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L'école à  l'hôpital. L'école répond- elle aux besoins des enfants hospitalisés ?

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par Françoise LEDROIT
Université Lumière Lyon 2 - Licence en sciences de l'éducation 2004
  

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1.2.3 L' adolescent et l'hospitalisation

S'ils ne sont pas hospitalisés en raison de rechutes ou d'une chronicité du mal, ils sont souvent admis pour les conséquences d'une prise de risques (accidents, alcool), ou de troubles du comportement (tentative de suicide, anorexie, boulimie). Chez l'adolescent, le handicap insupportable, a des répercussions psychologiques singulières:

32

- le corps perçu comme un objet «persécuteur» diminue l'estime de soi,

- le handicap bloque la socialisation, l'autonomie, incite à la passivité,

- la disparité corps /cerveau nécessite une redistribution des actes de vie, (déscolarisation, isolement social)

- traitement et maladie occasionnent conflits et auto-agression suicidaire,

- les maladies chroniques (diabète, RAA, épilepsie, asthme, insuffisance rénale), induisent le rejet (affectif ou des contraintes), suscitent les provocations (de toutes formes). Ces attitudes initient les rechutes dues aux interruptions de traitement. Par l'écoute empathique et l'enrôlement dans des activités cognitives, l'enseignant travaille à la restauration de l'estime de soi : en donnant un rôle actif, d'acteur ou de sujet impliqué. La maladie peut être envisagée comme un outil d'émancipation dès que s'engage le processus d'autonomisation. Elle confère à l'adolescent le sentiment de compétence quand il décèle ou règle ses propres problèmes.

La création de services médicaux pour adolescents est de conception récente (il n'y en a pas au CHT). On y privilégie le partenariat convenant à la prise en charge globale de l'individu.

La médecine, peut alors mieux répondre aux besoins des adolescents confrontés à des expressions somatiques liées à leur environnement social ou leur comportement psychique.

32 Armengaud D., L'adolescent malade, dans Guide de l'hospitalisation des enfants, Apache, Antony, 2000, p. 213-216.

16

1.2.4 Pédagogie adaptée

33

« L'école à l'hôpital est le meilleur moyen de normaliser la vie de l'enfant hospitalisé» L. Rossant

L'école à l'hôpital est un soutien social fort, destiné aux enfants et aux parents.

*

L'enseignant perçoit l'angoisse des uns et des autres. Il doit leur permettre de l'expri-

mer et offrir le soutien d'une relation stable. La pédagogie de l'enseignant concilie les demandes familiales et institutionnelles de continuité scolaire auxquelles s'ajoute la

34

problématique liée à la maladie. Ce qui nécessite le partage de la confidentialité .

«L'aide dont il a besoin pour vivre avec sa maladie, est un discours sur la globalité de son être,

35

que prononcent ensemble, en collaboration, médecin et enseignant.» Peyrard J-P

L'enseignant accorde de l'importance à l'enfant dans l'élève par l'écoute de son angoisse*, et à l'élève dans l'enfant malade par le maintien de la structure sociale qu'il reconnaît: l'école.

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« Peut-on envisager de faire agir l'enfant alors que l'on n'a pas écouté l'essentiel ? » H. Voisin

a) Mission du pédagogue

La mission du pédagogue consiste à guider l'enfant malade, sur un canal porteur intellectuel efficient. Elle vise à développer l'appétence : goût de vivre, de jouer, de comprendre, de se préoccuper de sa santé. Il s'agit de solliciter, activer ou réactiver toutes les fonctions cognitives, d'utiliser tout moyen d'expression, et de créativité. Il faut entraîner l'enfant vers des préoccupations externes afin qu'il fonde des projets.

S'il évoque sa pathologie, son traitement, c'est pour s'en distancier et se fondre dans la normalité de l'activité scolaire. L'enseignant (l'équipe éducative) prend en compte la douleur, le traitement, les restrictions, il est impliqué à la vigilance du handicap, par une information nécessaire au vécu quotidien. Il aide à comprendre les paroles des soignants, à situer les croyances exprimées, les rectifier au besoin (connaissances du corps, physiologie). Il guide l'enfant et le jeune dans ses propres réflexions notamment celles se rapportant à la prise de risque (physique, biologique, domestique ou social).

b) Posture du pédagogue-médiateur

Un séjour hospitalier convient à la pause structurante, à l'amélioration du concept de soi quand l'élève est en difficulté. La brièveté des séjours impose de recourir à ce que

33 Rossant L., L'hospitalisation des enfants, Que sais-je ?, PUF, Paris,1984, 127 p.

34 Voir en annexe «Réflexion : Du secret médical à la confidentialité ».

35 Peyrard J-P., Problématique de l'enseignement des élèves malades, dans Guide de l'hospitalisation des enfants, p.138.

36 Directrice honoraire du centre scolaire de l'hôpital A.Trousseau à Paris.

17

l'élève sait déjà : ses métaconnaissances et de travailler sur ses difficultés. Il est fait

37

appel à l'élève «méthodologue» et «analysant» métacognition 38

. La permet de prendre
conscience de sa propre façon de penser, par une introspection visant à contrôler ce que l'on sait et ce que l'on fait. Elle favorise la maîtrise des apprentissages et de l'au-tonomie, à travers la capacité d'évaluation qu'elle développe.

Il faut «récupérer» ses métaconnaissances, lui permettre de se représenter un objectif, afin qu'il adopte une procédure adaptée. On lui demande d'évaluer sa démarche par verbalisation de l'expérience acquise (rétroaction), de constater sa propre «capacité réflexive» afin qu'il comprenne ce qu'il fait pendant qu'il le fait. L'élève doit pouvoir dé-contextualiser la procédure (niveau inter-psychique) qu'il adopte, pour élaborer un schéma abstrait, global, et personnel (niveau intra-psychique). Le sentiment d'efficacité généré par

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l'attribution intérieure de réussite permet d'améliorer l'ipséité , favorise l'implication de l'élève, donne du sens aux apprentissages.

c) démarche

L'évaluation diagnostique est un prélude à la démarche, amenant l'élève à se présenter. (Une fiche «Je me présente», permet à l'enseignant de faire connaissance avec l'enfant). Chaque élève, du CP au CM2 dispose du moyen de lire, commenter et remplir sa fiche. Elle est complétée par une fiche d'évaluation tenue par l'enseignant.

La phase de décentration/métacognition porte sur deux points douloureux:

· Les causes de l'hospitalisation : elles sont racontées, écrites et/ou dessinées.

Les souvenirs traumatisants sont stockés dans l'un des hémisphères cérébraux. Dans le cas de l'hémi-sphère gauche, siège du langage, le sujet peut restituer les souvenirs par la parole. Ce qui n'est plus possible dans le cas inverse impliquant le «syndrome de stress post-traumatique». Pour la Science n° 317 p 11.

Elles visent d'abord la compréhension et l'appropriation de la maladie ou du handicap. Charles Gardou dirait que penser est « apprendre à diriger sa conscience, à lire et à donner signification au vécu, et à en faire un lieu privilégié de compréhension» 40 (penser, permet aussi de panser la blessure).

41

Pour donner du sens aux apprentissages, on fait appel à «l'élève psychologue» , on écoute

42

son vécu, dédramatise l'émotionnel l'utilisant comme support d'apprentissages.

Cette distanciation permet à l'enfant de se délier de situations vécues et de ses affects pour les envisager sereinement afin d'établir un rapport avec le désir d'apprendre.

37 Develay M., Donner du sens à l'école, op.cit.

38 Dolly A-M., Métacognition et médiation, CRDP d'Auvergne, 1997, 104 p.

39 Prise de conscience de soi.

40 Gardou C., La personne handicapée : d'objet à sujet, de l'intention à l'acte, Colloque à Lyon II,17-19 sept. 1998.

41 Develay M., ib. id.

42 Voir annexes «les maux en mots».

·

18

Les difficultés scolaires : il s'agit de les situer, d'en permettre l'intelligibilité, d'ouvrir la négociation, d'élaborer un programme et d'envisager le but à atteindre. Cette mise en «pro-jet» fait appel à l'élève «stratège», les bénéfices qu'il pourra en tirer lui permettent de penser le futur à la lumière du présent. Ces activités ont lieu dans la Zone Proximale de Développement 43 circonscrite lors de l'évaluation diagnostique. Dans cet espace d'action (ZPD) l'apprentissage médiatisé par l'enseignant prend du sens pour l'apprenant. L'enseignant-médiateur s'adapte au cheminement intellectuel, instrumentalise erreurs et tâtonnements pour faire son diagnostic, et produire l'analyse

44

d'évaluation formative . Donner du sens à l'école, c'est mettre l'élève en projet dans

ses dimensions sociologique et psychologique. Le projet s'ancre dans la réalité du passé, l'analyse du présent (ce que je peux faire pour y remédier), et dans le sentiment de continuité (le retour à l'école).

d) Verbalisation

Le dialogue de la relation duelle passe dans la verbalisation, utilisée comme moyen de transfert, et de lien entre «l'avant et l'après». Le langage développe l'abstraction.

45

En passant de l'implicite à l'explicite, la mise en mots favorise la conceptualisation et

la distanciation. Elle permet de matérialiser les représentations (objectives et subjectives) des acquis et des doutes. Il s'agit d'opérer des prises de conscience pour mettre en rapport les moyens utilisés et le but à atteindre aussi bien sur la maladie que le savoir scolaire. L'hospitalisation peut représenter deux pans d'une vie «l'avant et l'après». L'enseignant-médiateur doit réunir et mettre en lien ces deux pans, les acquis en constituent le cément. Cette démarche de «conflit socio-cognitif », activé dans l'interaction verbale, est un gage de progrès.

«Dans l'espace de l'action et du dialogue, le sens s'élabore. L'interaction se transforme en pensée ; le sens est une construction de l'apprenant... conçu comme un processus social d'intériorisation» 46

Verbaliser aide «l'élève épistémologue» à saisir la signification de ce qu'il vit, à créer des ponts entre ce qu'il sait ou reste à apprendre, à faire le lien entre la maladie et la biologie.

« Cette trans-disciplinarité permet au sujet de se comprendre en apportant des réponses à des questions clés telles que celles de l'existence et de la conscience » 47

43 De ce que l'apprenant peut faire seul à ce qu'il peut atteindre avec l'aide d'un tiers (ZPD).

44 Évaluation qui informe l'enseignant et l'élève sur l'état d'avancement de l'apprentissage.

45 Voir l'annexe, mettre les maux en mots.

46 Barth B-M., L'apprentissage de l'abstraction, Retz, Paris, 2001, p. 206.

47 Develay M., op cit., p. 107.

e) 19

Motivation

Favoriser le sentiment de compétence 48

49

« Un élément nouveau n'est intégré que s'il solutionne un problème ou répond à une question »

La motivation est, selon Lieury, la résultante des besoins d'autodétermination et de compétence. Pour cela, l'enseignant cherche à créer la motivation intrinsèque qui enrôle le sujet dans une tâche, en ciblant les activités le poussant à s'investir activement et personnellement. La tâche est définie en fonction des besoins, des intérêts et des objectifs personnels de l'élève (implication et autodétermination). La difficulté est appropriée à l'élève qui s'en acquittera au mieux (la compétence perçue est proportionnelle à l'effort fourni et aux résultats).

50

L'affectif et le cognitif sont intimement liés : nos actions, décisions, rapports sociaux

et apprentissages dépendent d'une somme d'interférences liant émotions et raisonnement. Le sentiment de satisfaction éprouvé par l'auto-contrôle du travail scolaire rejaillit sur l'élève, le malade voire la maladie.

La motivation permet l'engagement par lequel l'individu s'implique dans le cours du monde*, elle est le produit du passé et l'ébauche d'une destinée. (J. Ladrière)

f) Projet d'école

En milieu hospitalier, les projets sont individualisés, plaçant de fait l'enfant au centre du système éducatif (Ce paradigme des Écoles à l'hôpital fut généralisé par la loi d'orientation de 1989).

1° Il s'agit d'associer étroitement la famille au projet individualisé, de maintenir la socialisation en luttant contre l'isolement, en créant des liens avec les autres malades et l'école d'origine.

*

2° Préserver et/ou restaurer le moi (ipse ) de l'enfant malade permet de dédra-

*

matiser le vécu par une mise en mots 51 de l'angoisse et de la douleur,

« La perception des émotions exerce une puissante influence sur la raison»52 A. Damasio L'émotion interfère à la fois sur le biologique et le cognitif.

3° En partenariat avec l'élève et son école, le projet d'activité cible les compétences à atteindre dans les matières fondamentales.

53

4° Les activités créatives, ludiques et sociales, l'éducation à la santé et aux

48 Lieury A., Fenouillet F., Motivation et réussite scolaire, Dunod, Paris, 1996, p. 123-124.

49 Meirieu P., Apprendre...oui, mais comment, ESF, Paris, 1987, p. 166.

50 Bloom B., citation rapportée par Barth B-M, op cit., p. 193. Le facteur affectif interviendrait à 25% dans la réussite, les méthodes de l'enseignant 25%, « l'état d'entrée du cognitif» 50% .

51 Voir l'annexe, Mettre les maux en mots.

52 Damasio A., L'erreur de Descartes, Odile Jacob, 1995.

53 Le jeu autorise une verbalisation symbolique des conflits.

risques sécurisent en favorisant la motivation intrinsèque aux apprentissages.

54

Nous conclurons, en accord avec Lévine l'existentiel *

, que chez l'enfant hospitalisé,

(vie / maladie / mort) prime sur le temporel (scolarité), le sentiment de sécurité et le rétablissement des liens sociaux sont un préalable à la mise enjeu du cognitif.

Ò Les agressions s'inscrivent dans les mécanismes opératoires de la pensée. Si l'école ne cherche pas comment on restaure le moi d'un enfant qui a subi des agressions, et ne donne pas la priorité à ce problème sur celui des apprentissages traditionnels, elle propose une expérience scolaire artificielle » . Lévine Jacques

55

« L'activité cognitive naît dans les espaces relationnels qui la rendent possible »

La parole donnée à l'enseignant à l'hôpital formalise ce projet.

Deux enseignants spécialisés sont assistés par des suppléants chargés de cours qui interviennent dans leur spécialité. Ces derniers furent invités à donner leur avis en répondant aux questions suivantes: Réponse de l'un d'eux:

- Comment définis-tu ton travail d'enseignant auprès des jeunes hospitalisés?

plusieurs mots conviennent à définir ce travail : soutien scolaire, travail au rythme de

l'élève, adaptation et patience ; soutien psychologique (l'école fait oublier)

- Qu'elles sont les demandes des élèves hospitalisés?

S'occuper, réviser, comprendre, lire, travailler, s'amuser sur l'ordinateur

- En quoi ton action d'enseignant te semble la plus utile?

L'enseignant est le lien avec la normalité

- Quels sont les problèmes que tu rencontres (élèves, parents, collègues, soignants, CHT)

Établir les relations avec l'école d'origine

Déterminer promptement le niveau scolaire d'un élève

L'exiguïté des locaux scolaires

- Pour améliorer les conditions de ton travail, que suggères-tu?

Être soutenu par l'Institution

Augmenter le nombre d'enseignants.

Après cet état des lieux, nous aborderons l'enquête.

20

54 Levine J., L'enfant malade et les fondements de la psychologie scolaire, Bul. 18 AFPS, 12/1976.

55 Barth B-M., dans op. cit., p. 211.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway