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Le principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables

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par Moussa TRAORE
Université Gaston Berger de Saint Louis du Sénégal - Maà®trise 2008
  

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Section II : Une responsabilité objective des comptables

Le caractère objectif de cette responsabilité s'explique par le fait que l'élément d'appréciation n'est pas la personne du comptable mais sa gestion. A l'opposé des ordonnateurs, les comptables sont tous des fonctionnaires, « ils n'ont pas une situation politique qui éclipse leur condition d'agent public »30, ce qui justifie l'uniformisation de leur régime de responsabilité (II). Il faut toutefois préciser au préalable que le maniement des fonds de l'Etat les assujettit à une responsabilité contraignante (I).

§ 1 . Un régime de responsabilité contraignant

Ce caractère contraignant émane des garanties jointes à la responsabilité du comptable. Il y en a principalement trois : la prestation de serment31 qui se fait en principe devant la Cour des comptes et qui est une garantie morale, ce qui ajouté à son immatérialité en fait un sujet qui ne mérite pas qu'on lui accorde une importance particulière ; à côté d'elle, il y a le cautionnement (A) et l'hypothèque légale (B).

29 Moussa ZAKI, loc. cit. p. 307

30 P. M. GAUDEMET & J. MOLINIER, op. cit. p. 365.

31 Le paragraphe 2 de l'instruction générale française du 16 août 1966 relatif à l'organisation du service des comptables publics dispose : « le serment professionnel est l'acte par lequel les comptables jurent de s'acquitter dans leurs fonctions avec probité et fidélité et de se conformer exactement aux lois et règlements qui ont pour objet d'assurer l'inviolabilité et le bon emploi des fonds publics. ».

Le comptable prête obligatoirement serment avant d'être installé sur son premier poste.

A - Le cautionnement

32 JORS 3537 du 30 juin 1962, p.1115.

33 Cf. Arrêté du 24 novembre 2000 organisant les modalités de fixation du cautionnement des comptables des établissements publics locaux d'enseignement et des établissements dont la responsabilité et la charge incombent entièrement à l'Etat (France).

34 Moussa ZAKI, loc. cit. p. 231.

35 « La constitution du cautionnement pourra être réalisée soit en un seul versement, soit par versements mensuels d'un montant minimum égal à la moitié de l'indemnité de responsabilité allouée au titulaire du poste comptable. L'indemnité de responsabilité ainsi allouée mensuellement sera égale au douzième du montant du cautionnement auquel sera astreint le titulaire du poste comptable. » article 3 décret n° 62.233 précité.

Il est régi au Sénégal par le décret n° 62.233 du 14 juin 196232.Avant leur prise de fonction, les comptables sont tenus de constituer un cautionnement. C'est un dépôt destiné à verser à la collectivité publique lésée le montant total ou partiel d'un débet mis à la charge du comptable. En argent ou en titres, il est déposé au service des dépôts et consignations. Il est fixé par arrêté du ministre des finances, ou par arrêté conjoint du ministre des finances et du ministre de tutelle lorsque le comptable public remplit ses fonctions auprès d'une collectivité publique ou d'un établissement public relevant d'un autre ministère ; son chiffre varie suivant le poste comptable occupé33 : Trésorier général = 1.800.000 F CFA, Receveur général et payeur général = 1.440.000 F CFA, Percepteur = entre 360.000 et 480.000 F CFA etc.34

Si le comptable en a les moyens, il peut s'acquitter de la somme requise en un seul versement, à défaut, le cautionnement peut faire l'objet d'un paiement échelonné35 sur une durée inférieure à deux ans à compter de sa nomination. Les comptables qui se retrouveraient dans l'impossibilité de mobiliser les fonds nécessaires à la constitution du cautionnement avant leur entrée en fonction peuvent s'affilier à une association de cautionnement mutuel. Cela se matérialise par le versement d'une cotisation annuelle égale au centième de la somme exigée. De surcroît, le comptable doit souscrire une assurance pour couvrir sa responsabilité personnelle et pécuniaire. Il faut faire la différence entre le cautionnement et l'assurance. Le premier est une garantie pour l'Administration alors que la seconde que le comptable peut contracter à titre personnel est destinée à lui rembourser le montant des débets mis à sa charge.

Le cautionnement permet de prévenir toute insolvabilité du comptable lorsque sa responsabilité pécuniaire est engagée et qu'il ne bénéficie pas des atténuations prévues. L'arrêt de quitus donne droit à la restitution du cautionnement.

En définitive, le cautionnement est une mesure très efficace pour le Trésor dans une perspective de couverture des pertes occasionnées par le comportement fautif d'un comptable.

A coté de cette garantie, l'Administration dispose d'un procédé tout aussi efficace : c'est l'hypothèque légale.

B - L'hypothèque légale 36

Cette hypothèque a été instituée au Sénégal par la délibération n°3 du 27 août 1962 et est régie par le décret n° 63.478 du 13 juillet 196337. Tous les biens immeubles du comptable acquis avant sa nomination (à l'intérieur du pays et à l'étranger), les immeubles acquis à titre gratuit ou onéreux après sa nomination (donation, testament, héritage), les immeubles acquis par son ou ses conjoints à titre onéreux après sa nomination - sauf s'il est établi qu'ils ont été acquis avec des deniers appartenant au(x) conjoint(s) - et ce quel que soit le régime matrimonial, sont grevés d'une hypothèque légale. Cette hypothèque concerne de même les immeubles acquis au nom des enfants mineurs (à moins que ces derniers soient en mesure de prouver que les fonds qui ont servi à l'achat de l'immeuble leur appartenaient) depuis sa nomination.

Les biens du comptable font l'objet d'un recensement général et permanent. Il est lui- même soumis à une obligation de déclaration de toute acquisition de bien immobilier dans les huit jours et est tenu d'en demander l'inscription au livre foncier.

La levée de l'hypothèque est automatique lorsque la Cour des comptes rend un arrêt de quitus comme le précise l'article 38.2 de la loi 99-70 précitée : « Si le compte est reconnu régulier, la chambre rend un arrêt de décharge à l'égard du comptable demeuré en fonction ; à l'égard du comptable sorti de fonctions, elle rend un arrêt de quitus qui donne mainlevée de toutes les sûretés et garanties grevant les biens personnels du comptable au profit du Trésor public. » (cf. dans le même sens l'article 9 du décret 63.478 du 13 juillet 1963).

L'hypothèque est, à l'instar du cautionnement, une garantie efficace pour le Trésor. A côté d'elle, il y a d'autres garanties moins efficaces : c'est le privilège du Trésor sur les biens meubles et le gage général.

36 Cette hypothèque est parfois qualifiée de forcée.

37 JORS 3619 du 3 août 1963, p. 1049.

Le privilège du Trésor est un droit de préférence qui permet au Trésor d'être payé avant les autres créanciers qui entrent en concours avec lui. Le gage général est prévu par le nouveau code des obligations civiles et commerciales du Sénégal en son article 200 : « Le débiteur répond de sa dette sur tous ses biens présents et à venir. ». Il est dévolu à tous les créanciers.

Il faut cependant noter que les comptables publics des matières38 « sont dispensés du dépôt d'un cautionnement et de la constitution de garanties, sauf lorsque l'importance des mouvements du poste le justifie. »39.

A travers l'hypothèque et le cautionnement, on peut effectivement affirmer que le comptable est soumis à une responsabilité contraignante. Comparée à celle des ordonnateurs, même si elle trouve son fondement dans le maniement par le comptable de fonds appartenant à l'Etat, cette responsabilité n'en est pas moins coercitive. Ce qui fait dire à Jean AUTIN : « S'il est normal qu'une responsabilité lourde et permanente pèse sur le comptable, il est regrettable que les administrateurs et les ordonnateurs puissent échapper à toute sanction alors qu'ils sont susceptibles par leurs erreurs ou leur inertie de faire supporter aux comptables publics des fautes dont ils sont les initiateurs. »40.

Toutefois, si la responsabilité du comptable comporte une autre spécificité, c'est que contrairement à celle de l'ordonnateur, elle est uniformisée pour l'ensemble du corps des comptables publics.

§ 2. Un régime de responsabilité uniformisé

Bien qu'il existe différents types de comptables, ils sont tous soumis aux mêmes responsabilités. Il ne serait dés lors pas pertinent d'analyser cette responsabilité en tenant compte de cette diversité, on pourrait néanmoins l'appréhender par son étendue (A) et sa mise en oeuvre (B).

38 Il faut discerner dans le corps des comptables publics ceux qui manient les fonds (comptables des deniers) et ceux (comptables des matières) qui assurent la garde et la conservation des matériels et matières en stocks, et suivent les mouvements des biens ordonnés par les administrateurs de crédits, les ordonnateurs et leurs délégués (article 25 décret 2003-10 1). La comptabilité des matières est régie par le décret n° 8 1-844 du 20 août 1981 modifié.

39 Charles FOURRIER, Finances publiques du Sénégal, Paris, Pedone, 1975, p. 269.

40 Jean AUTIN, Initiation aux finances publiques, Paris, Dunod, 1971, p.19.

A - L'étendue de la responsabilité

Du fait de leur qualité de fonctionnaire, ils relèvent du statut général de la fonction publique. Mais il y a en outre une responsabilité personnelle et pécuniaire qui leur est spécifique41.

La responsabilité prévue par le statut général de la fonction publique est la même que celle envisagée pour les ordonnateurs fonctionnaires. La loi 61-33 n'opère pas de distinction entre les fonctionnaires à ce niveau. Il faut cependant préciser que le comptable peut échapper à des sanctions administratives s'il parvient à justifier que les règlements, instructions ou ordres auxquels il a refusé ou même négligé d'obéir auraient pu engager sa responsabilité personnelle et pécuniaire de comptable public (article 21 décret n° 62.195 du 17 mai 1962).

D'un autre coté, le comptable est personnellement et pécuniairement responsable du paiement des dépenses, du recouvrement des recettes, de la garde et de la conservation des valeurs, du maniement des fonds et des mouvements de compte de disponibilité, des opérations et documents de comptabilité, de la conservation des pièces justificatives et de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'il dirige. Il est également responsable des contrôles qu'il est tenu d'effectuer en matières de recettes et de dépenses, ainsi que des paiements sur réquisition de l'ordonnateur s'il s'avère qu'il n'avait pas le droit de déférer à l'ordre de réquisition. La responsabilité personnelle et pécuniaire s'étend aussi aux actes des agents qui sont sous son autorité (agents comptables secondaires ou régisseurs)42. L'article 28 du décret 2003-101 dispose à cet égard : « Les comptables publics peuvent déléguer leurs pouvoirs à un ou plusieurs mandataires ayant la qualité pour agir en leur nom et sous leur responsabilité ». La loi 99-70 du 19 février sur la Cour des comptes élargit le champ de cette responsabilité par l'entremise d'autres comptables publics avec « les comptes externes de disponibilités dont il ordonne ou surveille les mouvements. » (Article 25.1). Enfin cette responsabilité pourrait porter sur les actes des comptables de fait, si le comptable patent a eu

41 Le décret 2003-101 dispose en son article 53 alinéa 4 : « Les responsabilités des comptables publics en matière de recouvrement sont engagées et mises en jeu dans les conditions fixées par le décret relatif à la responsabilité des comptables publics. ». C'est le décret n° 62.195 du 17 mai 1962 portant

réglementation concernant les comptables publics qui est jusqu'à présent applicable.

42 C.comptes, 19 décembre 1956, Saumitou - Laprade, trésorier payeur général du pas de calais : responsabilité du fait des préposés ou d'autres comptables, GAJF, 4e éd., n° 26, p. 236

C.comptes, 30 octobre 1952, Lévêque, commune de Roche - Posay : responsabilité du fait des régisseurs, GAJF, 4e éd., n° 27, p. 247.

connaissance de ces actes sans pour autant les signaler au responsable de la collectivité publique dont il dirige le poste comptable et au ministre du budget.

Pour résumer, le comptable est en tant que fonctionnaire, disciplinairement responsable, et en tant que comptable, personnellement et pécuniairement responsable, pour faits personnels et pour faits d'autrui, de l'exécution comptable de la loi de finances.

Après avoir analysé le champ d'application - assez vaste il faut le reconnaître - que couvre la responsabilité du comptable, il convient de s'intéresser à sa mise en oeuvre.

B - La mise en oeuvre de la responsabilité

Etablir la responsabilité du comptable ne nécessite pas la commission d'une faute ; il y a une présomption générale de responsabilité qui pèse sur lui. Il lui appartient une fois cette responsabilité engagée de prouver que sa gestion est régulière.

Cette responsabilité peut être engagée soit par la Cour des comptes, soit par le ministre des finances (article 32 décret 62-195 du 17 mai 1962 portant réglementation concernant les comptables publics)43.

- La procédure juridictionnelle : la loi 90-70 sur la Cour des comptes dispose en ses articles 25 « La Cour juge les comptes des comptables principaux44 » et 34 « Tout comptable public doit rendre compte de sa gestion devant la Cour ». La Cour rend d'abord un arrêt provisoire qui comporte les observations et injonctions éventuelles et qui sera notifié au comptable. Ce dernier dispose d'un délai d'un mois45 (deux mois en France) pour produire ses justifications. Si à partir de ces justifications le juge financier considère le compte régulier, il rend un « arrêt de décharge » qui se transforme en « arrêt de quitus » si le comptable quitte ses fonctions ; si le compte comporte un excès de recettes ou une insuffisance de dépenses, la Cour rend un « arrêt d'avance » ; si par contre il y a excès de dépenses ou insuffisance de recettes, elle rend un « arrêt de débet ».

43 JORS 3531 du 2 juin 1962, p. 921.

44 Le trésorier général apure les comptes présentés par les comptables des organismes publics et les trésoriers payeurs régionaux procèdent à l'apurement administratif des comptes des comptables des collectivités locales. Si le comptable est déchargé, la décision du comptable principal produit les mêmes effets qu'une décision de la Cour, si par contre l'apurement laisse apparaître des irrégularités pouvant entraîner la mise en débet du comptable, le comptable principal en fixe le montant à titre conservatoire et transmet le dossier et les pièces justificatives à la Cour des comptes qui, après demande de justification au comptable, statue définitivement (cf. articles 34 de la loi 99-70 et 342 de la loi 96-06 du Sénégal).

45 Le non respect de ce délai peut entraîner une amende pouvant aller jusqu'à 100.000 francs par injonction et par mois de retard à moins que le comptable ne fournisse une justification valable de ce retard (cf. article 37 de la loi 99-70).

L'arrêt de la Cour des comptes peut faire l'objet d'un recours en révision devant la Cour elle-même (présentation de nouvelles pièces justificatives, erreur, omission, faux ou double emploi) ou d'un recours en cassation devant le Conseil d'Etat (incompétence, vice de forme ou violation de la loi) ;

- La procédure administrative : il y a d'abord une phase amiable où le ministre des finances - en France, ça peut aussi être le ministre de tutelle mais l'arrêté de débet qu'il prononce n'a qu'une valeur déclarative il faut l'intervention du ministre des finances pour lui donner une valeur exécutoire - émet un ordre de versement à l'encontre du comptable. Si ce dernier ne défère pas à l'ordre, il est prévu une phase exécutive dans laquelle il est émis à l'encontre du comptable constitué en débet un titre de perception exécutoire par le moyen d'un arrêté de débet.

Le comptable mis en débet est dans l'obligation de couvrir le Trésor du montant de la perte de recettes subie ou de la dépense indûment payée.

Le comptable peut cependant bénéficier d'une décharge de responsabilité ou d'une remise gracieuse de débet. Il peut ainsi s'adresser au ministre des finances pour obtenir une décharge totale ou partielle de responsabilité. La décharge est automatique si la faute est indépendante de sa volonté (cas de force majeure : incendie, guerre, vol à main armée etc.). C'est un droit pour le comptable (la décision du ministre des finances fait l'objet d'un contrôle du juge administratif). Le comptable peut également bénéficier d'une remise gracieuse totale ou partielle. A la différence de la décharge, c'est une faveur relevant du pouvoir discrétionnaire du ministre des Finances. L'introduction d'une demande de décharge peut surseoir le versement de la somme à couvrir.

En dehors de ces deux exonérations de responsabilité, il y a l'admission en non valeur des créances irrécouvrables (disparition ou insolvabilité du débiteur, insuffisance des moyens en personnel et en matériel nécessaires pour le recouvrement). Il faut tout de même noter que ce régime n'éteint pas immédiatement la dette. La somme est inscrite sur le registre des créances admises en non valeur et la dette peut être poursuivie jusqu'à une durée de deux à cinq ans en fonction du montant de la créance.

Les mécanismes de mise en jeu de la responsabilité du comptable sont multiples, mais principalement répartis entre deux autorités : l'une juridictionnelle, la Cour des comptes et l'autre administrative, le ministre des Finances.

Ce qu'il y a lieu de retenir de ce chapitre, c'est que le principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables, au-delà de la spécialisation ou de l'incompatibilité fonctionnelle des agents d'exécution du budget, aura une incidence sur la responsabilité (qui selon le professeur ORSONI trouve son fondement juridique dans l'article 15 de la déclaration des droits de l'Homme et du citoyen qui stipule : « La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration. »46) ; en effet, selon qu'on est dépositaire des fonctions administratives ou comptables, on est susceptible d'encourir une responsabilité rarement engagée ou une responsabilité drastique. Le constat qui ressort de l'étude de la responsabilité des agents d'exécution du budget, c'est qu'il faut impérativement, à l'encontre des ordonnateurs, la reconsidérer dans le sens de son effectivité à l'endroit des ministres et dans le sens d'un champ plus large, précis et effectif pour les élus locaux.

Au terme de cette première partie, il y a lieu de comprendre par principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables, que les deux phases fondamentalement différentes de l'exécution du budget « ont été confiées à deux corps d'agents publics indépendants l'un de l'autre, les ordonnateurs et les comptables, qui appartiennent à des hiérarchies administratives distinctes, exercent des compétences différentes et supportent des responsabilités particulières »47. Ces propos du professeur Pierre LALUMIERE illustrent parfaitement les deux composantes de cette règle que sont d'une part la distinction des tâches et partant leur incompatibilité, et d'autre part le distinguo des responsabilités qui découlent de l'exécution de ces tâches.

Cependant, au-delà de sa signification, l'intérêt de l'étude de cette règle est aussi à chercher dans son efficience. En clair, qu'est-ce qu'un budget exécuté sur la base de ce principe présente de plus ou de moins qu'un autre ? Quelle est l'actualité du principe ? Quel est son avenir dans l'organisation financière des pays pour lesquels il représente jusqu'ici une originalité incontestable ?

Autant de questions dont nous tenterons de trouver les réponses dans la portée du principe de la séparation.

46 Gilbert ORSONI, Science et législation financières, Paris, économica, 2005, p. 377.

47 Pierre LALUMIERE, Les Finances publiques, Armand Colin, 1970, p. 269

Deuxième partie : La portée du principe de la

séparation des ordonnateurs et des comptables

Maintenant que nous avons une idée de la signification du principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables, il convient de s'appesantir sur ses implications dans l'exécution du budget. En d'autres termes, quel est l'apport du principe dans cette exécution ?

D'emblée, nous pouvons dire que c'est un apport considérable. Dans l'intention du législateur de 1822, le principe devait être en mesure de concilier transparence des finances publiques et organisation efficace de la réalisation des opérations financières. On peut sans ambages affirmer que le principe a répondu aux attentes qui l'ont fait naître.

Mais vu sous un autre angle, la règle de la séparation a eu des effets secondaires inattendus qui ont poussé d'aucuns à donner des réponses nuancées quant à la question de son efficacité. Le moins que l'on puisse dire, c'est que le principe entraîne des conséquences défavorables à une exécution optimale de la loi de finances.

Ce qui nous pousse à envisager l'étude de cette partie sous deux angles : dans un premier temps, nous mettrons l'accent sur les avantages du principe (Chapitre I) avant de nous intéresser ensuite à ses inconvénients (Chapitre II).

Chapitre premier : Les avantages du principe de la
séparation des ordonnateurs et de comptables

Si le principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables est toujours maintenu, c'est qu'il fait preuve d'une efficacité avérée dans l'exécution du budget. En effet, il a le mérite d'avoir décelé subtilement l'existence de deux types de tâches qu'il n'était pas souhaitable de cumuler pour deux bonnes raisons :

- les opérations de l'exécution de la loi de finances sont multiples et variées et sont donc trop consistantes pour être confiées à une seule et même personne ;

- la règle de la séparation des ordonnateurs et des comptables est une transposition du principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs en droit financier. A cet égard, la préoccupation de Montesquieu suivant laquelle « tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser » demeure plus que jamais valable dans la gestion des deniers publics. Le principe peut s'enorgueillir d'avoir répondu, au moins en partie, aux exigences d'une gestion transparente des finances publiques.

En clair, les avantages du principe seront analysés à l'aune de la division rationnelle du travail (Section I) et de la gestion saine des finances publiques (Section II).

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