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La compétence des juridictions militaires congolaises face aux civils.

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par Joel BONGOLONGONDO
Université de Kinshasa - Licence en Droit 2013
  

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Introduction générale

O1. Problématique.

L'article 156 de la Constitution du 18 février 2006 en vigueur en République démocratique du Congo telle que révisée le 20 Janvier 2011, est au centre des inquiétudes sur la compétence des juridictions militaires face  aux personnes autres, que les membres des Forces armées de la République et de la Police nationale  congolaise.

Il ressort de cet article que les juridictions militaires ne peuvent juger des civils que pendant les circonstances exceptionnelles et à la condition que le Président de la République, en temps de guerre ou après que l'état de siège ou d'urgence aura été proclamé, décide après délibération en conseil des Ministères, de suspendre la répression des infractions qu'il fixe et pour une période déterminée, par les juridictions ordinaires.

De ce fait, la loi organique qui en vertu de l'alinéa dernier du même article précité, organise et détermine la compétence et le fonctionnement des juridictions militaires doit être conforme à la constitution.

PREMIERE PARTIE :

UNE COMPETENCE ANTERIEURE DES JURIDICTIONS MILITAIRES CONGOLAISES FACE AUX CIVILS

Aux termes de l'article 115 de la loi n° 04/023 du 12 novembre 2004 portant organisation générale de la défense et des Forces armées, le législateur congolais définit la Justice militaire comme une juridiction indépendante relevant du pouvoir judiciaire, chargée de respecter la loi et de renforcer le maintien de l'ordre public et de la discipline au service des Forces armées. Et à l'exposé des motifs jumelé des lois n° 023 et 024/2002 du 18 novembre 2002 portant respectivement Code judiciaire et Code pénal militaires, il est dit que la justice militaire apparaît désormais comme un instrument du pouvoir judiciaire au service des Forces armées1(*).

Sous ce même angle le Professeur LIKULIA BOLONGO Norbert, Général d'armées, notait ce qui suit: « le fondement du droit pénal militaire et de la justice militaire réside donc dans la nécessité du maintien d'une façon permanente et sans relâche, d'une discipline particulière aux Forces armées et de la mise en oeuvre des moyens propres à assurer la sécurité de l'Etat et l'unité de la Nation. A cette époque, le Droit pénal militaire se présentait ainsi comme le prolongement de l'action disciplinaire (...) car c'est lui qui impose et rétablit par la force l'ordre au sein de l'Armée lorsque les sanctions disciplinaires et pénales prévues par le droit commun se révèlent incapable d'assurer cet ordre. »2(*)

Lorsqu'on s'adonne à un petit exercice en demandant de façon désintéressée au commun des mortels ce qu'on entend par justice militaire, toutes les réponses convergent vers la considération d'une justice des militaires pour les militaires et par les militaires3(*).

Cette même question, n'a pas laissé indifférente la Commission Africaine des Droits de l'Homme qui a consacré très clairement dans ses Directives au §L le droit des civils à ne pas être jugés par un tribunal militaire4(*). Elle énonce à ce sujet que ``les tribunaux militaires ne peuvent en aucune circonstance juger des civils'', précisant que ceux-ci (les tribunaux militaires) ont pour seul objet de connaitre des infractions d'une nature purement militaire commise par le personnel militaire5(*).

La préoccupation fondamentale se situe autour de l'idée que les juridictions militaires sont essentiellement pénales et c'est au cours du procès pénal qu'apparaissent dans toute leur ampleur les droits fondamentaux de l'homme. Le délinquant risque ce qu'il a de plus sacré au monde: sa vie, sa liberté, son honneur, son patrimoine. Alors que, devant le juge statuant en matière de droit privé, l'on lui demande simplement de dire le droit applicable en ayant une connaissance technique des faits de la cause, au juge pénal, en sus de connaissance technique, on demande un sens profond de l'humain et du social, car la décision qu'il prend n'est pas une solution à une difficulté juridique. Le juge pénal prononce des mesures d'assistance, de surveillance, d'amendement ou d'élimination6(*). Cela requiert un mécanisme de protection face à cette menace de la sentence pénale sur la personne humaine.

C'est cela donc bien sur le rôle traditionnel des droits de l'Homme : protéger du pénal, protéger la personne contre les menaces que fait planer l'intervention du droit pénal sur ses droits7(*) (droit à l'honneur, droit à la vie, droit à la liberté, droit au patrimoine).

Malgré ce que prévoit la Constitution de la République dans son article 156 sus-évoque, malgré cette aspiration noble de la Commission africaine des droit de l'Homme, malgré la sensibilité et la délicatesse qui entourent le procès pénal au risque de voir une décision d'élimination ou touchant au patrimoine ou à la liberté du prévenu être prononcée, malgré le cri et l'appel à l'humanisme, malgré la spécialité, le fondement et les idéaux ayant conduit à l'institution de la justice militaire ; malheur est de voir qu'en République démocratique du Congo, pays qui a ratifié bon nombre d'instruments juridiques régionaux et internationaux en matière des droits de l'Homme et les a même consacrés par une soixantaine des dispositions constitutionnelles, il existe cependant les lois n°023 et 024/2002 portant Code judiciaire et Code pénal militaires devenus inconstitutionnelles, lesquelles attribuent aux Juridictions militaires une compétence à l'égard de tout individu étranger à l'Armée, civil soit-il.

Et pourtant, ces Juridictions à vocation pénale, statuant sur des questions de vie ou de mort, siègent avec des juges assesseurs en grand nombre, alors qu'ils ne justifient pas d'une maitrise en droit ou de tous les aspects délicats et sensibles qui entourent un procès pénal au niveau des droits mis en jeu.

Il est particulièrement regrettables que les juridictions militaires appliquant un code pénal militaire dont la plupart d'incriminations y prévues une fois aggravées sont punies de mort, soient compétentes même à l'égard des individus étrangers aux Forces armées et à la Police nationale. Aussi, est-il alarmant, que ces juridictions soient compétentes pour juger les auteurs (civils soient-ils) des crimes internationaux (crime de guerre, crime contre l'humanité et crime de génocide), infractions non seulement graves mais aussi complexes, alors que les juges assesseurs n'ont pas de connaissances approfondies pour ces genres de crimes.

Il va falloir s'interroger sur la compétence personnelle des juridictions militaires congolaises face aux individus étrangers à l'Armée et à la Police nationale.

Quel intérêt a-t-on alors à aborder un tel sujet ? La réponse à cette question se trouve au point 02 qui suit.

* 1 Exposé des motifs des lois n° O23 et 024/2002 du 18 novembre 2002 portant Code judiciaire et Code pénal militaires, in JORDC, 44ème Année, Numéro Spécial, Kinshasa, 20 mars 2003, p.5.

* 2 Général N. LIKULIA BOLONGO, Droit pénal militaire zaïrois, Tome premier, L'organisation et la Compétence des Juridictions des Forces armées, LJDJ, Paris, 1977, p.2.

* 3 J.I.C. KAMBALA MUKENDI, Eléments de Droit judiciaire militaire congolais, EUA, Kinshasa, 2009, p.15.

* 4 In http://www.afrimap.org/english/images/treaty/ACHPR_Directives&Principes_ProcesEquitable, Consulté le 08 octobre 2013.

* 5 In L. MUTATA LUABA, Droit pénal militaire congolais. Des peines et incriminations de la compétence des juridictions militaires en R.D. Congo, Editions du Service de documentation du Ministère de la Justice et Droits humains, 2ème édition, Kinshasa, 2012, p.34.

* 6 E.J. LUZOLO Bambi Lessa et N.A. BAYONA ba Meya, Manuel de Procédure pénale, PUC, Kinshasa, 2011, p.27.

* 7 F.TULKENS, «Politique criminelle et droits de l'Homme en Afrique », in P.AKELE ADAU (sous dir.), Réforme du Code pénal congolais. A la recherche des options fondamentales du Code pénal, Tome II, CEPAS, Kinshasa, 2008, p.86.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci