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La bonne foi dans le contrat d'assurance

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par Henriette E. KAMENI KEMADJOU
Université de Douala - Master II Recherche 2008
  

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§ II : LA SANCTION DE L'ASSURE EN CAS DE FAUSSES DECLARATIONS INTENTIONNELLES

L'assuré est tenu d'être de bonne foi au moment de la conclusion du contrat d'assurance dans ses déclarations. Il s'agit là, selon les termes propres à Emmanuel KANT tels que repris par Joseph VIALATOUX dans son ouvrage intitulé La morale de KANT édicté par Presses Universitaires de France en 1968, d'« un impératif hypothétique » à des fins réelles, encore appelé impératif « assertoriquement pratique ». Ainsi, la bonne volonté de l'assuré d'être de bonne foi lors de la conclusion du contrat n'est qu'une règle de prudence68(*) en vue d'échapper aux sanctions prévues par le législateur CIMA chaque fois que sa mauvaise foi sera démontrée. L'assuré qui agit de bonne foi ne le fait que pour éviter une punition qui joue ainsi un rôle dissuasif, bien qu'intervenant de façon répressive chaque fois que la faute sera commise. Il est donc important, avant de voir la nullité du contrat comme sanction à la mauvaise foi de l'assuré dans ses déclarations (B), de s'attarder sur les divers cas de déclarations de sa mauvaise foi (A).

A- Les divers cas de déclarations de mauvaise foi de l'assuré

La mauvaise foi, définie comme un acte illicite d'un auteur indélicat commis en vue d'obtenir un avantage auquel il n'a pas droit69(*), elle est mieux comprise en tant qu'antonyme de la bonne foi. Aussi, l'assuré qui n'agit pas de bonne foi est de mauvaise foi. Lors des déclarations faites à la formation du contrat d'assurance, l'assuré peut manifester sa mauvaise foi par ses actes ou même ses abstentions. On parlera dans la première hypothèse de fausses déclarations (I) et dans la seconde des réticences dolosives qu'elles soient partielles ou totales (II).

I- Les fausses déclarations

La déclaration est une affirmation par laquelle une personne assure la réalité d'un fait ou d'un acte. Les fausses déclarations sont donc des déclarations erronées sous réserve l'article 8070(*), ou celles mensongères. Elles sont des manifestations de la mauvaise foi de l'assuré lorsque celui-ci agit intentionnellement dans le but d'amener l'assureur à contracter dans les conditions qu'il n'aurait pas admises s'il l'avait su, ou bien dans l'optique de diminuer la prime ou cotisation à payer. Ces fausses déclarations peuvent concerner la personne de l'assuré à l'instar de son état de santé, son âge, sa profession, ou même sa situation matrimoniale. Elles peuvent aussi se rapporter aux modalités relatives au contrat d'assurance comme la chose assurée, les méthodes prudentielles, les personnes utilisant la chose assurée.

Les fausses déclarations doivent être distinguées des déclarations équivoques, c'est-à-dire floues. Toutefois, lorsque le caractère intentionnel de l'équivoque est prouvé, la mauvaise foi de son auteur est de ce fait retenue. Outre l'acte mensonger ou erroné, la mauvaise foi peut aussi résulter du silence dissimulateur entendu ici comme étant la réticence dolosive.

II- Les réticences dolosives

On entend par réticences dolosives tous comportements malhonnêtes de l'assuré qui use du silence pour ne pas dévoiler un fait réclamé afin de tromper son cocontractant au moment de la formation du contrat d'assurance. Elles sont des manifestations de la mauvaise foi de l'assuré.

Quand elles sont partielles, l'assuré dans ces cas donne une fraction de réponse juste, mais s'abstient d'aller au bout de ses déclarations. Tel a été le cas dans l'affaire opposant une compagnie d'assurance à une jeune femme mariée qui, à propos de son activité en tant qu'assurée, s'est déclarée infirmière tout en s'abstenant de signifier qu'elle était à titre occasionnel prostituée71(*). Il s'agit bel et bien d'une réticence dolosive partielle. Les réticences dolosives totales sont constituées dans les cas où l'assuré se tait complètement sur un fait réclamé.

