a demandé au Canada de lui fournir des détails supplémentaires relativement aux différentes transactions identifiées par le Brésil relativement au PTC157(*). Invoquant le fait que la plupart des informations demandées sont des renseignements commerciaux sensibles ou encore sont protégés par le secret du Cabinet, le Canada fait preuve de beaucoup de réticences face à cette demande. Le Brésil a donc demandé au groupe spécial de tirer des déductions défavorables des différentes réticences exprimées par le Canada158(*).

Le groupe spécial rappelle donc la nécessité d'établir une présomption à l'effet que l'aide du PTC à l'industrie canadienne des avions de transport constitue une subvention. Le groupe spécial constate que les différentes aides au titre du PTC constituent des contributions financières au sens de l'article 1.1 de l'Accord SMC. De plus, au moins trois contributions du PTC dans le secteur des avions régionaux ont été négociées à des taux n'assurant pas la rentabilité commerciale159(*). Le Canada n'a pas été en mesure de réfuter la présomption d'avantage. De plus, le groupe spécial en arrive à la conclusion que les faits démontrent que c'est en raison de la vocation exportatrice de ce secteur que les contributions financières ont été accordées. L'aide octroyée par le PTC à l'industrie canadienne des avions de transport régional est donc subordonnée en fait aux résultats à l'exportation au sens de l'article 3.1 a) de l'Accord SMC160(*).

Les groupes spéciaux et l'organe d'appel en sont donc arrivés à ces différentes conclusions au regard des différents programmes mis en place par les pouvoirs publics brésiliens et canadiens afin de soutenir leur industrie aéronautique respective. Toutefois, ces décisions n'ont pas eu comme effet de régler la situation, elles ont plutôt contribué à envenimer les relations entre les deux pays. Alors que parfois, les parties mettront en application rapidement et en toute bonne foi les recommandations formulées, dans d'autres circonstances, ce ne sera pas le cas. Le droit de l'OMC a donc prévu un mécanisme pour s'assurer de la mise en oeuvre des décisions rendues mais également pour s'assurer que les nouvelles mesures prises satisfassent elles-mêmes aux règles de l'OMC.

* 149 Marc TESSIER, Op. Cit., p. 13.

* 150 Rapport du Groupe spécial, «Canada - aéronefs», WT/DS70/R, 14 avril 1999, par. 6.176.

* 151 Ibid., par. 6.177. La date du premier janvier 1995 est celle de la mise en place de l'OMC. C'est également à cette date qu'est entré en vigueur l'Accord SMC. Les groupes spéciaux sont en effet tenus de respecter le principe de non-rétroactivité des accords de l'OMC à des mesures antérieures à leur entrée en vigueur. Ce principe est exprimé à l'article 28 de la Convention de Vienne sur le droit des Traités. Par ailleurs, les règles de l'OMC s'appliqueront à des situations qui n'ont pas cessé d'exister depuis l'entrée en vigueur des accords de l'OMC.

* 152 Ibid., par. 9.284.

* 153 Ibid., par. 9.286.

* 154 Ibid., par. 9.286 et 9.287.

* 155 Ibid., par. 9.284.

* 156 Ibid., par. 6.197.

* 157 Ibid., par. 9.292.

* 158 Bien que cette possibilité de tirer des déductions défavorables en cas de non-coopération d'une partie à la collecte des renseignements prévue par l'Annexe V de l'Accord SMC semble, a priori, limitée aux subventions pouvant donner lieu à une action, le groupe spécial, confirmé par l'Organe d'appel [Organe d'appel, WT/DS70/AB/R, par. 202], a étendu cette possibilité aux subventions prohibées en se basant notamment sur la pratique de la CIJ dans l'Affaire du Détroit de Corfou, 1949, CIJ 4, p. 18 et Affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, 1986, CIJ 14, p. 72 à 76, paragraphes 152 et 154 à 156.

* 159 Rapport du Groupe spécial, «Canada - aéronefs», WT/DS70/R, 14 avril 1999, par. 9.307.

* 160 Ibid., par. 9.341.

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