CONCLUSION GENERALE
Au terme de notre travail, il nous est bon de dégager
les points saillants qui l'ont caractérisé. La partie
introductive de notre travail nous aidé à justifier le
choix et l'intérêt de notre sujet, à délimiter notre
étude dans son domaine, dans l'espace et dans le temps, à
présenter la problématique couronnée par les questions de
recherche, à établir les hypothèses de notre travail,
à nous fixer les objectifs de la recherche, à avoir les
techniques et méthodes permettant de recueillir les données ainsi
qu'à pouvoir faire la subdivision du travail.
Au premier chapitre, nous nous sommes intéressés
à élucider toutes les notions nécessaires à notre
sujet. Il a été d'abord question de voir les définitions
des concepts clés à notre sujet. En plus, nous avons passé
en revue les notions relatives à la police judiciaire, à son
historique, à son organisation au Rwanda, à son statut et
à sa mission. Nous avons également passé en revue les
notions sur l'enquête préliminaire conduite par la Police
judiciaire et enfin par le statut et la compétence de la police
judiciaire.
Dans le deuxième chapitre, nous nous sommes
intéressés à analyser les problèmes
constatés lors de l'enquête préliminaire conduite par les
OPJ et à voir leur impact sur la poursuite des infractions au niveau de
la police judiciaire, au niveau de l'ONPJ ainsi qu'au niveau des juridictions
compétentes.
De prime abord, il y a les problèmes d'ordre technique,
matériel, financier et les moyens humains comme l'insuffisance des
connaissances techniques et les moyens humains suite à l'insuffisance de
la maîtrise du droit et des techniques d'enquêtes, le nombre
insuffisant des OPJ face au taux de criminalité plus ou moins
élevé dans certaines régions du pays sur l'effectif de
7300 policiers relativement faible compte tenu de la population rwandaise qui
arrive à 10.000.000 d'habitants.
Pour ce qui est de l'expertise médicolégale,
nous avons remarqué l'incompétence, le manque de temps et des
techniques de la médecine légale pour les médecins ou tout
simplement l'absence d'un médecin légiste. Il y a
également l'insuffisance des moyens matériels et financiers comme
les moyens de déplacement, de communication et les enjeux de prise de
photos et ainsi que la situation socioéconomique liée à
l'insuffisance de traitement salarial ce qui conduit à la corruption et
la non réception des demandes et plaintes comme l'indique la liste
établie par la Cour Suprême sur ceux qui ont été
condamnés pour l'infraction de corruption et le Rapport de l'Office de
l'Ombudsman sur l'infraction de corruption dans les services publics et
privés.
Nous avons également constaté le problème
du statut des OPJ car d'un côté ils sont régis par le
statut de leur fonction principale et de l'autre côté par le
Procureur au niveau de Grande Instance ; ce qui conduit à la
contradiction des ordres, des règles différents émanant
des autorités hiérarchiques créant ainsi
l'instabilité des OPJ dans leur mission. Il y a enfin l'ignorance de la
population qui modifie les traces des preuves ou qui ne savent pas où
porter les plaintes.
D'où, les conséquences non moins importantes
surgissent au niveau de la police judiciaire comme la non poursuite des
infractions constatée suite à l'instabilité de l'OPJ dans
l'exercice de sa mission, la non poursuite des infractions constatées et
la constitution des dossiers insuffisamment renseignés suite à
l'insuffisance des techniques d'enquêtes et moyens matériels et
humains. Au niveau de l'ONPJ, il y a les difficultés dans l'instruction
du dossier liées aux lacunes dans les dossiers transmis par l'OPJ. Sur
ce, nous avons constaté que sur 100 dossiers, 87% ont des rapports
d'expertise médico-légale en des termes compliqués et 13%
n'ont même pas ces rapports.
Pour le classement sans suite des dossiers, nous avons
remarqué qu'un grand nombre de dossiers sont classés sans suite
surtout les dossiers d'accidents matériels et de viol. Il y a
également la non poursuite des infractions et leurs auteurs, la perte
des procès suite au manque de preuves au niveau des juridictions
concernées.
.
Il été question enfin, de proposer des mesures
préventives et curatives en vue de l'amélioration de
l'efficacité des enquêtes préliminaires conduites par la
police judiciaire. Pour les mesures préventives, des propositions ont
été faites au niveau de la police judiciaire, des experts
médico légaux ainsi qu'à la population.
Concernant les OPJ, il faudrait l'harmonisation des
dispositions légales sur la Police judiciaire par l'unification de
l'autorité hiérarchique. Ainsi, il faudrait un seul
département de police judiciaire sous la direction d'un Directeur de la
CID; l'incorporation de la Police judiciaire comme les magistrats auxiliaires
au sein de l'ONPJ; considérer uniquement la fonction de l'OPJ en dehors
de sa fonction principale de policier lors qu'il est dans sa mission d'OPJ. Il
en est le cas en France et en Belgique car l'OPJ est sous le contrôle de
la chambre d'instruction mais sous la direction du ministère public.
Il faudrait aussi la mise en place du statut propre à
la Police judiciaire soit en considérant uniquement le statut de la
police nationale ou bien le statut des magistrats et agents de l'ONPJ et un
code écrit régissant la conduite des enquêtes
préliminaires complétant l'Arrêté Ministériel
n° 004/05 du 22/12/2005 instituant le règlement, les sanctions et
la procédure disciplinaires au sein de la Police Nationale. Il faudrait
ensuite le renforcement des moyens techniques, matériels, financiers et
humains des OPJ, par la mise en place d'un programme de formation en droit ou
d'un département de la police judiciaire dans la faculté des
sciences sociales et policières au sein de Kigali Institute of
Education (KIE), branche de Musanze ou à l'Institut
supérieur de pratique et de développement du droit de Nyanza pour
former les OPJ spécialisés en droit comme il en est le cas en
France et en Belgique.
Pour les experts légaux, il faudrait la formation
globale des experts légaux sur l'importance des rapports d'expertise
dans la poursuite pénale et la formation spécifique des
médecins légistes issus de la faculté de médecine
de l'UNR, comme il en existe en France et en Belgique.
Au niveau de la population, il serait mieux de faire la
sensibilisation aux habitants surtout ceux du milieu rural sur l'importance des
preuves dans la poursuite pénale lorsqu'une infraction vient
d'être commise. Il faudrait former les membres des Community Policing
Comittees (CPC) et les Local Defense Forces (LDF) aux techniques
d'enquêtes et aux notions élémentaires du droit de
procédure pour connaître les cas d'infractions et assurer le
maintien des preuves en vue d'une bonne enquête préliminaire. Un
OPJ devrait alors siéger dans chaque village pour poursuivre les
activités des CPC et des LDF comme il en est le cas au Kenya ;
Quant aux mesures curatives, il faudrait le renforcement des
mesures disciplinaires, par la mise en place d'un service d'inspection de la
police judiciaire comme il en existe au niveau de l'ONPJ, permettre, à
part la possibilité de la victime de recourir à l'ONPJ,
l'application du principe de récusabilité aux OPJ qui n'ont se
sont pas acquittés convenablement de leur tâche de faire les
enquête préliminaire et la possibilité des mesures
répressives aux OPJ en cas de leur défaillance. Il serait mieux
enfin d'indemniser les victimes des vices de l'enquête
préliminaire selon l'article 258 CCLIII. La mise sur pieds d'un fonds
d'indemnisation des victimes des vices de l'enquête préliminaire
serait l'une des solutions en vue de rendre justice à ces victimes.
Somme toute, nous constatons que les résultats de notre
étude confirment en totalité toutes nos hypothèses et nous
permettent d'atteindre nos objectifs.
Tout compte fait, la Police judiciaire est l'un des acteurs
principaux dans la poursuite des infractions en droit rwandais. Nous pouvons
alors suggérer au Gouvernement rwandais et à toutes les instances
concernées ce qui suit :
- Il faudrait instaurer au sein de l'Ecole supérieure
de la Police nationale sise à Musanze et à l'Ecole
supérieure de profession de droit de Nyanza, un programme de formation
élargie en droit et surtout les techniques d'enquêtes judiciaires,
le droit de procédure pénale, le droit pénal et à
la criminologie à l'endroit des OPJ;
- Il faudrait adopter une loi renforçant le statut de
la police judiciaire, son fonctionnement et sa compétence;
- Il faudrait également mettre en place une loi
permettant l'indemnisation des dommages résultant des vices de
l'enquête préliminaire conduite par les OPJ;
- Il faudrait instituer un Arrêté
ministériel accordant le pouvoir d'OPJ à certaines
autorités de l'administration locale;
- Enfin de compte, il faudrait renforcer les moyens
socioéconomiques et matériels aux OPJ ainsi que leur effectif en
vue de répondre à leur mission en toute efficacité.
Nous voici au terme de notre travail, nous ne
prétendons pas avoir épuiser le sujet, car notre domaine
était clair; l'impact de la police judiciaire sur la poursuite des
infractions en droit rwandais. C'est le domaine du droit de la procédure
pénale. La voie est ainsi ouverte à d'autres chercheurs pour
aborder d'autres aspects de notre sujet que nous n'avons pas pu traiter ou
approfondir. La raison n'est rien d'autre que le manque de temps et de moyens
financiers de feuilleter plus de documentations et de mener des
enquêtés suffisantes dans ce domaine. C'est ainsi que nous
n'avons pas pu traiter les points suivants:
Ø La problématique des preuves dans la poursuite
des infractions de viols en droit rwandais
Ø Impact des experts médico-légaux dans
la poursuite des infractions de viols et d'homicides en droit
rwandais ;
Ø De la restructuration de la police judiciaire et le
renforcement des mécanismes d'enquêtes préliminaires en
droit rwandais.
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