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L'interdiction de la fusion General Electric / Honeywell


par - Jan Wasilewski Aude Rousselot
Science Po
Traductions: en Original: fr Source:

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1.3.2. Des propositions insuffisantes

GE/H s'est rapidement déclaré surpris du niveau des exigences de la Commission, ne s'étant préparé qu'à présenter à nouveau le dossier constitué pour les instances américaine et canadienne. Une argumentation complète a donc dû être élaborée dans l'urgence par les 17 lawyers et lobbyistes du Cabinet Skadden, Arps, Slate, Meagher&Flom qui s'est chargé de compléter la ressource interne de GE (Department of Public Relations Services de GE dirigé par Joyce Hergenhan) pour ces négociations. (GE impose apparemment à H de mener seul la campagne de négociation, même si cette coalition est stable).

Ce retard au départ va finalement rester comme une forme permanente de «défense» de GE/H face aux demandes de la Commission et non une anticipation qui aurait sans doute été plus productive et moins exaspérée.

Le 29 mai 2001, toutes les parties prenantes se rencontrent à Bruxelles pour 2 jours d'auditions. Selon quelques observateurs, GE/H se fonde dans une contr'argumentation économique pour défendre sa position, contestant en particulier le bundling (effet portefeuille) en envoyant des experts économistes renommés (dont le Pr. Shapiro de Berkeley), ne pouvant nier les effets horizontaux de la fusion.

La Commission ayant maintenu son interprétation de l'effet portefeuille, J. Welch propose le 12 juin de vendre la branche aérospatiale d'Honeywell estimé à 2,2 milliards de dollars sans compter la branche de production de moteurs d'hélicoptères. C'est à cette époque que la question du GECAS émerge comme obstacle majeur, et J. Welch propose immédiatement d'en séparer les activités en une entité juridique indépendante de GE, - tout en restant opposé à la demande de M. Monti d'effectuer un transfert en bourse du capital du GECAS dont GE veut absolument rester propriétaire. C'est visiblement insuffisant face aux demandes de la Commission.

Après une semaine de négociations, J. Welch flanqué de sept assistants rencontre Monti deux fois dans la journée du 13 juin 2001 sans parvenir à trouver de compromis. Monti veut que GE vende 20% du GECAS à un concurrent, pour J. Welch c'est hors de question : il est soutenu dans son raisonnement par ses lawyers et économistes qui arguent que « it would bee like asking a Ford CEO to drive a Toyota for 20% of his time » (Barry Nalebuff, économiste de Yale). A cet instant de l'échec de la stratégie économiste, on sent que la fusion est sur le point d'être avortée.

Le 17 juin, date légale limite pour déposer des propositions, GE propose des concessions juridiques que la Commission juge inadéquates et insuffisantes, notamment en l'absence de propositions sur le GECAS. Cette fois Monti exige la cession de la totalité des activités avioniques, qui représentent 3,6 milliards de dollars de chiffre d'affaire et la moitié des bénéfices de Honeywell.

Le 27 juin 2001, soit 2 semaines après la date limite légale pour déposer des propositions, GE propose encore de nouvelles concessions juridiques très précises pour se détacher progressivement de GECAS et au profit d'actionnaires choisis, que la Commission accepte d'examiner mais finit par déclarer comme toujours insuffisantes.

Durant toute cette période, J. Welch et M. Bonsignore contestent médiatiquement l'analyse et les conclusions de la Commission sur la théorie du portefeuille, dénoncent l'instabilité (réelle) et la croissance (réelle) des exigences de la Commission5(*), et sa partialité : le 14 juin GE émet ainsi un communiqué de presse qui suppose que la véritable raison de l'opposition à la fusion est la défense des intérêts des entreprises européennes.

> Les négociations ont donc été laborieuses, et les positions inconciliables ; le rejet technique était inévitable, et il est intervenu le 3 juillet 2001 lors d'un vote en session plénière de la Commission.

A l'issue de l'examen de cette partie juridique de l'interdiction de la fusion, où le compromis n'a pu être trouvé entre la Commission et GE/H sur les questions d'antitrust malgré une stratégie juridique et économiste importante, on peut s'interroger sur cette atmosphère en dérive progressive qui semble avoir été l'arrière-plan de ces négociations difficiles. On peut y lire toute la stratégie politique de GE/H, et les probables raisons de son échec retentissant.

* 5 Ces demandes successives et contradictoires ont d'ailleurs déclenché la colère de Wall Street et du Wall Street Journal

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