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Le Travail des enfants


par Aude Cadiou
Université de Nantes - DEA de droit privé 2002
  

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Paragraphe II  :
Offrir aux enfants une éducation adaptée

Une des caractéristiques actuelles de l'éducation dans les pays en développement est le temps très court que passe les enfants à l'école. En effet, même lorsque l'inscription à l'école primaire atteint des niveaux honorables, on constate que de nombreux enfants abandonnent leurs études : 150 millions d'enfants ont quitté l'école avant d'avoir fini leur cinquième année d'études primaires46(*). On peut avancer deux causes à ce phénomène. Tout d'abord la scolarité n'est pas gratuite et payer les livres et les repas de midi représentent parfois un lourd sacrifice pour une famille pauvre, d'autant que pendant qu'il est à l'école, l'enfant ne gagne pas d'argent en travaillant. Une éducation de base visant à éliminer le travail des enfants doit épargner ces dépenses aux familles démunies. Il faut donc que les ressources financières permettent de couvrir bien plus que le traitement des enseignants, l'installation et l'entretien des bâtiments scolaires. L'insuffisance chronique du financement de l'éducation de base dans les pays en développement est un problème qui exige une solution, et celle-ci est de la responsabilité du monde entier, notamment du fait du lourd fardeau de la dette qui écrase tant de pays en développement.

La dette du tiers-monde atteint aujourd'hui des sommets : selon la Banque mondiale, la dette de l'Afrique subsaharienne était en 1996 de 227 milliards de dollars, celle de l'Asie du Sud de 152 milliards de dollars. La dette de nombreux pays d'Afrique est deux à trois fois plus élevée que leur produit national brut, et le remboursement de celle-ci engloutit une grande partie de leur ressources. De plus, pendant ce temps, l'aide publique au développement fournie par les pays riches a considérablement réduit. L'ONU avait fixé pour objectif que cette aide atteindrait 0.7% du produit national brut des pays industrialisés du G7, mais en 1998, elle représentait 0.19% seulement. Avec une dette énorme à rembourser et des ressources qui n'augmentent pas, sans compter une population en constante augmentation, les pays en développement ont de grandes difficultés à faire de l'éducation une priorité nationale. En plus, de ces difficultés financières, le Fonds monétaire international a imposé à ces pays en développement des plans d'assainissement financier qui imposent de comprimer fortement les dépenses publiques . Il apparaît évident que si les pays riches veulent tenir leurs engagements de lutte contre le travail des enfants, ils vont devoir consentir des efforts d'ordre financier à l'encontre des pays pauvres. En effet, ceux-ci ne pourront pas mettre en place un système d'éducation de base gratuit et accessible à tous sans cette aide.

Ensuite, beaucoup de zones rurales n'ont aucun système scolaire et il faut alors un courage certain pour parcourir tous les jours des kilomètres à pieds pour aller à l'école. Afin de remédier à cette situation d'abandon scolaire, il faudrait qu'en zone rurale l'école aille au-devant de l'enfant, par exemple en créant de petites classes de plusieurs niveaux, pour scolariser les enfants à des distances raisonnables de chez eux. Une école accessible à tous les enfants d'une petite zone rurale inciterait, sans aucun doute, les parents à envoyer leurs enfants en classe, notamment du fait que l'enseignant pourrait faire pression sur eux et leur expliquer la nécessité d'éduquer leurs enfants. Si beaucoup d'enfants d'une même zone se retrouvent en classe, les enfants délaissés pourront aussi demander à leurs parents de les rejoindre.

Cependant, si l'on veut véritablement inciter les enfants, et leurs parents, à profiter de l'école, il faut surtout améliorer les programmes enseignés. En effet, pour que les écoles attirent et retiennent les enfants, il faut que l' enseignement soit jugé pertinent par les élèves et par leurs parents. L'une des premières conditions de succès sera donc de lier les leçons à la vie communautaire. Dans les endroits où la plupart des enfants sont au travail, on ne saurait logiquement continuer à enseigner comme s'ils ne travaillaient pas. Il faut faire savoir, par la même occasion, quels types d'activités sont particulièrement dangereux, favorisant ainsi une meilleure connaissance de leurs droits en leur expliquant notamment les lois sur le travail des enfants. On doit aussi leur donner les compétences pratiques pour la vie courante. En effet, les programmes ne doivent surtout pas être rigides, mais au contraire être centrés sur les attentes des enfants. L'enseignement dispensé doit pouvoir être souple et s'adapter à la catégorie de population à laquelle il s'adresse.

Néanmoins, quelque soit la région où il est dispensé, l'enseignement doit permettre au minimum à tous les enfants de savoir lire, écrire et compter. Les enfants des zones rurales ne doivent pas être avoir des programmes privilégiant la récitation, mais plutôt ceux donnant des solutions pratiques à leurs problèmes quotidiens. Enfin et surtout, l'école doit pouvoir s'adapter au rythme de vie communautaire. Les familles pauvres ont besoin de toute la main-d'oeuvre disponible en temps de récoltes par exemple, et il est impératif qu'elles puissent si elles le souhaitent pouvoir compter sur l'aide de leurs enfants pendant ces périodes. Il faut donc que l'emploi du temps scolaire puisse être modulé, en fonction des régions et des périodes. En effet, une famille qui ne peut demander à ses enfants une aide pendant les récoltes, sera très réticente à les envoyer l'année d'après à l'école.

Les écoles présentes en Afrique voient un taux d'absentéisme scolaire très élevé en période de récolte, mais il faut que cet absentéisme soit rendu possible par l'école elle-même. C'est la stratégie adoptée par l'Etat indien du Kerala où le travail des enfants est quasiment inexistant et le taux d'alphabétisation de 91%.L'inscription à l'école y est gratuite et un repas est offert à tous les écoliers qui peuvent s'absenter facilement pendant les périodes où les parents ont besoin d'aide47(*). Cependant, le succès de cette province n'est pas du uniquement à ces souplesses, mais également à une réelle volonté politique de favoriser l'enseignement.

En plus, de la gratuité, de la facilité d'accès et de la souplesse, l'enseignement devra aussi, pour pouvoir se développer convenablement, être pratiqué par des personnes compétentes. En effet, la crise financière qui a frappé l'éducation des pays en développement, a contribué à dégrader la rémunération et la situation des enseignants, surtout au niveau primaire qui est pourtant le plus important. De ce fait, la qualité des professeurs qui rentrent dans le système a baissé elle aussi : beaucoup d'enseignants ont dû abandonner l'enseignement ou prendre un deuxième, voir un troisième emploi. Il est évident que dans ces circonstances, de nombreux enfants ne peuvent pas considérer l'école comme un lieu qui élargira leur horizon et leur offrira de nouvelles possibilités. Si même les professeurs sont obligés d'exercer plusieurs professions, comment l'école pourrait-elle leur offrir une éducation leur permettant d'obtenir un emploi stable ? Il faut donc privilégier la formation et le salaire de ces enseignants afin qu'ils puissent faire leur travail dans les meilleures conditions possibles. De plus, il faudra remplacer des enseignants qui ont des idées négatives envers les enfants pauvres, de basse caste ou qui travaillent. En effet, ces enfants sont souvent victimes de préjugés importants et peuvent subir de mauvais traitements pendant l'école, ce qui ne peut que les inciter à la quitter. Il faudrait donc favoriser l'emploi d'enseignants de la même communauté que leurs élèves et les sensibiliser à la situation des enfants. L'emploi d'enseignants jeunes, faisant partie de la même communauté que celle de leurs élèves, ne pourrait que prouver aux enfants que l'éducation permet une vie sociale et économique plus prospère, et les inciter à profiter de l'école.

Les ressources attribuées à l'éducation doivent impérativement être trouvées rapidement, pour que les objectifs de scolarisation universelle soient atteints. Les pays industrialisés devront bien évidemment faire un effort conséquent dans ce sens. Les institutions internationales et les banques de développement doivent soutenir du mieux possible les efforts nationaux visant à redonner la priorité absolue à l'enseignement primaire. L'éducation de base pour tous est réalisable, si on lui accorde la priorité exigée par la Convention relative aux droits de l'enfant. Ce n'est pas seulement une question de ressources, mais aussi de choix politiques. On estimait que la dépense supplémentaire nécessaire pour que tous les enfants puissent être scolarisés d'ici l'an 2000 était de six milliards de dollars par an, soit moins de 1% de ce que le monde dépense chaque année en armements.

Cependant, la clé de l'élimination du travail des enfants ne réside pas uniquement dans le développement d'un système d'éducation.

* 46 Rapport Unicef : « La situation des enfants dans le monde » 1997 préc.

* 47 « La recette du Kerala » par Samuel Grumiau, le 1er janvier 1999 ( http://www.icftu.org )

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