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Les transitions démocratiques en Afrique noire francophone. Réflexion sur le cas de la Guinée (Conakry )

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par Oumar KOUROUMA
Université Hassan II, faculté de droit de Mohammedia (Maroc ) - Licence fondamentale de droit public 2010
  

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CHAPITRE 1 : DU CADRE THEORIQUE ET SCIENTIFIQUE DE LA REFLEXION

« ...tant il est vrai qu'une spéculation générale sans enquête de terrain est vaine et qu'une enquête de terrain sans cadrage théorique est aveugle »9(*)

R. Rieffel, Sociologie des médias.

D'entrée, il convient de souligner que c'est en s'inscrivant dans la même logique que Rieffel, que ce chapitre a été consacrée. Et comme le dit ALAIN « nos idées sont nos lunettes»10(*), ce sera donc le lieu de mettre en exergue des concepts, des notions et des 11(*)instruments d'analyse théorique devant guider l'évolution de notre travail. Mais avant tout, il conviendra de savoir ce qu'est « une théorie » et « une science ». Pour la première, le dictionnaire Larousse 2009 nous apprend qu'étymologiquement, le terme vient du grec théôria qui signifie action d'observer et se définit comme « un ensemble de théorèmes et de lois systématiquement organisés, soumis à une vérification expérimentale, et qui vise à établir une vérité scientifique ». C'est aussi un « ensemble relativement organisé d'idées et de concepts qui se rapporte à un domaine déterminé ».

Par ailleurs, dans son ouvrage de méthodes des sciences sociales12(*) , Madeleine Grawitz exposait différentes définitions selon des conceptions diverses. Ainsi pour les tenants d'une conception formelle comme Raymond Aron, la théorie est « un système hypothético-déductif constitué par un ensemble de propositions dont les termes sont rigoureusement définis, élaboré à partir d'une conceptualisation de la réalité perçue ou observée ». De sa part Manheim considère qu'une « théorie constituerait un système de croyances, une idéologie » qui varie avec le temps et qui permettrait de comprendre la période qui la suscite. D'autres côtés, se trouve la conception de la théorie explication qui soutient qu'une théorie aide à comprendre une époque.

Quant à la science, il faut reconnaitre qu'elle a fait objet de plusieurs définitions au fil et à mesure de l'évolution de la connaissance humaine. Cependant, nous n'allons nous atteler ici que sur ces acceptions modernes. Ainsi Karl Jasper nous en donne une large définition selon laquelle « la science est la connaissance méthodique dont le contenu, d'une manière contraignante, est à la fois certain et universellement valable ». Dans la même logique le Larousse 2009 sera plus clair en mentionnant que « la science est un ensemble de connaissances relatives à une catégorie de faits, d'objets, ou de phénomènes obéissant à des lois et vérifiables par les méthodes expérimentales ». Ainsi donc en parlant d'un cadre théorique et scientifique de ce sujet, il ne saurait s'agir que de l'ensemble des mécanismes mis en commun pour le rendre intelligible. C'est dans cette optique que nous serons amenés, dans une vision un peu plus large, à identifier les instruments d'analyse des mutations politiques dans le tiers monde en général mais surtout en Afrique avec tout le problème qui peut être lié à leur importation (section2). Mais bien avant cela, il conviendra d'abord de faire la lumière sur l'encrage sémantico-historique du concept de transition (section1).

SECTION1 : DE L'ENCRAGE SEMANTICO-HISTORIQUE DU CONCEPT DE TRANSITION

Pour commencer il faut rappeler que le terme « transition » vient du latin « transitio » qui signifie « passage », et désigne « le passage d'un état de chose à un autre »13(*) ou d'une situation à une autre. Il fut en grande partie utilisé en rhétorique pour désigner « la manière de lier les parties d'un discours ». Ce passage peut être brutal, rapide ou se réaliser progressivement. Toutefois, il faut reconnaitre qu'il n'est pas facile de cerner ce terme car il fait objet d'emploi dans plusieurs domaines, au-delà de celui du politique, notamment celui économique mais aussi épistémologique, philosophique et les sciences de la nature. Mais ici c'est son usage dans les études politiques qui nous intéresse le plus. Ces études politiques entendues dans ce contexte comme sociologie politique, économie politique etc... C'est dans ce sens qu'il nous est rappelé que l'utilisation du terme remonte essentiellement aux travaux de Karl Marx en économie politique et sciences politiques avant de faire objet d'une appropriation plutard (1989) par les analystes des changements démocratiques (la troisième vague). Dans cette présente réflexion, il s'agira donc de retrouver cette origine marxiste du concept (paragraphe1) avant de se pencher sur son emploi actuel dans le cadre d'une conception libérale de la démocratie (paragraphe2).

PARAGRAPHE1 : DU CONCEPT DE TRANSITION : une construction marxiste

Dans son article publié le 7 Janvier 2004 dans la revue multitudes14(*), GUILHOT Nicolas rappelle avec rigueur les origines marxistes d'un usage scientifique du concept de transition. C'est d'ailleurs à ce titre que le professeur Timothée NGAKOUTOU15(*) considère que Karl Marx et Max Weber lui ont donné ses lettres de noblesses dans leur analyse des processus par lesquels la société capitaliste a succédé à celle féodale en Europe. En effet, dans le cadre de son étude des différents modes de production qui ont jalonné l'Histoire de l'Humanité, Marx développe en véritable théorie le concept de transition : d'abord perçu comme le passage d'un système de production à un autre. Cependant, c'est dans la critique de l'Etat bourgeois qu'il sera le plus marquant en parlant du nécessaire passage du système capitaliste au système communiste. C'est delà qu'on peut réellement saisir l'essence de l'usage actuel de ce concept. Mais par la primauté qu'il accorde au facteur économique, cette transition est d'abord économique (I) avant d'être politique (II).

I. DE LA TRANSITION ECONOMIQUE CHEZ MARX :

Dans la logique marxiste, la transition est perçue comme « le passage d'un stade de développement historique à un autre, où le second (socialisme) est déjà présent comme la dynamique concrète de ce passage, et réalise le processus de destruction de l'État ». C'est dans la même logique qu'interviennent les écrits de Gilles DOSTALER qui désigne par transition économique « un état ou une situation qui correspond à certaine forme d'organisation sociale ». D'après DOSTALER, cela implique l'organisation de la production matérielle, de la distribution, des échanges, de la consommation, ainsi que la « nature » des institutions politiques, juridiques, sociales, et les idéologies en cours. Cette combinaison de réalités sociales est ce que Marx appellera mode de production. Ce dernier est une réalité mouvante car animé par la lutte des classes. C'est donc de ce dynamisme que les systèmes infrastructurels parviendront à la véritable finalité qui est le communisme. En définissant donc le communisme comme une finalité du processus d'effondrement du système économique capitaliste, la doctrine marxiste construisait une phase transitoire qui est: le socialisme réel conçu comme un stade historique.

Ainsi, dans sa critique du capitalisme, Marx présente un système d'exploitation de l'homme par l'homme, incapable d'assurer le progrès malgré qu'il ait été à la base de la révolution industrielle. Car ce système, selon lui, ignore que « l'ouvrier produit le capital et le capital produit l'ouvrier ». C'est un système, d'après lui, qui produit ses propres fossoyeurs ; et sa chute et la victoire du prolétariat sont également inévitables. Donc, au nom d'une certaine eschatologie, le marxisme annonçait une révolution qui devait changer l'ordre du monde. D'où d'ailleurs Rosa Luxembourg écrit : « la révolution est grandiose et tout le reste n'est que connerie16(*)». Cette révolution à la fois économique et politique que l'URSS (Union des républiques Soviétiques Sociales) initia gagnera le monde avec les multiples conversions, selon réalités locales, des systèmes économiques nationaux au socialisme (comme en Guinée, au Sénégal et au Ghana sous les premières républiques pour ne parler que de ceux-ci en Afrique) ou au communisme en Chine, en Corée du sud..... Donc ces changements économiques planétaires portent en eux les traits qui semblent être communs à toutes les transitions : la contestation de l'ordre précédent, la recherche d'un système efficace.

Toutefois, pour toucher notre cible, la transition démocratique, il convient d'exposer l'aspect politique de cette origine marxiste du concept de transition.

II. DU CONCEPT DE TRANSITION POLITIQUE CHEZ MARX

Malgré la place prépondérante que prit le facteur économique dans la pensée de Karl Marx, celui politique n'était pas en reste, pour ne pas dire qu'il ne les séparait pas. Toutefois, le premier devait déterminer le second : tel est d'ailleurs le socle de sa philosophie. A ce titre il écrit : « la structure économique de la société constitue la base concrète sur laquelle s'élève une superstructure juridique et politique et à laquelle correspondent des formes de conscience sociale déterminées ».

La transition politique qui se définit, au sens strict, chez Ana SALDANHA comme « un changement politique contrôlé qui s'opère au sein de certaines sociétés et qui permet le passage d'un système à un autre sans que l'on puisse délimiter le moment précis de rupture17(*) », est donc chez Karl Marx le passage à la société sans Etat qui consacrera la grande libération politique et sociale de l'Homme. Cela devra se faire par le dépérissement de l'Etat. Ainsi un nouvel ordre politique pourra naitre. Cette transition est donc perçue à la fois comme une rupture mais aussi comme une véritable révolution devant libérer l'Homme du poids de tout système de classe source de domination économique et politique.

Cette importante transition des régimes politiques capitalistes a son processus propre reparti en des étapes : la première étant rapide et non pacifique, est la révolution qui devra renverser le pouvoir capitaliste qui n'est autre qu'un appareil d'exploitation de la masse ouvrière ; Cette révolution devra donner naissance au système socialiste comme seconde étape. Ce système étant conçu comme la phase historique constitue la véritable période de transition politique et économique du système capitaliste au communisme. Ce sera le moment du règne de la dictature du prolétariat18(*), de la socialisation des moyens de production et donc du dépérissement de l'Etat. Pour enfin aboutir au communisme. Toutefois, si cette explication part du capitalisme, il faut dire que d'autres phases historiques sont déjà dépassées à savoir: la communauté primitive, le régime esclavagiste, le régime féodal.

C'est dans ce contexte que la révolution bolchevique de 1917 en Russie s'affirmera comme le point de départ de la conversion des systèmes capitalistes en systèmes communistes.

Ainsi, il découle de cette explication que le concept de transition n'est pas une fille de la toute jeune discipline de la science politique occidentale qui est la transitologie mais bien une construction marxiste et approfondie plutard dans la soviétologie. Cela se justifie par l'usage de vocabulaire comme révolution, rupture, changement... ; le souci de remise en cause de l'ancien système conçue contraire au progrès humain .... Mais, après cette découverte, on se demande comment le concept actuel de transition démocratique a-t-elle été construit ? Quel est son contenu ? C'est à ces questions que nous tenterons de répondre dans les lignes qui vont suivre.

* 9 Mamadou NDIAYE, E-GOUVERNANCE ET DÉMOCRATIE EN AFRIQUE : LE SÉNÉGAL DANS LA MONDIALISATION DES PRATIQUES, Thèse pour le Doctorat en Sciences de l'Information et de la Communication, Université de Bordeaux, 2006, p17

* 10 Alain, le citoyen contre les pouvoirs, Paris, Ed. Du Sagittaire, 1926, p.148.

* 11 M. Grawitz, Méthodes des sciences sociales, Paris, éd. Dalloz, 1996, p22

* 12 Madeleine Grawitz, Méthodes des sciences sociales, Paris, éd. Dalloz, 1996, p377

* 13 Le Larousse 2009

* 14

http://multitudes.samizdat.net/La science politique et la transition démocratique à l'Est.

* 15 Timothée NGAKOUTOU, Les limites de la démocratie subsaharienne, éd. Etudes Africaines

* 16 François Châtelet, Olivier Duhamel, Evelyne Pisier-Kouchner, Histoire des idées politiques, 1982, éd. presse universitaire de France, p142.

* 17 Ana Saldanha, « Révolution des OEillets : transition sociopolitique et démocratisation au Portugal », ILCEA, 13 | 2010 , [En ligne], mis en ligne le 30 novembre 2010. URL : http://ilcea.revues.org/index872.html. Consulté le 12 mai 2011.

* 18 Ce système peut se comprendre mieux en faisant recours au marxisme-léninisme

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe