WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

L'autorité de la norme constitutionnelle au Cameroun

( Télécharger le fichier original )
par Etienne KENFACK TEMFACK
Université de Douala-Cameroun - D.E.A. de droit public 2005
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

PARAGRAPHE 1 : UNE DUALITE SUR LE PLAN DE LA THEORIE DU DROIT CONSTITUTIONNEL

La dualité du pouvoir constituant est affirmée autant par la doctrine que par la jurisprudence. Mais elle n'implique pas les mêmes conséquences selon que l'on se place du côté du juge ou de celui des auteurs. C'est cette divergence, qui peut de même être établie au sein de la doctrine qui nous autorise à penser que la distinction constituant originaire -constituant institué (I) et les incidences qui s'attachent à celle-ci (II) ne revêtent plus désormais qu'une simple valeur explicative, n'étant séparés que par le temps.

I - LA VALEUR EXPLICATIVE DE LA DISTINCTION CONSTITUANT ORIGINAIRE -CONSTITUANT INSTITUE

L'indivisibilité de la souveraineté ne permet pas d'envisager qu'un autre pouvoir puisse avoir une compétence en matière constitutionnelle. (9) La suprématie de la norme fondamentale repose en effet sur son élaboration par un pouvoir qui n'est soumis à aucun contrôle, un pouvoir souverain. Sous ce rapport, l'on ne peut que s'interroger sur la division de ce pouvoir en "originaire" et "dérivé". L'interrogation est d'autant plus pertinente que toutes les Constitutions camerounaises ont posé que "la souveraineté nationale appartient au peuple" Elle justifie ainsi non seulement qu'aucune fraction du peuple ni aucun individu ne puisse s'en attribuer l'exercice, mais encore que toute autorité émane de la nation souveraine. Or comme le précise Carré de Malberg, en reposant la souveraineté sur la nation l'on admet qu'il n'y a qu'une volonté. Sous ce postulat, la distinction constituant originaire - constituant dérivé, qui apparaît comme un moyen de distinguer l'élaboration de la modification de la Constitution (A) permet surtout de reconnaître les titulaires de ces deux pouvoirs (B).

dans ce sens. Dictionnaire constitutionnel, p 777.

9 Le peuple étant le seul souverain, toute autre autorité dans l'Etat ou de l'Etat ne peut réclamer pour lui le bénéfice de ce pouvoir, à moins de le tenir du peuple lui-même. Il faut en effet préciser que si le peuple est souverain, il exerce cependant cette souveraineté plus par intermédiaire que directement. Mais cette "délégation" ne constitue pas une dépossession car la souveraineté est inaliénable et imprescriptible, une et indivisible. Et comme seul le souverain est compétent en matière constitutionnelle, il s'ensuit que la qualité d'intermédiaire des autorités de l'Etat leur attribue compétence pour réviser la Constitution.

A) Le pouvoir d'élaborer et de modifier la norme constitutionnelle

Symbolique, solennelle, l'élaboration d'une Constitution est un moment privilégié dans toute société politique. Elle marque le passage d'une organisation sociale au stade le plus achevé que l'on puisse concevoir : l'Etat. Qu'elle intervienne dans une situation de "vide juridique" ou après une Révolution, la manifestation d'un pouvoir originaire atteste de la naissance d'un nouvel Etat (1). Dans cette oeuvre de structuration de la société, ce qui est définitif est l'Etat. En effet la dynamique de l'idée de société qui a prévalu à la rédaction de la Constitution initiale implique nécessairement qu'à un moment, certaines modifications de la loi fondamentale s'imposent. Celles-ci se feront par la mise en oeuvre d'un pouvoir constituant institué (2).

1- Un pouvoir initial pour fonder l'Etat

Le droit constitutionnel est construit sur des fictions. Souveraineté, Etat, pouvoir constituant ne sont en réalité que des produits d'une construction intellectuelle. Des notions juridiques destinées à produire des effets. L'Etat est une fiction dont l'existence ne peut être prouvée qu'au moyen de sa Constitution (10). C'est ainsi que la Constitution du 04 mars 1960 donnera naissance à l'Etat du Cameroun, qui n'était alors qu'un territoire sous tutelle. Le caractère fondateur de la Constitution réalise l'unanimité au sein de la doctrine. La Constitution crée l'Etat par le mécanisme de l'institutionnalisation du pouvoir. Elle lui donne une forme précise, et l'on peut alors affirmer qu'il s'agit d'un Etat unitaire ou d'un Etat fédéral; d'un régime présidentiel ou d'un régime parlementaire. Sous ces considérations, la succession d'un Etat fédéral à un Etat unitaire en 1961 rentre dans la situation normale de la manifestation d'un pouvoir originaire, car comme le précise Pierre Pactet, "un réaménagement important de la Constitution marquant par exemple le passage d'un Etat unitaire à un Etat fédéral peut être considéré comme l'écriture d'une nouvelle Constitution". (11) Le pouvoir constituant originaire est donc le pouvoir qui pose les fondations de l'Etat par l'élaboration d'une Constitution.

2- Un pouvoir institué pour restructurer l'Etat

L'élaboration d'une Constitution n'est pas une fin en soit. L'évolution de l'idée de société qui a prévalu à son adoption rend impératif certains ajustements afin qu'elle ne tombe

10 l'Etat est une organisation sociale qui n'existe que par la Constitution. L'accord est unanime sur la nature fondatrice de la Constitution, car seule elle donne une forme à une société où généralement le pouvoir est personnalisé. Pour J.P. Jacqué, "toute société comporte un corps de règles écrites ou non destinées à fixer les modalités d'acquisition et d'exercice du pouvoir politique. Ces règles constituent la Constitution

11 P. Pactet, Institutions politiques. Droit constitutionnel, op cit p 74.

pas en désuétude. Le caractère perfectible de la Constitution vient surtout de ce qu'il est prévu en son sein même une procédure pour sa modification. Toutes les Constitutions camerounaises depuis 1960 ont toujours réservé un titre consacré à la révision de la Constitution. Cette entreprise ressortit de la compétence du pouvoir constituant institué ou dérivé, dans la matérialisation de l'idée avancée par Royer-Collard pour qui "les Constitutions ne sont pas des tentes dressées pour le sommeil. "(12) La mise en oeuvre d'un pouvoir constituant dérivé répond donc à une nécessité: celle de rendre le "pacte fondamental" en conformité avec l'évolution de la société. C'est du moins le principe de la révision.

B) La détermination des titulaires

L'identification de ceux ou celles qui mettent en oeuvre soit le pouvoir originaire, soit le pouvoir dérivé repose plus sur une observation des faits que sur une réflexion prenant appui sur les textes. Le droit constitutionnel camerounais offre des éléments d'analyse qui tantôt confortent la théorie constitutionnelle, tantôt la contredisent. Il ressort de cela que l'identification des titulaires du pouvoir constituant qui repose sur un principe (1), pose en réalité le problème du titulaire de la souveraineté et de celui qui l'exerce effectivement (2).

1- Une identification de principe

La détermination de ceux qui mettent en oeuvre le pouvoir constituant sur le strict terrain de la théorie constitutionnelle n'est concevable que par l'affirmation d'un principe. Pour D. Georges Lavroff, "le pouvoir constituant est reparti entre le peuple et ses représentants. Le peuple en est le titulaire principal et les représentants interviennent à titre secondaire."(13) II résulte de cela que te pouvoir constituant, qu'il soit originaire ou dérivé, à pour titulaires le peuple et ses représentants. Ce principe est consacré au Cameroun par les référendums constituants de 1960 et de 1972 et par les "révisions" de 1961 et de 1996. Il ressort un chasse-croisé entre le peuple et ses représentants, dans une sorte de "construction - déconstruction" de la règle de droit suprême. Cependant, il convient de noter que les révisions constitutionnelles que le Cameroun a connues jusqu'à présent ont été ratifiées par les représentants du peuple. Il semble donc que le droit constitutionnel camerounais consacre une sorte de "distribution" du pouvoir constituant : le peuple comme constituant originaire uniquement et ses représentants comme constituant institué(14)

12 Royer-Collard, cité par J. Gicquel, Droit constitutionnel et institutions politiques, op cit. p 171.

13 D.G. Lavroff, Droit constitutionnel de la Vè République, Dalioz, 2*°" éd. 1997.

14 Sous le strict plan de la procédure, il est aisé de reconnaître que le peuple camerounais est toujours intervenu chaque fois qu'il s'est agit pour les autorités de l'Etat d'établir une nouvelle Constitution, et donc de poser les bases d'un nouvel Etat. Les référendums constituants de 1960 et de 1972 s'opposent ainsi aux multiples recours au pouvoir de révision, et parfois pour ratifier une nouvelle Constitution qui pour ses concepteurs n'est qu'une loi constitutionnelle.

2- La problématique de la détention et de l'exercice du pouvoir constituant

Elle est posée par Pierre Pactet qui souligne que le véritable problème n'est pas de savoir à qui appartient le pouvoir constituant, mais plutôt qui l'exercera. Le postulat posé par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen est repris par les différentes Constitutions camerounaises qui disposent que "la souveraineté nationale appartient au peuple camerounais..." Il résulte de là que, conformément à l'idéal démocratique, le souverain et par corollaire le pouvoir constituant c'est le peuple camerounais. Il n'apparaît pas pourtant au regard du droit constitutionnel camerounais que le peuple soit la "sanction obligatoire de la Constitution." On pourrait plutôt noter une prégnance de la notion de "représentation" corollaire de la souveraineté nationale dans l'identification de celui qui décide de "l'exception". Certes le peuple est souverain, mais l'exercice de cette souveraineté se fait par "l'intermédiaire (...) des membres du Parlement... "(15) II s'ensuit une différenciation entre le détenteur de la souveraineté et celui qui l'exerce effectivement.

Cependant la distinction pouvoir constituant originaire - pouvoir constituant dérivé n'est pas à proprement parler une identification entre celui qui exerce la souveraineté et celui qui en est le détenteur. Car le recours au peuple est prévu par les Constitutions camerounaises comme mode de ratification d'une loi de révision. Cette distinction à de fortes incidences sur le pouvoir de modification de la norme suprême.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Tu supportes des injustices; Consoles-toi, le vrai malheur est d'en faire"   Démocrite