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Concentration Coca-Cola et Orangina : Un projet à  bulles


par Aurelia
Université Paris XII - Maitrise de Droit Public Economique 1999
  

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2- L'APPLICATION DE L'ORDONNANCE DE 1986 OU L'ADMINISTRATION DE L'ECONOMIE AU NOM DE LA PRESERVATION D'UNE CONCURRENCE EFFECTIVE

Il s'agit bien du retour d'une économie administrée, mais d'un troisième type. L'ordonnance de 1986 sur la libéralisation des prix consacre l'empire de la liberté d'entreprendre et de concurrence. S'il est bien connu qu'un excès de liberté est par lui-même liberticide, il revient à l'Etat de souverainement arbitrer le terrain de jeu du marché, ou se confrontent l'offre et la demande. Reniant ainsi les thèses ultraliberales d'un équilibre spontané du marché (Hayek), ou d'une main invisible déterminant l'intérêt Général (A.Smith), l'Etat se doit d'intervenir pour compenser les lacunes du marché : il lui appartient de réguler les comportements pour préserver le libre fonctionnement de celui-ci(A). En effet, seul l'Etat dispose de cette force contraignante permettant de sanctionner les abus pour maintenir un équilibre optimal et redistribuer les ressources de façon équitable. Ce qui confère aux autorités économiques une certaine liberté d'appréciation, néanmoins subordonnée, comme le principe de légalité l'exige, au contrôle des décisions administratives. (B)

A- L'objectif d'une libre concurrence effective

Le conseil de la concurrence a émis un avis défavorable à la concentration car celle-ci aurait pour effet d'évincer Pepsi-Cola, le principal concurrent, du marché hors domicile.

Si le marché de la consommation à domicile via le circuit de la grande distribution n'est pas directement concerné, le conseil a néanmoins souligné l'existence d'un effet de contamination des atteintes à la concurrence relevées sur le marché du hors domicile : même si les bars et les machines ne représentent que 20% des ventes, ce marché est néanmoins très stratégique en tant qu'il façonne les nouvelles habitudes alimentaires. De plus, la position d'un petit commerçant est incomparable avec celle des grands distributeurs qui disposent d'un pouvoir de négociation important vis à vis des producteurs, ainsi que d'une surface de linéaire suffisamment importante pour proposer tous les produits (sans compter qu'il relève de leur intérêt de proposer un plus large choix possible à leur clientèle). Les commerçants, au contraire, ne disposent que de peu d'espace pour stocker et distribuer leurs produits. En s'approvisionnant, ils sont tenus de faire des choix entre les marques pour ne retenir en général que les plus renommées. Les titulaires de ces marques disposent ainsi d'un fort levier pour imposer la distribution de leurs autres produits.

En effet, les géants des boissons gazeuses ne produisent pas seulement des boissons au goût de cola, mais ont chacun à leur actif une gamme de 3 boissons différentes : Un cola, une boisson gazeuse à l'orange, et une limonade.

Les ministres ont estimé qu'avant la concentration, 2 ensembles complets de produits étaient proposés : le premier, offert par Coca-Cola, comprenait donc le Coca-Cola, plus une boisson à l'orange -Fanta-, plus encore une boisson gazeuse claire -Sprite- ; l'autre ensemble proposait, en raison d'un accord de distribution entre Pernod-Ricard et Pepsi-Cola, du pepsi-cola, de l'orangina et enfin de seven-up. En France, les 2 marques jouissant d'une grande réputation sont incontestablement Coca et Orangina. Les 2 concurrents s'affrontaient alors à armes égales, puisque chacun disposait d'un «produit phare ». Des lors, permettre l'acquisition d'orangina par Coca, revenait à priver la seule gamme concurrente (pepsi) d'une de ses composantes essentielles.

Estimant que cet effet de gamme ou de portefeuille constituait un atout essentiel, il revenait aux ministres d'éviter de rompre l'équilibre concurrentiel du marché -fait inévitable si l'on brise l'un des 2 ensembles de produits en réunissant Coca cola et orangina-. Compte tenu des barrières a l'entrée élevées qui caractérisent les marchés en cause, ces risques ont paru de nature à évincer Pepsi-Cola des marchés et à interdire à de nouveaux producteurs de s'y implanter. A titre significatif, schweppes a essaye de pénétrer le marché en 1989 en débloquant des frais de marketing dantesques, et enregistre aujourd'hui une baisse de 5%.

Ce à quoi Coca a opposé que Virgin parvenait très bien à se frayer une place au soleil, en lançant des produits tels que « virgin-pulp » ou « virgin-cola ». Mais l'on connaît la taille et la notoriété de cet investisseur...

Plus sérieusement, la requête de Coca-Cola a vigoureusement contesté la légitimité de l'utilisation de la notion d'effet de gamme ou de portefeuille en se plaçant sur 2 terrains :

Au plan théorique, la prise en compte de cet effet serait contradictoire avec la définition retenue du marché pertinent. Il est vrai que par ce raisonnement, les ministres prennent en compte des produits qui ne relevent pas du marché pertinent tel qu'il a été préalablement défini : l'effet de portefeuille implique de considérer la renommée du Coca-Cola, alors que le marché pertinent retenu n'englobe pas les boissons au goût de cola. Le Conseil d'Etat a néanmoins considéré que la contradiction n'était qu'apparente : reconnaître que le marché des boissons au goût de cola est distinct du marché des autres boissons gazeuses parce que les produits n'y sont pas substituantes n'empêche pas de relever que les 2 marchés demeurent voisins, et qu'il peut y avoir des interactions concurrentielles entre les 2. La notion d'effet de portefeuille permet au contraire de conceptualiser une vision pragmatique de la réalité des marchés. Si elle ne constitue pas une notion juridique consacrée par la loi ou le règlement, elle semble pouvoir être regardée comme un outil d'analyse adéquat, d'ailleurs reconnu en doctrine et régulièrement utilisé par les autorités de concurrence Européennes.

Au-delà de la contestation théorique s'ajoute la contestation de l'application concrète de la notion : Coca-Cola soutenant qu'elle ne disposerait pas de marques renommées au point d'entraîner un tel effet... Cela n'a pas convaincu : il suffit de constater qu'en l'état actuel du marché et des habitudes des consommateurs, la gamme des 3 produits est toujours homogène, qu'il s'agisse de la restauration rapide ou des fontaines automatiques. Coca cola, de même qu'orangina sont donc indubitablement des produits phares dont la notoriété est de nature a tirer la gamme dans laquelle ils s'insèrent.

Même si Pepsi ne détient pas Orangina et que la longévité de cet ensemble n'est pas certaine dans le long terme, le contrat qui les lie date de 1993, a été reconduit en 1996, avec des perspectives d'élargissement jusqu'en 2007. Coca-Cola réfute ici que les ministres confondent accord de distribution et propriété : ils raisonnent comme si Orangina appartenait à Pepsi, or Orangina appartient à Pernod-Ricard. Pour l'avocat, il n'y a aucun lien de causalité entre les soit-disantes difficultés de Pepsi et le rachat par Coca-Cola...

Toujours est il qu'au regard de la conjoncture actuelle du marché et de la présumée solidité de l'entente entre Pepsi et Orangina (d'ailleurs, dans la foulée de la signature du protocole d'accord entre Coca-Cola et Pernod-Ricard, le 19 décembre 1997, le PDG, le directeur juridique et le directeur des ressources humaines d'Orangina ont démissionné, se sentant trahis par Pernod-Ricard après avoir mené une longue bataille contre l'hégémonie de Coca-Cola) ; Les ministres ont donc pu légalement constater que le rachat d'orangina par Coca-Cola constituait une atteinte décisive a la concurrence au sens de l'ordonnance de 1986.

En dernier lieu, l'argument tenant au détournement de pouvoir des ministres dont la décision n'aurait eu pour seul but de protéger la position acquise de Pepsi sur le marché a été rejetée : En effet, les ministres n'ont agit que dans le seul but de préserver une concurrence effective, ce qui revient à évidemment préserver la survie de la seule gamme concurrente. Décision qui relève uniquement de leur pouvoir de contrôle des concentrations.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo