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Notion et régulation de l'abus de puissance économique

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par Azeddine LAMNINI
Université Sidi Mohammed Ben Abdellah Fès - DESA 2008
  

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Première partie 

IDENTIFICATION DE L'ABUS DE PUISSANCE ECONOMIQUE

12. La réalité des rapports de forces dans le marché. Le rapport économique est par nature un rapport de forces46(*). De l'affrontement naît un équilibre qui, sans avoir été voulu par l'Homme, est néanmoins le plus efficace à satisfaire ses besoins. Tel est, nous l'avons vu, le postulat économique libéral. Ainsi, les rapports de forces sont au coeur de l'activité économique. Ils se concrétisent par une agressivité dans la compétition économique.

Au coeur de cette lutte concurrentielle, l'entreprise cherche souvent à améliorer ses capacités compétitives, notamment par la concentration de puissance économique et le développement de nouvelles techniques de conquêtes des marchés. Cette réalité a été accentuée, d'une part, par l'apparition de la société de consommation de masse accompagnée par le développement du crédit comme instrument de consommation47(*), et d'autre part, par la concentration de grandes puissances économiques privées, notamment celles de la grande distribution48(*).

13. La compétition a pour objet la conquête de la clientèle. La lutte concurrentielle porte réellement sur les débouchés. Le marché sacrait ses champions en leurs permettant d'écouler ses productions, ce qui est, dans une économie d'abondance, une condition de succès de l'entreprise. Cette réalité économique se traduit par la conquête de la clientèle qui peut être des consommateurs professionnels - finaux ou intermédiaires - ou des consommateurs non professionnels. Ainsi, la recherche des débouchés par la conquête et la captation des consommateurs professionnels ou non professionnels est une condition sine qua non de la survie de l'entreprise quelque soit son pouvoir de marché49(*).

Cela pousse les entreprises, à renforcer et à augmenter leurs pouvoirs du marché à l'égard des autres concurrents cela se concrétise par une tendance à la concentration de la puissance économique, et le développement de nouvelles techniques de commercialisation, à l'égard de leurs partenaires en développant des rapports de coopération économique, ainsi qu'à l'égard des consommateurs non professionnels par le déploiement de nouvelles techniques d'incitation trop alléchantes50(*).

14. La puissance économique confère un pouvoir de fait. La puissance économique confère à son détenteur un pouvoir à l'égard de ses partenaires et de ses concurrents. C'est un pouvoir de fait, à l'instar de la force physique des Hommes. Il trouve sa source dans la puissance économique de son titulaire et ainsi, il se distingue des autres pouvoirs reconnus par l'ordre juridique, notamment au niveau de la nature, du fondement et de l'objet. A cet effet, il n'est pas reconnu par l'ordre juridique car, son titulaire ne dispose pas d'une prérogative juridique couvert par un droit subjectif, ou garanti par l'exercice d'une liberté économique. En effet, ce pouvoir économique est susceptible d'être mesuré. Plusieurs critères permettent de réaliser cette mesure. Il permet de déterminer le pouvoir susceptible d'abus. .

15. Le pouvoir économique peut être source d'abus. Dans ses rapports économiques, concurrentiels ou contractuels, l'entreprise peut être tentée d'abuser de la liberté de la concurrence que la loi lui reconnaît. En effet, le pouvoir économique s'exerce souvent par l'entreprise économiquement puissante comme un moyen de contrainte, destiné à maximiser ses rentes de manière illégitime ou, comme une arme pour fausser le bon fonctionnement de la concurrence et ainsi affaiblir ou éliminer ses concurrents.

Cet exercice abusif se manifeste à plusieurs égards. Il peut conduire un partenaire à contracter sans réflexion, comme il peut se manifester par un déséquilibre contractuel excessif. En outre, l'entreprise disposant d'un pouvoir économique peut profiter de sa supériorité de fait pour se soustraire aux règles du marché ou encore imposer sa loi aux autres acteurs de ce dernier.

16. L'exercice abusif du pouvoir économique a des conséquences sur les principes directeurs du système juridique. Les contrecoups de cet exercice abusif du pouvoir économique sur les règles de jeu dans le marché, le bon fonctionnement de la concurrence et la liberté contractuelle des opérateurs ne sont pas négligeables. En effet, si l'exercice abusif ou irrégulier ou encore anarchique de la liberté de concurrence engendre fréquemment des préjudices considérables pour les autres concurrents, pour le fonctionnement du marché ainsi que pour les consommateurs, cette réalité perturbe certains principes juridiques sous-tendant notre droit, dans la mesure où, l'agressivité concurrentielle altère le fonctionnement naturel des mécanismes du marché, et comporte des implications considérables et perceptibles à chacun d'entre nous dans l'exercice de sa liberté de choix.

17. L'existence du pouvoir susceptible d'abus est une condition sine qua non de son exercice abusif. Partant de ce qui vient d'être présenté, l'identification de l'abus de puissance économique doit passer par deux étapes essentielles. D'abord, la puissance économique confère un pouvoir qui est à l'origine de l'abus. Ainsi, l'abus trouve son appui dans un pouvoir. Il est conditionné par l'existence de ce dernier. Cependant, ce pouvoir ne présente en tant que tel rien d'illégitime. C'est son exercice abusif qui le manifeste et qui a des conséquences juridiques considérables. Ainsi, l'existence du pouvoir économique à l'origine de l'abus (Chapitre I) est une étape indispensable à celle de son exercice abusif (Chapitre II).

Chapitre I

* 46 M. S. Payet, Droit de la concurrence et de la consommation, op. cit., n° 63, p. 117

* 47 « Le début de la société de consommation de masse remonte en effet, dans les pays européens, aux années d'après guerre. C'est à cette époque que la société de consommation est devenue ce qu'elle est à l'heure actuelle : « une société d'abondance ». Parallèlement l'on a assisté, notamment, au développement de crédit comme instrument de consommation ». N. Chardin, Le contrat de consommation de crédit et l'autonomie de la volonté, op. cit., n° 18, p. 23.

* 48 Au-delà de ces enjeux politiques, les nouvelles règles ont été dictées par l'évolution récente des circuits de distribution. En effet, de profondes mutations économiques ont affecté ces dernières années aussi bien la grande distribution de masse que la petite distribution intégrée et spécialisée. En France, ces mutations économiques, notamment dans le secteur agro-alimentaire, ont contribué à placer les grandes surfaces en situation dominante face aux producteurs. Cette inversion des rapports de force, qui a donné lieu à de nouvelles pratiques telles que le déréférencement injustifié, a révélé l'inadaptation de la législation existante, notamment celle concernant le contrôle des concentrations, l'abus de position dominante, la transparence tarifaire et les discriminations.

* 49 « Sauf cas exceptionnel, vous le savez, il y a toujours des produits concurrents d'au moins une autre marque. Il y a toujours, ou presque toujours, des marques de notoriété équivalente. Il y a toujours, ou presque toujours, des produits d'une qualité équivalente. On le sait très bien. Que va donc faire notre acheteur ? Il va retenir un produit et éliminer un autre. [...] Mais, que va faire le vendeur éliminé qui ne vend pas ? S'il perd un client, ce n'est pas grave. Ce n'est pas grave ? Si ce client représente 1 % de son chiffre d'affaires, en effet, ce n'est pas grave. Mais, si ce client représente 5 % ? Je crois pouvoir dire que perdre délibérément 5 % du chiffre d'affaires est très grave. Je ne connais pas beaucoup de chefs d'entreprises. Je ne parle plus du malheureux agent commercial qui va se faire mettre à la porte parce qu'il n'aura pas réalisé ses objectifs, mais je parle du chef d'entreprise qui accepte une telle perte de chiffre d'affaires. S'il est P.D.G., il va se faire révoquer par son conseil d'administration. S'il est propriétaire de son entreprise, il va se demander si, avec cette perte de 5 %, il va pouvoir continuer à étaler ses frais fixes. A 5 %, cela va peut-être passer. Mais à 10 %, cela ne passera plus. Va-t-il alléger ses charges en réduisant la publicité pour sa marque ? Va-t-il « dégraisser », c'est-à-dire licencier ? Et si cela dure, ne va-t-il pas devoir se « délocaliser », ou, tout simplement, déposer son bilan ? ». X. de Mello, « Loyauté ou liberté de la concurrence », LPA, 1994, n° 83, P. 17 et s.

* 50 « La société de consommation de masse telle qu'elle s'est développée à partir de la fin du XIXe siècle a amené au développement de méthodes de diffusion des produits dont le professionnel pourrait être tenté de profiter pour écouler ses produits plus facilement et en plus grand nombre ». H. Claret, « Contrats et obligations - protection du consommateur », art. 1109, fasc. 10, J.Cl. Civil, n°8.

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