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Le principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables

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par Moussa TRAORE
Université Gaston Berger de Saint Louis du Sénégal - Maà®trise 2008
  

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Section II : Un principe par conséquent assoupli

Le champ d'application du principe - qui initialement couvrait la totalité de l'exécution de la loi de finances - tend aujourd'hui à se restreindre. Il est en effet des pans entiers de cette exécution qui échappent à son emprise. Le principe est ainsi assoupli aussi bien en matière de dépenses (I) qu'en matière de dépenses (II).

§ 1 . En matière de dépenses78

Les assouplissements du principe en matière de dépenses varient suivant qu'on s'intéresse aux finances de l'Administration centrale (A) ou aux finances des Collectivités locales (B).

77 Luc SAÏDJ, « Réflexion sur le principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables », RFFP n°41, 1994, p. 69

78 Par assouplissements du principe, nous entendons les situations dans lesquelles le principe ne s'applique pas ; par conséquent, la réquisition ne sera pas considérée comme une limite au principe dans la mesure où même si l'ordonnateur use de ce droit, la séparation demeure respectée.

A - Dans les finances de l'Etat

Le principe a subi des aménagements dans certains domaines au sein de l'Etat. Nous pouvons en répertorier cinq : les crédits spéciaux du Chef de l'Etat, les crédits de fonctionnement de l'Assemblée nationale, les dépenses payables avant liquidation, les dépenses payables sans ordonnancement et les régies d'avances.

S'agissant d'abord des crédits spéciaux du Chef de l'Etat79 qui se subdivisent en fonds secrets et fonds politiques, ils sont librement administrés par le Président de la République qui n'a de compte à rendre à aucune autorité politique ou juridictionnelle. « Lors du retrait de ces fonds au Trésor, le comptable n'exerce aucun contrôle et ne recueille aucune pièce justificative concernant l'emploi de ces fonds »80.

Les crédits de fonctionnement de l'Assemblée nationale sont des fonds versés par le trésorier général au trésorier de ladite Assemblée. Ces fonds ne sont soumis qu'au contrôle des ses membres.

Les dépenses payables avant liquidation quant à elles, concernent les avances et les acomptes. Les avances sont des versements effectués avant l'exécution du marché, donc en méconnaissance de la règle du service fait. Pour ce qui est des acomptes, si l'exécution d'un contrat excède trois mois, et que l'entrepreneur justifie le commencement de l'exécution du contrat, l'Etat peut consentir à lui avancer une somme (acompte) qui ne peut dans tous les cas outrepasser la valeur des prestations exécutées. Les dépenses payables sans ordonnancement : en raison de leur caractère répétitif (rémunération des agents de l'Etat), ou de l'absence de marge de manoeuvre laissée à l'Administration81 (pensions civiles ou militaires), certaines dépenses sont payables sur simple présentation des titres de créances. L'ordonnancement peut intervenir ultérieurement à titre de régularisation.

En ce qui concerne les régies d'avances, c'est le même procédé que pour les Collectivités locales (cf. B - Dans les finances locales).

Il peut être fait abstraction à l'application du principe dans plusieurs dépenses au sein de
l'Etat, ce qui est cependant tout à fait légal contrairement aux violations. Mais cette

79 En France, c'est l'équivalent des fonds spéciaux qui sont l'apanage du Premier ministre qui les utilise et les répartit entre les différents ministères sans l'intervention d'un comptable. Cette pratique est justifiée par la destination de ces sommes (contre-espionnage par exemple), ce qui n'empêche pas aux ministres destinataires d'informer le Chef du Gouvernement qui à son tour informe le Parlement.

80 René CELIMENE, Droit budgétaire et comptabilité publique au Sénégal, NEA, 1985, p. 53

81 Ces types de dépenses peuvent être qualifiées d'obligatoires ; leur paiement n'est pas assujetti à l'appréciation de l'opportunité des dépenses auquel se livre l'ordonnateur

faculté de pouvoir méconnaître le principe n'est pas spécifique à l'Etat. Les Collectivités locales peuvent aussi obtenir une dérogation à la règle de la séparation des ordonnateurs et des comptables.

B - Dans les finances locales

Dans les Collectivités locales, les assouplissements au principe sont réductibles à la régie d'avances. Les régies sont des caisses rattachées à un service public. Elles sont dirigées par des agents - les régisseurs qui sont nommés par le ministre chargé des Finances ou par le Gouverneur de région - qui sous l'autorité d'un ordonnateur et d'un comptable, monopolisent toutes les phases de l'exécution du budget. Dans le cas des régies d'avances, le régisseur est chargé de régler les dépenses récurrentes et de faible montant. L'article 10 du décret 2003-657 du 14 août 2003 relatifs aux régies de recettes et aux régies d'avances dispose : « Il est mis à la disposition de chaque régisseur une avance dont le montant, fixé par l'arrêté ayant institué la régie et, le cas échéant, révisé dans la même forme, est au maximum égal, sauf dérogation accordée par le ministre chargé des Finances, au quart du montant prévisible des dépenses annuelles à payer par le régisseur. ». En plus de la modicité et de la fréquence qui caractérisent les dépenses payées par le régisseur, ce dernier ne peut payer des dépenses autres que celles dont il a expressément obtenu l'autorisation (voir article 9 du décret précité). Une fois par mois, le régisseur est tenu de fournir au comptable les pièces justificatives des dépenses effectuées. Si les pièces sont régulières, un ordonnancement interviendra ultérieurement pour régulariser les dépenses. Dans le cas contraire, les régisseurs sont soumis aux mêmes responsabilités que les comptables publics : c'est ainsi qu'il peuvent constituer un cautionnement (comme ils peuvent en être dispensés suivant les dispositions de l'article 4 du décret 2003-657). Ils peuvent aussi, en cas de mise en débet, bénéficier de la part du ministre chargé des Finances des mêmes atténuations que les comptables publics. Enfin ils disposent d'une indemnité de responsabilité82.

En dehors des contrôles effectués par l'ordonnateur et le comptable, les régisseurs « sont également soumis aux vérifications de l'Inspection générale des Finances et à celles des autres structures de contrôle de l'Etat. » (article 15 décret 2003-657). L'Inspection générale des Finances qui exerce le pouvoir de contrôle du ministre chargé des Finances

82 Décret n° 75-1110 du 11 novembre 1975 fixant l'indemnité de responsabilité des régisseurs

(qui nomme ses membres), effectue, suivant l'article 3 alinéa 3 du décret n° 74-1262 du 17 décembre 1974 créant les fonctions d'opérations financières auprès des départements ministériels83, le contrôle périodique des opérations des régisseurs. Parallèlement à ce contrôle, il y a les autres structures de contrôle de l'Etat parmi lesquelles on peut compter l'Inspection générale d'Etat qui est chargée de vérifier, de façon inopinée si nécessaire, l'utilisation des crédits publics et la régularité des opérations des régisseurs84.

Le régisseur de manière générale - le régisseur d'avances en particulier - déroge donc par ses attributions au principe puisqu'il cumule toutes les tâches. C'est ce qui fait dire à monsieur FOURRIER qu'il a la qualité « d'ordonnateur-comptable »85, c'est-à-dire un ordonnateur de crédits habilité à manier les fonds comme s'il était un véritable comptable.

Les dépenses publiques échappent pour une partie non négligeable de leur exécution à l'application du principe. Qu'en est-il de l'exécution des recettes ?

§ 2 . En matière de recettes

Nous étudierons dans ce paragraphe les assouplissements du principe à partir de la dichotomie traditionnelle ressources fiscales (A) et ressources non fiscales (B).

A - Concernant les ressources fiscales

L'application de la séparation aux procédures de recouvrement des recettes fiscales n'est pas remise en cause pour les impôts directs. Par contre pour les impôts indirects, c'est la même administration qui est responsable de toute la procédure de recouvrement des recettes. Ainsi, la perception de la taxe sur le chiffre d'affaire, des droits d'enregistrement, des droits indirects et des droits de douane ne fait pas intervenir un ordonnateur et un comptable en même temps, mais se fait au comptant ; c'est-à-dire que c'est le contribuable lui-même qui procède à la constatation et à la liquidation des droits en reconnaissant immédiatement l'existence et le montant de l'impôt. Il s'acquitte aussitôt de la somme due auprès du comptable des services de la direction générale des

83 JORS, du 4 janvier 1975, p. 5

84 Article 2 du décret n° 80-9 14 du 5 septembre 1980 organisant l'Inspection Générale d'Etat

85 Ce qu'il faut préciser ici, c'est que le régisseur est un ordonnateur-comptable, car remplit les deux fonctions à la fois, mais n'est ni un ordonnateur, ni un comptable (n'en a pas légalement le titre).

impôts (pour les taxes sur la valeur ajoutée par exemple) ou celui des services de la direction des douanes (droits de douane et droits indirects).

L'émission d'un ordre ou titre de recette n'est donc pas indispensable, sauf si le débiteur refuse de payer.

Si la non application du principe à certaines dépenses est la plupart du temps justifiée par leur fréquence et la modicité de leur montant, le fondement est ici à chercher dans des impératifs de rapidité et simplification de la procédure de perception.

Les dérogations au principe ne sont pas uniquement perceptibles en matière de ressources fiscales, mais également en matière de ressources non fiscales.

B - Concernant les ressources non fiscales

Les atténuations de la règle de séparation en matière de recettes non fiscales renvoient aussi aux régies, mais cette fois ci aux régies de recettes. Le décret 2003-657 a autorisé les régisseurs de recettes à recouvrer des recettes sans y avoir été autorisés a priori par un titre de perception. Tout comme pour les régies d'avances, la somme doit être modeste mais elle doit aussi avoir un caractère non fiscal. L'article 6 du décret 2003-657 stipule à cet égard : « Sauf dérogation accordée par le ministre chargé des Finances, les impôts, taxes et redevances prévus au code général des impôts, au code des douanes et par les lois en vigueur ne peuvent être encaissés par l'intermédiaire d'une régie. ». On peut ranger dans ces recettes, les loyers en cité universitaire, les droits d'inscription dans les bibliothèques, les droits d'entrée dans les musées etc. Si le régisseur recouvre des recettes autres que celles pour lesquelles pouvoir lui a été donné, il se constituera comptable de fait.

Après avoir encaissé les recettes, il les reverse au comptable qui effectue un contrôle sur l'exactitude de la liquidation avant de saisir l'ordonnateur pour l'émission d'un titre de perception en vertu duquel le recouvrement est régularisé. Si les vérifications révèlent des irrégularités, le régisseur peut être amené à s'expliquer ou être mis en débet.

Les régies de recettes et les régies d'avances sont soumises au même système organisationnel et aux mêmes contrôles.

Les inconvénients du principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables, qu'ils soient afférents au principe lui-même ou à ses incidences sur l'organisation administrative, ne sont pas négligeables. En dépit des raisons nobles qui ont fait naître cette règle, son application a entraîné des blocages à telle enseigne qu'on est arrivé à se demander si elle était toujours pertinente. Pour corriger ces défectuosités tout en maintenant le principe, le législateur a envisagé des situations dans lesquelles il était possible de se passer totalement ou partiellement de cette séparation des agents d'exécution du budget suivant les exigences d'efficacité.

Ces inconvénients ne sont cependant qu'une facette du principe, en l'occurrence son impact négatif sur l'exécution du budget. On ne saurait en effet contester aujourd'hui l'apport positif du principe qui se ramène principalement à l'assainissement des finances publiques et à la rationalisation des opérations sur les deniers publics.

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