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Le principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables

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par Moussa TRAORE
Université Gaston Berger de Saint Louis du Sénégal - Maà®trise 2008
  

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Chapitre premier : La séparation des fonctions

La séparation des ordonnateurs et des comptables implique avant tout une séparation des tâches qui leur sont confiées. Il y a donc une division rationnelle du travail qui découle du principe et qui voudrait que chacun de ces deux acteurs assure en ce qui le concerne toutes les tâches et seulement les tâches qui lui seront dévolues dans le cadre de l'exécution du budget. C'est dans cette perspective que l'ordonnateur va être chargé de prescrire l'exécution du budget (Section I), pendant que le comptable se livre à des opérations telles que la conservation des valeurs, la gestion de la trésorerie, la tenue de la comptabilité, bref il lui revient la charge de manier les fonds (Section II).

Section première : La prescription de l'exécution du budget par
l'ordonnateur

C'est la phase administrative de l'exécution du budget. Elle relève exclusivement de l'ordonnateur et comporte des tâches variées selon qu'il s'agit des dépenses (I) ou des recettes (II).

§ 1 . Les opérations de dépenses

Ces opérations peuvent être décomposées en trois phases : l'engagement de la dépense (A), la liquidation (B) et l'ordonnancement ou le mandatement (C).

A - L'engagement de la dépense

Suivant l'article 88 du décret 2003-101 portant RGCP, « l'engagement est l'acte par lequel l'Etat ou un autre organisme public crée ou constate à son encontre une obligation de laquelle résultera une charge. ». Il faut cependant préciser que la notion d'engagement recouvre deux significations : d'une part l'engagement juridique qui est le fait générateur de la dépense et qui peut résulter d'un acte juridique (arrêté, marché ou contrat) ou encore de faits extérieurs à tout acte de volonté (dommages causés par un organisme public), et d'autre part l'engagement comptable qui est l'imputation par l'ordonnateur, sur les crédits budgétaires dont il dispose, des fonds nécessaires à la

réalisation de la dépense décidée. Dés lors, cette somme ne peut plus être affectée à un autre usage. Comme le souligne monsieur Mamadou DIOP8, « c'est l'acte qui rend l'Etat débiteur (commande de fournitures ou passation d'un marché, décret de nomination etc.) ». L'engagement comptable est donc l'affectation d'une partie des crédits budgétaires à la réalisation de la dépense qui résulte de l'engagement juridique. En d'autres termes, l'engagement comptable doit toujours précéder l'engagement juridique dans la mesure où les engagements de dépenses sont limités soit au montant des crédits, soit au montant des autorisations de programme inscrites au budget. Cette opération préalable va permettre de s'assurer de la disponibilité des crédits avant de procéder à la signature d'un quelconque engagement juridique.

L'engagement peut être spécifique (contrat, marché) ou permanent (règlement mensuel des dépenses de personnels ou encore paiement des annuités d'emprunt). Les actes d'engagement de la dépense sont soumis à un contrôle financier (contrôle de régularité budgétaire et juridique de la dépense). La régularité de l'engagement entraîne une apposition du visa du contrôleur financier. Par contre lorsque l'engagement est irrégulier, le visa fait défaut, ce qui empêche la poursuite de l'opération de dépense.

La phase d'engagement est caractérisée par la liberté qui est accordée à l'ordonnateur dans la prise de sa décision mais toujours à l'avenant des prévisions budgétaires et des textes.

Il faut enfin noter que l'engagement doit prendre la forme d'un document écrit et être établi en trois exemplaires : un exemplaire pour le fournisseur ou l'entrepreneur, un autre pour l'ordonnateur et un troisième conservé dans les archives de l'agent comptable.

En somme, il faut dire que l'engagement est le point de départ de l'opération de dépenses. C'est donc une étape essentielle dans laquelle il est procédé à l'affectation des crédits ou moyens financiers indispensables à la dépense. Mais comme on l'a souligné, l'engagement n'est que l'entame d'un processus qui se poursuit avec d'autres opérations dont la liquidation.

B - La liquidation de la dépense

L'article 93 du décret 2003-101 la définit comme suit : « l'opération qui consiste à
constater et à arrêter les droits du créancier
». En termes clairs, sa finalité est de vérifier

8 Mamadou DIOP, op. cit. p. 101

la réalité de la dette et de fixer le montant ou la hauteur de la dépense. Elle renferme deux éléments : la vérification du service fait et la liquidation proprement dite.

La règle du service fait a été instituée par l'ordonnance française du 14 septembre 1822. Elle consiste à vérifier la réalité de la dette. L'ordonnateur ne devra procéder au calcul d'une créance (ce qui ouvre droit à son paiement ultérieur) que si le créancier a effectué la prestation justifiant sa rémunération. Cette opération présente l'avantage d'empêcher à l'Etat de payer un service qui n'a pas été effectué ou qui a été effectué mais pas conformément aux clauses d'un contrat. C'est donc une garantie pour l'Etat. La personne responsable du marché doit à cet effet fournir des titres et des pièces justificatives permettant d'attester le service fait. Cette étape doit aboutir à une certification de service fait dressée par l'ordonnateur à l'intention de l'agent comptable sur la base d'une facture ou de tout autre document ad hoc.

La liquidation proprement dite ou le calcul des éléments comptables de la facture renvoie au calcul du montant de la dette. L'ordonnateur doit à cet effet vérifier si la dette n'est pas totalement ou en partie éteinte du fait de la prescription ou encore par l'intermédiaire d'un paiement antérieur. En effet des acomptes ou avances peuvent être consentis par l'Etat à des entreprises qui effectuent des travaux pour son compte.

En définitive, il faut dire que c'est dans cette seconde étape de l'exécution administrative des dépenses que la dette devient liquide (fixation du montant exact en argent)9. C'est donc une étape fondamentale avant l'intervention de l'ordonnancement.

C - L'ordonnancement ou le mandatement de la dépense

Aux termes de l'article 99 du RGCP du Sénégal, « L'ordonnancement est l'acte administratif par lequel, conformément à la liquidation, l'ordre est donné au comptable de payer la dette de l'Etat ou celle des autres organismes publics ». C'est donc l'ordre de payer adressé par l'ordonnateur au comptable. Il se traduit par une ordonnance de paiement quand il s'agit d'un ordonnateur principal et par un mandat de paiement s'il s'agit d'un ordonnateur secondaire ou d'un ordonnateur principal d'une personne publique autre que l'Etat. A quelques exceptions près (procédures de paiement sans ordonnancement préalable, paiement par les régisseurs), aucune dépense ne peut être

9 cf. Maurice DUVERGER, Finances publiques, 7e éd., PUF, 1971 p. 315

acquittée à moins d'être a priori ordonnancée. Cette opération est matérialisée par l'établissement d'un ordre général de paiement. La décision d'ordonnancement est un acte qui relève du pouvoir discrétionnaire de l'ordonnateur. Cela n'empêche que le Conseil d'Etat, dans deux de ses décisions10 avait admis la possibilité d'intenter un recours pour excès de pouvoir contre le refus d'ordonnancement.

L'ordonnancement ou le mandatement répond à des exigences qui sont au nombre de trois :

1. intervention de l'ordonnateur dans la limite des crédits budgétaires autorisés (il doit énoncer l'exercice, le chapitre et s'il y a lieu, l'article auquel se rapporte la dépense) ;

2. soumission avant signature au visa du contrôleur financier ;

3. respect des dispositions légales et réglementaires et transfert au comptable des pièces lui permettant de vérifier la régularité de la dépense lors du paiement.

Il faut cependant noter que pour certaines dépenses, cette troisième phase ne représente pas une étape obligatoire. Ceci est la plupart du temps dû au caractère répétitif de ces dépenses.

L'ordonnancement est donc une étape très importante qui marque la fin de la phase

administrative et la transition vers la phase comptable de l'exécution des dépenses.

En définitive, on peut affirmer que les compétences de l'ordonnateur dans le cadre de l'exécution des dépenses sont réductibles à ces trois opérations. Il convient maintenant de s'intéresser à ses attributions en matière de recettes.

§ 2 . Les opérations de recettes

L'exécution administrative des recettes recouvre deux opérations principales : il y a d'abord l'établissement des recettes (A), et ensuite la mise en recouvrement (B).

A - L'établissement des recettes

C'est une opération qui se réalise en deux temps : d'un côté nous avons la constatation
des droits, et de l'autre la liquidation. C'est ce qui ressort de l'article 41 du décret 2003-

10 CE, Section, 4 février 1949, Villaret (Rec. Page 52). CE, Ass. , 24 janvier 1961 Médard (Rec. Page 141).

101 portant RGCP qui dispose : « Dans les conditions prévues pour chacune d'entre elles, les recettes sont constatées et liquidées avant d'être prises en charge et recouvrées ».

S'agissant tout d'abord de la constatation des droits, il faut dire que c'est le fait générateur de la créance publique. On pourrait donc l'assimiler à la phase d'engagement dans le cadre de l'exécution des dépenses. Concernant les recettes fiscales, cela se matérialise par l'existence d'une matière imposable ainsi que des lois et règlements qui justifient ou permettent la soumission de contribuables à l'impôt. La créance publique peut aussi avoir des origines non fiscales, c'est soit une infraction entraînant une amende, soit la condamnation pécuniaire d'une personne physique ou morale, soit encore la conclusion d'un contrat. Une fois ce travail fait, l'ordonnateur détermine la valeur exacte de la créance.

Pour ce qui est donc de la liquidation, comme dans le cadre des dépenses, elle permet de calculer le montant de la recette ; en clair, elle détermine la hauteur de la dette des redevables. Concrètement, on devrait arriver à la somme due à partir de la base d'imposition et par l'application de barèmes ou tarifs. Elle donne lieu à l'établissement d'un titre de perception (qui a valeur de régularisation pour les recettes encaissées au comptant ou sur versement spontanée des redevables).

L'établissement des recettes est donc un préalable au recouvrement qui permet de parvenir à la maîtrise de la valeur exacte de la créance de l'Etat.

La fin de l'exécution de cette opération va mener à la dernière étape de l'exécution administrative des recettes que constitue la mise en recouvrement.

B - La mise en recouvrement

Elle est matérialisée par la mise sur pied d'un titre de recettes et l'inscription sur un bordereau récapitulatif aux fins d'enregistrement dans la comptabilité administrative. La créance constatée et liquidée doit faire l'objet d'un ordre de recettes constitué :

- soit par un extrait de décision de justice ;

- soit par un acte formant titre ;

- soit par un arrêté de débet ;

- soit par un titre de perception.

L'ordonnateur dispose d'une compétence exclusive en matière d'émission d'ordre de recettes, exception faite de la décision de justice. Les créances d'une collectivité locale émanant d'une décision de justice imposent à l'ordonnateur une intervention dans les deux mois. En cas de défaillance, le représentant de l'Etat dispose d'un pouvoir de recouvrement d'office. Le bordereau va ensuite être envoyé au comptable avec toutes les pièces justificatives.

La mise en recouvrement met fin au rôle de l'ordonnateur11 dans l'exécution des recettes.

Il faut reconnaître que c'est dans l'exécution administrative du budget que se prennent les décisions d'effectuer telle dépense ou de recouvrer telle recette. C'est donc une phase incontournable qui, comme nous l'avons souligné dans nos développements, fait ressortir une certaine autonomie de l'ordonnateur dans ses choix.

Cependant les pouvoirs de ce dernier ne vont pas jusqu'à la conservation des valeurs ou

encore la gestion de la trésorerie, ce qui justifie l'intervention d'un agent comptable.

Section II : Le maniement des fonds par le comptable

C'est la phase comptable de l'exécution du budget. L'ensemble des opérations auxquelles le comptable se livre se ramène à deux éléments : le paiement des dépenses (I) et le recouvrement des recettes (II).

§ 1 . Le paiement des dépenses

Le paiement est l'acte par lequel l'organisme public se libère de sa dette. Il correspond à l'exécution comptable des dépenses. Dans cette phase, l'agent comptable remplit deux fonctions : une fonction de payeur (A) et une fonction de caissier (B).

A - La fonction de payeur

Cette fonction renvoie à l'exercice d'un certain nombre de contrôles. En effet avant de
procéder au paiement, le comptable effectue un contrôle sur les documents fournis par
l'ordonnateur. Il s'agit essentiellement d'un contrôle de régularité. La jurisprudence

11 Les opérations en matière d'impôts indirects sont confiées à des agents publics : services de la Direction générale des impôts - d'où le transfert de la fonction d'ordonnateur en matière de recettes au Directeur général des impôts (impôts indirects et taxe sur le chiffre d'affaire) - services de la Direction des douanes (ordonnateur correspond au Directeur des douanes : droits de douane et droits indirects).

financière a en effet admis que le comptable ne pouvait pas s'ériger en juge de la légalité des décisions administratives12. C'est donc un contrôle qui porte sur la régularité de l'ordre reçu ; c'est-à-dire la qualité d'ordonnateur, la disponibilité des crédits, l'imputation de la dépense, la justification du service fait, le respect des règles de prescription, le calcul du montant de la dépense.

D'autre part, ce contrôle s'intéresse à l'identité et à la capacité du créancier. Le comptable doit en effet vérifier qu'il s'agit du véritable créancier ou de son représentant dûment habilité. Enfin, il appartient au comptable de veiller à l'application des règles de la déchéance (article 27 RGCP), ou encore de vérifier si les actes n'ont pas fait l'objet d'une annulation contentieuse.

La régularité de la dépense entraîne son paiement. Par contre, si l'un des éléments faisant l'objet de contrôle comporte une irrégularité, le comptable suspend le paiement et en informe l'ordonnateur. Face à cette situation, ce dernier dispose de deux options : rectifier l'erreur qui lui a été signalée par le comptable (ce qui nécessite un nouvel ordonnancement) ou lui donner un ordre de réquisition. Si l'ordonnateur opte pour le second choix, le comptable sera tenu de payer mais il dégage par la même occasion la responsabilité du paiement de la dépense qui reposait sur lui. Dés lors, l'ordonnateur devient responsable du paiement ; mais pour que ce transfert de responsabilité soit effectif, il faut que le comptable ait au préalable opposé l'irrégularité en question - le comptable reste responsable des irrégularités non couvertes par la réquisition - faute de quoi, il demeure personnellement et pécuniairement13 responsable du paiement. Il ne faut toutefois pas perdre de vue que même en cas de réquisition, l'agent comptable doit refuser de procéder au paiement s'il y a absence de crédits, absence de service fait ou de sa justification, absence de visa du contrôleur financier ou s'il y a caractère non libératoire de la dépense.

La première tâche du comptable est donc relative à un ensemble de contrôles de régularité et non de légalité (faculté appartenant au seul juge) de la dépense. Une fois ces conditions de régularité remplies, il passe à l'opération matérielle de paiement.

12 C. comptes, 28 mai 1952, Marillier, receveur commune de Valentigney, GAJF, 4 éd., p. 148 et s.

13 C. comptes, 17 octobre 1916, Masselot, comptable du département de Constantine, GAJF, 4e éd., p. 171 et s.

B - La fonction de caissier

Lorsque le comptable remplit sa fonction de caissier, cela signifie que la dépense est régulière à tous égards et qu'il est désormais dans l'obligation de libérer l'Etat de sa dette. Ce dernier va ainsi procéder au règlement de la dette en payant le créancier lui- même.

Ici, le comptable se livre à une autre série de contrôles relatifs au caractère libératoire de la dépense. Il doit en effet s'assurer de l'identité du bénéficiaire, mais aussi de sa capacité juridique. L'agent comptable peut, à cette fin, exiger du créancier (comme preuve de son identité) ou de son représentant (à titre de justification des pouvoirs qui lui ont été conférés par le créancier) la production d'un acte authentique. D'autre part, il vérifie qu'il n'existe pas d'opposition au paiement ; c'est-à-dire si la somme n'est pas réclamée par un tiers ou s'il n'y a pas de saisies-arrêts ou de cessions sur les biens du créancier. Les créanciers de ce dernier peuvent en effet s'opposer à ce qu'il soit payé. Cette opposition doit être signifiée aux comptables payeurs qui suspendent le paiement jusqu'à validation de l'opposition par justice. Dés lors, pour que la dépense ait un caractère libératoire, le paiement doit se faire non pas au profit du créancier originaire mais à l'endroit des opposants14. Enfin le comptable vérifie si le mode de paiement précisé par le fournisseur sur le bon d'engagement ou de commande est en conformité avec les différents modes prévus par le RGCP.

Le règlement de la dette peut prendre plusieurs formes15 : virement, remise d'un chèque, en espèces contre délivrance d'une quittance.

S'il ne décèle aucune irrégularité à l'issue de ce contrôle, il accorde son visa « vu bon à payer » sur le titre de paiement et procède au versement. Dans le cas contraire il doit refuser de procéder au paiement même sur réquisition de l'ordonnateur sous peine d'engager sa responsabilité personnelle et pécuniaire16.

L'exécution comptable des dépenses englobe donc deux fonctions essentielles. Une
exécution transparente du budget nécessite, à côté de l'ordonnateur, la présence d'un

14 C. comptes, 30 avril 1980, Smaggia, commune de Sucy-en-Brie, GAJF, 4e éd., p.185 et s.

15 Notons cependant que le paiement par virement de compte est en principe obligatoire pour les dépenses qui excédent un montant fixé par arrêté du ministre des Finances.

16 CE, 1er juillet 1890, Léon, TPG de l'Oise, Rec. CE p. 1056

CE, 28 et 29 juillet 1890, Souchard, Receveur municipal de Montauban, Rec. CE p. 1059 C. comptes, 7 juillet 1943, Gautier, A. S. de la grange des nones, Rec. p. 63.

C. comptes, 13 mars 1969, Deville, Payeur général de France en Tunisie, Rec. p. 74

contrôleur mais aussi d'un collaborateur qui puisse concrétiser ses ordres. Cependant, l'intervention du comptable en matière de recettes recouvre-t-elle la même importance ?

§ 2 . Le recouvrement des recettes

L'exécution comptable des recettes devrait aboutir au recouvrement matériel de la créance de l'Etat (B), mais au préalable, le comptable doit prendre en charge les rôles et les ordres de recettes (A).

A - La prise en charge

Les opérations de recouvrement commencent par la réception par le comptable des ordres de recettes émis par l'ordonnateur. Dés lors, le comptable doit inscrire la recette dans ses écritures : c'est la prise en charge. Il s'agit de procéder à l'enregistrement comptable de la recette. Mais au préalable, il y a un contrôle des opérations dont l'ordonnateur ou d'autres personnes intervenues dans la phase d'établissement de la recette avaient la charge. Il peut arriver que la prise en charge ait été entamée par un ou plusieurs comptables qui lui ont précédé. Dans ce cas, il vérifie les possibilités de recouvrement de la recette ou du reste si une partie l'a déjà été. S'il juge la créance irrécouvrable, il doit émettre dans les six mois suivant son entrée en fonction (délai qui peut être prorogé à douze mois par décision ministérielle s'il prouve que les six mois étaient insuffisants pour obtenir toutes les informations nécessaires pouvant lui permettre d'apprécier la recouvrabilité) des réserves motivées pour dégager sa responsabilité. Le Conseil d'Etat a en effet décidé que le comptable était responsable de la gestion de ses prédécesseurs s'il n'a pas formulé de façon précise et par écrit des réserves sur cette gestion dans les six mois suivant sa prise de fonction17. On peut répertorier entre autre le contrôle de l'identification du débiteur, l'examen des pièces justificatives, la vérification de la régularité de la recette, vérification de la régularité des réductions ou annulations des ordres de recettes. Mais le contrôle porte uniquement sur le fondement de la recette et sur sa régularité. Les actes formant titres de perception sont ensuite « notifiés aux redevables par avis les informant de la date d'échéance et des modalités de règlement » (article 44 décret 2003-101 portant RGCP).

17 CE, 23 juin 1989, Ministre des finances c/ Véque et autres comptables de la commune de Romainville, GAJF, 4e éd., p. 217 et s.

En matière d'impôts directs, les percepteurs ont pour tâche de prendre en charge les rôles - qui sont des documents retraçant les éléments d'assiette retenus et le montant de l'impôt - sur un registre spécial tenu hors comptabilité.

L'envoi au débiteur de l'avis des sommes à payer met fin à cette opération et donne de ce fait droit au recouvrement matériel de la recette.

B - Le recouvrement matériel

Une fois les ordres de recettes notifiés aux redevables, le recouvrement est en principe amiable. L'article 45 du décret 2003-101 portant RGCP dispose à cet égard : « La procédure habituelle de recouvrement est amiable ». La procédure de recouvrement diffère suivant qu'il s'agit des recettes fiscales ou des recettes non fiscales.

S'agissant de recettes fiscales, il faut distinguer la perception des impôts directs de celle des impôts indirects.

Pour les impôts directs, le percepteur adresse au contribuable un avertissement qui est un extrait du rôle18 qui indique le montant de la dette, la datte de mise en recouvrement ainsi que la date limite de paiement. Au-delà de cette date, le redevable reçoit un rappel ou une lettre de sommation, il peut commencer à subir une pénalité telle qu'une majoration de 10%. S'il refuse toujours de payer, le recouvrement devient forcé avec l'intervention d'une contrainte qui est un acte par lequel le rôle est mis à exécution forcée, ce qui ouvre droit à des poursuites contre le contribuable. On peut alors procéder à des saisies (après envoi d'un commandement à payer) et dans ce cadre, l'Administration n'a pas recours au juge, elle bénéficie du privilège d'exécution d'office. Les ordres de recettes sont rendus exécutoires par les ordonnateurs qui les ont émis alors que les rôles, les décisions de justice et les arrêtés de débet forment titres de perception exécutoires. Toutefois, la procédure d'exécution forcée peut ne pas aboutir si le redevable conteste le bien-fondé

de la créance ou la régularité de l'acte de poursuite devant la juridiction compétente. Quant aux impôts indirects, ils sont perçus sans rôles nominatifs ; les états de liquidation forment titre de perception. Leur recouvrement n'obéit pas au principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables. C'est la même Administration qui établit et liquide l'impôt qui le perçoit. La perception peut se faire suivant deux modalités :

18 Tous les impôts directs ne sont pas forcément perçus par voie de rôle : c'est le cas des impôts exigibles par anticipation ou perçus à la source.

- les droits au comptant : le fait générateur et son recouvrement sont concomitants. Si le contribuable refuse d'acquitter l'impôt, il peut être émis un titre de perception visé par une autorité judiciaire, ayant donc caractère exécutoire. Le titre est notifié au contribuable par lettre recommandée. Sur la base de ce titre, l'Administration peut engager des poursuites comme en matière d'impôt direct et parvenir à des saisies de biens etc.

- les droits constatés : l'établissement de l'impôt et sa perception peuvent être simultanés comme ils peuvent être séparés par un espace de temps.

Concernant les recettes non fiscales, le décret 2003-101 dispose en son article 42 « les redevances pour services rendus et les autres produits divers ou éventuels de l'Etat ou des autres organismes publics sont perçus sur ordre de recettes formant titres de perception de créances constatées par état de liquidation ou décisions administratives ».

Sous peine d'engager sa responsabilité pécuniaire et personnelle, le comptable est tenu de veiller au recouvrement total des fonds par la caisse publique. La recette peut néanmoins se révéler impossible à recouvrer du fait de l'insolvabilité ou de la disparition du débiteur. Dans ce cas, l'admission en non valeur de la créance peut être requise.

Le redevable s'acquitte de sa dette par « versement d'espèces, par remise de chèque ou effets bancaires ou postaux, ou par versement ou virement dans l'un des comptes de disponibilité ouverts au nom des comptables publics. Toutefois, dans les cas prévus par la loi, les redevables peuvent s'acquitter par remise de valeurs ou par l'exécution de prestation en nature » (article 48 décret 2003-101 portant RGCP).

Il faut souligner que le Trésor dispose en matière d'impôt de sûretés et de privilèges. Il en est ainsi du « privilège du Trésor » qui est un droit de préférence qui lui permet d'être payé avant les autres créanciers qui entrent en concours avec lui.

Cette phase de l'exécution du budget fait ressortir le rôle et l'importance du comptable dans toutes ses dimensions, mais aussi et surtout dans toute sa particularité au regard des fonctions allouées à l'ordonnateur.

A partir des éléments que nous avons abordés dans les deux phases de l'exécution du budget, il nous est possible d'affirmer qu'il y a une manifestation du principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables dans les tâches dont chacun de ces deux agents a la charge. Ainsi, ces fonctions, nonobstant leur interdépendance sont

formellement délimitées car pour reprendre les mots du professeur Luc SAÏDJ, « l'administrateur - a même sens que ordonnateur ici - est chargé d'apprécier l'opportunité de la dépense et le comptable est chargé d'interdire les irrégularités »19.

Néanmoins, la règle de la séparation des ordonnateurs et des comptables n'a pas simplement vocation à avoir des incidences sur les fonctions de ces deux agents ; elle implique aussi des responsabilités séparées.

19 Luc SAÏDJ, loc. cit. p. 69

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984