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Identité et appartenance: temps et comput anthropologique chez R. E. Mutuza Kabe

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par Jean Francis Photios KIPAMBALA MVUDI
Université de Kinshasa RDC - Doctorat en philosophie 2012
  

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§ 3. Lois de l'imitation et l'harmonie des cinq tambours comme valeur de l'identité de Banyarwanda

« Les termes Banyarwanda et Kinyarwanda sont devenus, particulièrement depuis 1962, des termes fourre-tout, des nids de confusion et des refuges commodes pour certaines personnes soucieuses de camoufler leur vraie identité en vue d'obtenir des facilités politiques en RDC »(548(*)).

Le « Banyarwanda » est un terme qui renferme l'idée d'une commutativité fonctionnelle des trois groupes ethniques vivant le Rwanda : Twa-Hutu-Tutsi qui, du reste, se sont livrés à des guerres sanglantes jusqu'à l'unification en un seul Rwanda.

Serufuri nous apprend que « pour réduire les distinctions ethniques considérées comme des facteurs de désintégration politique, la monarchie tutsie a trouvé dans le vocable Banyarwanda un facteur d'unité symbolique et d'intégration totale. La conceptualisation tutsi du peuple rwandais a conduit à une falsification répétitive qui consiste à faire croire que les Rwandais forment un tout homogène. Pour consolider cette polarisation, la monarchie tutsi est allée jusqu'à forger des légendes étiologique ou des mythes d'origine dont la première fonction était de montrer que les Bahutu, les Batutsi et, les Batwa forment une grande famille des frères qui auraient pour ancêtre éponyme un personnage nommé Kanyarwanda, dont le Rwanda et les Banyarwanda auraient hérité le nom »(549(*)).

Ce qui étonne Mutuza en se demandant pourquoi ce mythe est plein de contradictions quand bien même les Tutsi se considèrent comme Banyarwanda, ils ne manquent pas du tout de se dire une race différente que les autres sont sensés imiter parce qu'élus et race de dieu !

Dans un ouvrage très célèbre, Tarde a analysé les différentes formes de l'imitation « qui est le processus psychologique essentiel dont découle la répétition »(550(*)). Il distingue, par exemple, « l'imitation-tradition » (qui se transmet d'une génération à l'autre), puis « l'imitation-mode » et « l'imitation-coutume » (qui s'impose entre contemporains).

Pour qu'il y ait spécificité dans la propagation d'une attitude ou d'une opinion, « il faut naturellement que tous les imitateurs aient choisi le même point de repère, c'est-à-dire le même exemple à imiter qui leur servira de `dénominateur commun(551(*)). Si on observe bien ce concept d'une sociologie basée sur l'imitation, on resterait dans la spéculation, comme chez Mutuza, si on ne le complète pas par la fonction corrélative : la tendance à ressortir les innovations ou les inventions.

L'analyse des poèmes dynastiques le montre bien clairement qu'une société sans initiateurs reste à l'état statique, état incompatible avec les changements inévitables du milieu ambiant. Ce sont, les inventions qui les diffusent (que ce soit sur des faits ou des idées isolées, ou que ce soit sur des ensembles de manifestations diverses). Les poèmes dynastiques donnent une idée de croyance, et toute idée ou croyance nouvelle, donne naissance à une vague d'imitation, mais il faudrait ajouter, selon les auteurs organicistes (Spencer), que « l'homme fait spontanément ou consciemment un triage dans les faits qui lui semble bons ou mauvais à imiter ». L'imitation n'est point aveugle et l'innovateur ne sera sans doute entendu que si son invention répond en réalité à des besoins virtuellement présents dans le préconscient individuel. Il existe cinq tambours dans les poèmes qui, de ce fait, font qu'il existe un phénomène social incontestable : la force de l'imitation varie proportionnellement au pourcentage des sujets qui ont déjà adopté le genre à imiter. Cette diffusion s'opère donc en « progression géométrique ». Comme une goutte d'huile sur un buvard qui s'étend d'abord lentement à son point de chute puis envahit tout le papier avec une vitesse croissante d'étalement, le module imitable semble d'abord pénétrer prudemment au sein d'un noyau de premiers adeptes. Le premier tambour sonnant, puis le second, ensuite le troisième, puis encore le quatrième, et en fin le cinquième en vue de justifier la présence royale dans le kraal, l'unique Ruanda. Leurs sons font le stade critique d'abandon ou de survie, le plus vulnérable, où seul un contradicteur peut également, par le même processus de tendances imitatives, ramener les pionniers à ses vues. C'est le cas de la révolution ruandaise qualifiée de génocide.

Cette idée révolutionnaire sortait d'ailleurs du « petit groupe ». Et comme telle, elle s'est épanouie comme une véritable explosion. D'un départ basé sur la curiosité individuelle, puis à travers un processus de suggestion de proche en proche, le phénomène atteint toute son ampleur à partir du moment où l'imitation intéresse la « psychologie des foules », c'est-à-dire le stade où le mécanisme devient de plus en plus irréfléchi, inconscient, voire animal. Le mouvement n'est plus contrôlable. Seule la complexité de différentes vagues superposées d'intérêts imitables oblige les groupes à des compromis et des ajustements constants, déterminant un degré de relativité aux cohésions collectives.

Ces engouements foudroyants, ces modes qui révolutionnent en quelques jours la mentalité de tout un pays, que le dernier des réfractaires finira par adopter de crainte d'être lynché, nous en avons de multiples exemples dans toutes les manifestations mystiques, politiques, artistiques ou simplement de modes et de distractions qui forment la trame de l'histoire. Avec quelques années de recul, certains de ces engouements, usages et modes paraissent ridicules. L'histoire n'existerait pas, il n'y aurait aucune définition de société, sans l'acte imitatif indéfiniment répété. Ridicules sont aussi les cinq tambours royaux. Mais leur explication reste une suite imitative dont la politique des Tutsi se laisse guider par ordre identifié par les tambours dont les sons sont exponentiels aux attributs royaux.

* 548 SERUFURI HAKIZA, P., Op. Cit. p. 210.

* 549 Ibidem, p. 211.

* 550 TARDE, G. (de) , Les lois de l'imitation

* 551 DIGEMANS, G., Psychanalyse des peuples et des civilisations, p. 160.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry