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Vers un système arabe unifié d'arbitrage commercial (L'apport de la convention d'Amman)


par AdeL BsiLi
Faculté de Droit de Tunis - DEA Droit privé général 1989
  

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Paragraphe deuxième : Le choix du droit applicable

Le droit applicable au fond du litige va offrir une solution dont dépendra la réalisation du l'équilibre du système. L'article 21 de la convention d'Amman précise le mécanisme que les arbitres doivent suivre afin de donner la solution adéquate et ce en fonction du choix des parties par son respect (A) ou par sa localisation (B).

A- Le respect du choix des parties

Le respect du choix des parties va consister dans l'application du droit choisi par les Parties. Ceci va se manifester sur deux plans :

D'une part, les arbitres statueront sur la base du contrat ou sur la base d'un « code de lois ».

D'autre part, ils peuvent statuer en amiables compositeurs en cas d'accord explicite des parties.

1- Le respect du contrat ou l'application d'un code de lois 

a- Le respect du contrat

L'article 21.1 dispose que la « commission statue dans le conflit sur la base du contrat conclu par les parties ».Cette disposition de la convention confère au système CAAC une portée importante. En effet, en plaçant le contrat au sommet de la hiérarchie des normes que devait appliquer la commission, la convention donne à la volonté des parties toute sa dimension et toute sa valeur et valorise le principe général « le contrat est la loi des parties ».

D'ailleurs, si on se place au niveau de la pratique arbitrale la plus récente, on peut dire que statuer sur la base du contrat c'est tenir compte de la place importante accordée au principe « Pacta Sunt Servanda » dans l'arbitrage international69(*).

Cette place est légitime vu que le commerce international est géré, avant tout, par les principes du droit des contrats. Ce droit contractuel est un palliatif majeur à la diversité des législations nationales qui constituent autant d'obstacles à son développement. On a dit à juste titre, dans ce cadre, que « c'est parcequ'il franchit les frontières, qu'ne matière internationale, le contrat est véritablement la loi des parties »70(*).

Pris dans ce sens, le contrat aura donc une fonction normative dans la mesure où il aboutira à la création d'une ou plusieurs normes juridiques individuelles71(*).

Il faut remarquer que la convention d'Amman n'a pas suivi la convention de Genève de 1961, ni le règlement d'arbitrage de la CCI , ni même le régime établi par le NCPC français ou celui de la loi type CNUDCI qui disent dans des termes voisins, que l'arbitre doit appliquer le droit choisi par les parties et tenir compte des stipulations contractuelles.

On peut penser que les rédacteurs de la convention se sont inspirés de la thèse subjectiviste selon laquelle l'application d'une loi à un contrat repose toujours sur la volonté des parties et n'a de force obligatoire que dans la mesure où la volonté des parties lui a conféré cette force72(*). Ceci témoigne de l'intérêt qu'ont réservé les rédacteurs à la volonté des parties. Celle ci lie l'arbitre qui n'a pas à apprécier le bien fondé du choix des parties73(*).

Peut-on dire que la théorie du « contrat dit sans loi » peut trouver ici une illustration ? La réponse par l'affirmative n'est pas certaine, tout comme le débat doctrinal, opposant ceux qui n'admettent pas une telle théorie, en se référant aux solutions conflictuelles74(*), à ceux qui la défendent, en disant qu'elle correspond aux aspirations des habitués du commerce international de voir leurs contrats soustraits à l'emprise des lois étatiques75(*).

Cependant, si les parties se sont référées à une loi étatique, un autre problème peut se poser. En effet, on se demande qu'elle sera la solution en cas de conflit entre cette loi et une disposition contractuelle ?

Une sentence CCI n° 3380 en 198076(*) a disposé qu'un tel conflit ne doit être résolu qu'à la lumière des termes des clauses contractuelles relatives au droit applicable. Mais que faut-il faire si le choix des parties est porté sur tout un système ?

b- L'application d'un « un Code de Lois »

L'article (21.1) dispose que la commission statue, « s'il y a lieu, sur la base du code de lois objet, d'un accord ... explicite entre les parties ». Ainsi, un deuxième choix s'offre aux parties, que la commission doit, éventuellement, respecter.

Cependant, cette application peut n'est qu'une éventualité. En réalité, cette disposition suit une démarche qui va du spécial au général empruntant la voie de la loi type CNUDCI de 1985 selon laquelle, les parties peuvent désigner, soit une loi, soit tout un système juridique d'un Etat donné (article 28.1).

Mais comment peut-on détecter cet accord implicite des parties sur l'application d'un Code de lois ?

Il nous parait que la référence à une loi, bien qu'elle soit un indice sérieux, reste insuffisante pour appliquer tout un système. En plus, les arbitres devront l'appliquer minutieusement ce qui peut poser un problème de conflit de lois ou une donner lieu à une interprétation inadaptée à l'esprit du texte. C'est pour nuancer de telles craintes, que la loi type CNUDCI ait précisé que la référence à un système d'un Etat, ou à une loi, n'implique que les règles de fond.

On peut se demander s'il existe d'autres critères pour rechercher l'accord implicite des parties portant sur un système juridique ?

Une doctrine autorisée estime, que l'important, est d'imputer aux parties à un contrat, la volonté implicite de choisir la loi qui valide celui ci plutôt que celle qui ne lui donne aucun effet77(*). Cette solution offre aux parties une grande marge de liberté et assure à la commission arbitrale un large pouvoir d'appréciation. D'ailleurs, au du coté des arbitres, la solution se justifie par le fait que l'arbitre international ne dispose pas de Lex fori à laquelle il pourrait emprunter des règles de conflit de lois78(*).

2- L'arbitrage en équité

L'article 21.2 dispose que la commission doit statuer sur la base des règles d'équité en cas d'accord explicite des parties. C'est l'amiable composition ou l'arbitrage en équité qui a, presque, la même signification79(*).

Bien qu'il soit prévu par la majorité des règlements d'arbitrage80(*), ce mode d'arbitrage ne cesse de poser un problème de signification. Ainsi, Mr LOQUIN estime que la clause d'amiable composition signifie une renonciation au droit, obligeant les arbitres à se dégager du respect de tout droit positif, ou plutôt une renonciation conventionnelle aux effets de la règle de droit81(*). Pris en ce sens, L'amiable composition n'apparaît que comme « un phénomène d'éviction des règles de droit »82(*).

En revanche, d'autres auteurs estiment que, le plus souvent, les amiables compositeurs se sentent obligés de statuer selon le droit « parce qu'ils y voient une sorte de ratio scripta »83(*).

En conclusion, le respect du choix des parties, en appliquant, soit le contrat, soit la loi, soit l'équité, doit être guidé par la nécessité de réaliser l'équilibre entre l'attente légitime des parties et les intérêts supérieurs du commerce international.

B- La localisation du choix des parties :

La localisation aura un double sens :

D'une part, elle signifiera la recherche, par les arbitres, de la loi applicable en cas d'absence de choix des parties.

D'autre part, elle signifiera la prise en compte des règles et moeurs établies dans le domaine du commerce international.

1- La commission statue sur « la base des règles de lois ayant le plus de rapport avec l'objet du conflit », en cas d'absence de choix explicite ou implicite des parties. Cette disposition doit être clarifiée par détermination des "règles de lois" (a) et leurs rapports avec l'objet du conflit (b).

a- Que faut-il entendre par « règles de lois » ou règles juridiques ? Ce sont les règles substantielles ou les règles de conflit de lois ? Ou toutes les deux ?

La convention d'Amman se diffère de la loi type CNUDCI et du règlement CCI qui disposent, respectivement dans les articles 28.2 et 13.2, que les arbitres appliquent la loi désignée par la règle de conflit qu'ils jugent appropriée en l'espèce.

Si on donne aux « règles de lois » le sens de règles de conflit de lois, la commission aura un pouvoir moins étendu que celui accordé par les règlements CCI ou CNUDCI, conférant à l'arbitre le pouvoir de choisir la règle de conflit la plus appropriée et non celle ayant un rapport avec l'objet du litige.

En revanche, si on entend par « règles de lois », les règles substantielles, la commission aura un pouvoir plus opérationnel lui permettant de choisir la loi applicable sans passer par une règle de conflit.

Enfin, si on entend par "règles de lois" les règles de conflit de lois et les lois substantielles, la commission aura un large pouvoir qui consiste soit à choisir une loi désignée par une règle de conflit, soit à appliquer directement une loi substantielle.

L'application directe d'une loi matérielle est un système appelé le « système de voie directe ». Ce système suppose que « les parties ont implicitement laissée à l'arbitre international la liberté de choisir le droit matériel applicable soit par l'intermédiaire d'une règle de conflit de son choix soit même directement »84(*).

b- Que faut-il entendre par règles de lois « ayant le plus de rapports avec l'objet du conflit ». ?

On peut supposer qu'il s'agit du système optant pour la loi du lieu d'exécution, appliqué par plusieurs arbitres dans un grand nombre de sentences CCI85(*). Mais nous pensons qu'il serait mieux de dire que la commission doit observer une localisation objective, qui tient compte du rapport en cause, pour le localiser dans le pays offrant la meilleure solution pour la stabilité des relations entre les parties. La dernière jurisprudence française se rallie à la solution précédente dont un arrêt de principe de la Cour de Cassation86(*).

Cependant, cette localisation ne doit pas se limiter à la recherche d'une loi, elle doit prendre en considération, aussi, les règles et les moeurs établies dans le commerce international.

2- La commission, tout en appliquant la loi ou le droit, doit respecter les règles et moeurs établies dans le commerce international (Article 21.1).

Sur ce point, la convention d'Amman se diffère, aussi, des autres conventions et règlements d'arbitrage international87(*).

En premier lieu, les arbitres sont tenus de « respecter », et non « tenir compte », de ces règles. Faut-il en conclure que l'obligation est plus rigoureuse ? S'il en est ainsi, la convention d'Amman aura un sens plus évolué en la matière.

En second lieu, l'objet de ce respect sont « les règles et moeurs établies dans le commerce international » et non les usages de cette matière88(*). Si ces derniers peuvent être rapprochés aux « moeurs », leur identification aux « règles » peut poser des problèmes.

Nous espérons que la future pratique arbitrale du centre donne une clarification sur cette notion de « règles et moeurs » et, surtout, sur la portée de l'obligation faite à la commission de les respecter.

Dans ce cadre, Mr. FOUCHARD estime que « l'application par l'arbitre des usages de commerce international, s'impose toujours à l'arbitre, sans qu'il soit nécessaire que les parties dans leur convention, ou le Règlement arbitral, l'autorisent expressément »89(*).

Les enseignements de la pratique arbitrale peuvent nous être utiles. En effet, une certaine pratique prévoit que l'application de la lex mercatoria est possible, si le droit choisi par les parties, serait contraire à l'ordre public international ou lacunaire, ou s'il n'a pas été prouvé90(*). La plus récente pratique arbitrale se réfère aux usages et principes généraux de droit, si le choix des parties se trouve en contradiction avec le principe de bonne foi91(*). Ainsi, le rôle des arbitres est important dans la réalisation de l'équité à travers la solution qu'ils donnent au conflit. Ce rôle sera important, aussi, dans la réalisation de l'équilibre à travers la procédure.

* 69 - Sentences CCI n° 1512, JDI, 1974, p. 905 ; n° 2708, JDI, 1977, p. 943 ; n° 2694, JDI, 1978, p. 985 ; n° 3267, JDI, 1982, p. 960 ; n° 2119, JDI 1979, p. 997.

* 70 - J. Robert, L'arbitrage : Droit interne- Droit international privé, p. 279 et s.

* 71 - JM Jacquet, Principe d'autonomie et contrat international, p. 65 et s.

* 72 - H. Batiffol, Subjectivisme et objectivisme dans le droit international privé des contrats, mélanges offertes à Jacques Maury, p. 39 et s.

* 73 - Sentence CCI n° 1581, JDI, 1974, p. 887.

* 74 - Arrêt de la cour de cassation française du 21 juin 1950, RC, 1950, p. 611, Notes, Batiffol.

* 75 - B. Goldman, Frontières du droit et Lex mercatoria, annuaire de philosophie de droit, 1964, p. 117.

* 76 - JDI

* 77 - Y. Derains, L'ordre public et le droit applicable au fond du litige dans l'arbitrage international, RA, 1986, p. 390.

* 78 - Sentence CCI n° 1512, JDI, 1974, p. 904.

* 79 - E. Loquin, L'amiable composition en droit comparé et international : Contribution à l'étude de non droit dans l'arbitrage commercial, Paris, 1980.

* 80 - Les articles 28.3 de loi type CNUDCI et 13.4 règlement CCI, par exp.

* 81 - E. Loquin, Pouvoirs et devoirs de l'amiable compositeur : à propos de trois arrêts de la Cour d'appel de Paris, RA, 1985, p. 199 et s.

* 82 - Bredin, L'amiable compositeur et le contrat, RA, 1984, p. 259.

* 83 - R. David, op. cit, p. 464 et s.

* 84 - P. Lalive, Les règles de conflit de lois applicables au fond du litige par l'arbitre international siégeant en Suisse, RA, 1976, p176.

* 85 - Sentences n° 4132, JDI, 1983, p. 997 ; n° 2438, JDI 1976, p. 696.

* 86 - Cass. Civ, 25 Mars 1980, JDI, 1980, p. 680, notes de Ph. Kahn.

* 87 - Expl : article 28.4 de la loi type CNUDCI ou l'article 13.5 du règlement CCI.

* 88 - La traduction nous parait inappropriée. Le texte arabe parle de ÞæÇÚÏ ÇáÚÑÇ ÇáÏæáíÉ.

* 89 - Ph. Fouchard, op. cit, p. 413

* 90 - Sentences CCI n° 4761, JDI, 1987, p. 1009 ; n° 2991, JDI, 1976, p^. 973.

* 91 - Sentence CCI n° 5065, JDI, 1987, p. 1011 ; sentence CIRDI en 1984, JDI, 1986, p. 993, notes Gaillard.

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