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Identité et appartenance: temps et comput anthropologique chez R. E. Mutuza Kabe

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par Jean Francis Photios KIPAMBALA MVUDI
Université de Kinshasa RDC - Doctorat en philosophie 2012
  

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Section 2. Affront comme réponse au nominalisme

§ 1. Nominalisme méthodologique

On sait qu'il importe beaucoup aux philosophes, en particulier ceux de notre siècle, d'être précis dans leur langage, de savoir de quoi ils parlent. Mutuza est quelque part intransigeant dans ses propos quand il reproche aux philosophes et intellectuels congolais d'engager des discussions sur des évidences(299(*)). Il se demande comment, quand bien même sachant qu'il importe beaucoup aux philosophes, en particulier ceux de notre siècle, d'être précis dans leur langage, de « savoir de quoi ils parlent », mais ils ne laissent pas d'en discourir tout de même que s'ils les comprenaient.

L'affront trouble tellement la philosophie de Mutuza qu'il est buté à la question ontologique du statut de sa lutte politique(300(*)). Dans quelle mesure l'injure et l'injustice sont-elles autorisées dans la lutte politique ? C'est le problème de circonstance. Tous les problèmes concernant le temps, la connaissance et l'être dans son humanisme nous poussent vers l'analyse ontologique du nominalisme. Nous sommes tous nominalistes sans le savoir et par naissance. En tant que nominalistes, nous avons tendance à objectiver notre monde(301(*)). Cette tendance est seulement un accident historique et non pas une nécessité essentielle. Le souci des réalistes du Moyen Age par exemple était de maintenir la validité des universaux comme expressions authentiques de la réalité(302(*)).

Le nominalisme, dans notre conception philosophique vient du latin nominalis, « nominal », dans la philosophie scolastique médiévale, doctrine qui substitue à la notion d'idées générales celle de signes généraux, et qui affirme que les universaux (ou concepts universels), sont des signes, et non des substances constituant un ordre du réel ; seules les choses particulières sont pourvues d'existence.

Ainsi les universaux, tels que cercle, beauté ou animal, passent pour n'être que des noms, des termes qui ne servent à évoquer que des choses particulières. Le nom « cercle » qui s'applique aux choses circulaires, est, en tant que tel, une désignation générale ; mais il n'existe pas séparément une entité concrète et une essence de la circularité correspondant au nom. L'universel ne peut donc être qu'un terme.

Le nominalisme s'est développé dans la lignée de la logique dérivée d'Aristote selon laquelle toute réalité est faite de choses singulières, tandis que la théorie du réalisme est issue des idées universelles (ou archétypes) de Platon. Pour le réalisme, les universaux ont une existence réelle et séparée, antérieure ou indépendante des objets particuliers dans lesquels ils se manifestent.

La querelle entre le nominalisme et le réalisme s'est amplifiée au Moyen Âge : la position nominaliste a été exposée par Roscelin (+ 1125), puis développée par Guillaume d'Occam (+ 1349), tandis que la position réaliste a été illustrée par Bernard de Chartres et Guillaume de Champeaux (+ 1121).

Entre le nominalisme et le réalisme, le conceptualisme fait figure de doctrine intermédiaire, pour laquelle les universaux, bien que dénués d'existence réelle ou substantielle dans le monde extérieur, existent néanmoins en tant qu'idées ou concepts, et ne sont par conséquent davantage que des simples noms. Un réalisme plus modéré affirme que les universaux sont logés dans l'esprit humain et qu'ils se réfèrent à des qualités des choses particulières.

L'enjeu de la querelle n'est pas seulement philosophique ; il est aussi théologique, car Roscelin soutient que la Trinité (le Père, le Fils et le Saint-Esprit), conçue traditionnellement par la théologie catholique comme constituant l'unité d'une seule nature divine, ne peut être comprise selon la méthode individualisante du nominalisme que comme trois dieux distincts et séparés. Aussi l'Église est-elle fermement opposée au nominalisme. Dans le domaine de l'éthique, cette position anti-nominaliste implique le rejet d'une hypothétique nature humaine et le refus de la doctrine du droit naturel bâtie sur ce concept : selon la position dominante dans l'Église, les actes sont moralement bons ou mauvais selon qu'ils sont commandés ou interdits par Dieu.

Le nominalisme d'Occam a suscité de nombreux débats, notamment avec les empiristes et dans les discussions sur la nature du langage. Le questionnement sur les universaux, surtout, ne s'est pas éteint et a ouvert la voie à de nombreuses théories nominalistes modernes telles que l'instrumentalisme, le pragmatisme et le positivisme logique.

La critique sans appel que la philosophie analytique(303(*)) adresse d'ailleurs à toute la littérature philosophique qui la précède, c'est-à-dire la « métaphysique » est de ne pas savoir de quoi elle parle, ou plutôt de parler de n'importe quoi, voire de rien du tout, en utilisant des termes au mieux confus, au pire complètement vides de sens. Cette situation est d'autant plus dangereuse quand il s'agit de mal du pays, cette sangsue.

* 299 Ce que le Moyen Âge établit, c'est ainsi l'évidence commune à tous les sens. Dans la mesure où sentir, c'est proprement être illuminé, et que cette illumination a pour source une unique lumière, il est possible de parler d'une lumière du goût ou du tact, qui participent d'une même évidence lumineuse que la vue. On peut difficilement comprendre Descartes, chez qui le concept d'évidence est essentiel mais qui ne l'étend pas à un autre sens que la vue, sans ce contexte scolastique dont il est l'héritier beaucoup plus qu'il ne l'affirme. Ainsi, l'évidence est lumineuse et non -- seulement -- visuelle. En accord avec l'optique du XIIIe siècle (Robert Grosseteste, Roger Bacon), on ne parlerait pas ici d'un « tact de la vision » (Descartes, Diderot) mais plutôt d'un « toucher lumineux ». Il y a une sensation de l'évidence ; il y a aussi une évidence de la sensation. Chez Descartes, ce n'est pas l'oeil qui voit, mais l'âme. Ainsi, chez lui, les animaux ne voient pas, à proprement parler. Pour Descartes, sentir, c'est se sentir. Et c'est ce qu'il nomme penser : « il me semble que je vois (videre videor), que j'entends, que je m'échauffe, et c'est proprement ce qui en moi s'appelle sentir, et cela, pris ainsi précisément, n'est rien autre chose que penser » (Méditations métaphysiques, II). « Je pense donc je suis » peut ainsi se traduire par « je sens que je pense, donc je suis ». En écho négatif à l'évidence de la sensation, l'erreur ou l'illusion lui seront souvent attribuées.

* 300 À partir de Descartes, le XVIIe siècle développe le problème central de l'erreur, puis le XVIIIe siècle celui de l'illusion. On parle du témoignage des sens. Mais, à côté du lieu commun d'une induction dans l'erreur par le témoignage des sens, on a très tôt souligné que l'erreur n'est pas une catégorie de l'ordre de la sensation. Malebranche rappelle que l'erreur est dans le jugement.

Remarquons toutefois que supposer un faux témoignage des sens repose sur une conception de la sensation comme donné brut, qui se constitue en perception par l'apport du jugement.

Aux XIXe et XXe siècles, dans une démarche analogue à celle de l'humanisme renaissant qui chercha l'essence de l'humain dans ses limites ou au-delà (fous, « sauvages », etc.), on peut noter l'extrême attention de la psychologie et de la physiologie pour toutes les anomalies de la sensation, « erreurs perceptives », déformations, pathologies sensorielles, etc. Dans le même ordre, mais dans une tout autre visée, il faut mentionner les expériences provoquées d'une transformation de la sensation par les drogues (Baudelaire, Rimbaud, Michaux...).

* 301 KIPAMBALA, J. F.-Ph., Temps et Apocatastase chez Grégoire de Nysse, p. 91.

* 302 C'est pourtant sur ce type d'approche que s'appuient des travaux tels que ceux d'Ernst Mach dans l'Analyse des sensations (1886) pour développer un sensationnalisme intégral : « le monde est uniquement constitué par nos sensations ». L'influence de ces thèses est importante, tant en physique (Einstein, Boltzmann, Planck) qu'en philosophie (Russel, William James), en psychologie (Gestalt Theorie) ou encore en littérature (Musil, Hofmannsthal).

* 303 Les techniques modernes d'analyse moléculaire de l'ADN, de l'ARN et des protéines permettent de détecter les mutations et constituent les outils indispensables d'une meilleure approche des pathologies génétiques, mais aussi des autres maladies dans lesquelles des remaniements du génome sont impliqués (comme les cancers). La recherche des mutations, lorsque ces dernières sont répertoriées pour un gène donné, facilite le dépistage d'une maladie héréditaire, permet souvent un diagnostic de certitude et facilite le conseil génétique.

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