B.1.3. L'environnement cognitif indirect
Le second sous environnement est l'environnement cognitif
indirect. Il est composé des présuppositions et du savoir
encyclopédique des interlocuteurs, c'està-dire l'ensemble des
hypothèses en mémoire, plus ou moins accessibles au niveau
attentionnel. Cet environnement compose l'ensemble des prémisses
indispensables à l'existence de la compréhension
inférentielle26, traditionnellement appelé Ç
présupposésÈ. Cet environnement cognitif indirect regroupe
l'ensemble des hypothèses, des présuppositions
générales acceptées comme vraies dans la mémoire du
système, c'est-à-dire dans la mémoire
conceptuelle27 des interlocuteurs, mais aussi l'ensemble des
conclusions qui découleraient d'une potentielle inférence prenant
pour prémisses une ou plusieurs de ces hypothèses. Comme le
disent Sperber et Wilson (1989:67), Çun individu possède non
seulement le savoir représenté dans son esprit mais aussi le
savoir qu'il est capable de déduire du savoir dont il a la
représentation. È Par exemple, à l'heure actuelle, il ne
fait aucun doute que Jean-Paul Sartre n'a jamais dirigé un magazine sur
internet. C'est une conclusion inférentielle qui nous est manifeste, et
donc accessible, sans pour autant que nous ayons effectivement effectué
cette inférence auparavant. Cette Ç mémoire
encyclopédique È (Sperber&Wilson,1989), cette Ç vue
unifiée du monde dans lequel (un interlocuteur) se trouve "jeté"
È (Watzlawick,1972:265) est l'ensemble des prémisses qu'un
interlocuteur possède sur le monde en général, et qui
guideront son comportement au court de sa vie ; dans un environnement du
système étant l'espace-temps, la notion d'environnement cognitif
indirect renvoie à la variable temps.
Cet environnement regroupe trois formes différentes
d'entrées conceptuelles en mémoires, qui sont les entrées
logiques, encyclopédiques et lexicales. L'entrée logique d'un
concept correspond aux règles déductives particulières
propres à un
26 Ç Le rTMle (de l'environnement) n'est pas simplement
de filtrer les interprétations inadéquats : (il) fournit des
prémisses sans lesquelles les implications ne peuvent tout simplement
pas être inférées. È (Sperber&Wilson,1989:62)
27 Un concept est un élément qui, combiné
avec d'autres concepts, structure une hypothèse. Pour un
développement de ce point, voir Sperber&Wilson (1989:134-135)
certain concept. L'entrée encyclopédique
correspond à l'extension, la manifestation matérielle de ce
concept dans le monde. Enfin, l'entrée lexicale comprend les
informations sémiotiques correspondant à ce
concept28.
Bien que tous deux cognitifs, il existe pourtant un
différence fondamentale entre ces deux environnements : l'environnement
cognitif direct est supposé être communément manifeste aux
interlocuteurs qui perçoivent potentiellement les mêmes
informations du monde Ç extralinguistique È29, alors
que l'environnement cognitif indirect est propre à chaque interlocuteur.
L'environnement cognitif indirect est le passage en mémoire à
long terme d'événements individuellement ponctuels qui sont dans
un premier temps stockés dans la mémoire à court terme. Ce
qui fait de l'environnement cognitif indirect un ensemble de
représentations ancrées en chaque interlocuteur, et qui sont par
conséquent plus immuables.
Pour conclure ce développement sur les stimuli et
l'environnement, nous rappellerons l'importance de concevoir l'environnement du
système comme un ensemble de perceptions, et donc d'informations,
c'est-à-dire que, comme le dit Bateson (1980:48), Ç il n'y a dans
l'esprit que des transformations, des perceptions, des images et les
règles permettant de construire tout cela. È La communication est
une production d'informations sur des informations, critère fondamental
faisant du système communicationnel un système
cybernétique. De plus, le fait que l'ensemble du système cognitif
humain traite de l'information lui permet d'opérer à travers un
seul mécanisme de traitement, traitant de l'information et articulant
compréhension et production, qui fonctionnera de façon semblable
pour le traitement de tout stimulus.
28 Pour un développement complet de ces trois types
d'entrées conceptuelles, voir Sperber & Wilson (1989:135-145).
29 Nous n'entendons pas par là que les perceptions chez
les interlocuteurs sont identiques, mais plutôt que ce sont des
éléments qui ont la potentialité d'affecter la perception
de tous les interlocuteurs.
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