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Le régime de l'administration transitoire des territoires en droit international.

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par Luc Yannick ZENGUE
Université de Yaoundé II (SOA) - Diplôme d'études approfondies en droit international public et communautaire 2007
  

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2- Le pouvoir discrétionnaire du Conseil de Sécurité

En droit, l'autorité ainsi que le moyen employé pour l'émission d'une décision, doivent être identiques en ce qui concerne le retrait de la même décision. C'est en cela que consiste le principe du parallélisme des formes. Transposé dans notre cadre, ce principe implique que la fin d'une administration directe d'un territoire par les Nations Unies ne peut intervenir qu'à travers une résolution du Conseil de sécurité dans l'exercice de ses pouvoirs exclusifs et discrétionnaires au titre du chapitre VII.

Le pouvoir est exclusif en ce sens que si le conseil n'en fait pas usage, aucune autre entité ne peut s'en prévaloir. Il est le seul à exercer le pouvoir. Même sur le fondement de la résolution Dean Acheson, ni l'Assemblée générale, ni le Secrétaire général, n'ont eu à intervenir dans l'activité d'une administration transitoire pour y mettre fin en lieu et place du conseil.

Quant au caractère discrétionnaire du pouvoir du Conseil en vue de mettre fin à une administration transitoire, il est parallèle du pouvoir dont dispose le Conseil pour qualifier une situation susceptible d'être classé dans la triade du chapitre VII. Le Conseil est le seul juge du moment où une situation cesse de troubler la paix et la sécurité internationales, d'une part, et de l'atteinte des objectifs globaux de l'administration intérimaire. La décision, dans le cadre de la situation au Kosovo que « la présence internationale civile et la présence internationale de sécurité sont établies pour une période initiale de 12 mois, et se poursuivront ensuite tant que le Conseil n'en aura pas décidé autrement»122(*), est fort illustrative à ce sujet. Toutefois, ceci n'empêche pas une certaine flexibilité dans la pratique du Conseil. Agissant sur proposition su Secrétaire général, il tient compte de la situation sur le terrain, du coût de l'opération, de la possibilité pour d'autre organisations ou institutions spécialisées de prendre la relève au niveau notamment de l'aide au développement et - last but not least- de la volonté de l'Etat, voir des parties concernées123(*).

L'observation des progrès considérables au sein du territoire concerné par une administration transitoire et la mise en oeuvre par le Conseil de son pouvoir discrétionnaire sont des conditions cumulatives de la cessation des activités d'une administration transitoire en droit international. Mais il ne s'agit pas pour « la présence internationale » de se retirer de manière instantanée, une fois les conditions satisfaites, et sans autre forme de procédure. Des stratégies spécifiques sont employées à cet effet.

B. Les stratégies de la sortie d'une administration transitoire en droit international

Comme l'indique bien son appellation, une administration dite transitoire n'a pas vocation à s'éterniser. Elle est limitée dans le temps, et a pour ambition le rétablissement des conditions idoines d'exercice par les autorités locales, des pouvoirs de gouvernement sur un territoire. Une fois la période nécessaire audit rétablissement écoulée, il importe de rechercher les voies de sortie de l'administration internationale. Généralement, ces issues s'articulent autour d'une intensification de la création des institutions locales et du transfert de l'administration, ainsi que l'organisation d'une consultation populaire.

1- L'intensification de la création des institutions provisoires locales et le transfert de l'administration

La conséquence de l'octroi à une entité juridique quelconque d'un certain pouvoir, est la mise à sa charge d'une responsabilité certaine. En optant d'intervenir en faveur de la création ou de la restauration de l'Etat, l'O.N.U. ne fait rien d'autre que de s'engager dans la « création ou le rétablissement des institutions inexistantes, endommagées ou détruites »124(*). A titre d'illustration, en guise de réponse aux larges pouvoirs de la MINUK, il existe entre autres, les responsabilités suivantes :

1) « Organiser et superviser la mise en place d'institutions provisoires [...]

2) Transférer ses responsabilités administratives aux institutions susvisées, à mesure qu'elles auront été mises en place, tout en supervisant et en facilitant le renforcement des institutions locales du Kosovo »125(*).

Dans la résolution 1272 (1999) du 25 octobre 1999, le Conseil souligne en outre,  « qu'il faut que l'ATNUTO consulte la population [...] en vue de créer des institutions locales démocratiques, notamment une institution indépendante chargée des droits de l'homme au Timor oriental, et de transférer ses fonctions administratives et de service public à ces institutions ».126(*) De même, l'une des missions conférée par le Conseil à la MINUK, consiste, « à un stade final, superviser le transfert des pouvoirs des institutions provisoires du Kosovo aux institutions qui auront été établies dans le cadre d'un règlement politique »127(*). Les institutions dont il s'agit sont des instituions moulées dans le model démocratique des Nations Unies ; puisque la démocratie et le développement sont interdépendants et se renforcent mutuellement128(*).

Dans la deuxième phase d'une administration intérimaire, les pouvoirs d'administration sont transférés progressivement aux institutions locales. Le moment de ce transfert peut être déterminé dans le temps. Ainsi, dans le cadre de l'AETNU, le transfert de l'administration aux autorités locales a été rendu nécessaire à partir du 1er mai 1963. Toute chose qui constituait en elle-même, une limitation ratione temporis de l'exercice des prérogatives de puissance publique par l'O.N.U. Lent et progressif, le processus de création desdites institutions et le transfert des pouvoirs à celles-ci s'intensifie de façon décisive quand arrive la fin de l'administration. Le but essentiel devient dès lors non plus la création des conditions minimales pour l'administration du territoire par l'Organisation, mais celui de permettre à la population locale de décider de l'avenir du territoire (Timor) ou alors d'en exercer l'auto-administration démocratique dans le cadre d'une entité étatique dont la souveraineté et l'intégrité territoriale ne sont pas remises en question par le Conseil de sécurité (Kosovo).

Le transfert de l'administration ne met pas fin de manière radicale à l'engagement des Nations Unies. L'organisation peut rester saisie de la situation via d'autres passerelles. A titre d'illustration, l'engagement des Nations Unies en Irian occidental ne prit pas fin avec le transfert de l'autorité à l'Indonésie. Aux termes de l'article XVI de l'Accord, des experts des Nations Unies sont chargés de rester là où leurs fonctions exigeaient leur présence. De plus, conformément à l'article XVII, un représentant du Secrétaire général fut nommé. Assisté par les experts susmentionnés, il exerça une fonction consultative et de concours pour la conclusion des arrangements qu'il incombait à l'Indonésie de prendre pour l'autodétermination du territoire129(*)

Cependant, l'intensification de la création des instituions et le transfert des compétences à elle seule ne saurait suffire à mettre fin à une présence internationale. Encore faut-il qu'elle s'accompagne de l'organisation des élections populaires et du retrait de ladite présence internationale.

2- L'organisation des consultations populaires et le retrait de la présence internationale

L'expiration de la période d'administration intérimaire est généralement marquée par l'organisation sous les auspices de l'O.N.U., d'une consultation populaire. Cette consultation peut se décliner sous la forme d'un plébiscite, d'un référendum ou d'une élection. Dans les deux premiers modes de consultation, il s'agit de déterminer le sort définitif du territoire alors qu'une élection vise la détermination de l'identité des personnes appelées à présider aux destinées de l'Etat restauré ou nouvellement crée.

Ainsi donc, à la fin de la période d'administration internationale du territoire de la Sarre, un plébiscite est organisé le 13 janvier 1935. La solution du retour à l'Allemagne l'emporte à la quasi-unanimité (90,3% des voix) ; en conséquence, le Conseil de la S.d.N. décide par une résolution du 17 janvier 1935, « la réinstallation de l'Allemagne dans le gouvernement du territoire du bassin de la Sarre »130(*).

C'est également à la faveur d'une consultation populaire organisée sous l'égide de l'ATNUTO, que le territoire du Timor oriental accède finalement à l'indépendance et la République du Timor Leste devient membre des Nations Unies le 27 septembre 2002131(*).

Le mode électoral est privilégié dans la détermination du statut futur du territoire provisoirement administré, ainsi que dans celle de l'identité des autorités locales, en raison de l'optique de la « démocratisation de l'Etat »132(*) dans laquelle s'inscrit résolument l'O.N.U. dans les deux dernières décennies. En effet, « la supériorité morale d'un pouvoir qui est légitimé par la volonté du peuple, exprimée lors des élections libres et honnêtes »133(*), est le gage indéfectible d'une véritable stabilité. Cependant, ici certaines questions méritent d'être évoquées : Les opérations de retour pourront-elles être accélérées pour permettre aux réfugiés de prendre part aux élections ? Sinon, faudra-t-il prévoir des possibilités de vote par correspondance ? Il reste tout de même qu'au lendemain des élections, le rôle de la mission d'administration intérimaire aux côtés d'une assemblée constituante élue doit être repensé. Des adaptations du mandat ou, au moins, du mode de fonctionnement de la mission sont nécessaires.

La phase du départ des présences internationales soulève des questions toutes aussi cruciales pour la consolidation de la paix que du régime démocratique. Pour reprendre les termes du Secrétaire général de l'O.N.U. concernant la situation en Haïti, « si ce départ a lieu trop tôt, il risque de déstabiliser un gouvernement encore vulnérable et inciter les forces de la réaction à profiter de sa faiblesse. S'il a lieu trop tard, il peut créer une situation de dépendance préjudiciable à la stabilité et au développement futur du pays »134(*). Il revient aux Nations unies, de concert avec les autorités locales, de prendre en considération ces différents paramètres et de décider du moment idéal du retrait des présences internationales. Ainsi, il peut arriver que le souverain territorial réinstallé ou installé sur le territoire, convienne avec les Nations Unies, de la continuité de la présence de tout ou partie soit de la présence internationale civile, soit de la présence internationale de sécurité seulement, voire des deux en même temps. L'Indonésie accepta la permanence sur le territoire d'un certain nombre de fonctionnaires des Nations Unies, « là où leurs fonctions [exigeaient] leur présence »135(*).

C'est l'illustration d'une administration coopérative et intégrative.

* 122 Résolution 1244, par. 19

* 123 SICILIANOS (A.-L.) L'ONU et la démocratisation de l'Etat : Systèmes régionaux et ordre juridique universel, Pedone, Paris, 2000, p.228

* 124 DAUDET (Y.), « La restauration de l'Etat », in Les Nations Unies et la restauration de l'Etat, op. Cit.,p. 18

* 125 Résolution. 1244, Op.Cit., par. 11c), d)

* 126 Résolution 1272 (1999), par. 2 et 8 ; c'est nous qui soulignons.

* 127 Résolution. 1244, Ibidem, par. 11f) ; C'est nous qui soulignons

* 128 Le 50éme anniversaire de l'O.N.U., Rapport annuel du Secrétaire général sur l'activité de l'organisation, 1996, New York, NU, 1996, p. 363

* 129 Voir Yearbook of the United Nations, 1962, p. 126.

* 130 Voir ROUSSEAU (Ch.), Droit international public, tome II, Paris, Sirey, 1974, p. 418

* 131 Voir Le Monde, 28 septembre 2002

* 132 SICILIANOS (A.L.) L'ONU et la démocratisation de l'Etat : Systèmes régionaux et ordre juridique universel, Op. cit., p. 2

* 133 Déclaration adoptée à l'issue de la conférence internationale des démocraties nouvellement restaurées, NU, doc. A/43/538, 16 août 1988, Annexe, p 22

* 134DALLIER (P.), « La fin des opérations de maintien de la paix des Nations Unies », AFDI, n° 42, 1996 p. 70 ; Les Nations Unies et Haiti, p. 6 ;

* 135 « Accord entre la République d'Indonésie et le Royaume des Pays-Bas concernant la Nouvelle-Guinée occidentale (Irian occidental) », signé au siège de l'Organisation des Nations Unies, à New York, le 15 août 1962, publiée in : RTNU, 438, p. 275, et aussi reproduit en annexe au Doc. NU A/5170, du 20 août 1962, et au Doc. NU S/5169, du 21 septembre 1962, article XVI

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