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La responsabilité civile du créancier professionnel en matière de sûretés

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par Arnaud Silvère Yansounou
Faculté de droit de La Rochelle - Master II Recherche Droit Privé 2005
  

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A°) L'exigence d'un consentement éclairé de la caution

La caution est de tous les contractants l'un de ceux qui souscrit l'une des obligations les plus rigoureuses. Des cautions peuvent en effet s'engager pour des montants et une durée indéterminés. Lorsqu'elle s'engage, la caution doit donc être à même de mesurer la portée de son engagement21(*). Pourtant, le cautionnement a longtemps été considéré comme un contrat ordinaire. Le caractère unilatéral de ce contrat confère au cautionnement une certaine spécificité. La jurisprudence est en effet très attachée à la protection de la volonté de la caution (1).

La théorie des vices de consentement en matière de cautionnement est en recul, elle est de moins en moins invoquée par les cautions :

d'une part, ce recul doit être mis en parallèle avec l'utilisation de plus en plus fréquente par les cautions du droit de la responsabilité civile.

D'autre part, le législateur a pris en considération certaines situations pour renforcer la protection du consentement de la caution. Ainsi, les techniques protectrices et d'ordre public du droit de la consommation ont-elles été étendues aux cautionnements des opérations de crédit régies l'article L. 311-2 du Code de la consommation. Il en résulte que l'offre préalable doit être remise à la caution comme à l'emprunteur (article L. 311-8 du Code de la consommation) et que la caution bénéficie du même délai de réflexion que l'emprunteur.

Enfin, ce recul de la théorie des vices du consentement est aussi dû en partie à la création par la jurisprudence d'obligations nouvelles qui pèsent désormais sur l'établissement de crédit : devoir de conseil et de discernement de la situation du débiteur principal.

L'insuffisance des règles de droit commun à protéger efficacement la caution a donc conduit le législateur et les juges à renforcer le consentement de celle-ci (2).

1°) Les vices du consentement de la caution

Le cautionnement, opération accessoire à l'obligation principale mettant en relation le créancier et le débiteur principal, suppose une rencontre des volontés du créancier professionnel et de la caution. Pour être valablement formé, le contrat de cautionnement doit respecter les conditions énumérées par l'article 1108 du Code civil.

Nous traiterons principalement le dol et l'erreur sur la substance même de l'engagement de la caution.

a
· Le dol de la caution

Le dol est une cause de nullité de la convention, énonce l'article 1116 du Code civil, « lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. »

En matière de cautionnement, il ne pourra être retenu que s'il émane du créancier professionnel car, dans la logique de l'article 1116 du Code civil, le comportement du débiteur principal ne peut jamais donner lieu à une annulation du cautionnement mais seulement à une action en responsabilité contre le débiteur principal.

Quant au fait du créancier professionnel, il peut se rendre coupable de dol en raison d'une réticence dolosive. Le dol permet de pallier l'absence d'obligation générale d'information reposant sur le créancier professionnel : c'est la réticence plus que les manoeuvres dolosives ou le mensonge qui sera en effet le plus fréquemment retenue.

Plusieurs décisions de la Cour de cassation22(*) annulent alors le cautionnement au double motif « que manque à son obligation de contracter de bonne foi et commet ainsi un dol par réticence le créancier professionnel qui, sachant que la situation de son débiteur est irrémédiablement compromise ou à tout le moins lourdement obérée, omet de porter cette information à la connaissance de la caution afin d'inciter celle-ci à s'engager. »

Ce qui revient à faire peser sur le créancier professionnel une obligation d'informer la caution, préalablement à son engagement, au fond, sur la nature de celui-ci.

Finalement, la manoeuvre dolosive consiste à faire croire qu'un crédit sera accordé. Mais cette obligation est triplement limitée : d'une part, le créancier ne peut révéler que ce qu'il connaît23(*) ; d'autre part, aucune obligation d'informer spontanément des cautions qui, en raison de leurs liens avec le débiteur principal, peuvent s'informer elles-mêmes24(*) ; et enfin, le créancier professionnel n'a aucun devoir de conseil à l'égard de la caution, notamment en ce qui concerne l'opportunité, pour celle-ci, de l'acte ; mais les choses changent peut-être à cet égard25(*).

b
· L'erreur sur la substance même de l'engagement

En théorie tout au moins, plusieurs types d'erreurs sont susceptibles de justifier une annulation du cautionnement. Il faut qu'il s'agisse seulement d'une erreur sur la substance26(*), c'est l'erreur - obstacle. Cependant, la caution a l'obligation de se renseigner. Pour cette raison, les juridictions rejettent quasi-systématiquement les demandes en nullité des cautions qui prétendent avoir été trompées sur la solvabilité du débiteur principal. L'erreur dans l'appréciation des risques encourus n'est donc pas retenue, à moins qu'elle ne soit manifeste et que le créancier professionnel soit en même temps de mauvaise foi27(*).

Un arrêt récent marque cependant une évolution importante. La Cour de cassation28(*) annule en effet un cautionnement en approuvant une Cour d'appel d'avoir retenu que la caution avait fait de la solvabilité du débiteur principal la condition tacite de sa garantie. Or, au jour de l'engagement, le débiteur principal était une société dont la situation était déjà irrémédiablement compromise. Cet arrêt n'est peut être pas une décision de principe. Cependant, il témoigne d'un infléchissement de la Cour de cassation, tout au moins en présence de cautions profanes.

* 21 Il convient de se placer au jour du contrat pour apprécier le caractère explicite et non équivoque de la connaissance par la caution de la portée de son engagement : cass. civ. 1ère, 09 Mai 2001 ; Revue de droit bancaire et financier, Juillet - Août 2001.

* 22 Cass. civ. 1ère, 21 Janvier 1981 : Bull. civ. I, n° 187 ; J. C. P., 1989, II, 21363, note D. Legeais.

* 23 Cass. civ.1ère, 11 Février 1986, Bull. civ. I, n° 22 : des faux bilans avaient été produits à la banque. Plus contestable : Cass. com., 08 Décembre 1987, Bull. civ. IV, n° 263 : au moment de l'octroi du prêt et du cautionnement, la banque n'avait pu avoir connaissance du bilan de l'année précédente ni du refus de délivrance du certificat de régularité des comptes ; mais il y avait déjà eu onze protêts !

* 24 Seul un refus de renseignement aurait été fautif de la part de la banque. Cass.civ.1ère, 10 Juin 1987, D., 87.445, note L. Aynès.

* 25 Comp. Cass.civ.1ère, 13 Février 1996, Bull. civ. I, n° 78; D., 96, som., 265, note L. Aynès, et Cass. com., 23 Juin 1998, Bull. civ. IV, n° 208.

* 26 L'erreur sur la substance même de l'engagement a pu ainsi être commise par une caution illettrée et ignare qui aurait confondu l'engagement juridique avec une simple garantie morale. L'espèce concernait des agriculteurs bretons : Cass. civ.1ère, 25 Mai 1964 : Bull. civ. I, n° 269, p. 210.

* 27 Dès lors que l'erreur n'est pas de son fait, la caution peut se prévaloir d'une présentation erronée des pertes en bénéfice dans l'acte de vente de fonds de commerce financé, cass. com., 10 Décembre 2002 : Bull. Joly 2003, p. 413, note P. Scholer.

* 28 Cass. com., 01 Octobre 2002 : D., 2002, AJ, 3076 et 2003, jurisp., 1617, note Y. Picod.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus