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Le Travail des enfants


par Aude Cadiou
Université de Nantes - DEA de droit privé 2002
  

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Paragraphe II  :
Le travail des enfants dans le secteur formel

Le secteur formel regroupe toutes les activités dotées des attributs de l'activité économique classique, à savoir le lien salarial et l'encadrement légal. En matière de travail des enfants, la main-d'oeuvre enfantine est alors employée soit dans des usines, comme n'importe quel salarié adulte, soit les enfants sont réduits à l'état d'esclaves par des gérants de fabriques peu scrupuleux, par le biais de la servitude pour dettes.
La servitude pour dettes est sans aucun doute une des formes d'exploitation des enfants les plus intolérables. Ce qui caractérise cette forme d'exploitation, ce sont non seulement les conditions de travail déplorables, mais surtout que la personne humaine est réduite à l'état de marchandise : l'enfant esclave appartient à un propriétaire. On apprend aux jeunes victimes à accepter les conditions dans lesquelles elles vivent et surtout à ne jamais se rebeller. En Asie du Sud, notamment en Inde, ce phénomène d'esclavage a pris une forme quasiment traditionnelle connue sous le nom de travail en servitude des enfants. Le principe de ce système est très simple, les enfants qui n'ont souvent que huit ou neuf ans, sont remis en gage par leurs parents à des propriétaires de fabriques en échange de prêts. Les enfants travaillent donc pour acquitter une dette ou toute autre obligation contractée par leur famille, cependant la servitude de toute une vie n'arrive la plupart du temps même pas à réduire la dette des parents. En effet, les créanciers, qui sont le plus souvent les propriétaires, manipulent les parents de telle sorte qu'il est très difficile, voir même impossible à la famille de régler sa dette ; ils s'assurent ainsi une main-d'oeuvre pratiquement gratuite à perpétuité. Les familles peuvent ainsi rester en servitude pendant des générations, les enfants prenant la relève des parents âgés ou infirmes. On rappellera une fois de plus que les systèmes de servitude sont illégaux dans presque tous les pays et notamment dans ceux où ils sont les plus répandus ; ils sont contraires non seulement aux lois sur le travail des enfants mais également à toutes les conventions internationales ratifiées par ces pays.

En Inde, ce type de transaction est très fréquent dans l'agriculture, ainsi que dans les industries comme la fabrication de cigarettes, le tissage des tapis, la production d'allumettes, les carrières d'ardoise et l'industrie de la soie. En Asie, on estime à plusieurs dizaines de millions le nombre d'enfants employés dans ces conditions. Bien sût, la plupart des enfants ainsi exploités appartiennent aux secteurs les plus marginalisés de la société. Ces minorités ethniques ou ces groupes défavorisés sont souvent considérés comme n'ayant aucun droit, et eux-mêmes sont souvent arrivés à le croire. A propos de cette véritable forme d'esclavage des enfants, on ne pense généralement la rencontrer qu'en Inde, au Népal et au Pakistan, mais elle existe également en Afrique sub-saharienne, au Brésil ou encore en Mauritanie où chaque année des milliers de bébés naissent encore dans un esclavage de fait. Traditionnel pendant des générations, l'esclavage a été officiellement aboli en 1980, mais 400 000 Africains noirs servent toujours en esclaves, officiellement ou non leurs maîtres berbères15(*).

Le travail de ces enfants n'est pas toujours rémunéré, mais quand il l'est, les gages sont la plupart du temps si maigres qu'ils ne suffiront jamais à rembourser la dette. D'autant, que les propriétaires de ces enfants, ne sont jamais à court d'idées pour prolonger la dépendance financière : l'employeur prélève le prix de la nourriture et des outils, si l'enfant commet une faute une somme supplémentaire est prélevée sur ses gages et si il est malade, une nouvelle dette vient alourdir la première pour payer les soins. A ce rythme, il n'est donc pas étonnant qu'une famille soit asservie sur plusieurs générations et ce qui est bien sûr le but poursuivi par le créancier-propriétaire. Cette forme d'exploitation, qualifiée d'intolérable par l'UNICEF, fait partie des objectifs prioritaires de l'Organisation Internationale du Travail, mais son éradication se révèle difficile du fait du caractère traditionnel de ce système et de la grande pauvreté des familles, qui estiment souvent préférable d'envoyer leur enfant travailler, dans des conditions qu'ils ignorent souvent, plutôt que de le garder dans une famille qui ne peut le nourrir faute de moyens.

Le salariat des enfants dans le secteur économique structuré est certainement la forme la plus étudiée et la plus médiatisée du travail des enfants, alors qu'en fait elle ne concerne qu'une minorité d'enfants au travail ; le Bureau International du Travail ne recense en effet que 8% des enfants actifs dans les industries manufacturières et autant dans le commerce et l'hôtellerie, un peu moins de 4% dans les transports et la manutention, 2% dans la construction et à peine 1% dans les mines et les carrières. Michel Bonnet affirme que le travail en sous-traitance pour les multinationales
( articles de sport, vêtements) n'occuperait sans doute pas 10% des travailleurs16(*). Il en est vraisemblablement de même pour l'agriculture industrielle ( grandes plantations de café, bananes, canne à sucre, thé...) où 5% des enfants seraient actifs. Néanmoins, même si ces enfants représentent une minorité des enfants au travail, leurs conditions de travail méritent à elles seules qu'on s'arrête sur cette forme d'exploitation. En effet, ils travaillent dans des conditions particulièrement dangereuses ; citons simplement comme exemple les conditions de travail dans une fabrique de verre en Inde où «  les enfants transportent des masses de verre fondu au bout de cannes de fer, à 60 centimètres à peine de leurs corps ; ils retirent du verre fondu de fours où la température atteint de 1500 à 1800°C, leurs bras courts d'enfants touchant presque le four ; ils assemblent et modèlent les bracelets de verre sur la petite flamme d'un réchaud à kérosène dans une pièce peu ou pas aérée, puisqu'il suffirait d'un courant d'air pour éteindre la flamme. Tout le sol de la fabrique est couvert de débris de verre et les enfants vont et viennent, portant ce verre brûlant, sans chaussures pour protéger leurs pieds. Des fils électriques nus pendant un peu partout parce que les propriétaires de la fabrique ne se sont pas souciés d'installer un réseau électrique interne isolé. »17(*) On voit donc les conditions déplorables dans lesquelles des enfants de moins de 14 ans sont amenés à travailler jusqu'à 14 heures par jour. Les jeunes mineurs connaissent de graves problèmes respiratoires, tels que tuberculose, bronchite et asthme...Les enfants travaillant dans les exploitations courent également de grands risques physiques, notamment de mutilations, dans les plantations de canne à sucre, où encore des risques de morsures de serpents ou de piqûres d'insectes.

Si la plupart de ces activités industrielles et agricoles sont le fait de sous-traitants nationaux, une partie est néanmoins contrôlée par des sociétés transnationales dont les produits sont destinés aux magasins et aux foyers de l'Occident. De grandes entreprises ayant leur siège social dans les pays riches délocalisent leurs installations d'assemblage dans les pays pauvres pour profiter des coûts inférieurs de personnel et des prestations sociales réduites. Ces cas ont amené des militants humanitaires dans les pays d'origine et d'accueil à faire pression sur ces compagnies pour qu'elles établissent des codes de conduite applicables tant à leurs propres opérations, qu'à celles de leurs sous-traitants. Nous verrons ultérieurement, les problèmes que peut poser ce type d'action et notamment leur influence perverse sur le travail des enfants.

* 15 Charles Jacobs and Mohammed Athie, « Bought and Sold », The New York Times, 13 juillet 1994

* 16 BONNET M. Regards sur les enfants travailleurs. La mise au travail des enfants dans le monde contemporain. Analyse et études de cas,  « Cahiers libres », Editions Page Deux, Lausanne,1998.

* 17 Rapport Unicef :  « La situation des enfants dans le monde » 1997

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