WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

L'assemblée nationale comme pouvoir constituant dérivé au Cameroun entre 1990 et 2008

( Télécharger le fichier original )
par Jules Bertrand TAMO
Université de Dschang Cameroun - Master de droit public 2011
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy
2 - Les nouvelles structures

La loi constitutionnelle de 1996 transforme la physionomie initiale des institutions de la Constitution du 2 juin 1996, notamment dans le sens de leur renforcement. Ainsi, le pouvoir exécutif est devenu formellement bicéphale, car contrairement à la révision de 1991 qui ne faisait pas du gouvernement un organe autonome, celle de 1996 lui réserve le chapitre II en lui faisant passer d'un organe déconcentré de l'Exécutif à un véritable organe distinct du président de la République. En plus, la révision de 1996 contient comme institutions nouvelles, un Parlement bicaméral avec la création d'une nouvelle Chambre, le Sénat281(*).

Font également leur apparition dans la nouvelle structure des pouvoirs, un Conseil constitutionnel (a) et une Chambre des comptes au sein de la Cour Suprême qui trône au sommet « Du Pouvoir judiciaire » (b), expression qui remplace désormais celle classique « De l'Autorité judiciaire ».

a - Le Conseil constitutionnel

La Constitution originaire de 1972 avait fait de la Cour Suprême une juridiction polyvalente dont l'hypertrophie des attributions était la principale caractéristique. Mais la loi constitutionnelle de 1996 vient l'amputer de sa qualité de juge constitutionnel282(*).

En effet, à l'allure d'une mutation qui se veut profonde, l'acte de révision de 1996 opère un passage de l'expérience tenant à la séparation des litiges dans « l'un juridictionnel » à l'instauration d'une manifeste distinction limitative des contentieux par suite de dislocation juridictionnelle. C'est ainsi que le contentieux constitutionnel a été extirpé du « joug de la Cour suprême »283(*) pour être confié conformément au nouveau titre VII du texte constitutionnel, à un organe spécial, en l'occurrence le Conseil constitutionnel. Le sentier d'un ordre juridictionnel nouveau est désormais tracé, signant ainsi formellement la fin d'une époque : celle du monopole contentieux jusqu'alors détenu par la Cour Suprême ainsi que d'une impression : celle selon laquelle le système juridique camerounais avait embrassé l'option d'unité de juridiction.

Incontestablement inspiré par le modèle français de justice constitutionnelle dont l'institution tenait du souci du constituant de ce pays de contenir un Parlement parfois trop entreprenant face à la branche gouvernementale de l'Exécutif, le constituant camerounais de 1996 a créé un Conseil constitutionnel affecté de plusieurs charges. Ainsi, selon l'article 47 alinéa 1er de la loi constitutionnelle de 1996, le Conseil constitutionnel statue souverainement sur : la constitutionnalité des lois, des traités et accords internationaux ; les règlements intérieurs de l'Assemblée nationale et du Sénat avant leur mise en application quant à leur conformité à la Constitution; les conflits d'attribution : entre les institutions de l'Etat ; entre l'Etat et les régions ; entre régions.

L'article 48 le charge également de veiller à la régularité des élections présidentielles, législatives et des consultations référendaires dont il est par ailleurs appelé à en proclamer les résultats.

En plus de ces attributions de nature contentieuse, le Conseil exerce une fonction de nature consultative. Mais les avis donnés par le Conseil ne peuvent l'être que sur les matières qui relèvent de sa compétence284(*).

Cette double activité (contentieuse et consultative) sera pareillement exercée par onze membres désignés pour un mandat de neuf (9) ans non renouvelable et par un nombre indéterminé de membres de droit que sont les anciens présidents de la République. Mais, les critères du choix des sages restent vagues et floues. En effet, lorsque la Constitution dispose laconiquement que les membres du Conseil sont choisis parmi les personnalités de réputation professionnelle établie et jouissant d'une grande intégrité morale et d'une compétence reconnue, on est immédiatement amener à se poser la question de savoir de quelles profession et compétence s'agit-il. Manifestement, les techniciens du droit au rang desquels figurent les enseignants d'universités, ne peuvent vigoureusement se prévaloir de telles dispositions, sujettes à interprétation, pour assurer les fonctions de conseiller constitutionnel285(*). Il est cependant à remarquer que la désignation des sages reste empreinte d'une forte dose de discrétion reconnue aux autorités compétentes. Aux termes de l'article 51 alinéa 2 de la Constitution, ils sont nommés par le président de la République et désignés de la manière suivante : trois, dont le président du Conseil, par le président de la République ; trois par le président de l'Assemblée nationale après avis du Bureau ; trois par le président du Sénat après avis du Bureau et deux par le Conseil Supérieur de la Magistrature.

Les membres du Conseil constitutionnel prêtent serment devant le Parlement réuni en congrès dans les formes fixées par la loi. Leurs fonctions sont incompatibles avec celles de membre du Gouvernement, du Parlement ou de la Cour Suprême, l'acte de révision ayant reconnu au législateur compétence pour fixer les autres éléments du statut des juges constitutionnels tels les incompatibilités, les obligations, les immunités et les privilèges. De même, l'organisation et le fonctionnement, les modalités de saisine ainsi que la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel sont fixés par la loi286(*).

Le droit de saisine du Conseil est limitativement attribué aux personnalités de l'Etat telles que le président de la République, le président de l'Assemblée nationale, le président du Sénat, un tiers des députés ou un tiers des sénateurs et les présidents des exécutifs régionaux lorsque les intérêts de leurs régions sont en cause. Mais en cas de contestation sur la régularité de l'une des élections prévues à l'alinéa 1er de l'article 48 précité, le Conseil constitutionnel peut être saisi par tout candidat, tout parti politique ayant pris part à l'élection dans la circonscription concernée ou toute personne ayant qualité d'agent du Gouvernement pour cette élection. En cas de contestation sur la régularité d'une consultation référendaire, le Conseil constitutionnel peut être saisi par le président de la République, le président de l'Assemblée nationale ou le président du Sénat, un tiers des députés ou un tiers des sénateurs.

Que reste-t-il finalement à la Cour Suprême privée de sa qualité de juge constitutionnel ?

* 281 Sur les développements relatifs au Parlement bicaméral, cf. chapitre 1 de la seconde partie de cette étude.

* 282 Qualité qu'elle n'avait, en réalité, jamais eu à s'en approprier du fait que le président de la République était le « véritable juge de la constitutionnalité des lois au Cameroun ». V. à ce sujet DONFACK SOKENG (L.), « Cameroun : Le contrôle de constitutionnalité des lois hier et aujourd'hui. Réflexions sur certains aspects de la réception du constitutionnalisme moderne en droit camerounais », in MELONE (S.), MINKOA SHE (A.) et SINDJOUN (L.) (dir.), La réforme constitutionnelle du 18 janvier 1996 au Cameroun. Aspects juridiques et politiques, op. cit., pp. 362-405, notamment pp. 374-376.

* 283 Cf. ABA'A OYONO (J.-C.), « Les mutations de la justice à la lumière du développement constitutionnel de 1996 », op. cit., p. 19.

* 284 Article 47 alinéa 4 de la Constitution.

* 285 C'est l'avis de ABA'A OYONO (J.-C.), « Les mutations de la justice à la lumière du développement constitutionnel de 1996 », op. cit., p. 19.

* 286 Cf. la loi n° 2004/004 du 21 avril 2004 portant organisation et fonctionnement du Conseil constitutionnel ainsi que celle n° 2004/005 du même jour fixant le statut des membres du Conseil constitutionnel.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus