WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La bonne foi dans le contrat d'assurance

( Télécharger le fichier original )
par Henriette E. KAMENI KEMADJOU
Université de Douala - Master II Recherche 2008
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

I- La présomption de bonne foi à l'égard de l'assuré

Résultant du premier volet du caractère de bonne foi de la police d'assurance, l'assuré est présumé être véridique lorsqu'il vient proposer à l'assureur de prendre en charge un risque donné ou aussi, lorsque celui-ci lui propose de couvrir ce risque. Ainsi, lors des pourparlers, ses paroles, ses affirmations, ses informations et ses réponses aux questionnaires sont prises comme des « paroles d'évangiles » selon la présomption légale en ce domaine297(*). Si suspicion il y avait, c'est qu'aucun contrat d'assurance ne pourrait être signé. Pour surpasser cette difficulté, l'assureur doit pouvoir se remettre entièrement à l'assuré. Le contrat d'assurance est ainsi considéré comme un contrat de confiance où l'assureur, puisqu'il possède le droit d'accepter ou de refuser la couverture d'un risque, doit prendre son cocontractant pour une personne franche et sincère. Il ne peut ainsi que compter sur sa compréhension ; c'est pourquoi il se cantonne à lui signifier la nécessité d'être de bonne foi dans ses déclarations298(*).

L'assureur devant se référer en toute confiance aux dires de l'assuré, il doit dès lors s'en servir pour apprécier le risque et établir la contrepartie de sa couverture en cas de son acceptation.

II- Le calcul du coût d'assurance par l'assureur sur la base des déclarations de l'assuré

Puisque l'assuré est présumé être de bonne foi, l'assureur doit se conformer à cette règle en se basant effectivement sur les déclarations de celui-ci pour apprécier le risque à prendre en charge299(*). Ceci ne voudrait pas dire qu'il ne puisse pas faire de demande de visite ou exiger de celui-ci certains documents tels les certificats de contrôle, les carnets de visite etc., dans le but de mieux forger sa conviction.

A l'issu de ces déclarations et modalités quelques fois utilisées, l'assureur peut refuser de prendre en charge le risque dont voudrait se protéger son potentiel client. Très souvent, ce refus se justifie par des fortes chances que le risque se réalise soit à cause de sa nature, de celle de la chose assurée, ou encore de la personne de l'assuré. Il peut aussi accepter de prendre en charge le risque et dans ce dernier cas, il doit totalement se fier aux dires de l'assuré pour calculer la prime ou la cotisation à verser300(*). Dès lors, dans la branche IARD, les informations sur la chose assurée, sur la personne de l'assuré servent donc à apprécier le risque et, en cas d'acceptation à calculer le coût de l'assurance. En assurance vie, l'âge de l'assuré, sa situation matrimoniale, et aussi le nombre d'années qu'il voudrait être lié à l'assureur remplissent les mêmes fonctions. Aussi, selon que l'assuré voudrait couvrir des risques plus dangereux ou adjoindre à la garantie principale celles supplémentaires, sa prime ou cotisation se verra importante. A contrario, lorsque celui-ci voudra assurer un risque jugé plutôt peu réalisable ou bien ne voulant que la garantie principale, sa police d'assurance sera moins coûteuse. La prime ou cotisation est donc la « représentation pécuniaire du risque assuré »301(*), c'est-à-dire la somme d'argent que l'assuré s'engage à verser à l'assureur en contrepartie de la prise en charge de son risque. Le caractère de bonne foi du contrat d'assurance sommant à l'assureur de se fier totalement aux déclarations de l'assuré pour le calcul du coût de l'assurance, le coût de l'assurance repose donc sur cette présomption légale. De ce fait, il est conçu un équilibre primaire lors de la formation du contrat d'assurance. Mais hormis le fondement légal, l'équilibre de base de ce contrat se justifie aussi par sa nature juridique.

B- Le fondement contractuel de l'équilibre primaire du contrat d'assurance

Outre le fondement légal tiré du caractère de bonne foi du contrat d'assurance, l'équilibre de base dudit contrat se justifie aussi par sa nature juridique. La police d'assurance est indubitablement un contrat. De ce fait, il en résulte un équilibre financier des parties issu non seulement du respect des grands principes contractuels (II) mais tout d'abord de la considération du contrat comme loi des parties (I).

I- Le contrat d'assurance pris comme loi par les parties contractantes

Le contrat d'assurance est la loi que se sont fixés l'assureur et l'assuré302(*). Ceci parce que la police d'assurance est la convention par laquelle l'assureur accepte de couvrir un risque que court l'assuré en contrepartie du versement d'une prime ou d'une cotisation par celui-ci, à charge pour lui d'indemniser le bénéficiaire en cas de survenance du sinistre303(*). Appartenant à la grande catégorie des contrats tels que définis par la théorie générale en matière civile304(*), le contrat d'assurance n'échappe guère au principe de l'article 1134 du Code civil camerounais. En effet, « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ». Comme telles, elles doivent être respectées rigoureusement par les parties qui les ont établies305(*). Ces dernières ayant exprimé leurs consentements de manière expresse, libre et non viciée, elles ne sont, en observant les clauses du contrat, qu'entrain d'obéir aux règles qu'elles se sont fixées.

A l'inégalité naturelle des parties au contrat d'assurance, est ainsi créée une égalité voulue par les parties. En effet, les parties contractantes sont toutes deux régies par la loi qu'elles se sont fixées. L'assuré consommateur qui adhère au contrat d'assurance préétabli par l'assureur le fait par sa propre volonté manifestée par l'expression de son consentement sain, car il jouit d'une liberté d'adhésion qu'il exerce à son aise. Il n'obéit donc qu'à lui-même lorsqu'il respecte les dispositions y prévues car le faisant par sa propre volonté306(*). D'où, il reste libre et égal à son cocontractant l'assureur.

Arrivant à un même résultat bien que la méthode diffère, cette situation peut aussi bien être appréhendée selon le regard de Hobbes307(*). L'assureur professionnel et l'assuré consommateur en tant que parties forte et faible, il existe à l'état de nature un conflit réel entre eux où, très souvent, le plus fort abuse du plus faible. Il lui dictera ses règles jusqu'à être dépassé par l'autre qui, en ce temps précis, fixera aussi sa règle. Se retrouvant dans un état semblable au Léviathan marqué par sa barbarie et sa précarité extrême, les deux parties ne pourront alors vivre en harmonie réelle que si chacune d'entre elles cède une part de ses pouvoirs à une autorité supérieure. Cette dernière doit dès lors les régir et elles lui doivent chacune le respect pour la préservation des intérêts communs.

Le contrat est donc la manifestation de la volonté commune ou des intérêts communs qui vient rétablir cette inégalité naturelle existante entre l'assureur et l'assuré. Cette volonté commune constitue le socle des grands principes contractuels tels que développés par la doctrine libérale.

II- Le respect des grands principes contractuels

La police d'assurance, comme tout contrat, est fortement marquée par la liberté des parties contractantes. Le législateur en la matière n'intervient donc qu'en tant qu' « arbitre » ou « sapeur-pompier ». La liberté est donc la règle (a) et les dispositions légales, les compléments, qui ne peuvent supplanter la première qu'en cas de non respect de l'ordre public interne (b).

a- L'équilibre résultant de la liberté contractuelle

De la liberté contractuelle, se dégagent les grands principes contractuels qui sous-tendent l'idée d'une égalité, voire d'un équilibre entre les parties au contrat d'assurance. Aussi, le contrat d'assurance est une convention formée par la rencontre des volontés de l'assureur et de l'assuré308(*). Chacun d'eux a ainsi exprimé librement son consentement. La volonté, prise à la fois comme source et mesure des droits créés, confère la charge à ceux-ci d'assumer ce qu'ils ont exprimé. Elle est l'essence même de la théorie de l'autonomie de la volonté telle que formulée par Emmanuel GOUNOT dès 1912. D'après cette théorie, l'obligation contractuelle repose exclusivement sur la volonté des parties309(*). D'où l'égalité et l'équilibre existant entre les deux cocontractants.

De cette théorie de l'autonomie de la volonté, naît ainsi le principe si cher à FOUILLE « Qui dit contractuel, dit juste ». Car le contrat étant le fruit de l'expression du consentement de deux êtres humains raisonnables, cela voudrait dire qu'il y a création d'un rapport de force égal et donc juste entre eux. Ceci se matérialise dans le contrat d'assurance par la mention à la fin de celui-ci « Bon pour accord », « Lu et approuvé »310(*). Toujours issu de la nature de la police d'assurance, l'équilibre entre les parties trouve sa justification dans le principe « l'aléa chasse la lésion ». En effet, même si on peut admettre que certains contrats sont conclus au désavantage de l'une des parties malgré leur volonté donnée, en matière d'assurance, cela ne peut pas causer de déséquilibre entre celles-ci. L'aléa, élément intrinsèque à la police d'assurance lui donne le caractère d'un contrat aléatoire. De ce fait, l'assureur accepte de couvrir un risque qui pèse sur l'assuré ; ce risque dépendant exclusivement de la survenance d'un hasard. Donc, le risque assuré peut ou non se réaliser au cours du contrat. Il est alors très difficile de jauger primo facies l'équilibre financier existant entre les parties lors de la formation du contrat, car ne sachant pas si le risque se réalisera, ni le temps de sa manifestation et encore moins son ampleur. Il n'existe donc pas à proprement parlé de lésion dans le contrat d'assurance. Ceci prouve aussi, à l'aide d'un jugement par défaut, l'équilibre financier dudit contrat.

En plus des fondements issus du droit volontaire311(*), l'équilibre dans le contrat d'assurance se justifie aussi au travers des principes propres au droit naturel tels « Pacta sumt servanda ou le respect de la parole donnée ». Cette maxime, figurant au nombre des principes du droit naturel, a été relevée par Hugo De GROOT dit Grotius (1583-1645) appartenant à l'école du droit naturel. Reprenant l'idée du contrat social développée par ALTHUSIUS (1556-1617) et avant HOBBES, LOCKE312(*) et ROUSSEAU, il affirme que puisqu'il est de nature de tenir ses engagements, il est aussi justifié de donner effet aux règles reposant sur la volonté concordante des individus. D'où la matérialisation de la force obligatoire du contrat qui a été consacrée par le droit positif à travers plusieurs dispositions la proclamant et la protégeant.

* 297 Ceci signifie que les paroles de l'assuré sont considérées comme étant des vérités absolues sous réserve de certaines vérifications que doit faire l'assureur en tant que professionnel.

* 298 Il doit ici jouer le rôle de conseiller professionnel envers l'assuré. Il doit attirer l'attention de l'assuré sur les sanctions découlant de sa mauvaise foi.

* 299 BOKALLI (V-E), Le nouveau droit du contrat d'assurance des Etats africains, op. cit., p. 427.

* 300 La prime est donc la « représentation pécuniaire du risque » de façon à ce qu'il existe une proportionnalité de la prime au risque, marquant ainsi la corrélation étroite qu'il y a entre eux. Voir KAMGWOUE (J-M), Procédure d'indemnisation des victimes dans les assurances de dommages et de personnes, op. cit., p. 10 et 13.

* 301 KAMGWOUE (J-M), Procédure d'indemnisation des victimes dans les assurances de dommages et de personnes, op. cit., p. 10.

* 302 Le contrat est la loi des parties contractantes. La police d'assurance est un contrat. Donc, par syllogisme, elle est la loi que ce sont fixées l'assureur et le souscripteur-assuré. Ce raisonnement a été suivi dans l'arrêt N° 29/CC du 12 octobre 2006 opposant la société Cameroon Insurance et autres à dame BILOUNGA Irène où les juges de céans déduisent que « le contrat conclu entre dame BILOUNGA et la Garantie Mutuelle des Cadres est devenu la loi des parties ». Voir aussi l'arrêt N° 353/CC du 08 septembre 2005 opposant la société CHANAS et Privat au laboratoire PALEOLOGOS.

* 303 KAMGWOUE (J-M), Procédure d'indemnisation des victimes dans les assurances de dommages et de personnes, op. cit., p. 5.

* 304 Voir l'art 1101 du code civil camerounais où le contrat est défini comme « une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent envers une ou plusieurs personnes autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose ».

* 305 Voir Arrêt N° 29/CC du 12 octobre 2006 opposant la société Cameroon Insurance et autres à dame BILOUNGA Irène. Dans cet arrêt, le juge de céans affirme que « par sa nature, le contrat d'assurance répond aux critères de l'art. 1101 qui définit le contrat ».

* 306 « Car l'impulsion du seul appétit est esclavage et l'obéissance à la loi qu'on s'est prescrite est liberté ». Voir ROUSSEAU (J-J), Du contrat social, Union générale d'Editions, 1973, Paris VI e, p. 78.

* 307 Selon Thomas HOBBES, pour tout homme, un autre homme est un concurrent, avide comme lui de puissance sous toutes ses formes. Voir CHEVALIER (J-J), Les grands oeuvres politiques de MACHIAVEL à nos jours, Librairie Armand Colin, 1970, p. 47.

* 308 Voir BERR (C-J) et GROUTEL (H), Droit des assurances, op. cit., p. 42. Il existe donc une différence entre l'accord des volontés qui est la conclusion du contrat (les parties ne pouvant plus révoquer unilatéralement leur consentement), et la prise d'effet marquant le début d'exécution du contrat.

* 309 Voir Les grands principes contractuels tirés du site www.google.fr.

* 310 L'une ou l'autre de ces mentions est toujours écrite à la fin de la police d'assurance, certifiant ainsi que l'assuré adhérent y a librement consenti aux clauses fixées par l'assureur. La signature du souscripteur au bas de la mention est une preuve de l'expression de son consentement.

* 311 C'est le droit créé par la volonté humaine.

* 312 John LOCKE (1632- 1704), auteur de l'ouvrage « Essai sur le gouvernement civil » publié en 1690, part de l'état de nature et du contrat originel qui a donné naissance à la société pour aboutir au résultat suivant : c'est l'existence des droits naturels de l'individu dans l'état de nature qui va le protéger des abus du pouvoir. L'état de nature est donc pour lui un état de parfaite liberté et égalité. Voir CHEVALIER (J-J), Les grands oeuvres politiques de MACHIAVEL à nos jours, op. cit., p. 69 à 79.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry