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Identité et appartenance: temps et comput anthropologique chez R. E. Mutuza Kabe

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par Jean Francis Photios KIPAMBALA MVUDI
Université de Kinshasa RDC - Doctorat en philosophie 2012
  

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0. 2. Objectifs : temps entropologique et éthique anthropologique face à l'espace géométrique computationnel

Le rétablissement éthique du temps anthropo-logique(33(*)) analysé par Mutuza étant à la base de cette recherche, nous re-soulevons ces problèmes pour contribuer dans quelque mesure que ce soit à leur solution, non à leur aggravation. On ne saurait guérir une plaie sans en connaître la nature ou l'essence ni la gravité. En évoquant là certains aspects de la tragique histoire identitaire de relations entre les populations lacustres et banyarwandaises, nous voudrions éviter d'aggraver des rancoeurs comme de culpabiliser les Hutu, les Tutsi ou les Twa qui nous liront. Nous ne sommes pas responsables des crimes du passé, même si nous pouvons le devenir des méfaits de l'avenir. Nous devons savoir, dans l'oeuvre de Mutuza, ce qui a pu se passer entre ces populations non pour ressasser leurs ressentiments ou leurs culpabilités, mais au contraire pour faire front, ensemble, afin d'empêcher la continuation ou le retour de telles folies.

Le premier objectif du travail est de présenter une philosophie d'inspiration congolaise dont l'auteur se distingue par son analyses objectives, et par sa synthèse subjective et systématique, par son épistémologie que lui-même qualifie de réévaluation des concepts. Son oeuvre abondante certes, s'endort encore, couverte d'apathie, pieusement dans les rayons des nos bibliothèques. Nous voulons la ranimer, l'exhumer. Le second objectif est la résolution des conflits d'identités et d'appartenances qui déchirent l'humanité dans son ensemble et la RD Congo en particulier, surtout dans sa partie Est, contexte où la question de l'identité et de l'appartenance se pose avec acuité. Ceci se résume dans la perspective du temps entropologique de « La Problématique du Mythe Hima-Tutsi ».

Notre époque s'est confrontée à un problème dont les conséquences s'ouvrent sur un paradoxe conduisant vers un chaos sans nom ; paradoxe qui crée les apories des valeurs et qui s'exprime à travers une multitude des nouveaux langages: Démocratie et Droit de l'homme, Tribu et Nation, citoyenneté mondiale et développement(34(*)) durable, liberté culturelle et dialogue entre civilisations, droit à la vie et qualité de la vie, parité et principe d'équité, etc. Cela provient de la prise de conscience de l'exigence d'émancipation politique des peuples qui est symétrique à leur émancipation historique, qui se comprend comme une sortie de statu quo ethnologique soumis au rythme du temps entendu comme áêïëïõèßá, où point n'est besoin de rattraper un prétendu retard inoculé par le miroir d'un progrès illusoire et d'une histoire en folie fictive.

En d'autres termes, pour citer Théodore Papadopoulos, « l'émancipation politique a entraîné une régression nette de l'état de civilisation institué au prix de longs et pénibles efforts »(35(*)). C'est comme le « jeu des enfants qui s'amusent dans le sable, la joie d'avoir construit s'éteint en même temps que la joie de construire... le sable s'écroule et laisse sans trace la construction bâtie à grand-peine »(36(*)), disait saint Grégoire de Nysse (+ 395).

Dans cette prise de conscience cet « apparent fatras de mots et concepts ne peut être ni condamné, ni corroboré. Des valeurs et aspirations humaines authentiques s'y entremêlent aux fruits amers de l'apostasie occidentale, qui ont vicié de l'intérieur le processus de mondialisation »(37(*)). Ce que souhaitent les populations n'a jamais été connu. Le paradoxe est d'autant plus grand que le rapprochement des peuples qui aurait dû être constaté, mais malheureusement fut fait et se fait encore par les colonisateurs. D'un côté il y a la séparation forcée des peuples par des limites administratives ; de l'autre côté, le rapprochement obligé par la force politique. De là naît le vague de l'identité qui chevauche entre deux chaises : l'une procédurale et déontique, l'autre substantielle et conséquencialiste. Une observation objective démontrera que la tribu et l'ethnie séparent les peuples et s'articulent sur un fossé qui s'élargit imperceptiblement de jour en jour, en mettant la Communauté Internationale devant des conséquences imprévisibles.

L'histoire de la RD Congo ressemble à une histoire de conflits entre des groupes qui cherchent à se dominer les uns les autres, pourrait-on penser ; l'homme a peur de la faiblesse et de l'insécurité. De ce chef il cherche à vivre en groupe, pour se fortifier et se défendre, progresser et se protéger. Les conflits éclatent chaque fois que le groupe se replie sur lui-même, sur ses certitudes, ses préjugés et ses préconceptions. De là naissent l'indifférence et le mépris, le soupçon et la haine.

La rencontre des groupes sociaux entre eux donne lieu à des attitudes opposées : le bond en avant et le repli, l'absorption et l'éjection, l'amalgame et la rupture. Car tout groupe, porteur de pouvoir, connaît des expériences antithétiques de croissance et de désintégration, tout en essayant de se transcender et de se préserver en même temps. C'est une question de choix, de risque et d'épreuve. C'est la vraie dimension du temps en tant qu'épreuve (èëéøçò) qui est un des éléments du pouvoir (äõíÜìéò) inséparable de la contrainte, à laquelle le groupe est soumis à dessein ou involontairement.

Ces rencontres constituent le matériel fondamental de l'histoire entendue comme dans son sens premier, du grec dont la racine désigne l'action de voir, éóôïñ est celui qui a vu ou, si l'on veut, un témoin et ce qu'il peut ajouter à sa propre expérience n'est qu'un autre témoignage au deuxième degré. En elles, se décide la destinée politique de l'homme. Quel en est le caractère ? La base du pouvoir de tout groupe social, c'est l'espace qu'il doit se donner à lui-même. Etre signifie avoir de l'espace, ou « plus exactement se procurer de l'espace pour soi-même »(38(*)).

C'est à ce stade que nous avons rencontré Raymond Emmanuel Mutuza avec La Problématique du Mythe Hima-Tutsi. Les concepts de l'identité et de l'appartenance jouent un rôle important à cause de l'espace géographique et de la lutte de Tutsi de pouvoir pour sa possession.

Il s'agit de replacer le mythe Hima-Tutsi dans l'oeuvre de Mutuza pour en tirer une leçon philosophique quant à la valeur de la thèse proposée. Le travail évoluera en deux étapes : l'exposé et explication. Avec l'explication nous serons dans la normativité. Car c'est une construction théorique fondée sur un jugement de valeur. Nous considérons les relations politiques non dans leur réalité mais en tant qu'idéaux. C'est pourquoi nous avons la possibilité de prendre en considération aussi bien les formes possibles que les formes actuelles de ces relations.

L'intérêt philosophique de cette étude tient à son « actualité ». Les thèses de Pagès en 1933, de J. Maquet en 1954 et en 1961, de Baumann et Westermann en 1962, de Papadopoulos en 1963, ou même pendant l'antiquité de Pline le jeune, d'Aristote, de Cicéron etc. nous aideront à éclairer notre question contemporaine d'appartenance.

Toutefois, la thèse de Mutuza ne saurait être acceptée d'emblée. Il s'agit d'en dégager la portée anthropologique, d'en éprouver la valeur philosophique après la compréhension. Si de prime abord une de ses thèses est fausse, non pertinente, c'est alors que l'on est à même de dire au besoin qu'elle est dépassée. C'est ici que réside la dimension critique de notre travail.

Les conflits à l'Est de la RD Congo en sont une illustration. Sont-ils fondés sur la nécessité et l'impératif d'avoir un espace à soi ? Les Bantu (Hutu) ont-ils perdu leur pouvoir et leur indépendance en accueillant les Tutsi ? Ils peuvent récupérer le pouvoir d'être plutôt plus vigoureux. Mais n'ont-ils pas perdu quelque chose d'important: la relation avec le temps, entendu comme áêïëïõèßá qui fait des Bantu un peuple mystique(39(*)). Ce qui nous amène au problème de l'abandon du pouvoir.

C'est pourquoi la lutte pour l'espace n'est pas simplement la tentative d'écarter un groupe d'un espace donné. Le vrai but, c'est d'attirer cet espace dans un champ de force plus grand, et de le priver d'un centre propre à lui. Si cela se produit, ce n'est pas le pouvoir d'être individuel qui est changé, mais la façon dont l'individu se trouve au centre, influence la loi et l'organisation du pouvoir. C'est la dimension de l'épreuve (èëéøçò) qui est la base même de l'entropie.

Dans le cas concret, ce n'est pas seulement l'espace géographique qui donne pouvoir aux Hima-Tutsi. C'est aussi son rayonnement dans une partie du territoire de la RD Congo, c'est aussi son impact sur la Communauté Internationale. C'est ce que décrie Raymond Emmanuel Mutuza Kabe en disant que « transplantées, immigrées, réfugiées ou clandestines, les populations Hima-Tutsi qui ont trouvé asile sur le sol hospitalier de la République Démocratique du Congo, se sont comportées et ont vécu en conquérantes. Vivant en groupes fermés, elles ont, dès l'origine, reconstitué leur structure politique et intensifier leur identification, au fur et à mesure qu'elles étaient considérées comme étrangères, tendant ainsi à former un Etat dans l'Etat en République Démocratique du Congo »(40(*)). C'est cette pensée qui nous a inspiré et suggéré l'idée de l'appartenance.

On peut redire que notre travail comporte un double objectif. Le premier est celui de présenter la philosophie sociale et politique de Mutuza. Le second est d'y repérer les éléments propres à l'acquisition d'un savoir approfondi de l'ethnoglossotoponyme sous-jacent à l'entropologie du mythe Hima-Tutsi. Ainsi, la séparation et la réunion computiques du glossonyme et de l'ethnonyme ouvriront le champ de la reconnaissance du toponyme culturel.

* 33 Peut-être pourrait-on aujourd'hui traduire le mot anthropos « Üíèñùðïò » par « humain » plutôt que par « homme ». Si on se réfère à Wittgenstein dans  « Remarque sur le Rameau d'or de Frazer », in Actes de la recherche en science sociale, 16, septembre 1977, p. 35-42. Ce même concept avait été définit par Turing, 1938, en rapport avec la computation qu'il prend comme traitement de symboles et pour lui le calcul numérique était un aspect inessentiel de la computation. Dans ce sens, et alors qu'ils étaient considérés comme des outils de calcul numérique, Simon, en 1952, concevait les computeurs comme des systèmes de manipulation de « symboles physiques ». Mutuza qui se réfère à Russel pour définir la philosophie, sait qu'avec Frege et Whitehead, dans leurs travaux, ils avaient montré que la logique était un système symbolique obéissant à des règles de « calcul », notion dont le sens linguistique et logique (calcul des propositions) signifie très exactement computation. Áíèñùðïò et Computeur sont ici interchangeables.

* 34 L'on peut bien se demander d'où vient le changement de l'intitulé du cours de civisme et Développement !

* 35 Poésie dynastique du Ruanda et l'Epopée Akritique, Paris, Belles Lettres, 1963, Préface.

* 36 GREGOIRE DE NYSSE, Sur l'Ecclésiaste, Hom. 13, PG 44, 628 AB.

* 37 MARGUERITE, A. P., La nouvelle éthique de la mondialisation : défi pour l'Eglise, p 2.

* 38 TILLICH, P., Amour, Pouvoir et Justice, traduit de l'anglais par Theo Junker, Paris, PUF, 1964, p. 63.

* 39 La mystique est une des doctrines philosophiques qui se fonde sur la croyance en une réalité essentielle pour la compréhension de l'univers qui dépasse l'entendement humain. Ici, on prend ce qui est rare chez les Occidentaux comme le normal chez les Bantu. Ainsi Jakob Böhme (1575-1624), mystique allemand, surnommé « le philosophe allemand », a exercé sur la pensée allemande une grande influence, notamment sur Hegel, dont Mutuza a lu l'oeuvre, et Schelling. Il commente la Bible dans son Mysterium Magnum en 1623 et les travaux de Paracelse sa vision de la réalité. Pour Lui, toute chose advient à l'existence dans le conflit des contraires, de même que ce conflit enrichit la perception et l'intelligence. Ainsi, le mal est un élément nécessaire du bien, car, sans le mal, la volonté deviendrait inerte et le progrès impossible. Dieu lui-même, selon Böhme, possède des attributs conflictuels. La vie mystique est caractérisée par une vitalité, une productivité, une sérénité et une joie accrues, car les aspects intérieurs et extérieurs s'harmonisent avec le Divin. On a développé de nombreuses théories philosophiques complexes pour tenter d'expliquer le phénomène mystique.

* 40 La Problématique du Mythe Hima-Tutsi, Kinshasa, Noraf, 2004, Introduction.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius