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Typologie des systèmes d'élevage laitier au Maroc en vue d'une analyse de leurs performances

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par Mohamed Taher Sraà¯ri
Faculté universitaire des Sciences agronomiques de Gembloux, Belgique - Doctorat en Sciences agronomiques et Ingénierie biologique 2004
  

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III-3-3-c Les stratégies des éleveurs : l'analyse des cas types

Les enquêtes approfondies menées auprès de quelques éleveurs représentatifs de chaque type nous ont donc permis de dessiner sept « profils » qualifiés de « cas - types ». Pour chacun d'eux, nous expliciterons les enjeux et les objectifs au travers de quelques indicateurs, notamment économiques. Les bénéfices dégagés par vache sont calculés par différence entre les produits bruts et la somme des charges opérationnelles, frais d'irrigation et salariat compris2(*). Le tableau 20 résume ces différents points.

Le cas type GL (grand troupeau laitier) est une exploitation privée de 20 ha, avec un élevage de 74 vaches laitières de type Holstein (le propriétaire engage par ailleurs des investissements dans d'autres unités agricoles spéculatives telles que bananes, fraises, avocats...). La main-d'oeuvre est exclusivement salariée (9 travailleurs permanents). L'exploitation dispose d'importants investissements en bâtiments et en ateliers relatifs à une conduite intensive du cheptel (salle de traite, annexes de stockage...). L'exploitant recherche une forte productivité. Il applique l'insémination artificielle (IA) dans la mesure du possible mais, par sécurité, s'assure le concours d'un bon taureau. Toute la SAU est réservée aux cultures fourragères. L'assolement comprend une culture associée de lupin et triticale, suivie d'un maïs d'été. Ces fourrages se conservent facilement en ensilage, assurant une couverture en fourrages pour le cheptel toute l'année. Le rationnement des vaches laitières est calculé en fonction de leur niveau de lactation, ce qui n'est pas fréquent. Les vaches sont conduites en trois lots : les hautes, moyennes et faibles productrices. Les concentrés sont tous achetés de l'extérieur. Leur part dans le rationnement est élevée (64 % de la MS ingérée), soit 14 kg/jour/pour une vache laitière produisant plus de 20 kg de lait/jour. Il est vrai que le chargement animal, près de 4 VL par ha de SFP, impose cette pratique. Le bénéfice par vache est de 4 228 DH, soit environ 420 €, le lait représentant 75 % des recettes totales de l'élevage. Le propriétaire étant par nécessité un absentéiste, le problème essentiel est lié à la technicité des ouvriers et du gérant. L'avenir de ces unités étant très lié à leur rentabilité, elles sont menacées de disparaître car la conjoncture ne leur est pas favorable : stagnation du prix du lait, intrants coûteux, blocage des importations de génisses.

Le cas type PL (petit troupeau laitier spécialisé) est constitué d'une exploitation de 10 vaches laitières reposant sur 3 ha loués au domaine de l'Etat. La production est de 5 220 kg de lait par lactation. L'exploitation est entre les mains d'un « jeune promoteur » qui, faute de trouver du travail diplômé dans d'autres secteurs d'activités, s'est lancé dans l'élevage laitier. La présence de salariés permanents est systématique, le promoteur s'occupant beaucoup plus des aspects d'approvisionnement et de gestion technique de l'étable. Toute la SAU est réservée aux cultures fourragères. Leur conduite est intensive afin de combiner un maximum de rendement pour l'affouragement en vert (bersim) et le stockage sous forme d'ensilage (maïs). Les vaches sont toutes d'origine Prim'Holstein, importées par l'intermédiaire d'une usine laitière. Ce choix représente un gros investissement pour l'éleveur, (170 000 DH à rembourser) assuré à la fois par un prêt à court terme consenti par l'usine (remboursement par déduction sur le paiement du lait) et par endettement personnel (prêts familiaux). L'éleveur mesure la production régulièrement afin d'ajuster les rations. Celles ci sont calculées par ses soins après information et même formation auprès de voisins (type GL). C'est le seul groupe où de réelles demandes techniques sont réclamées. Le lait constitue près de 72 % des recettes globales d'élevage. Cependant, l'exploitation continue d'être sévèrement endettée, ce qui interdit tout investissement complémentaire (élevage de taurillons). De plus, elle repose sur des facteurs de production aléatoires (notamment foncier avec la location du terrain).

Le cas type PLP est illustré par une exploitation de 45 ha de SAU, avec 20 vaches laitières, produisant chacune 2 800 kg de lait. Sur les 5 ha de SFP irrigables, on trouve une rotation bersim - maïs grain, menée sans grande technicité. L'objectif de l'éleveur est de privilégier les cultures de rente irriguées, ce qui fait que la SFP n'occupe que 11 % de la SAU. Le cheptel bovin laitier est issu à l'origine de génisses d'importation, remplacées progressivement par les produits nés sur place en utilisant l'IA, avant l'arrêt récent de ce service. L'alimentation est basée sur une succession de fourrages en vert ou ensilé mais aussi sur tous les résidus de cultures (collets de betteraves) les adventices de toutes les cultures de rente et le pâturage des chaumes de céréales. Les aliments concentrés sont distribués durant toute la lactation des vaches. La quantité de concentrés et les proportions du mélange restent identiques quels que soient les fourrages distribués. La culture de betteraves permet d'avoir accès à de la pulpe à prix réduit (0,90 DH/kg). La paille est un produit spéculatif sur ces exploitations et on l'utilise au minimum afin d'en vendre le plus possible. Sur place, elle est donnée broyée avec les concentrés et très peu utilisée en litière. Le bénéfice est de 3 844 DH par vache. Le lait n'assure plus que 54 % des recettes d'élevage car ces éleveurs accordent une certaine importance à l'engraissement des mâles sans en faire une priorité. La complémentarité entre élevage et culture, par les flux qu'elle permet, est ici à son optimum.

Le cas type PLS, très largement représenté dans la zone, correspond au profil d'une exploitation traditionnelle à faible technicité de 4,0 ha, de type familial (famille nombreuse, plus de dix personnes), disposant d'une moto pompe et pratiquant un système de polyculture - élevage sur des collectifs partagés (2,5 ha de blé, 0,5 ha de maraîchage et 1 ha de cultures fourragères). L'élevage bovin y est représenté par 3 vaches laitières croisées. La saillie est assurée par un taureau croisé choisi pour sa bonne conformation et non pour ses antécédents laitiers supposés. L'alimentation s'appuie sur les cultures fourragères, mais les résidus des cultures maraîchères et du désherbage sont distribués au fur et à mesure de leur récolte. Deux phases de transition sont critiques pour l'alimentation du cheptel, (i) entre la culture du bersim et la culture du maïs (de fin mai à juillet) où l'apport en aliments grossiers se fait par la pâture des chaumes de blé, de résidus maraîchers et par la vaine pâture sur les bas côtés des routes, et (ii) entre le maïs et le bersim. (de fin septembre à début décembre) où l'alimentation est assurée essentiellement par la paille et par des résidus divers. Les concentrés sont distribués seulement pendant ces deux phases de transition afin de freiner l'amaigrissement des vaches. La quantité est estimée à 200 kg par VL d'un mélange de pulpe déshydratée de betterave et de son de blé. Ce type d'alimentation n'est pas adapté aux exigences quantitatives et qualitatives liées à la production laitière qui chute fortement lors des phases de transition. La production laitière par vache est de 750 kg par lactation, soit à peu près 500 kg par an, avec un intervalle entre vêlage estimé à 18 mois. Le bénéfice dégagé par ce type d'élevage est de 2 075 DH par vache. Le lait, vendu à des colporteurs, ne représente plus que 37 % des recettes, la préférence allant au veau (sevrage tardif, deux quartiers étant réservés à l'allaitement), puis à l'engraissement des génisses et des taurillons. La contrainte en trésorerie impose souvent des ventes hâtives de bovins, décidées à contrecoeur.

Le cas-type RBLS ou « riz-bersim » est un système de polyculture-élevage, décrit par une exploitation reposant sur un lot de 5 ha appartenant à une coopérative de la réforme agraire. Ces exploitations sont tenues de cultiver du riz, étant donné la nature hydromorphe des sols, la sole fourragère s'insère idéalement en dérobé par rapport au cycle du riz (de mai à octobre). A partir du mois de novembre les terres sont semées en blé pour la moitié de la surface et en bersim pour l'autre. L'origine du troupeau est composite avec des vaches croisées et des vaches Pie Noires importées par l'intermédiaire des centres de collecte du lait. La conduite des deux types génétiques étant la même, le potentiel Pie Noire est sous exploité. L'alimentation est typique de ce système : du bersim à volonté pendant six mois, de la paille et des concentrés les six autres mois. La flambée des prix de la paille après une année de sécheresse a obligé l'éleveur à acheter une coupe de bersim dans l'attente de sa propre récolte. Le foin, malgré sa faible qualité, se développe aussi dans ce but, alors que les essais de vulgarisation de l'ensilage du bersim n'ont pas porté leurs fruits (coût trop important, conservation difficile en raison de la teneur en eau proche de 90 %). Le bénéfice n'est que de 2 055 DH par vache. Seuls 34 % des recettes proviennent du lait.

Le cas type GA correspond à un éleveur du type allaitant. Le cheptel bovin est constitué de 50 vaches de race locale (250 kg de poids vif, 450 kg de lait dont 200 à 250 sont traits). L'exploitation est de type familial et repose sur une SAU de 10 ha. Aucune culture fourragère n'est pratiquée, et le troupeau est essentiellement nourri sur parcours forestier, vaine pâture et sur chaumes et jachères. Les vaches prêtes à vêler ou remises en état pâturent les parcelles privées de proximité, mais en général, les zones de pâturage sont éloignées des lieux d'habitation (10 jusqu'à 50 km) et un des membres de la famille est mobilisé pour assurer le gardiennage du troupeau. Les vaches qui mettent bas ne sont traites sur place que durant les deux premières semaines et rejoignent ensuite le troupeau principal. Le lait qui n'est pas autoconsommé par la famille est livré aux centres de collecte et non aux colporteurs peu intéressés par ces producteurs occasionnels. L'orientation de ce système est ainsi complètement tournée vers la viande (93 % des recettes). Les charges sont réduites au minimum pour les animaux, et le bénéfice par vache est faible, de l'ordre de 890 DH, mais la forte taille du troupeau permet de dégager un revenu correct pour la famille.

Le dernier cas-type, ST, est celui des paysans « sans-terre ». L'exploitation agricole, issue de morcellements successifs suite aux héritages, est fortement exportatrice de main-d'oeuvre mais élève quelques vaches sur des terrains de proximité. Le troupeau est constitué de 4 vaches dont l'alimentation est totalement basée sur des ressources gratuites. Un enfant non scolarisé se consacre totalement à la tâche de leur trouver un lieu de pacage entre pâturage en forêt et chaumes accordés par d'autres agriculteurs. Si le pâturage ne suffit pas, les femmes vont ramasser des herbes en forêt ou sur le bas côté des routes qui seront distribuées le soir au troupeau. Aucun achat extérieur de fourrages, de paille ou de concentrés n'est prévu pour le troupeau sauf pour les cas exceptionnels (maladie). Les années de très fortes sécheresses, quand les parcours sont improductifs, le troupeau est vendu. Bien que les vaches soient traites pendant les deux à trois premiers mois de lactation, le lait est en totalité utilisé pour les besoins de la famille. Le bénéfice obtenu est de 1 684 DH par vache, la part du lait produit est insignifiante (3 %).

* 2 le coût des fourrages est basé sur les prix de revient de production, la paille et les concentrés sont comptés au prix d'achat, la main d'oeuvre familiale est gratuite. Le lait trait auto consommé par la famille est comptabilisé dans les produits.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle