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Monopoles légaux et marché commun d'Afrique Centrale

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par Gaël Nguefack Donzeu
Université de Dschang-Cameroun - Master 2 en Droit de Affaires et de l'Entreprise  2012
  

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Paragraphe 2 : Une protection menacée par les intérêts et besoins du marché

intérieur

Si l'essor des droits intellectuels est la marque d'une efficience économique incontestable, ces droits ne sont pas sans poser de problème. A vrai dire, il peut exister une contradiction apparente entre les principes du droit communautaire de la concurrence avec ceux de la propriété intellectuelle. C'est ici que se pose la question de la compatibilité, non de l'existence, mais de l'exercice de ces droits eu égard aux fondements de la libre circulation des marchandises (A) et de la libre concurrence (B). Dans les deux cas, cet exercice se trouve suffisamment limité285.

A. L'exercice des droits de propriété intellectuelle limité par la libre circulation des marchandises

La libre circulation des marchandises suppose que chaque Etat de la Communauté s'engage à ne pas créer de nouvelles restrictions, directes ou indirectes, aux échanges intracommunautaires. Celarequiert également que les agents économiques, autres que les Etats, ne causent pas non plus de revers, directement ou indirectement, à cette liberté par leur comportement. C'est l'idée projetée par la Convention de l'U.E.A.C. d'où il ressort que les restrictions ou interdictions sur le fondement de la propriété industrielle et commerciale ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire, ni une restriction déguisée au commerce entre les Etats membres286. La mesure limitative nationale ne doit excéder le strict nécessaire pour atteindre l'objectif de protection. La question reste donc de savoir dans quelle mesure la libre circulation des marchandises peut porter atteinte à l'exercice des droits de propriété intellectuelle ?

285 V. en ce sens TERCINET (A.), Droit européen de la concurrence (opportunités et menaces) op. cit. pp. 256300 ; POLLAUD-DULIAN (F.), Droit de la propriété industrielle, op. cit. pp. 35-44 et 232-251.

286 Article 16 paragraphe 2 de la Convention de l'U.E.A.C. c'est pratiquement le sens de l'article 36 du TFUE.

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La jurisprudence287 est donc intervenue en reprécisant la notion d'objet spécifique et en créant la théorie de l'épuisement du droit288. En effet, si l'objet spécifique est notamment d'assurer au titulaire l'exclusivité et la récompense, ne fait pas partie de cet objet, le droit de s'opposer à l'importation ou à la commercialisation dans un Etat membre, d'un produit écoulé licitement sur le marché d'un autre Etat par le titulaire lui-même, ou avec son consentement. Dans ce cas, on dira qu'il a épuisé son droit. L'épuisement du droit ne concerne que la circulation ou la première commercialisation de produits couverts par le droit de propriété intellectuelle, pas leur fabrication289.

Le monopole légal du titulaire s'amenuise lorsque celui-ci a délibérément consenti à la commercialisation de son produit dans d'autres Etats, ce qui l'oblige à consentir des licences obligatoires. Le juge conclut dès lors que : « L'exercice, par le titulaire d'un brevet, du droit que lui confère la législation d'un Etat membre d'interdire la commercialisation, dans cet Etat, d'un produit protégé par le brevet et mis dans le commerce dans un autre Etat membre, par ce titulaire ou avec son consentement, serait incompatible avec les règles du Traité relatives à la libre circulation des marchandises à l'intérieur du Marché commun »290.

Quid de la limitation par la libre concurrence ?

B. L'exercice des droits de propriété intellectuelle limité par la libre

concurrence

Le caractère exclusif des droits de propriété intellectuelle et la conclusion de licences souvent elles mêmes exclusives posent le problème de la compatibilité de ces droits et accords avec le principe de la libre concurrence, tel qu'il s'exprime dans les prohibitions des ententes illicites et abus de position dominante. Le caractère peu

287 Affaire Centrafarmc BV c/ Sterling Drug précitée.

288 La théorie de l `épuisement du droit a été initialement élaborée en droit de la propriété intellectuelle par la doctrine allemande et spécialement KOHLER (« Handbuch des deutschen Patentrechts in rechtvergleichender Darstllung », Mannheim, 1900). Elle a ultérieurement inspiré la jurisprudence.

289 CJCE, 5 octobre 1988, Maxicar c/ Renault, Aff. 53/82, Rec. P. 6039, Att. 11.

290 Point 15, arrêt Centrafarm.

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contestable d'un marché où opèrent les détenteurs de technologie favorise le développement des comportements anticoncurrentiels ou abusifs tels que les « buissons de brevet » ou encore l'effet de réseau destinés uniquement à empêcher l'émergence de la concurrence.

Depuis l'affaire « semences de mais »291, la jurisprudence a jugé de l'incompatibilité des licences exclusives fermées comportant une protection territoriale absolue, c'est-à-dire celle par laquelle les parties s'entendent pour éliminer toute concurrence de la part des tiers.

En ce qui concerne les abus de position dominante, ce serait détruire tout l'édifice de la propriété intellectuelle si l'obtention d'un droit exclusif était considérée comme abusive292. En revanche, l'exercice abusif du droit peut être interdit s'il est de nature à affecter le commerce intracommunautaire. En outre, en raison de la nature particulière du monopole conféré par les droits de propriété intellectuelle, la jurisprudence a développé une approche en se fondant sur les circonstances exceptionnelles293 pour obliger le titulaire du droit de consentir une licence. Au nom de la libre concurrence voire la protection des consommateurs, des droits seront concédés aux tiers s'il apparait une demande nouvelle, un refus injustifié du titulaire d'accorder des licences aux rivaux et l'intention d'exclure toute concurrence sur le marché dérivé. Dans le même sens, en cas de non exploitation ou d'exploitation insuffisante du droit intellectuel, avec pour intention d'exclure la compétition, le titulaire pourra être contraint d'octroyer des licences obligatoires.

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291 CJCE, 8 juin 1982, LC Nungesser et K. Eisele c/ Commission, Aff. 258/78 : Rec. p. 2015.

292 C'est en fait le sens le l'arrêt Maxicar c/ Renault.

293 Proches de la « théorie des facilités essentielles».

Les droits de propriété intellectuelle apportent des restrictions considérables au principe de la liberté du commerce et de l'industrie ; la liberté d'action des autres agents s'arrête où commence le droit exclusif294. Le législateur et la jurisprudence sont donc intervenus pour définir les contours et les frontières de ces droits car le domaine des abus possibles commence là où s'arrête l'exercice des prérogatives comprises dans les limites de l'objet spécifique d'un droit de propriété industrielle.

Dès lors, bien que conférant un monopole légal d'exploitation qui constitue un avantage concurrentiel, une distinction doit être opérée entre l'existence même d'un droit de propriété intellectuelle qui laisse indifférent, et son exercice, qui tombe sous le regard attentionné du droit communautaire de la concurrence.

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294 POLLAUD-DULIAN (F.), op. cit. p. 21.

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo