WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Approche systémique des jeux pragmatiques communicationnels.

( Télécharger le fichier original )
par Colin FAY
Université de Rennes 2 - Master LCER 2012
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

A.2.2. Le modèle inférentiel

Ë la suite de l'étude pragmatique et de la fin de la dichotomie langue/parole, la prise en compte du sujet parlant et du contexte fut approfondie par Grice et les théoriciens à sa suite, avec le concept de coopération, d'inférence ainsi que les maximes conversationnelles. On retrouve chez Gardiner un développement qui n'est pas sans annoncer les théories ultérieurement développées par Grice.

Gardiner (1989) donne un rTMle aux signes qui est différent de celui du rTMle qui leur est donné dans la théorie du code. Ë l'inverse d'un signe-étiquette vu comme l'expression d'une pensée, l'existence d'un signe est envisagée comme un indice nécessaire pour compléter le vide communicationnel laissé par le contexte. En d'autres termes, le signe est utilisé afin de combler ce que le contexte d'interaction ne Ç dit È pas :

Les mots sont choisis après une évaluation très précise de leur intelligibilité ; plus la chose dont on parle est éloignée, plus on devra fournir d'indices afin de permettre son identification. En revanche, si la situation est la même pour le locuteur et pour l'auditeur du point de vue temporel et spatial, un seul mot ou indice suffira souvent à l'identification. (...) Les mots ne sont que des indices, la plupart des mots ont un sens ambigu et, dans chaque cas, la chose-signifiée doit être découverte dans la situation, par l'intelligence vive et active de l'auditeur. (1989:51,16,nous soulignons)

Il est important de noter dans cet extrait la notion d'indice et d'intelligence vive et active de l'auditeur. On retrouve à travers ces deux idées l'importance de la situation d'énonciation dans la communication : dans un contexte précis, les interlocuteurs ne codent pas une pensée en un signe transparent pour le transmettre à l'Autre qui viendra le décoder. Ici, l'interlocuteur produit le signe en tant qu'indice de sens, complétant la situation d'énonciation, afin que l'Autre découvre, infère la chosesignifiée. C'est-à-dire qu'une situation contextuelle fournit des indices, qui, s'ils ne sont pas suffisants pour la communication, vont être complétés par des signes. Prenons un exemple concret. Deux amis sont chez l'un en pleine discussion. Celui qui est reçu a terminé son verre. Celui qui reçoit va donc lui en proposer un nouveau. Il peut le resservir directement, mais aussi lui proposer, par un simple signe élocutionnel montrant la bouteille ou encore en lui disant Ç Un autre ? È Ici, nous le voyons bien, nous ne sommes pas dans une situation de phrases ou de signes qui pourraient être vus comme elliptiques, oü le complément serait fourni par des signes tronqués. Au contraire, ce qui fournit le complément, c'est le contexte. Tout dans le

contexte est indice de ce que l'hôte souhaite signifier, et le signe qu'il produit est un complément d'indices de ce que la situation d'énonciation ne possède pas. Dans la conception de Gardiner, ce qui guide la production d'un signe, ce n'est pas la transformation d'une pensée en signe(s) via un code, mais bien une Ç visée communicative > (Douay,2000:45) du signe. Ce qui légitime l'utilisation d'un signe est le fait que l'interlocuteur reconnaisse que le locuteur communique à travers ce signe. Les interlocuteurs sont dans une situation de coopération pour trouver un accord sur le sens, plutôt que dans une situation de codage-décodage.

Ainsi, Gardiner souligne, bien avant Grice, l'importance de la coopération dans la communication. Nous retrouvons cette notion chez Grice, qui la formalise notamment dans deux de ses articles Meaning (1957) et Logic and Conversation (1975). Dans son premier article, il développe l'idée que le sens est obtenu gr%oce à la reconnaissance par l'interlocuteur des intentions communicatives du communicateur. Il y fait la distinction entre les signes signifiant naturellement et ceux signifiant nonnaturellement, c'est-à-dire produits intentionnellement et non-intentionnellement. Ce qui fait qu'un signe puisse signifier non-naturellement, donc par convention, c'est l'effort du locuteur pour rendre explicite son intention de produire un effet à travers ce signe, et en retour la reconnaissance par l'interlocuteur de cette intention de communiquer, c'est-à-dire une capacité à communiquer et à méta-communiquer (à communiquer que l'on communique).16 Nous retrouvons également chez Grice (1975), l'approche des signes comme indices de l'intention communicative : lorsque un auditeur reconnait l'intention qu'a le locuteur de communiquer, il va chercher à se représenter ce que le locuteur veut communiquer. Les interlocuteurs possèdent la capacité de se représenter ce que Grice (1975) appelle les Ç implicatures conversationnelles >. Nos conversations n'étant pas Ç une succession de remarques décousues >, mais un Ç effort coopératif >17, l'interlocuteur a donc toutes les raisons de s'attendre à ce que le locuteur lui fournisse les indices nécessaires, qui, une fois mis en parallèle avec le contexte, l'amèneront à la compréhension du sens. D'après Grice, ce Ç principe coopératif > trouve en lui l'accord des interlocuteurs sur un

16 Nous avons déjà abordé cette question dans l'avant propos AP.2.

17 Grice,1975:45: Ç Our talk exchanges do not normally consist of a succession of disconnected remarks, and would not be rational if they did. They are characteristically, to some degree at least, cooperative efforts. >

certain nombre de principes, appelés maximes conversationnelles, qui sont au nombre de quatre : la quantité (faites que votre contribution contienne autant d'informations que nécessaire, mais pas plus), la qualité (faites que votre contribution soit vraies), la relation (soyez pertinent) et la manière (soyez clair)18. Partant de la présomption que chaque interlocuteur est implicitement en accord sur ces maximes, et que la violation d'une maxime aura un effet particulier producteur de sens, tout signe est donc indice qui permet à l'interlocuteur d'inférer ce que le locuteur a voulu signifier. Par exemple, si la réponse à la question Ç A quelle heure viens-tu ? È est Ç Dans l'après-midi ! È le premier pourra inférer de la réponse du second que celui-ci, adhérant au principe de coopération, ne donne pas plus d'informations car il ne les possède pas et n'est pas capable de donner une heure précise. Il infère donc, en mettant le signe en relation avec le contexte, et à travers les maximes conversationnelles, ce que le locuteur a voulu signifier. Pour résumer, les deux interlocuteurs coopèrent implicitement pour se comprendre à travers l'acceptation de l'implicature que composent les quatre maximes, cette implicature conversationnelle qu'est le principe de coopération étant un accord sur un ensemble de Ç principes de conversation È à respecter dans le discours.

Le modèle que nous venons de voir est appelé Ç modèle inférentiel È puisqu'il base l'obtention du sens sur l'action de reconnaissance par l'interlocuteur des indices laissés par le locuteur, indices qui, une fois mis en parallèle avec le contexte et l'ensemble de l'implicite du discours, permettent d'inférer des conclusions qui sont logiquement impliquées par le contexte, selon ce modèle, Ç communiquer, c'est produire et interpréter des indices. È (Sperber&Wilson,1989:13)

Fondamentalement, ce qui distingue l'analyse gricéenne des autres théories, c'est de suggérer que la reconnaissance de l'intention de communication puisse suffire à l'existence d'une communication, et donc qu'il puisse exister une communication uniquement inférentielle. Sperber et Wilson, dans leur ouvrage La Pertinence (1989), vont reprendre ces théories développées par Grice et Gardiner, mais ne retenir qu'une seule des quatre maximes, englobant toutes les autres : Ç soyez pertinent È.

18 Nous n'avons pas développé les sous-maximes propres à chacune, qui sont des explicitations de la maxime générale.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Le don sans la technique n'est qu'une maladie"