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L'incidence des quatre libertés communautaires sur la fiscalité : étude de la jurisprudence récente de la CJCE

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par Mouna EL HIH
Université Toulouse 1 Capitole - Juriste international 2009
  

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Section 2 : Le recul de la souveraineté fiscale des Etats..........................................p.78

§1  La cohérence fiscale inversée et l'absence de prise en considération des intérêts financiers des Etats.................................................................................................p.78

A) La cohérence fiscale inversée et mise au service des libertés.................................p.78

B) Des Etats non considérés comme parties à part entière au litige : le motif des pertes fiscales systématiquement rejeté par la Cour.................................................................p.82

§2 : Une situation antinomique entre la logique fiscale et celle du juge communautaire.....p.84

A) Une logique fiscale quasi-inexistante dans la jurisprudence du Juge du Luxembourg.............................................................................................p.84B) Un juge guidé par une logique téléologique tendant à assurer une application uniforme du droit communautaire...................................................................................p.86

CONCLUSION

BIBILIOGRAPHIE.....................................................................................p.90

LISTE DES ABREVIATIONS.......................................................................p.95

ANNEXE................................................................................................p.96

INTRODUCTION GENERALE

Si nous tentions de saisir la fiscalité telle qu'elle se manifeste au sein de l'Union européenne, nous nous pourrions nous contenter de l'aborder selon une définition mono conceptuelle. En effet, celle-ci-ci procèderait plutôt d'un triptyque, tel que celui proposé par le professeur Patrick Dibout, qui la présente comme :

- « la fiscalité construite, celle des textes adoptés par le Conseil ;

- la fiscalité contrainte, celle des arrêts de la CJCE ;

- la fiscalité induite, celle provenant de l'influence des divers régimes nationaux les uns sur les autres. »1(*)

C'est donc une fiscalité à multiples facettes que l'on découvre, similaire à un prisme dont les contours surgiraient selon l'éclairage que l'on adopterait. Pour notre part, nous orienterons notre petite lanterne vers l'aspect contraint de celle-ci, tel qu'il découle de la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés européennes (ci-après, la CJCE).

Mais avant toute chose, une rapide présentation des termes du sujet nous paraît opportune, en vue de nous permettre de mieux saisir les tenants et aboutissants de l'oeuvre prétorienne en matière de fiscalité.

En effet, et lorsque l'on s'aventure à parcourir le Traité instituant la Communauté européenne (ci-après TCE), notre esprit ne peut qu'être frappé par la carence des dispositions relatives à la fiscalité. Il semblerait que celle-ci n'était pas au coeur des préoccupations des l'époque, qui consistaient plutôt en la volonté d'établir un marché commun et de rapprocher progressivement les politiques économiques des États membres, ainsi que de promouvoir un développement harmonieux des activités économiques dans l'ensemble de la Communauté, une expansion continue et équilibrée, une stabilité accrue, un relèvement accéléré du niveau de vie, et des relations plus étroites entre les États qu'elle réunit2(*)

Certes quelques dispositions visent de manière expresse les problèmes de nature fiscale, inhérents à la construction d'un marché économique intégré. Elles sont essentiellement concentrées dans la troisième partie du Traité, relative aux politiques de la Communauté au chapitre 2 du titre IV, intitulé « dispositions fiscales ». On trouvera ainsi en matière de fiscalité indirecte des prohibitions posées aux articles 23 TCE et 90 TCE, ou encore une disposition particulière relative à l'harmonisation des impôts à l'article 93 TCE.

Nonobstant, la fiscalité ne semble avoir été abordée qu'en tant qu'outil complémentaire dans la réalisation des objectifs du Traité, dont fait partie la politique de concurrence, puisque « les auteurs du traité ont été conscients, dés le départ, de la nécessité de prévoir quelques dispositions dans cette matière, en raison notamment de l'influence que celle-ci peut avoir pour assurer la libre concurrence dans les échanges dans la Communauté »3(*). Cela explique dés lors le caractère minimaliste de la démarche des rédacteurs du Traité, qui se sont bornés à ne prévoir que les règles nécessaires au bon fonctionnement du Marché commun.

La simple coordination des politiques économiques étant souhaitée, la question de la création d'une politique fiscale, dont les modalités techniques auraient découragé dés le départ le processus de construction européenne a rapidement été évacuée par les Etats, soucieux de ne pas entraver la bonne marche de leur principal projet, et surtout de na pas voir leurs souveraineté fiscale et budgétaire menacées.

La souveraineté fiscale est en effet un attribut de la souveraineté nationale, symbole suprême de l'indépendance d'une puissance étatique qui implique le transfert du pouvoir fiscal aux représentants du peuple4(*) et a contrario, l'interdiction d'un tel transfert vers des entités supra-étatiques. A cet égard, les modifications successives du Traité de Rome, la mise en place de l'Union économique et monétaire et la finalisation du Marché unique européen procèdent d'une logique contraire à ces principes par la remise en cause des compétences originellement réservées au pouvoir législatif interne, et au-delà, par  le risque croissant de voir les Etats dépossédés de leur pouvoir budgétaire au profit des instances communautaires.

Ces éléments de réflexion nous permettent de mieux comprendre la prudence dont fait montre certaines autorités de la Communauté, pleinement conscientes de ces difficultés d'ordre politiques, qui viennent s'ajouter à celles de nature économique et technique, liées à la disparité des fiscalités nationales et à la diversité structurelle des prélèvements obligatoires.5(*) Néanmoins, et si certaines de ces autorités font preuve de timidité, telle que la Commission qui dans sa communication du 23 juillet 1975, fait état de multiples contraintes qui « imposent des limites à l'harmonisation fiscale et préconise de limiter la tâche à `l'essentiel et donc de limiter l'action de la Communauté aux mesures absolument indispensables' »6(*), d'autres comme la CJCE se sont révélées être plus téméraires. En témoigne l'évolution dont a été l'objet sa jurisprudence.

Certes les débuts furent difficiles, puisque la Cour a notamment estimé que le « le droit communautaire, ne restreint pas, en l'état actuel de son évolution la liberté de chaque Etat membre d'établir un système de taxation différencié pour certains produits en fonction de critères objectifs »7(*), leur laissant ainsi une marge de manoeuvre dans l'élaboration des systèmes nationaux d'imposition.

Toutefois, sa quête d'un équilibre entre le respect des compétences fiscales appartenant aux Etats membres et la protection des objectifs du Traité la conduite à développer un raisonnement particulier, basé sur des dispositions générales du Traité, dont elle a habilement su étendre la portée. Il s'agit en l'occurrence des libertés proclamées par le Traité, et la Cour a affirmé que : « Les articles du Traité relatifs à la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux constituent des dispositions fondamentales pour la Communauté et toute entrave, même d'importance mineure, à ces libertés est prohibée »8(*).

Néanmoins, c'est dans le cadre des articles relatifs aux personnes, aux services et aux capitaux que l'intervention de la Cour a été la plus remarquée, et notamment en matière de fiscalité directe, où l'harmonisation des législations nationales se limite à quelques directives, relatives aux groupements de sociétés, aux fusions, à la coopération administrative ou encore à l'épargne9(*). En effet, s'il est un domaine où la réglementation européenne peine à prospérer, c'est assurément celui des impôts directs.

Il n'est guère étonnant alors de voir la Cour intervenir en cette matière, certains la qualifiant à cet égard « de rempart des droits du citoyen contre les États trop gourmands », d'autres voyant en elle l'outil d'une harmonisation « forcée » de la fiscalité directe en Europe, visant à combler le vide laissé par un Conseil des ministres trop craintif et inopérant.

En tant qu'institution juridictionnelle de la Communauté européenne, celle-ci doit veiller à garantir le respect du droit communautaire, et ce notamment en matière fiscale, par tous les justiciables, ainsi que l'unité de son interprétation et de son application.

La CJCE a posé à cet effet le principe selon lequel si la fiscalité directe relève de la compétence des Etats membres, ces derniers doivent exercer celle-ci dans le respect du droit communautaire10(*), notamment des dispositions du Traité sur les libertés de circulation.

Telle est la clef de voûte de la construction jurisprudentielle que nous nous donnons pour tâche d'étudier dans le présent mémoire. Nous verrons à cette occasion « L'examen par la CJCE de la compatibilité de la législation fiscale nationale avec les quatre libertés » et ce dans la première partie.

Il s'agira pour nous de présenter dans un chapitre premier le raisonnement adopté par le juge de Luxembourg dans sa recherche d'une violation par un Etat membre des obligations qui lui incombent en vertu des libertés et des principes communautaires. Celle-ci passe par la reconnaissance d'une portée fiscale aux libertés de circulation et par l'application des principes d'égalité et de non-discrimination. S'en suit un examen de la comparabilité des situations des contribuables ainsi qu'une sélection de la base légale en vue du prononcé de la sanction, qui se verra à cette occasion qualifiée de simple entrave ou discrimination.

Nous nous intéresserons dans un second chapitre aux justifications des mesures fiscales contraires aux libertés susceptibles d'être avancées par un Etat membre. Nous relèveront d'ailleurs une évolution récente dans la recevabilité de ces justifications et qu'une diversification de leurs natures, ainsi qu'un aménagement du test de proportionnalité auquel a recours le juge au dernier stade de son analyse.

La seconde partie nous permettra de nous focaliser sur « l'impact du contrôle de la CJCE » sur la fiscalité des Etats membres. Nous en verrons les conséquences sur l'ordre juridique interne des Etats membres dans un premier chapitre, où il sera notamment question de la réaction des pouvoirs juridictionnels et législatifs que nous illustrerons à travers l'exemple de la France, de même que nous présenterons les modalités d'exercice de ce contrôle en mettant en exergue son caractère aussi bien direct qu'indirect.

Le chapitre deuxième aura quant à lui trait à l'incidence du raisonnement jurisprudentiel sur les rapports des Etats avec les pays tiers. Nous découvrirons à cet effet que la logique téléologique retenue par le juge de l'Union n'est pas sans effet sur la souveraineté fiscale des Etats.

* 1 P. de FREMINET, « La communauté européenne dispose-t-elle d'un véritable juge fiscal? », Revue de Droit fiscal 2007, 21 juin 2007, n°25, pp. 6-12.

* 2 http://www.touteleurope.fr/fr/organisation/droit-communautaire/les-traites/presentation/les-traites-de-rome-1957.html

* 3 D. CALLEJA, D. VIGNES, R. WAGENBAUR, Dispositions fiscales-rapprochement des législations, comm. Megret, le droit de la CEE, édition de l'ULB, 2ème ed., 1993, p-3.

* 4 M. BOUVIER, Introduction au droit fiscal général et à la théorie de l'impôt, Paris, Systèmes Fiscalité, L.G.D.J, Lextenso éditions, 9ème édition, 2008, p-13.

* 5 J. M COMMUNIER, Droit fiscal communautaire, Bruxelles, Bruylant, 2001, p-5.

* 6 COM (75) 391 final.

* 7 CJCE, 22 juin 1976, aff. 127/75, Bobie, Rec., p.1088.

* 8 CJCE, plén., 15 févr. 2000, aff. C-34/98, Commission c/ France ; Ph. Derouin et Ph. Martin, Droit communautaire et fiscalité : Litec, 2008, p. 23.

* 9 L. BERNARDEAU, « Jurisprudence de la CJCE : fiscalité directe », Revue de Droit fiscal 2007, juillet-septembre 2007, n°46, étude 995.

* 10 CJCE, 14 sept. 1995, aff. C-279/93, Schumacker; Rec., I. p. 1306.

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