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La coopérative agricole comme instrument juridique de relance du secteur agricole en RDC

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par Clovis KAMBURUTA
Université libre des pays des grands lacs - Licence 2012
  

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CHAPITRE PREMIER :

LA NECESSITE DES REFORMES FACE AUX INSUFFISANCES DU REGIME JURIDIQUE APPLICABLE A L'EXPLOITATION AGRICOLE

La nécessité de réforme du secteur agricole semble être évidente au regard de la situation nationale actuelle que le pays traverse. Mais avant d'envisager les perspectives d'avenir qui peuvent relever l'agriculture congolaise (section 2), disons un mot sur l'état de lieux de ce secteur (section1) durant la deuxième république

Section1. Etat de lieux du secteur agricole congolais

Le secteur agricole congolais fut marqué par différentes périodes au cours de son évolution. L'agriculture sous la deuxième république n'a pas produit des résultats satisfaisants, ceci à cause de la prise d'une mauvaise politique économique. La plus grosse erreur politico-économique sous la deuxième république fut incontestablement la zaïrianisation (§1). Cette dernière a plongé le pays dans une situation économique critique pendant des longues années. Et pour tenter de corriger cette erreur, le gouvernement fut poussé à réfléchir sur un modèle politique agricole globale et de cohérence à l'intérieur de laquelle devait s'articuler différentes actions de relance du secteur agricole : Le Plan Directeur (§2). Une politique qui, malheureusement, eut du mal à être exécuté pour diverses raisons que nous allons voir sous ce point.

§1. La zaïrianisation et son impact sur le secteur agricole

Réalisée dans le courant de l'année 1974, la « zaïrianisation » a constitué l'un des évènements les plus importants de la politique menée par le régime mobutiste, à savoir la nationalisation progressive des biens commerciaux et des propriétés foncières qui appartenaient à des ressortissants ou groupes financiers étrangers. En réalité, si cette mesure s'inscrivait officiellement dans un effort visant à la réappropriation nationale de l'économie ainsi qu'à la redistribution des richesses acquises pendant la colonisation, elle a constitué surtout un échec.

A. Structures économiques

Après la première guerre du Congo, Mobutu, nouveau chef d'État s'est engagé à regagner la confiance des milieux d'affaires étrangers. En 1966, les puissantes industries minières du Kasaï et du Katanga sont nationalisées. C'est alors l'âge d'or du Congo, maintenant indépendant (en 1967 1 franc congolais vaut alors 2 dollars américains). Les écoles publiques se développent et l' exode rural s'accélère ; les prix du café, du cuivre ou d'autres minerais sont florissants mais l' économie du pays est encore, comme à l'époque coloniale, trop tournée vers l' exportation, et par conséquent fragile.

À partir de 1973, le pays est touché par une crise économique aiguë, due à la baisse des prix du cuivre et à l'augmentation de ceux du pétrole. La corruption se généralise et l' inflation devient galopante, tandis que Mobutu privatise de nombreuses entreprises à son nom ou aux noms de ses proches (zaïrianisation)11(*). Le pays produit d'importante quantité de café pour l'exportation mais ne couvre pas ses besoins alimentaires, Mobutu fait importer des céréales et de la viande d' Afrique du Sud et de Rhodésie (deux régimes alors ségrégationnistes à l'époque) au lieu de moderniser l' agriculture du pays qui, vu son climat, pourrait facilement subvenir à ses besoins.

De manière générale, les nouveaux propriétaires de biens économiques et financiers n'étaient pas suffisamment préparés pour assurer une gestion de moyen et de long terme de l'outil de production. Ceux qui n'ont pas fait faillite ont placé d'immenses investissements en Occident. Mobutu détourne les devises d'État de telle façon qu'en 1984, il est un des hommes les plus riches de la planète avec 4 milliards de dollars, l'équivalent de la dette extérieure du pays à l'époque. La dette s'accroît encore plus avec la construction pharaonique du barrage hydroélectrique d'Inga, chantier légué par la Belgique coloniale et dont le Zaïre n'avait pas besoin. Si le barrage d'Inga a rapporté de l'argent aux entreprises françaises (EDF) ou italiennes, celui-ci, tout comme l' aciérie de Maluku a vite été abîmé. Cette politique nationaliste du régime eu aussi pour conséquence de freiner les investissements étrangers au Zaïre, favorisant in fine une forme de monopole d'entrée de capitaux étrangers dans le chef des différents fonds de coopération au développement.

Bien que plus depuis plus de 20ans l'agriculture ne cesse d'être proclamée une priorité (déclaration de politique générale de 1969) dans ce pays, il ne parait pas qu'une certaine volonté politique ait concrétisé ces propos. En effet, nous référant aux objectifs assignés à l'agriculture zaïroise, à savoir :

1. Produire des denrées alimentaires de base en vue d'assurer à la population une alimentation saine et équilibrée et si possible arriver à exporter ;

2. Fournir les matières premières aux industries locales ;

3. Promouvoir les cultures d'exportation source génératrice des devises nécessaires à l'acquisition des biens d'équipement pour le développement du pays.

Face aux réalités sur terrain, d'aucun ne soutiendrait ces déclarations de démagogiques.

Cette stratégie était encore mieux définie dans le Manifeste de la N'Sele12(*). Dès lors, partant de ces considérations, la production agricole du Zaïre se divisait en deux catégories, à savoir : la production agro-industrielle et la production vivrière. Il est cependant regrettable de constater que sous la deuxième république le régime Mobutu n'a fait que placer la charrue devant le boeuf, en concentrant tous ses efforts à l'exploitation minière plutôt qu'à l'agriculture, base de tout développement. Quelle contradiction quand on sait que pour paraphraser l'homme du 24 mai 1965 : « Demain la puissance d'un Etat sera mesuré à la capacité de pouvoir nourrir sa population ».

D'ailleurs, pour mémoire, faut-il rappeler que le développement industriel de l'Occident passe d'abord par l'autosuffisance alimentaire ? Aujourd'hui, l'aide alimentaire constitue l'une des armes la plus utilisée pour narguer les Etats de l'Afrique noire. Plus de 35% du PNB des Etats de l'Afrique noire sont consacrés à l'achat des devises pour l'importation des denrées alimentaires européennes. La taille des familles africaines et la non compétitivité de l'agriculture (méthode culturale ancestrales, la désertification progressive du continent africain, la sécheresse), la mauvaise gestion (par quelques dirigeants), les détournements des fonds publics et l'irresponsabilité de certains chefs de service, tout cela rend la situation de plus en plus dramatique.

B. La zaïrianisation : une erreur politico-économique monumentale

La plus grande erreur politico-économique sous la deuxième république fut incontestablement la zaïrianisation dont les effets néfastes sur l'économie du pays se feront encore sentir pour longtemps. Ca va faire quatre décennies après la prise de cette mesure, ses retombées continuent à faire surface,. Ainsi donc, la politique de financement de ce secteur n'a pas changé jusqu'à ces jours.

Bref, l'agriculture zaïroise n'a constitué pour le pouvoir, ni une priorité et encore moins un secteur privilégié. Les possibilités financières allouées à ce secteur n'ont contribuées en rien à tirer l'agriculture zaïroise du gouffre de la zaïrianisation.

Ce coup fatal porté à son système d'approvisionnement, de production et de commercialisation affectera encore pour longtemps ce grand malade de l'économie zaïroise, comme l'appelle Gossens13(*). La différence était donc flagrante, il ne fallait pas s'attendre à des miracles lorsqu'un ministère ne recevait que 48% de ses prévisions préalablement tronquées, car une limite budgétaire était aussi imposée dès l'annonce des prévisions budgétaires de l'année suivante.

Cette insuffisance de moyens financiers n'a fait qu'aggraver davantage les contraintes14(*) au développement du secteur agricole dont voici des exemples :

1. Les carences en intrants agricoles (incapacité des agriculteurs à renouveler et à sélectionner leurs semences, à s'équiper en outils appropriés, à se procurer des engrais, des pesticides et autres herbicides ;

2. Le non-respect du calendrier agricole (le retard dans la libération des fonds alloués à un type de culture ne peut être reporté que pour l'année suivante) ;

3. Le régime foncier non adapté parfois au contexte socioculturel d'une ethnie (le fait qu'une tribu ou une ethnie reste propriétaire du sol si bien qu'aucun étranger n'a le droit de s'installer dans un village pour exploiter une terre appartenant à la tribu ou à l'Ethnie) ;

4. La faiblesse institutionnelle d'encadrement (l'insuffisance du nombre d'agronomes spécialisés dans les zones à vocation agricole due au fait que l'Etat zaïrois n'avait jamais doté ces localités d'une infrastructure d'accueil capable d'attirer les jeunes cadres universitaires) ;

5. L'absence institutionnelle de crédit supervisé (les institutions financières, bailleurs des fonds aux petits agriculteurs n'existaient pas dans ce pays ; seules les petites et moyennes entreprises pouvaient bénéficier parfois des crédits au près de la SOFIDE, de la Banque de crédit agricole et du ministère du pan) ;

6. Les voies et moyens de communication (ceci reste l'élément le plus déterminant ; aucune route d'intérêt national n'a été construite dans ce pays depuis l'indépendance, conséquemment, les étrangers interrégionaux sont inexistants ; les produits pourrissent en milieu rural dans un rayon de 200 à 800 km de grands centres urbains ; les routes sont souvent des pistes impraticables pendant la saison des pluies ; aucune ligne téléphonique entre les localités et encore moins entre les régions, une seule ligne de chemin de fer qui date du temps colonial et qui se limite à trois régions, suite à des éboulements par manque d'entretien ;

7. La distorsion des prix et le monopole de zone d'achat (pour certains centres la libéralisation des prix est effective alors que dans d'autres il y aurait blocage des prix ; ce phénomène pénalise surtout les petits agriculteurs15(*);

8. L'absence d'une politique de développement communautaire (l'agriculture est confrontée à d'autres difficultés pour sa survie même : les problèmes de soins de santé primaire, pas de dispensaire ni hôpitaux dans un rayon de plus ou moins 50 km dans les villages zaïrois et la répartition des écoles qui s'inscrit dans le même schéma et enfin, les routes de desserte agricole jamais entretenues).

Bref, l'agriculture, sous la deuxième république, n'a pas produit les faits escomptés à savoir, un impact à l'emploi, une capacité à répondre aux besoins de la population et enfin elle n'a pas su générer des devises par l'exportation des excédents de sa production aux pays voisins.

D'ailleurs, on se demande si, pour le cas du Zaïre, la thèse de Binswanger16(*) ne trouvait pas tout son sens à savoir :

« Là où la terre est abondante, la densité de la population peu élevée, et la culture itinéraire dominante, c'est une erreur d'investir dans les projets qui essaient d'augmenter la productivité de la terre(...), l'accès aux marchés et les infrastructures de transport et de commercialisation sont les formes d'investissement les plus indiquées ».

Ainsi donc, à la question de Carr17(*), à savoir : « Agriculture research or Extension service : Which has failed ? » Nous dirons qu'en ce qui concerne la RDC ni l'une, ni l'autre n'a jamais tenu compte des réalités quotidiennes auxquelles était confronté le paysan. Richard St.18(*) est plutôt optimiste et pense que l'agriculteur africain, bien que pauvre, fait preuve d'esprit et de conservation de l'équilibre de la nature dans ses préoccupations quotidiennes.

Entre 1984 et 1988, le Ministère de l'agriculture du Zaïre comptait plus 42 projets agricoles qui ne répondaient pas aux besoins urgents de la population agro-pastorale mais plutôt à la nécessité de ceux qui les avaient initié et financé19(*). Voilà pourquoi le gouvernement devait réfléchir sur un modèle de politique agricole globale et de cohérence à l'intérieur de laquelle pouvait s'articuler différentes actions : Le Plan Directeur.

* 11 Les années Mobutu (1965-1989): l'accroissement exponentiel d'une dette odieuse

* 12 Charte-programme qui définissait les orientations politiques du mouvement populaire de la révolution (MPR), le parti de Marechal Président Mobutu Sese Seko.

* 13 Gossens, F., B. Minten & E. Tollens, Nourrir Kinshasa, Le Harmattan, Paris, 1994, P. 48.

* 14 Berthelemy J.C. & C. Morrision, « Crise agricole et pénurie des devises en Afrique » in Revue Française d'Economie, Paris, France, 1999, pp. 3-30.

* 15 Gossens et alii, op. cit. p. 55

* 16 Binswanger, H., «Evaluating research system performance and targeting research» in Land-abundant areas of Sub-saharian Africa; World Development, 1986, Vol 14, pp. 469-475.

* 17 Carr, St. Agriculture research or extension service: which has failed? Rural African, 1971, Vol X, p. 208

* 18 Richard St, Indigenous Agricultural Revolution, Ecology and Food Production in West African, Hutchinson, Paris, 1985, p. 52.

* 19 Muzihigwa, K. Pêche, pisciculture et développement : L'expérience du Zaïre, Bilan et Perspectives, Août 1991. Données de base pour l'élaboration d'un plan directeur d'aquaculture nationale et pour la complémentarité de la pêche et de la pisciculture. P.U.L., 1991, p. 121

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway