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Problématique de la gestion des terres par les collectivités locales au MALI: cas de la commune de Bougouni

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par Ibrahim Boubacar SOW
Université Gaston Berger de Saint Louis- Sénégal - DEA Droit de la Décentralisation et de la Gestion des Collectivités Locales 2008
  

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Paragraphe 2 : Par la nécessaire relecture de la législation foncière

Dans sa phase pratique des mécanismes de gestion des terres par la commune de Bougouni, la multiplicité de la législation a créé certaines difficultés et des cas de conflits quant à leur application. Dans ces conditions, une relecture des textes juridiques et institutionnels nous parait nécessaire en vue d'avoir une politique foncière plus adaptée.

L'élaboration de cette politique pourrait être un moyen efficace dans la gestion des terres par les collectivités, en général, pour une meilleure visibilité dans sa phase pratique, mais à condition qu'elle soit consensuelle et porteuse d'espoir pour les acteurs qui interviennent dans le foncier. L'élaboration de cette politique de gestion des terres doit être en harmonie avec l'ensemble des systèmes de développement en général, et avec le processus de décentralisation en particulier.

La mise en oeuvre d'une politique de gestion des terres par les C.L s'articulera sur un document qui fixera les grandes orientations (objectifs, les stratégies et lignes directrices). Le contenu de ce document de base sera considéré comme un document de référence dans l'identification des acteurs, d'incompatibilités juridiques qu'institutionnelles. Dans l'étude de ce document, un certain nombre d'incompatibilités juridiques et institutionnelles entre les textes législatifs et réglementaires dans la gestion des terres sont appréhendées comme étant des faiblesses et des incompatibilités comme par exemple la loi portant principe de constitution et de gestion du domaine des C.T. Cette législation ne prévoit pas les modes d'acquisition des terres par les C.T si ce n'est par voie d'immatriculation ou que les terres (non immatriculées) soient dans le domaine des C.T et affectées ou cédées à celle-ci par l'Etat en fonction de l'intérêt régional, du cercle ou communal.78(*) En toute logique, les limites ne peuvent être définies que par les procédures d'immatriculation ou par un plan d'aménagement. L'accomplissement des formalités requises pour l'immatriculation demeure une tâche difficile tendant à priver les collectivités dans leurs missions de gestion des terres et des ressources naturelles renouvelables.

En attendant l'accomplissement des procédures d'immatriculation et des transferts, une forme juridique demeure nécessaire pour les C.T dans l'accomplissement de leur mission de gestion des terres et des ressources naturelles renouvelables, d'où la nécessité de « repenser et même inventer un modèle juridique»79(*). En tenant compte des difficultés pratiquées dans la gestion des terres par la commune de Bougouni, le document ci-haut précité servira de base pour concevoir une feuille de route pour une politique de mise en oeuvre du droit des C.T L'évaluation de ces résultats permettra de mettre en lumière les difficultés et l'identification des actions dans le but de définir les recadrages nécessaires.

La procédure d'élaboration du document et des feuilles de route sera suivie d'une logique participative: les départements ministériels concernés (Administration Territoriale et des C.L, Domaine de l'Etat et des affaires foncières, Aménagement du territoire, Environnement et assainissement...), les C.T, les communautés locales, les institutions de la République (Assemblée Nationale, Haut Conseil des Collectivités, Conseil Economique Social et Culturel). Une fois validé sur le plan national, ce document permettra une meilleure répartition des prérogatives des différentes institutions (collectivités et coutumes), de trouver leur domaine de compétence au partage des responsabilités. Les défis sont énormes quant on sait que, les problèmes juridiques entre les différents ministères chargés de la question sont nombreux et multiformes: souvent son ambiguïté, sa superposition ou «chevauchement des missions des départements ministériels...»

Sur le plan juridique, il est aussi question de la révision du Code domanial et foncier, mais aussi la loi portant principe de constitution et de gestion du domaine des C.T. Dans le souci de partage des compétences, la nécessité d'une véritable révision de ces différents textes s'impose. La problématique de la gestion des terres, dans son ensemble, montre d'une part, l'impact de la loi (d'une règle juridique) sur le comportement des acteurs sociaux, et, d'autre part celle des mécanismes qui jouent sur son application, celle des effets non désirés. Sur ce point, la doctrine parait partagée. Quant aux partisans de la conception positiviste de la législation, ils partent de la logique selon laquelle, le droit positif est capable de produire à lui seule des changements dans les comportements sociaux. De ce fait, l'attente du législateur est que l'objectif d'une loi soit en général réalisé, dans le cas contraire, on se trouve dans une situation exceptionnelle. Et quant au non respect de ces lois, E. LEROY, partisan de l'Etat, estime que « ces litiges sont souvent imputés par l'opinion publique, à une mauvaise législation foncière, alors qu'il ne s'agit que d'une mauvaise application du droit foncier qui a été reconnu, par ailleurs, par la presse étrangère comme l'un des plus moderne au monde. Je vous propose donc d'orienter vos réflexions sur les problèmes soulevés dans la pratique par une mauvaise application d'une législation qui donne satisfaction dans son principe »80(*). De ce fait, on en déduira à partir de cette pensée que la loi est considérée comme un instrument dans le processus de changement social : la règle juridique est conçue dans ce cas comme une norme adressée aux individus qui sont censés changer leur comportement en conformité avec la législation. En effet, sous la dimension institutionnelle, pour la mise en oeuvre d'une meilleure politique de gestion des terres par les C.L, le cadre institutionnel doit faire appel aux différents acteurs (plusieurs ministères, les C.T). Dans ces conditions, il appartiendra à ces différents acteurs de procéder au mieux à leur adoption dans la pratique. Dans ces conditions, les aspects du droit coutumier devront être soumis à un examen de fond afin d'intégrer certaines dimensions rurales dans le droit positif.

Quelques années après, cette approche a subi des critiques des sociologues du droit dont John Griffiths est l'un des porte-parole. Il formule ces critiques en trois(3) points81(*) :

Ø « Selon l'approche  instrumentaliste, la société est conçue comme un ensemble d'individus liés par l'organisation de l'Etat. Le législateur s'adresse donc à des individus et à leurs comportements individuels ». Sur ce point, il est a remarqué que toute activité humaine est déterminée par des relations sociales complexes et réciproques. Dans le chapitre du foncier, les relations sociales sont indissociables, elles sont déterminantes pour le comportement des acteurs (C.L, paysans et pasteurs, individuels ou organisés) vis-à-vis de leur patrimoine foncier,

Ø « Le législateur instrumentaliste suppose que le message contenu dans une loi que reçoivent les individus est conforme à l'interprétation et aux intentions qu'il en a données ». La diffusion des informations pose de multiples problèmes dans le milieu local. La loi peut subir différentes interprétations qui influent sur les normes locales, cet aspect est d'autant plus important que le taux d'alphabétisation, surtout pour le milieu rural, peut en susciter des effets dans la pratique. En conséquence, ce message peut donner lieu à des interprétations abusives, mais également à des abus volontaires de la part de certains agents étatiques (administrateurs et agents techniques),

Ø « L'Etat estime avoir le monopole législatif et considère toutes les autres sources de régulation sociale comme concurrentielles et susceptibles et d'entrainer un comportement récalcitrant de la part des individus ». Sur cette dernière critique, J. Griffiths affirme que les normes sociales et culturelles sont des facteurs d'organisation de la communauté et surtout en premier lieu les individus. Cette communauté est une source de régulation sociale au même titre que les normes extérieures. Il ressort de cette considération que les sources normatives ne sont pas clairement reconnues par l'Etat. Le résultat serait une confrontation (souvent conflictuelle) entre l'appropriation par l'Etat et l'appropriation coutumière.

Pour l'effectivité d'une gestion foncière locale, le législateur devra adopter une démarche plus sociologique en acceptant qu'une réforme foncière s'adresse à une société pluraliste82(*). La théorie sociologique propose deux grands axes, à savoir :

Ø La façon dont l'information juridique est communiquée aux acteurs concernés.

Ce procédé doit être édicté aux administrateurs et agents étatiques, qui sont reconnus comme receveurs et médiateurs, qu'aux populations locales. Leur capacité de mieux cerner le texte législatif est inégalement distribué parmi les populations locales. Ainsi, au niveau local, ces textes feront l'objet de diffusion conformément à la faculté de compréhension du milieu, simplicité dans la lecture du document, court, très concret et largement diffusées (radio rurale et les supports audio-visuels).

Ø La capacité des acteurs locaux à se positionner vis-à-vis de la réglementation

extérieure, c'est-à-dire leur capacité d'évaluer de façon autonome leur propre situation foncière et d'exprimer leurs propres besoins et les priorités du milieu. Cette capacité dépend en substance du contexte social comme le degré de combativité vis-à-vis de la bureaucratie, le sentiment de pouvoir de la nouvelle règle...

Ces orientations constituent des éléments de réponses au « comment-faire ». Décentraliser la compétence foncière est l'une des voies pertinentes pour la mise en oeuvre de ces orientations.

Chapitre 2 : La redéfinition de la politique de gestion des terres par les Collectivités locales.

Pour le renforcement de la politique de gestion du foncier, la commune de Bougouni doit mettre beaucoup plus l'accent sur l'application des prérogatives qui leurs sont conférées par les textes de la décentralisation. A ce titre, elle doit élaborer de nouvelles politiques pour répondre aux défis de leur environnement.

Pour ce faire, la commune de Bougouni, par nécessité, doit faire allusion aux conventions locales (Section1) qui peuvent être un outil novateur du développement local, mais aussi solliciter l'intervention de l'Etat dans les conflits (Section2) qui peuvent résulter de la pratique de ces conventions.

* 78 Art 9 de la loi 96-050 : « le domaine privé immobilier des C.T comprend :

_ les terres immatriculées du domaine privé de l'Etat cédées par celui-ci à titre onéreux ou gratuit,

_ les terres non immatriculées situées dans les limites des C.T, affectées ou cédées à celui-ci par l'Etat en fonction de l'intérêt régional, de cercles ou communal desdites terres,

_ les biens immeubles acquis à titre onéreux ou gratuit ou affectées par l'Etat.»

* 79 Barrière Olivier et Barrière Catherine « Un droit à inventer. Foncier et environnement dans le delta intérieur du Niger », éditions IRD, collection « A travers champs », 2001.

* 80Cit. Hesseling Gerti « Réformes et pratiques foncières à l'ombre du droit : quelques réflexions », Démocratie, enjeux fonciers et pratiques locales en Afrique : Conflits, gouvernance et turbulence en Afrique de l'Ouest et centrale, P. Mathieu, P.J. Laurent et J-C William, CDS.

* 81 Idem, page 215 et 216.

* 82 Pour plus de details, voir J. Griffihs, « Legal pluralism and the social working of law », Groningen, 1990 (non publié).

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon