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Le trafic international de faux documents d'identité


par Jean-Michel HAZIZA
Université de Pau et des Pays de l'Adour - M2 Police et sécurité intérieure  2019
  

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Parties à l'ONU

529. Structure et missions. L'ONUDC est un organe du Secrétariat des Nations-Unies, créé en 1997. Cet Office a pour mission d'aider les Etats membres de l'ONU dans un objectif de sécurité des personnes et des biens contre la grande criminalité, la drogue et le terrorisme.

530. Formation de juristes en amont des frontières de l'espace Schengen. Par exemple, l'ONUDC est tout à fait compétent pour « former des juristes en Afrique de l'Ouest à la coopération judiciaire internationale pour renforcer la lutte contre la traite des êtres humains et le trafic illicite de migrants »544, pays de départ des organisations criminelles de trafiquants d'êtres humains et de faux documents d'identité. Cette capacité à former des juristes dans les pays de départ des filières d'immigration illégale peut être considérée comme une surveillance policière en amont des frontières de l'espace Schengen545.

544 https://www.unodc.org/unodc/fr/frontpage/2019/February/unodc-trains-west-african-criminal-justice-practitioners-on-international-judicial-cooperation-to-enhance-fight-against-human-trafficking-and-smuggling-of-migrants.html?ref=fs4;

545 https://www.unodc.org/unodc/en/aboutunodc/index.html?ref=menutop : « Les trois piliers du programme de travail de l'UNODC sont les suivants : projets de coopération technique sur le terrain visant à renforcer la capacité des États Membres de lutter contre les drogues illicites, la criminalité et le terrorisme ; travaux de recherche et d'analyse visant à accroître la connaissance et la compréhension des problèmes liés à la drogue et au crime et à élargir la base de données factuelles pour les décisions politiques et opérationnelles ; activités normatives visant à aider les États à ratifier et à appliquer les traités internationaux pertinents, à élaborer une législation nationale sur les drogues, le crime et le

531.

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Aide à la diffusion d'informations. Pour assurer une surveillance de tous les Etats membres de l'ONU, l'ONUDC promeut la facilitation « de la diffusion d'informations sur la mise en oeuvre de la Convention des Nations-Unies contre la criminalité transnationale organisée et plus particulièrement du Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, mer et air »546, et du Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.

532. Coopération technique sur le terrain : sécurisation des documents d'identité et de voyage aux frontières. L'UNODC va assurer notamment une coopération technique sur le terrain pour renforcer la capacité des Etats membres à lutter contre les filières de traite des êtres humains et du trafic illicite de migrants au sein desquels des trafiquants sont spécialisés dans la fabrication de faux documents d'identité.

533. En ce sens, les articles 12 et 13 du Protocole additionnel à la Convention des Nations-Unis contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, sanctionne la fraude documentaire intégrée dans un groupe criminel transnational. Au regard de l'article 12 du présent Protocole, entendu dans sa globalité, chaque Etat partie doit prendre les mesures nécessaires sur la qualité de sécurisation des documents de voyage ou d'identité pour « empêcher qu'ils ne soient créés, délivrés et utilisés illicitement ». Or, l'ONUDC va apporter sa coopération technique aux agents faisant partie des bureaux de lutte contre l'immigration illégale pour accompagner la mise en place d'une surveillance policière des Etats parties dans la sécurisation des documents d'identité et de voyage, aux frontières.

534. Portée du Protocole additionnel contre le trafic illicite de migrants par terre, mer, et air sur la répression des filières d'entrée. En outre, entre dans le champ d'application du Protocole additionnel contre le trafic illicite de migrants par terre, mer et air, la répression à l'encontre des filières de migrants clandestins comportant des trafiquants de faux documents d'identité. Le vocable « filière » s'inspire de l'expression « entrée illicite » régie à l'article 3 b) du présent Protocole qui « désigne le franchissement de frontière » illégale du territoire d'un Etat partie. Cette entrée

terrorisme et à fournir des services de secrétariat et des services fonctionnels aux organes conventionnels et aux organes directeurs ».

546 https://www.unodc.org/unodc/en/human-trafficking/index.html?ref=menuside

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illégale peut être accompagnée d'usage de faux documents d'identité par les clandestins, ce que le Protocole réprime à l'article 3 c)547. Les articles 12 et 13 du présent Protocole sanctionnent en des termes similaires ce qui est déjà prévu au sein du Protocole additionnel de lutte contre la traite des êtres humains.

535. Bilan. A partir de ces dispositions, l'ONUDC va apporter une coopération technique aux autorités répressives des Etats parties, notamment sur les passages frontaliers poreux laissant passer un trafic illicite de migrants comportant en son sein des trafiquants de faux documents. En ce sens, l'ONUDC organise des formations de sensibilisation pour les gardes-frontières situés aux frontières aériennes, maritimes et terrestres sensibles dans les pays d'origine manquant de moyens, en vertu de l'objectif de « sécurisation des frontières » régi à l'article 11 du Protocole additionnel de lutte contre la traite des êtres humains.

536. Transition. D'autres acteurs internationaux non-onusiens viennent apporter des informations cruciales sur la détection de filières de faux documents d'identité situées dans les pays d'origine, ou de transit avant d'atteindre le sol européen.

2. Les autres acteurs internationaux non-onusiens participant à une surveillance policière sur les trafiquants avant leur arrivée sur le territoire européen

537. Bases de données et gouvernance migratoire. Une surveillance policière internationale est entreprise par l'inscription sur une base de données de toute personne suspectée de faire partie d'un réseau organisé lié à la fabrication de faux documents d'identité. C'est la mission de l'organisation internationale de police criminelle (Interpol), qui couvre une surveillance policière informatique au niveau international sur les trafiquants experts en faux documents d'identité (a). Le Centre international pour le développement de politique migratoires (CIDPM), organisation intergouvernementale renforcée entre un petit nombre d'Etats, a pour objectif de mettre en place le renforcement des capacités d'une gouvernance migratoire (b).

547 L'article 3 c) i du Protocole additionnel contre le trafic illicite de migrants par terre, mer et air dispose que « l'expression document de voyage ou d'identité frauduleux désigne tout document de voyage ou d'identité qui a été contrefait ou modifié de manière substantielle par quiconque autre qu'une personne ou une autorité légalement habilitée à établir ou à délivrer le document de voyage ou d'identité au nom d'un État , qui a été délivré ou obtenu de manière irrégulière moyennant fausse déclaration, corruption ou contrainte, ou de toute autre manière illégale; qui est utilisé par une personne autre que le titulaire légitime ».

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a) Interpol assurant une surveillance policière informatique au niveau international sur les trafiquants experts en faux documents d'identité

538. Partage de données policières non opérationnelles entre les Etats Parties. Interpol « compte 194 pays membres et est ainsi la plus grande organisation policière au monde »548, depuis l'adoption du Statut de Vienne le 13 juin 1956. Tous ces Etats collaborent grâce à des bureaux centraux nationaux, et avec le Secrétariat Général d'Interpol « en partageant des données policières »549.

539. Application aux utilisateurs de faux documents d'identité. Concrètement, les bureaux nationaux des Etats Parties au Statut de Vienne s'échangent des données policières non opérationnelles, en vue de permettre le signalement d'individus dangereux, notamment des criminels qui utilisent de faux documents d'identité pour avoir « la liberté de se déplacer »550. « L'usage frauduleux de documents d'identité et de voyage (qu'ils soient contrefaits, falsifiés ou simplement non officiels) constitue une grave menace pour les personnes et la société tout entière. Les récentes évolutions technologiques dans les domaines de la photographie, de l'informatique et de l'impression ainsi que la disponibilité de matériel à bas prix facilitent les activités de falsification »551.

540. Surveillance policière à distance sur la détection de la falsification des faux documents d'identité. Pour s'adapter aux trafiquants de faux documents d'identité, Interpol participe à la mise en place d'une surveillance policière à distance, qui est nécessaire. Ainsi, « les services chargés de l'application de la loi doivent maîtriser des compétences de plus en plus techniques. C'est pourquoi Interpol met à leur disposition des outils sophistiqués, des bases de données globales et des formations pratiques sur l'identification de faux billets et documents »552. Interpol vient donc aider à la détection de la falsification de faux documents d'identité avec de nombreux outils techniques « permettant aux pays membres d'effectuer des vérifications dans nos bases

548 https://www.interpol.int/fr/Qui-nous-sommes/Les-pays-membres

549 Ibid.

550 https://www.interpol.int/fr/Infractions/Faux-monnayage-et-documents-de-securite

551 Ibid.

552 Ibid.

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de données et ressources de référence sur le terrain, que ce soit dans un aéroport, un port maritime ou aux frontières »553.

541. Bases de données répertoriant les documents signalés. Voici les bases de données Interpol mises à disposition des Parties : la base de données Interpol répertoriant les documents de voyages volés ou perdus, volés vierges et invalidés, la base de données « Dial-Doc » qui permet aux pays de partager des alertes sur les nouveaux modus operandi de falsification des documents554, la base de données « Edison TD » catalogue les photos des documents d'identité et de voyage authentique ; la base de données « DISCS » enregistre tous les documents d'états civils555.

542. Portée du projet S-Print. Interpol est aussi l'initiative du projet S-Print. Ce projet, « qui réunit la communauté des services chargés de l'application de la loi et le secteur de l'impression sécurisée dans le but d'enrayer la prolifération de la fausse monnaie et des faux documents de sécurité à l'échelle mondiale, vise à empêcher les réseaux criminels organisés de se doter du matériel pouvant être détourné à des fins de contrefaçon »556.

543. Recherche sur les traits d'encre. En parallèle à ce projet, Interpol dispose de chercheurs sur « la recherche avancée sur les traits d'encre »557, ce qui accentue les connaissances en la matière pour les enquêteurs. Ce projet vient renforcer les systèmes d'échanges de données déjà existantes.

544. Bilan. En somme, grâce à de nombreux outils d'échanges d'informations disponibles pour les forces de polices, et grâce à la présence des bureaux nationaux dans les Etats parties au Statut de Vienne, Interpol opère une surveillance policière d'envergure sur l'enregistrement de données de criminels dangereux disposant avec eux de documents falsifiés, qui pourraient se situer en amont de l'espace Schengen.

553 https://www.interpol.int/fr/Infractions/Faux-monnayage-et-documents-de-securite/Fraude-aux-documents-d-identite-et-de-voyage

554 https://www.interpol.int/fr/Infractions/Faux-monnayage-et-documents-de-securite/Fraude-aux-documents-d-identite-et-de-voyage. Le vocable « Dial-Doc » ouvre la déduction de la mise en place d'un dialogue entre les pays membres sur les documents d'identité et voyage.

555 Ibid.

556 https://www.interpol.int/fr/Infractions/Faux-monnayage-et-documents-de-securite/Projet-S-Print

557 https://www.interpol.int/fr/Infractions/Faux-monnayage-et-documents-de-securite/Recherche-avancee-sur-les-traits-d-encre

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b) Le CIDPM à l'initiative d'un renforcement des capacités policières face aux risques des filières d'entrée de faux documents d'identité

545. Etats concernés. Le CIDPM est traduit de l'anglais « International center for migration policy developpment ». C'est une organisation intergouvernementale fondée en 1993 à Vienne, en Autriche. Elle compte actuellement dix-sept Etats membres, dont quatre ne faisant pas partie de l'Union européenne et de l'espace Schengen : la Bosnie-Herzégovine, la Serbie, la République de Macédoine, et la Turquie. Or, certains de ces pays connaissent de près ou de loin la « route des Balkans », passage transportant en grande partie des réseaux criminels organisés, avec le risque d'y trouver des filières spécialisées dans la fraude documentaire.

546. Gouvernance globale sur les filières d'entrée. CIDPM a vocation à coopérer avec les gouvernements, les organisations internationales, les instituts de recherches et les membres de la société civile dans le but de « mettre en place une gouvernance des migrations globale, durable et tournée vers l'avenir et applique une approche en trois volets : renforcement des capacités, dialogues sur les migrations et recherche »558. « En tant que facilitateur de plusieurs dialogues sur la migration, CIDPM occupe une position unique en termes de réseaux et de connaissances régionaux, ainsi que de portée géographique et thématique »559.La mise en place de dialogues autour de la gestion migratoire s'intéresse notamment à la « gestion des frontières »560 et à la prévention et la réduction de la « migration irrégulière »561. C'est en cela qu'elle organise une politique de surveillance policière sur ces types de réseaux criminels facilitant l'entrée illicite de migrants sur un territoire.

547. Publication de notes politiques sur la gestion des frontières. Le CIDPM publie régulièrement des « notes de politiques »562 ayant une vocation internationale. En ce sens, dans la note intitulée «Policy Brief : Crossing Borders in the next 15 years : How should and will border management develop ?», l'auteur développe des recommandations

558 https://www.icmpd.org/our-work/

559 Ibid.

560 Ibid.

561 Ibid.

562 https://www.icmpd.org/publications/policy-briefs/ : « Les notes de synthèse ICMPD sont des analyses politiques clés sur des questions liées à la migration qui fournissent des informations de base et des recommandations aux décideurs et aux membres du monde universitaire ».

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policières sur une nouvelle approche de gestion des frontières. La recommandation n°3prévoit que la coopération bilatérale et multilatérale devrait être renforcée dans le domaine de la gestion des frontières, à la fois à la frontière et en dehors.

548. Exigence de réciprocité de partage des ressources ou de compétences sur l'identification de documents frauduleux. Cependant, une telle coopération devrait exiger que le partage des ressources ou des compétences soit réciproque, en fonction des besoins et des compétences de chaque personne engagée. Par exemple, des visites d'études du pays X dans le pays Y pour apprendre l'approche de Y à la gestion des frontières dans le contexte maritime pourraient être organisées lors d'un atelier de formation sur l'identification de documents frauduleux provenant de la région du pays X563.

549. Application nécessaire dans les ex-pays des Balkans. En pratique, cette politique de partage des ressources, de compétences policières entre les Etats membres du CIDPM, devrait s'étendre aux ex-pays des Balkans. En ce sens, un Etat de l'Union européenne faisant partie du CIMPD pourrait organiser des visites d'études dans les pays tiers non ressortissants de l'Union européenne faisant aussi partie des CIDPM - la Bosnie-Herzégovine, la Serbie, la République de Macédoine, la Turquie - pour apprendre à ces pays une meilleure gestion des frontières dans un contexte maritime par exemple : mise en place d'ateliers de formation et de détection de documents frauduleux en provenance de la région des pays des Balkans. Une surveillance policière intergouvernementale pourrait s'acheminer vers une meilleure appréhension des trafiquants de faux documents en provenance des pays de l'Est désirant rejoindre les portes de l'Espace Schengen. En somme, le CIDPM exerce une surveillance policière en amont des Etats Schengen sur les filières d'entrée spécialisées dans la fraude documentaire en proposant des recherches empiriques interdisciplinaires et internationales, et des dialogues sur la migration entre les différents Etats membres, notamment par l'augmentation d'une capacité de formation, d'ateliers et de visites d'études internationaux et interinstitutionnels.

563 HENDOW (M.), «Policy Brief: Crossing Borders in the next 15 years: How should and will border management develop?»Background Paper. Vienna : ICMPD., February 2018, p. 8.

550.

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Transition vers l'étude de la dimension européenne. Par nature, la dimension internationale d'une surveillance policière sur les filières d'entrée d'immigration illégale et/ou de traite des êtres humains expertes dans la falsification de documents d'identité intègre nécessairement une dimension européenne. Or dans cette dimension européenne d'autres acteurs vont prendre le relais, dans l'hypothèse où les filières viendraient à échapper à la surveillance des instances internationales.

B) Une surveillance policière européenne renforcée aux frontières extérieures de l'Union européenne sur les filières d'entrée de faux documents d'identité

551. Efficacité européenne. La surveillance policière à l'échelle de l'Europe à l'encontre des réseaux criminels spécialisés dans la fraude documentaire s'exerce sous deux volets tout aussi efficaces l'un que l'autre : d'abord, l'Agence Europol exerce une surveillance policière non opérationnelle sur les frontières extérieures de l'Union européenne (1), pendant que l'Agence Frontex organise une surveillance policière opérationnelle sur ces mêmes frontières (2).

1. Une surveillance policière non opérationnelle sur les filières d'entrée de faux documents d'identité aux frontières extérieures de l'Union Européenne exercée par l'Agence Europol

552. Suivi non opérationnel des trafiquants de faux documents d'identité. L'Agence Europol est une agence européenne de police criminelle qui a pour objectif de faciliter l'échange de renseignements entre les polices nationales des Etats membres de l'Union européenne, notamment dans le domaine de la criminalité organisée. Elle facilite ainsi indirectement, de manière non opérationnelle, le signalement et le suivi d'un trafiquant de faux documents d'identité se trouvant par exemple au sein d'une filière d'immigration illégale à l'entrée de l'Espace Schengen.

553. Intérêt de l'accès au SIS. Les autorités nationales des Etats Schengen ont accès au SIS première génération, et au SIS deuxième génération (SIS II). En ce sens l'exploitation et l'utilisation des données inscrites sur le SIS concernent Europol et tous les Etats Schengen « aux fins de surveillance discrète ou de contrôle spécifiques » selon l'article 99 de la CAAS.

554.

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Action rayonnante d'Europol. Mais l'action d'Europol ne se limite pas seulement aux frontières extérieures de l'Espace Schengen, puisqu'elle concerne les frontières extérieures des Etats membres de l'Union européenne dans son ensemble. L'échange des renseignements sur de potentiels trafiquants de faux documents d'identité intégrés à une filière d'immigration illégale et/ou de traite des êtres humains, ou lié à une filière de prostitution, s'étend ainsi à la Roumanie, la Bulgarie et la Croatie, Etats membres qui ont pourtant décidé de conserver le contrôle à leurs frontières564.

555. Système information Europol : centrale d'informations et de renseignements. C'est le Système information Europol qui est la « base de données centrales d'informations et de renseignements criminels »565 d'Europol. Ce système de renseignements couvre tous les domaines de la criminalité grave. « Le Système Information Europol est utilisé par les fonctionnaires d'Europol, les agents de liaison des États membres et les experts nationaux détachés en poste au siège d'Europol, ainsi que par le personnel des unités nationales d'Europol et des autorités compétentes des États membres. En outre, certains partenaires de coopération d'Europol peuvent stocker et interroger des données via le centre opérationnel d'Europol »566. Ce système permet donc de combler une possible lacune sur la transmission de données Europol avec les polices criminelles des Etats membres de l'Union européenne non Schengen.

564 « Dans le cadre de l'Union européenne, l'espace Schengen n'a commencé à être mis en oeuvre qu'en 1995, soit dix ans après les accords signés au Luxembourg qui organisaient l'ouverture des frontières entre les Etats parties à la convention. Les Etats signataires ont en effet attendu l'établissement du SIS, comprenant un fichier commun des persona non grata, c'est-à-dire susceptibles d'avoir commis ou de commettre des délits ou des crimes, dans le périmètre de l'espace Schengen. Mais ce SIS ne pouvait être totalement efficient que si le Code frontières Schengen était appliqués par tous les pays membres, et plus précisément aux frontières extérieures communes. Or, cela n'a guère été le cas, comme l'on montré les attentats islamistes commis en Europe, à partir de 2015, par des personnes entrées sans contrôle. D'où, en 2015, la décision de rétablir le contrôle aux frontières terrestres prise par plusieurs pays de l'espace Schengen dont l'Allemagne, l'Autriche, le Danemark, la Suède et le Norvège » et par la suite la France. « Certes de tels rétablissements étaient prévus par les règles Schengen, mais pour des durées limitées. Or, des prolongations, toujours en cours, sont intervenues, au-delà de la durée autorisée par le code Schengen »., V. DUMONT (G.-F), « Des migrations incontrôlées ? », Le nouveau désordre international, Question internationale, La documentation française, n° 85-86 mai-août 2017, p. 60-61.

565 https://www.europol.europa.eu/activities-services/services-support/information-exchange/europol-information-system

566 Ibid.

556.

190

Couverture policière par l'échange de renseignements effectué aux frontières extérieures de l'Union européenne. Ainsi, Europol exerce donc une couverture de surveillance policière par l'échange de renseignements sur toutes les frontières extérieures de l'Union européenne, ce qui permet de prévenir d'éventuelles atteintes à la sécurité publique de l'Union européenne, en sachant qu'Europol peut, à l'initiative d'une demande faite par les Etats membres, ouvrir une enquête policière conjointe pour appréhender un suspect qui se trouverait à l'intérieur de l'Union européenne.

557. Transition vers une surveillance policière opérationnelle. Pour venir appuyer cette surveillance policière effectuée par le transfert de données entre les polices nationales des Etats membres, des équipes policières opérationnelles sont guidées par l'Agence Frontex, Agence qui peut être considérée comme un corps de police européen opérationnel veillant aux frontières extérieures de l'Union européenne.

2. Une surveillance policière opérationnelle sur les filières d'entrée de faux documents d'identité aux frontières extérieures de l'Union Européenne facilitée par l'Agence Frontex

558. Surveillance des biens et des personnes aux frontières de l'Union européenne. L'Agence Frontex exerce une surveillance des personnes et des biens aux frontières de l'Union européenne. Effectivement, « l'objectif premier de tout contrôle migratoire tient aux questions de sécurité, car la tâche régalienne essentielle de tout pouvoir est d'assurer la sécurité des personnes et des biens sur le territoire où il s'exerce. Il doit donc vérifier qui immigre, et refuser l'entrée à toute personne considérée comme susceptible de porter atteinte à cette sécurité »567.

559. Surveillance policière spécifique à la gestion intégrée des frontières extérieures. Une surveillance policière générale est exercée par les fonctionnaires d'Europol, mais une réelle surveillance policière spécifique à la gestion des frontières extérieures de l'Union européenne est confiée à l'Agence Frontex. La déontologie de son action est prévue au sein du Règlement du 14 septembre 2016 « relatif au corps

567 DUMONT (G.-F), « Des migrations incontrôlées ? », préc., p. 60-61.

191

européen de garde-frontières et de garde-côtes »568. Ce Règlement instaure un véritable principe de gestion intégrée des frontières au sens de l'article 4 a) à l'article 4 k), pour éviter « [l'] immigration incontrôlée »569. Ce principe se décompose en plusieurs missions : les opérations de recherche et de sauvetage des personnes en détresse en mer, l'analyse des risques pour la sécurité intérieure et pour la sécurité des frontières extérieures, la coopération entre les Etats membres mais aussi avec les Etats tiers et le retour des ressortissants des Etats tiers, puis surtout le contrôle aux frontières stricto sensu prévu à l'article 4 a) du Règlement.

560. Intégration de la surveillance policière des trafiquants d'identité faisant partie de filières d'entrée. Selon l'article ci-dessus énoncé, le contrôle aux frontières concerne notamment « les mesures liées à la prévention et à la détection de la criminalité transfrontalière, tels que le trafic de migrants, la traite des êtres humains et le terrorisme », hébergeant dans certaines situations des trafiquants de faux documents d'identité. Ainsi, ces mesures de prévention et de détection participent indéniablement à un processus vertueux de surveillance policière d'intérêt public à l'échelle de l'Union européenne.

561. Renforcement de l'assistance technique et opérationnelle .Pour que cette surveillance policière aux frontières soit effective et pour assurer un suivi effectif des contrôles aux frontières, l'Agence Frontex met à disposition au sein des Etats membres des officiers de liaison selon l'article 8 c), et elle peut même aller jusqu'à apporter son concours « dans les situations qui exigent une assistance technique et opérationnelle renforcée aux frontières extérieures, en coordonnant et en organisant des opérations conjointes » avec les Etats membres. Cette assistance technique et opérationnelle renforcée, assimilable à une surveillance policière, se concrétise

568 Règlement (UE) 2016/1624 du Parlement européen et du Conseil du 14 septembre 2016 relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, modifiant le Règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant le Règlement (CE) n° 863/2007 du Parlement européen et du Conseil, le Règlement (CE) n° 2007/2004 du Conseil et la décision 2005/267/CE du Conseil.

569 DUMONT (G.-F), « Des migrations incontrôlées ? », préc., p. 67 : « Par exemple, la police de l'air et des frontières de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle n'effectue des contrôles systématiques à la sortie des avions que pour certains vols internationaux qui atterrissent à Roissy ». « Depuis le début des années 2010, des pays européens ont laissé entrer sans contrôle des centaines de milliers de migrants ayant transité par la Turquie ou la Lybie. Souvent présenté comme le résultat d'une attitude humanitaire, c'est en réalité davantage la pression du nombre qui est la cause principale - comme cela avait été le cas en 1989, à la frontière austro-hongroise, avec les ressortissants d'Allemagne de l'Est ». C'est pour cette raison que l'Agence Frontex joue un rôle primordial pour optimiser la gestion du nombre de migrants arrivant au sein de l'Union européenne.

192

notamment par le déploiement des équipes du corps européen de gardes-frontières et de garde-côtes, à la demande d'un Etat membre, lorsque le contrôle devant être effectué sur son territoire doit s'opérer dans l'urgence570, en application des article 8 et 14 du présent Règlement571.

562. Coopération renforcée entre Agences. Plus encore, au regard de l'article 8

m) dudit Règlement, l'Agence Frontex a pour missions « de coopérer avec Europol et Eurojust et d'assister les États membres dans les situations qui exigent une assistance technique et opérationnelle renforcée aux frontières extérieures dans la lutte contre la criminalité organisée transfrontalière ».

563. Corps de police européen sur les filières d'entrée. Ainsi, le corps européen des garde-côtes et des gardes-frontières constitue la colonne vertébrale d'un nouvel espace de police et de justice, applicable aux filières d'entrée d'immigration illégale hébergeant des trafiquants de faux documents.

564. Optimisation des missions de surveillance. Afin que ses missions opérationnelles de surveillance aux frontières soient optimales sur la frontière d'un Etat membre subissant l'arrivée d'une filière criminelle spécialisée dans la fraude documentaire, le corps européen de garde-côtes et de garde-frontières peut s'appuyer sur les bases de données inscrites à Europol tel que le SIS II et le Système Information Europol. Si l'Agence le juge nécessaire, elle peut en informer Eurojust pour qu'une enquête judicaire soit ouverte dans les plus brefs délais. Le ou les Etats membres concernés par les opérations de contrôles aux frontières peuvent être assistés, dans le cas d'une urgence, par un corps de police détaché de l'Agence Frontex. En ce sens, il existe une véritable police européenne aux frontières avec une déontologie de travail commune dans la lutte contre la criminalité organisée au sens large, et dans la lutte

570 Voici l'exemple d'une situation d'urgence nécessitant l'appui des effectifs détachés de l'Agence Frontex : « la migration irrégulière peut s'exercer dans le cadre d'une migration clandestine, le plus souvent avec l'aide de passeurs, ou forcée, c'est-à-dire impliquant un recours à la force, avec destruction ou dégradation des infrastructures défensives installées à la frontière. Elle se produit encore de nos jours périodiquement aux barrières de Ceuta et Melilla, les migrants sachant que ceux qui sont parvenus à passer la frontière ont peu de risques d'être expulsés »., V. DUMONT (G.-F), « Des migrations incontrôlées ? », préc., p. 68.

571 En cas de flux migratoires disproportionnés arrivant sur les frontières d'un Etat membre de l'Union européenne, ce dernier doit être dans la possibilité de pouvoir compter sur des équipes opérationnelles en provenance de l'Agence, d'Europol et d'autres agences de l'Union européenne, en vertu du § 25 du Préambule du Règlement Frontex.

193

contre les filières d'entrée de trafiquants de faux documents d'identité sur le territoire de l'Union européenne.

565. Bilan. La surveillance policière sur les filières d'entrée s'exerce donc en amont des frontières extérieures de l'Union européenne, et au niveau des frontières de l'Union européenne, notamment par des techniques policières non opérationnelles et opérationnelles de qualité. Mais cette idée de surveillance policière européenne prend aussi corps lorsqu'il s'agit pour les Etats membres de suivre des « filières de maintien » qui se développent dans le berceau de l'Union européenne.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle