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Identité et appartenance: temps et comput anthropologique chez R. E. Mutuza Kabe

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par Jean Francis Photios KIPAMBALA MVUDI
Université de Kinshasa RDC - Doctorat en philosophie 2012
  

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§2. Conscience et science philosophique

On parle de conscience et science philosophique quand il s'agit du pouvoir d'être. Et qui peut mieux connaître Mutuza que Mutuza lui-même ? Il y a certes, des choses que l'homme connaît de lui-même, il y en a d'autres qu'il ignore. Ce qu'il ignore peut être connu des autres. C'est ce qui est ignoré qui peut faire l'objet de la recherche. Qui est, au fond, Mutuza ? Cet astre brillant dans le firmament des philosophes naquit à Yuma Kalima le 05 mars 1938. Fils de Mugumo, un modeste Mwami de Yananio, et de Kyotala, gentille dame qu'il n'a connue que très peu. Il est jumeau dont le frère est mort quelques années après, d'où le nom de Kabe, c'est-à-dire moitié. Dans le sein maternel, il est moitié. On le reconnait dans la famille comme moitié d'un frère fort physiquement. C'est pourquoi on le nomme Mutuza Kabe. Il est encore moitié à cause de la mort prématurée de sa mère le laissant amputé du fait de la séparation et de la cession à cette partie de soi. C'est une dure montée. Il est mis au monde avec son frère, il lui est semblable, tout en étant symétrique et mitoyen. Il évolue dans une corrélation entre son égo-logicité Kabe et l'acceptation d'être moitié. Ce qui fait que, chez les Lega les résultats mathématiques des deux nombres premiers dont la différence vaut 2 appelés nombres premiers jumeaux, s'appliquent sans beaucoup de peine, comme 5 et 7, 17 et 19, 101 et 103. Les Lega sont, comme d'ailleurs tous les Bantu, des géomètres, c'est-à-dire professionnels qui réalisent des mesures et des levés des terrains. Leur théorie géométrique s'intéresserait alors aux relations entre les points, les droites, les plans, les courbes, les surfaces et les volumes... Ils seraient, pour ainsi dire des savants mathématiciens avant la lettre. Les mathématiciens ne sont pas encore parvenus à découvrir si l'ensemble des nombres premiers jumeaux connus aussi des Lega est infini, c'est ainsi que les chants donnant l'identité des héros Balega sont des véritables poèmes géométriques.

La grand-mère, après la mort de la mère, prit soin de Mutuza chétif et maladif, l'instruisit en lui répétant ces mots prophétiques que Mutuza n'a jamais oubliés(125(*)):

kilega français

« Kamugulampungu je suis un petit serpent;

Nakega mubili nsa kega lukindo je manque de poids corporel, mais je suis très estimé

Natikizye melele kwi tumba j'ai cueilli une igname épineuse de là haut ;

Nu nkutitya kisamba ku nzogu zikwenda j'ai arraché la queue d'un éléphant en marche;

Kami ka mitongomitongo d'apparence d'un petit mwami chétif ;

Kasikila ka mintalabanda qui joue au flou comme un jeune garçon qui agit comme un vieux ;

Mpene za kilemba moi un bouc

Nenda idungu nsisile mitanda»(126(*)) si loin que j'aille, je ne termine pas mes voyages sans retour.

Orphelin de mère, séparé de la grand-mère, le voici auprès de sa grande soeur, épouse d'un instituteur de l'école primaire de Watangabo. Comme jumeau, il était soumis à un traitement particulier. Eduqué dans la cour du Mwami, il était préparé à en assurer un jour la charge(127(*)). Mutuza progresse dans les méandres du pouvoir traditionnel et s'en y familiarise avec les arcanes à travers les multiples actes initiatiques.

* 125 De gauche à droite la version et la traduction de Kamugulampungu. En italiques le kilega, en gras le français.

* 126. Kamugulampungu est une comptine, comme d'ailleurs toutes les comptines qui sont des formulettes, poèmes simples, récités ou chantés, souvent accompagnés d'une mélodie afin d'amuser et d'éduquer les petits enfants. Se distingue des comptines occidentales qui, on le sait se distinguent généralement en plusieurs types: les comptines numériques (Un Deux Trois / Nous irons au bois /Quatre Cinq Six / Cueillir des cerises / Sept Huit Neuf / Dans un panier neuf / Dix Onze Douze / Elles sont rouges), celles qui se terminent par un ordre va t'en ou sors, celles encore qui sont chargées de jeux phonétiques, avec des allitérations et parfois incompréhensibles (Am stram gram / Pique et pique et colégram / Bourre et bourre et ratatam / Am stram gram pique dame), et enfin des comptines narratives au sein desquelles se déroule une histoire cocasse ou pourvue d'un élément permettant de les dater. La plupart des comptines est transmise d'une génération à l'autre, par voie orale. Souvent, elles ouvrent et inaugurent un jeu. Dans ce cadre, elles désignent l'enfant à qui incombe une certaine tâche : un cercle d'enfants est formé et l'un d'eux doit compter ses camarades, les désignant successivement du doigt, syllabe après syllabe, d'une façon très rythmée, jusqu'à la fin de la comptine. Le dernier désigné est, selon le jeu, éliminé ou heureux élu. Universelles, les comptines sont bien souvent anonymes. Celles qui sont racontées au coucher des enfants ou qui leur apprennent les chiffres où l'alphabet figurent parmi les plus anciennes. On relève autant de variantes dans les comptines qu'il y a de régions. Parfois, poétiques et absurdes, elles mettent en scène des animaux, ceux qui notamment contiennent une connotation particulière, comique, drôle ou terrifiante : le cochon, l'éléphant, le lapin ou l'araignée. Kamugula mpungu est l'une des plus célèbres comptine qui demeure comme celle d'Une souris verte / Qui courait dans l'herbe / Je l'attrape par la queue / Je la montre à ces messieurs / Ces messieurs me disent / Trempez-la dans l'eau / Trempez-la dans l'huile / Ça fera un escargot tout chaud !. L'introduction de l'animal dans ce genre est l'occasion aussi de faire entrer un monde fantastique et magique dans lequel tout arrive et où tout est possible. La comptine se présente comme un univers merveilleux, irrationnel, qui plaît aux enfants. Cependant, les origines de nombreuses comptines, comme Coccinelle, Coccinelle, Envole-toi, sont l'objet de conjectures ; certains théoriciens pensent que diverses comptines en apparence naïves expriment en réalité des opinions sur la politique ou sur d'autres sujets d'actualité. Aussi est-il courant de trouver à l'intérieur d'une comptine un nom propre, un surnom, une allusion ou un événement précis qui sont autant de clins d'oeil de l'auteur destinés au lecteur, au réciteur ou au joueur. À l'instar des chansons populaires ou des ballades, certaines comptines doivent leur attrait à leur mélodie autant qu'à leurs mots.

* 127 MTUZA, Des nations sans Etat, p. 154-155. Il est à noter que l'accession aux charge de Baame n'est pas héréditaire et encore moins le privilège d'une caste. Le Bwami, disons-nous en paraphrasant Biebuyck, représente dans la pensée lega l'essence et le but final de la vie. Le Bwami imprègne toute la vie du Lega. Il est quelque chose qui marque, qui laisse des traces- KYANDANDA- il sert à renforcer les relations sociales et humaines.«Bwami, précise Biebuyck, has no theory about the universe, its origins and organisation or about the place of divinities, animals, and men in the universe. Bwami has no myths. It does not practise a specialized cult. Its ideology is essentially oriented toward men, toward the moral improvement of individual and toward harmonious relationships between men. Bwami is a search for the mastery of the good and for moral and spiritual excellence. The intent is both théorical and piratical. The Lega are convinced that moral improvement, moral and spiritual excellence, and absolute good can be achieved only trough initiation into and memberships in Bwami. J. VANSINA, qui a fait la synthèse de D. Biebuych sur le Bwami, nous présente sur la nature et le mode d'accession à cette institution des éléments précis: le Bwami lega, dit-il, était une superstructure qui affermissait les relations à l'intérieur des lignages et des clans tout en fournissant des grades et des titres plein de prestige et symboles et formait des systèmes de valeurs et d'idéologies très riches. Le Bwami était l'institution de tous les Lega, non seulement parce que 80% des hommes y participaient, mais aussi parce que les parties importantes du rituel étaient publiques. Le Bwami reliait donc différents clans en un seul faisceau et renforçait les liens à l'intérieur d'un clan et de ses lignages. Mais c'est à Biebuych qu'il faut faire appel pour dégager les conditions d'accès au Bwami. En principe, dit-il, cette Institution est accessible à tout homme pourvu qu'il soit circoncis. Les initiations au Bwami ne sont pas exclusivement réservées aux aînés des lignages et des familles étendues, aux riches, aux devins sorciers ou aux possédés. On peut dire avec certitude que 80% de Balega mouraient comme initiés à l'un ou l'autre grade de l'Institution. A l'intérieur des familles étendues, des lignages, des sous-clans et des clans, d'après l'importance hiérarchique du grade, les initiations se font suivant un système de rotation et de substitution. Un agnat accédant à un grade supérieur doit être remplacé dans son grade précédent par un agnat : s'il expire pendant les initiations on lui substitue immédiatement un agnat. Les femmes, en tant qu'épouses d'initiées, ont accès au Bwami. Il existe pour elles une série des grades qui sont homologues à ceux des hommes. Les initiations pour homme et pour femme sont inséparables : les femmes participent à celles des hommes et vice-versa, sauf quelques rites secrets réservés à l'un ou l'autre sexe. Un homme initié a donc toujours au moins une de ses femmes initiées au grade complémentaire. S'il monte en grade, sa femme doit également accéder à un grade supérieur. Il existe à l'intérieur de l'institution une hiérarchie de grades dont la nomenclature et le nombre ne sont pas les mêmes pour tous les Lega. Cette stratification, en commençant par le bas, se présente comme suit :

 

Homme

Femme

1. BWAMI

-LUKEKO

-KONGABULUMBU

-KANSILEMBO

KEGOGO

2. NGANDU

-MUSAGE WA NGANDU

-LUTUMBO LWA NGANDU

BOMBOA

3. YANANIO

-MUSAGE WA YANANIO

-LUTUMBO LWA YANANIO

BULONDA

4. KINDI

-KYIGO KYA KINDI

-MUSAGE WA KINDI

-LUTUMBO LWA KINDI

BUNYAMWA

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe