2.3. Commentaires et
observations
- Il faut attendre que le dossier judiciaire soit clos pour
connaître la responsabilité de KPMG dans cette affaire.
- Mais pour André KILESSE président de l'IRE
à l'époque, s'il était prouvé qu'il y avait eu une
fraude, le réviseur de l'entreprise KPMG aurait dû avertir le
Conseil d'Administration et l'Assemblée Générale de la
Sabena. Si l'enquête devait prouver que KPMG a sciemment ignoré
une fraude qu'il aurait dû remarquer et dénoncer à
l'occasion de l'examen des comptes de la Sabena, des poursuites sont
possibles.
- En plus explique André KILESSE, au niveau
disciplinaire, un dossier est ouvert et une enquête est menée. Et
si les faits sont avérés, le réviseur est renvoyé
devant les instances disciplinaires. voir section 5.1
Par ailleurs, en cas de fraude, des sanctions seront prises
à l'égard des particuliers (les cadres de la Sabena) qui auraient
caché la perception de certains montants au fisc.
2.4. Autre affaire KPMG/Sabena
Selon le curateur de la Sabena, Christian van Buggenhout, les
réviseurs de KPMG ont commis des fautes, en approuvant en 2002 un plan
de sauvetage de la Sabena avec la Swissair complètement
irréalisable.
Blue Sky contenait des engagements impossibles à tenir
par le partenaire suisse et les réviseurs auraient dû tirer le
signal d'alerte en mars 2001. Ils ne l'ont pas fait et la situation est devenue
sans issue. (38)
3.
Extraits sur le cas : Scandale Parmalat et Deloitte & Touche et Grant
Thornton
3.1. Scandale Parmalat
« Vive l'éthique dans les
affaires ! » « Vive l'entreprise
morale ! » Entendus lors du Forum économique mondial de
Davos, ces cris traduisent un voeu : que le capitalisme rebondisse sur des
bases assainies. Ce sera dur. Car, au moment même où ce
désir s'exprimait, l'énormité de l'affaire Parmalat
éclatait au grand jour. Qualifié de plus grand scandale financier
en Europe depuis 1945, il laisse présager des ondes de choc semblables
à celles, désastreuses, que provoqua en décembre 2001 la
faillite frauduleuse du courtier en énergie Enron.
Parmalat était l'exemple d'une réussite
impulsée par la dynamique de la mondialisation libérale. Petite
firme familiale de distribution de lait pasteurisé établie dans
les environs de Parme dans les années 1960, elle s'est
développée grâce à l'habileté de son
fondateur M. Calisto Tanzi, et aux généreuses subventions de
l'Union Européenne. Dès 1974, Parmalat se mondialisait et
s'installait au Brésil, puis au Venezuela et en Equateur. Elle multiplia
les filiales et créa des sociétés relais dans des
territoires offrant des facilités fiscales (île de man, Pays-Bas,
Luxembourg, Autriche, Malte), puis dans des paradis fiscaux (îles
caïmans, îles vierges britanniques, Antilles néerlandaises).
En 1990, elle entrait en Bourse, s'affirmant comme le septième groupe
privé d'Italie et occupant la première place mondiale sur le
marché du lait de longue conservation. Ce colosse employait quelque
37 000 salariés dans plus de trente pays, et son chiffre d'affaires
atteignait, en 2002, 7,6 milliards d'euros, une somme supérieure au
produit national brut d'Etats comme le Paraguay, la Bolivie, l'Angola ou
Sénégal...
Ce formidable succès valait au dirigeant, M. Tanzi,
d'être considéré comme l'une des figures de l'establishment
italien, membre de la direction de la Confindustria (le Medef local). Et
à l'action Parmalat d'être une des valeurs sûres de la
Bourse de Milan.
Jusqu'au 11 novembre 2003. Ce jour-là, des commissaires
aux comptes expriment des doutes sur un investissement de 500 millions d'euros
effectué sur le fonds Epicurum, basé aux îles Caïmans.
Aussitôt, l'agence Standard & Poors abaisse la notation des titres
Parmalat. L'action chute. Au même moment, la Commission des
opérations de bourse demande des clarifications sur la manière
dont le groupe compte rembourser des dettes qui arrivent à
échéance fin 2003. L'inquiétude s'empare des
créanciers et des détenteurs d'actions. Dans le but de rassurer,
la direction de Parmalat annonce alors l'existence d'une cagnotte de 3,95
milliards d'euros déposés dans une agence de la Bank of America
aux îles Caïmans. Et présente un document, établi par
cette banque américaine, attestant la réalité du montant
indiqué. La direction joue à quitte ou double. Soit chacun se
tranquillise, l'action remonte et les affaires reprennent, soit la
méfiance demeure et l'effondrement menace.
A cet instant décisif, la Bank Of America affirme que
le document exhibé par Parmalat pour prouver l'existence des 3,95
milliards d'euros est... un faux ! Un document à en-tête
approximatif, grossièrement falsifié au scanner ! L'action
s'effondre. En quelques jours elle ne vaut plus rien. Plus de 115 000
investisseurs et petits épargnants se retrouvent floués, certains
ruinés. On va vite apprendre que l'endettement de Parmalat
s'élève à 11 milliards d'euros ! Et que comme dans
les scandales Enron, Tyco, worldcom, Ahold, etc. ; il a été
sciemment dissimulé, depuis des années, au moyen d'un
système frauduleux ; à base de malversations comptables, de
faux bilans, de documents truqués, de bénéfices fictifs et
de pyramides complexes des sociétés offshore
emboîtées les unes dans les autres de manière à
rendre impossible la traçabilité de l'argent et l'analyse des
comptes.
Permanente, la fraude restait indétectable, au point
que, la veille encore du scandale la Deutsche Bank par exemple avait acquis 5,1
% du capital de Parmalat, et que des analyses recommandaient fortement
(« strong buy ») l'achat de titres du groupe ... Des
cabinets d'audit comme Grant Thornton ou Deloitte & Touche, de grandes
banques comme Citigroup sont accusés de complicité. Et la
nocivité des paradis fiscaux une fois encore soulignée. L'affaire
prend une ampleur planétaire.
Après la faillite d'Enron, les partisans de la
mondialisation libérale affirmaient que c'en était fini des
patrons voyous, des entreprises fripouilles et de l'horreur économique.
Et que cette affaire avait été en fin de compte
bénéfique, puisqu'elle aurait permis au système de se
corriger. Le scandale Parmalat prouve qu'il n'en est rien. Par Ignacio
Ramonet. (39)
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