S'il est très évident de faire la distinction entre une fausse déclaration72(*), et une réticence dolosive, il reste à noter que ces deux manifestations fustigées sont souvent liées dans les déclarations faites par l'assuré. Un exemple peut être pris dans un questionnaire en vue de la souscription d'une police d'assurance maladie où il est demandé au potentiel assuré s'il a été malade ces six derniers mois. A cette question, celui-ci répond par la négative qui est une fausse déclaration, et s'abstient donc de déclarer l'opération chirurgicale dont il a fait l'objet le mois dernier, d'où une réticence dolosive totale. L'on comprend bien pourquoi ces deux notions sont énoncées concomitamment par l'article 18 du Code CIMA73(*).

Aussi, avec l'extension doctrinale de la bonne foi de l'assuré en ce qui concerne les questions non formulées par l'assureur dans le questionnaire, si celui-ci ne déclare pas le fait dont il a connaissance de l'impact sur l'appréciation du risque, son abstention est ici assimilable à une réticence dolosive totale. Que ce soit une réticence dolosive partielle ou même totale, le Code CIMA la sanctionne par la nullité du contrat d'assurance.

B- La nullité du contrat comme sanction de la mauvaise foi de l'assuré dans ses déclarations

La sanction de la mauvaise foi de l'assuré dans ses déclarations est la nullité du contrat d'assurance à son tort exclusif. L'étude des conditions de mise en oeuvre de la nullité dudit contrat (I) nous permettra de mieux appréhender son effet rétroactif avec toutes ses conséquences (II).

I- Les conditions de mise en oeuvre de la nullité du contrat d'assurance

En vertu de l'article 18 alinéa 1 du Code CIMA qui prescrit qu' « indépendamment des causes ordinaires de nullité, et sous réserve de l'article 80, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre », la nullité est la sanction de la mauvaise foi de l'assuré dans ses déclarations. La preuve de cette mauvaise foi doit être rapportée par l'assureur74(*) devant la juridiction compétente75(*). Ce dernier doit alors user de tout moyen requis76(*) à savoir : questionnaire, formulaire, note de couverture, police d'assurance, autres correspondances ; prouvant ses allégations. Il doit juste rapporter la preuve du caractère intentionnel de l'agissement fautif de l'assuré, qu'il s'agisse d'une réticence ou d'une fausse déclaration, et de l'incidence que cela a eu sur l'appréciation du risque ou la garantie par lui accordée. Peu importe l'impact du fait retenu ou faussement déclaré sur la survenance du sinistre77(*). Etablie dans le respect des principes clés y relatifs78(*), la nullité est admise par le juge civil ou commercial dès lors que la mauvaise foi de l'assuré est démontrée.

Cependant, l'article 18 faisant intervenir la nullité « indépendamment des causes ordinaires de nullité », on pourrait bien se poser la question de savoir si la nullité du contrat d'assurance ne peut pas se justifier par le vice de consentement de l'assureur. Car nous avons vu comme manifestation de la mauvaise foi de l'assuré « la réticence » dolosive et la « fausse déclaration » ou déclaration erronée au moment de la conclusion du contrat justifiant ainsi le recours basé sur le dol ou l'erreur. Mais cette précision du législateur CIMA est mieux comprise par le fait que le lien de causalité devant impérativement exister en matière ordinaire entre la faute et le dommage n'est pas ici observé ; car faudrait-il le remarquer, l'impact du fait retenu ou faussement déclaré sur la réalisation du risque n'est pas nécessaire. Le régime de la nullité tel que prévu en assurance est donc plus avantageux pour la partie lésée dans ses droits. La nullité étant admise comme sanction de l'assuré de mauvaise foi, elle peut alors produire tous ses effets de manière rétroactive.

II- L'effet rétroactif de la nullité du contrat d'assurance

Dès lors qu'elle est admise, la nullité du contrat d'assurance met fin à la relation liant l'assureur à l'assuré. Cette rupture est rétroactive, c'est-à-dire que la relation liant l'assureur à l'assuré est considérée comme n'ayant jamais existée79(*). De ce fait, il devrait en principe avoir restitution des prestations exécutées de part et d'autre par les parties contractantes. Cependant, le Code CIMA dans son article 18 alinéa 2 énonce que « les primes payées demeurent alors acquises à l'assureur qui a droit au paiement de toutes les primes échues à titre de dommages et intérêts ». Alors, certes la nullité est rétroactive, mais l'assureur est en droit de ne pas restituer les primes ou cotisations payées par l'assuré pour la période couverte par lui. Il gardera ces sommes d'argent en guise de réparation au préjudice à lui causé par la rupture du contrat au tort de l'assuré. D'où, il est fondé d'exercer une action en réclamation de ces sommes s'il ne les a pas encore en sa possession80(*). Le caractère spécial de cette rétroaction tout comme les conditions de mise en oeuvre de la nullité du contrat d'assurance ont amené la doctrine à la qualifier de « peine privée »81(*).

La bonne foi de l'assuré étant exigée rigoureusement au moment de la conclusion du contrat d'assurance dans ses déclarations, elle ne s'arrête pas là. Elle se poursuit ainsi tout au long de l'exécution dudit contrat avec l'obligation lui incombant de déclarer toutes circonstances importantes pour l'assureur dans le suivi de leur relation contractuelle.

* 68 VIALATOUX (J), La morale de KANT, Collection sup, Presses Universitaires de France, 1968, p. 33. Voir dans le même ordre d'idées KANT (E), Fondements de la métaphysique des moeurs, Traduction de VICTOR DELBOS, Librairie DELAGRAVE, PARIS, Avril 1989, p. 123 à 127.

* 69 CHARRE-SERVEAU (M) et LANDEL (J), Lexique juridique et pratique des termes d'assurances, op. cit., p. 120.

* 70 Selon cet article relevant des assurances sur la vie, il n'existe aucune différence entre l'assuré de mauvaise foi et celui de bonne foi en matière d'erreur sur son âge ; car cette erreur étant en principe sans effet sur la continuité du contrat conclu. Voir BERR (C-J) et GROUTEL (H), Droit des assurances, op. cit., p. 55.

* 71 KULLMAN (J), LAMY Assurances, op. cit., p. 202.

* 72 La fausse déclaration est un acte erroné ou mensonger dont le caractère intentionnel est constitutif de mauvaise foi, tandis que la réticence dolosive est une abstention frauduleuse.

* 73 Voir art. 18 du Code CIMA, 3ème édition, La FANAF Editions, 2004, p. 43, « ...quand la réticence ou fausse déclaration... ». Voir aussi l'exemple ci-dessus cité où le pourvoi formé par le mari de l'assuré a été rejeté ; les juges donnant ainsi raison à l'assureur qui a annulé le contrat sur le double fondement de dol et de fausse déclaration intentionnelle du risque.

* 74 Voir art. 11 al. 3 du Code CIMA, op. cit., p. 40, « La charge de la preuve du caractère intentionnel de la faute appartient à l'assureur ».

* 75 Juridiction civile si le contrat est civil pour l'assuré ou commerciale si le contrat est commercial à son égard, de son lieu de domicile, selon l'art. 30 du Code CIMA. Voir BERR (C-J) et GROUTEL (H), Droit des assurances, op. cit., p. 78 et 79. Il s'agit donc au Cameroun du tribunal de première instance, si la valeur de l'intérêt du litige est moins de dix millions F CFA et le tribunal de grande instance si cette valeur est égale ou supérieure à ce montant.

* 76 La preuve écrite de la faute est exigée devant les juridictions civiles contrairement à celles commerciales où la preuve est libre et se fait par tout moyen en vertu du droit commun.

* 77 CIAPPA (A), L'assurance contre les accidents corporels, P.U.A.M, 2001, page 40. Voir dans un sens plus large YIGBEDEK (Z), L'interprétation des dispositions du Code CIMA sur le contrat d'assurance, op. cit., p. 57.

* 78 Ces principes sont : « Pas de nullité sans texte » et « Pas de nullité sans preuve » telles que prévues par le droit commun.

* 79 KULLMAN (J), LAMY Assurances, op. cit., p. 203.

* 80 BERR (C-J) et GROUTEL (H), Droit des assurances, op. cit., p. 54.

* 81 KULLMAN (J), LAMY Assurances, op. cit., p. 203.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand