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Le statut juridique de l'enfant adultérin dans le Code civil haà¯tien

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par Jennifer SYLAIRE
Université Jean Price (Haiti ) - Licence en droit 2002
  

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I.2.6 Héritage successoral

Le droit de famille, soulève les questions du statut civil des enfants du nom patronymique de la reconnaissance légale, de la tutelle et de la minorité des héritiers, de l'égalité ou non de toute filiation à concourir à la succession.112(*)

Selon l'article 760 du code civil français il est stipulé que :

« Les enfants dont le père ou la mère au temps de leur conception, était engagé dans les liens du mariage d'où sont issus des enfants légitimes, sont appelés à la succession de leur conjoint en concours avec ces enfants ; mais chacun d'eux ne recevra que la moitié de la part à laquelle il aurait eu droit, si tous les enfants du défunt y compris lui-même eussent été légitimes »113(*)

Dans le code civil haïtien, grandement influencé par le droit français, il est stipulé à l'article 616 : « La seule condition d'accéder à la vocation successorale c'est d'être reconnu, alors que l'atteinte la plus importante au statut juridique de l'enfant adultérin, touche justement à ses droits successoraux. »Selon la législation française, les droits successoraux de l'enfant adultérin, sont réduits :114(*)

- A la moitié de ce qui en son absence serait revenu au conjoint victime de l'adultère, quand il vient en concours avec lui (art. 759 du code civil français)115(*)

- A la moitié de ce qui lui serait revenu, s'il avait été légitime, lorsqu'il vient en concours avec d'autres enfants légitimes issus du mariage victime de l'adultère. La fraction dont sa part est amputée profite aux enfants légitimes issus de ce mariage.116(*)

Dans la législation haïtienne, il est stipulé à l'article 611 du code civil que les dispositions concernant la succession des enfants naturels ne sont point applicables aux enfants adultérins. Ceux- ci conformément aux articles 302, 306 et 313 du code civil haïtien, n'ont droit qu'à des aliments et ces derniers ne peuvent être amputés que sur la portion dont la loi sur les donations et testaments permet aux pères et mères de disposer.

Me François Latortue indique dans son cours de droit civil que l'enfant adultérin dans sa vocation d'hériter, demeure un étranger pour ses géniteurs. Il en résulte que :

- Ses auteurs peuvent lui faire, des donations, tout comme à un tiers

- Ils peuvent l'instituer héritier dans leurs testaments

- Les promesses par acte sous seing privé, faites par le père ou par la mère de nourrir ou d'élever un enfant adultérin ou incestueux sont licites, d'après la jurisprudence.

La raison est que ces promesses sont le fait d'une obligation naturelle transformée en obligation civile par la promesse d'exécution.

Selon Hugues FOUCAULT117(*) : « La coexistence de deux législations, l'une écrite, l'autre orale, est vécue tantôt sur un mode de confrontation ou d'affrontement tantôt sur celui du syncrétisme juridico coutumier... Cette cohabitation met en parallèle deux conceptions différentes du droit de famille et du droit de propriété, deux piliers sur lesquels repose le droit des successions... Dans la nomenclature successorale paysanne haïtienne, plusieurs principes régissent les règles coutumières de dévolution de la masse successorale... Parmi ces principes, certains tendent à maintenir l'équité entre tous les enfants du défunt, d'autres par contre, tendent à favoriser certains d'entre eux... Le choc entre deux systèmes opposés, crée des dissensions, au niveau de leur application respective. L'un axé sur des principes hérités en partie du code Napoléon (droit écrit) l'autre rattaché aux traditions du terroir et règlementé d'après les usages du milieu rural (droit coutumier)...

En matière de transmission de biens fonciers, le paysan a établi sa propre nomenclature, construit son vocabulaire particulier de désignation de l'héritier et du patrimoine, élaboré ses règles spécifiques de dévolution de la masse successorale et les modalités de l'indivision et du partage... Aux termes des opérations de partage, la propriété reste indivise, les héritiers demeurent en état d'indivision et la succession s'ouvre à la mort du « de cujus », indique péremptoirement le code civil haïtien [...] La première règle en droit successoral consiste à accorder vocation héréditaire à tous les enfants du « de cujus » à quelque filiation qu'ils appartiennent ».

Selon un arrêt du Tribunal de Cassation en date du 18 décembre 1944 sur le statut juridique de l'enfant adultérin, il est stipulé que celui-ci ne pouvant être ni reconnu, ni légitimé, est incapable d'acquérir par la prescription, la qualité d'héritier... 118(*)

En milieu rural, quelques facteurs, tels : l'âge, le sexe... permettent de favoriser certains héritiers. L'aîné du défunt, hérite d'une plus grande proportion de terre et des portions de terre les plus fertiles.119(*)Ce privilège dérive de deux pratiques coutumières répandues, lors des opérations de partage.120(*)L'aîné est invité à choisir son lot en premier. Il bénéficie des parcelles exploitées en pré héritage, comme étant des droits acquis, ce qui lèse les cadets.121(*) Certaines pratiques accordent une portion plus importante aux garçons. D'autres prescrivent que les filles doivent hériter des parcelles proches du « lakou » (parcelles plus riches organiquement)122(*) Lorsque des enfants de plusieurs lits concourent à la succession d'un même père, de subtils mécanismes tendent à exclure les enfants des « fanm jaden » au profit de ceux de la « maman pitit »123(*)

Certains enfants concourant à la succession, n'ont pas de filiation juridiquement établie, car ils ne sont pas reconnus légalement et ne portent pas le nom patronymique de leur géniteur.124(*) L'enfant adultérin est reconnu par la coutume, contrairement au droit écrit qui lui dénie tout droit.125(*) Droit oral transmis de génération en génération, le droit successoral foncier coutumier haïtien, cohabite avec le droit successoral foncier écrit et continuera à régir la vie des paysans en matière de dévolution de biens fonciers. 126(*)

L'enfant adultérin dans le droit écrit, subit le poids de mesures discriminatoires liées à la nature de sa filiation. Néanmoins la doctrine retient qu'en matière de biens fonciers, les modes de répartitions sont déterminés par des principes d'ordre général régissant la matière que les législateurs ont adopté et malheureusement qui se sont avérés inadaptés.

Le caractère égalitaire de ce droit, quant à l'attribution des parts héréditaires à chaque enfant sans distinction de filiation, de sexe, les problèmes d'actes de l'état civil, la question foncière, l'absence de titres de propriété et l'inexistence de cadastre, placent le paysan dans les rets de deux systèmes de droits aux prescriptions parfois contradictoires...127(*)Cette situation de fait maintiendra le paysan dans l'indivision théorique et juridique, mais ne résoudra pas le fait réel de la parcellarisation et de l'émiettement de la structure familiale...128(*) Situer sur le terrain successoral la sanction des devoirs acceptés dans le mariage ne parait ni juste, ni opportun. Ce qui est en cause n'est pas seulement l'égalité concrète entre enfants issus de lits différents dans le partage de la succession de leur auteur commun mais de manière à la fois plus abstraite et plus forte, l'identité des droits attachés au lien de filiation.129(*) 

Pour emporter vocation successorale véritable, le lien de filiation doit être légalement établi. Relativement à ce principe selon l'article 606 du code civil haïtien, voici ce qui en ressort : « Les enfants naturels n'héritent de leur père ou mère, ou de leurs ascendants naturels qu'autant qu'ils ont été légalement reconnus. Ils n'héritent jamais des ascendants légitimes de leur père ou mère. » C'est donc le lien de filiation qui constitue le support juridique des droits revenant à l'enfant, c'est-à-dire de sa succession et de son statut social en général. L'article 611 à cet effet n'a fait qu'écarter l'enfant adultérin de cette capacité. Aux termes de cet article la loi ne lui accorde que les aliments et ceux-ci ne peuvent être amputés que sur la portion dont la loi sur les donations et testaments permet aux pères et mères de disposer. Il est clair que l'enfant adultérin n'a pas la moindre issue. Le législateur ne lui donne pas vraiment le choix ; il a plutôt pris grand soin de lui imposer une situation juridique dont il lui sera extrêmement difficile de se défaire, puisque la vocation à succéder est une prérogative accordée aux enfants naturels pourvus que leur filiation soit légalement établie.

* 112 _ Jean Carbonnier, Droit civil, « La famille », tome 2 Paris, PUF 1960

* 113 _ Julien Hounpke op.cit

* 114 _ Ibid.

* 115 _ Ibid.

* 116 _ Ibid.

* 117 _ Hugues Foucault, « Travaux d'Anthropologies juridiques ». Le Nouvelliste du 4/12/2006.

* 118 _ «Femme et enfant», Publication de l'ordre des avocats de Port-au-Prince. Bibliothèque Nationale D'Haïti février 2003.

* 119 _ Hugues Foucault, op.cit

* 120 _ Ibid.

* 121 _ Ibid.

* 122 _ Ibid.

* 123 _ Ibid.

* 124 _ Ibid.

* 125 _ Ibid.

* 126 _ Ibid.

* 127 _ Hugues Foucault ,op.cit

* 128 _ Ibid.

* 129 _ Ibid.

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