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La responsabilité civile du créancier professionnel en matière de sûretés

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par Arnaud Silvère Yansounou
Faculté de droit de La Rochelle - Master II Recherche Droit Privé 2005
  

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2°) La nécessité d'une protection renforcée du consentement de la caution

La théorie des vices de consentement se révèle insuffisante à protéger efficacement le consentement de la caution en matière de cautionnement. Cette insuffisance a été palliée par de nouvelles obligations mises à la charge du créancier professionnel.

a
· Le devoir de conseil du créancier professionnel

Compte tenu de sa qualité et de ses compétences, le créancier professionnel doit donner un avis, doit donner des recommandations, doit éclairer la caution sur l'importance de la nature de l'acte.

Dans la mise en oeuvre de ce devoir de conseil, il faut distinguer deux types de situations :

la relation triangulaire ( caution, créancier et débiteur principal) et la relation caution créancier professionnel.

Dans la première situation, le débiteur principal met en cause la responsabilité du banquier dans la convention principale. En effet, la faute consiste pour le banquier à ne pas avoir averti avec assez de clarté les cautions du risque pris en s'engageant. Elle peut aussi consister à accepter un cautionnement alors qu'à l'évidence le projet financé n'est pas viable. Un tel devoir existe envers l'ensemble des cautions. Des cautions dirigeantes peuvent même se prévaloir d'un tel manquement dès lors qu'il est établi qu'elles sont inexpérimentées ou n'ont pas les connaissances nécessaires pour apprécier les risques liés au cautionnement d'une opération de crédit. La jurisprudence admet depuis peu (1990) que le débiteur emprunteur peut, dans certaines circonstances, mettre en cause la responsabilité de l'établissement de crédit pour non-respect d'un devoir de conseil (celui de ne pas s'engager parce que les remboursements susceptibles d'être dus sont trop élevés par rapport au patrimoine et aux ressources du débiteur).

La caution pourrait reprendre à son compte cette demande de mise en cause de la responsabilité du fournisseur de crédit en faisant valoir qu'elle était dès le départ privée de tout recours efficace contre le débiteur.

En effet, le débiteur était incapable de rembourser sa dette, donc la caution était privée de tout recours réel contre le débiteur principal. Ce qui se passe dans l'opération principale rejaillit dans le cautionnement.

La caution peut encore conduire un raisonnement de même nature dans la relation qu'elle entretient avec le créancier.

Dans le second cas, la caution va être victime en raison de son obligation de garantie. Le plus souvent, il est reproché au créancier professionnel, qui connaît la situation du débiteur, son client, de n'avoir pas communiqué à la caution non professionnelle des renseignements sur la situation de celui-ci ou encore la caution peut reprocher à l'établissement de crédit d'avoir exigé le cautionnement alors que dès le départ, ses ressources et son patrimoine étaient insuffisants. En revanche, il n'incombe au créancier professionnel aucun devoir de conseil sur l'intérêt ou l'opportunité du cautionnement : les mécanismes ordinaires paraissent suffisants.

Cependant, le devoir de conseil qui pèse sur l'établissement de crédit ne doit pas peser sur la gestion de l'entreprise du débiteur principal. Bien qu'exceptionnelle, l'immixtion du banquier dans les affaires du crédité reste néanmoins envisageable. Le banquier s'immisce dans les affaires du débiteur (l'entreprise) dès lors que ses « conseils » pèsent sur la gestion même de l'entreprise : 

 d'une part, le banquier peut voir sa responsabilité engagée en qualité de dirigeant de droit, cette situation se rencontre par exemple lorsque le banquier est président du Conseil d'administration, gérant de société.

D'autre part, le banquier peut voir sa responsabilité engagée en qualité de dirigeant de fait.

b
· Les obligations d'information et de discernement du créancier professionnel

La faute du banquier met en cause un double manquement :

Le devoir de discernement (c'est-à-dire la faculté de juger et d'apprécier avec justesse la situation de l'entreprise du débiteur) et l'obligation d'information. La connaissance qu'a ou devrait avoir l'établissement de crédit sur la situation de l'entreprise peut d'ailleurs être qualifiée « d'élément subjectif de la faute. »29(*)

Le devoir de conseil concerne l'obligation d'analyse de la situation du débiteur principal à partir de données brutes et recoupées par des vérifications.

Pour la doctrine30(*), « le devoir de vigilance du banquier doit être proportionnel à la compétence financière de l'emprunteur. » La notion de discernement constitue la base de l'appréciation du banquier.

S'agissant de l'obligation d'information, il est impossible de détailler de manière exhaustive et limitative les informations que le banquier doit retenir. En revanche, il est possible d'affirmer que l'obligation ne peut porter que sur les informations que le banquier est à même de recueillir.

La responsabilité du banquier en tant que débiteur d'une obligation d'information en cours d'exécution du contrat est souvent sollicitée, eu égard à la masse de renseignements dont il dispose sur la vie des affaires. Très largement admise à l'égard des clients du banquier, cette obligation est plus discutée dans les rapports de ce dernier avec la caution : si son existence est incontestable au moment de la formation du contrat, les juges ne la sanctionnent en cours d'exécution que dans certaines circonstances où le banquier est considéré comme investi d'une responsabilité particulière31(*). Cette jurisprudence32(*) généralement approuvée par la doctrine, n'a en effet pas consacré l'existence d'un devoir général d'information sur l'évolution du risque, qu'il s'agisse de la progression de la dette garantie ou de l'évolution de la solvabilité du débiteur, notions distinctes (l'état de la dette n'est pas celui du patrimoine du débiteur), mais souvent confondues.

Pourtant, il est évident que plus l'information sera développée, mieux la protection des intérêts de la caution sera assurée :

avertie en temps utile, elle pourra faire pression sur le débiteur, agir pour la défense personnelle de ses intérêts, notamment dans le cadre des mesures préventives, et mettre fin, en cas d'engagement à durée indéterminée, à son obligation de couverture.

Aussi par touches successives, le législateur a-t-il comblé en grande partie le vide jurisprudentiel.

La loi du 01 Mars 198433(*) fixe dans son article 48 le principe, le contenu et la périodicité des informations dues par les banques aux cautions d'entreprise. Désormais, lorsqu'un établissement de crédit subordonne un concours financier à la fourniture d'un engagement de caution, il devra informer annuellement cette dernière de l'état de la dette, c'est-à-dire du montant total de ce qui est dû au 31 décembre de n'année précédente En outre, si l'engagement est à durée déterminée, la caution devra être informée de son terme ; si au contraire l'engagement est à durée indéterminée, la faculté de résiliation et ses conditions éventuelles d'exercice doit être rappelée. La loi Madelin du 11 Février 199434(*) étend l'article 48 à tous les créanciers en cas de cautionnement à durée indéterminée consenti par une personne physique pour garantir une dette professionnelle d'un entrepreneur individuel (article 47 II).

Le groupe de travail relatif à la réforme du Droit des Sûretés suggère qu'aux nombreuses obligations d'information qui se superposent aujourd'hui soit substituée une unique obligation de portée générale, par laquelle tout créancier serait tenu, avant le 31 Mars de chaque année, de faire connaître à toute caution personne physique le montant du principal de la dette et de ses accessoires restant dus au 31 décembre de l'année précédente.

Il conviendra de retenir trois décisions qui pourront éclairer sur le contrôle réalisé par le juge dans les manquements du banquier à son obligation d'information :

une première décision est rendue par la Cour d'appel de Versailles35(*). Elle engage la responsabilité du banquier qui accorde une augmentation importante de concours sans se faire communiquer une situation récente à défaut du dernier bilan non encore établi.

Une seconde décision36(*) dans laquelle le banquier, alerté par l'augmentation importante du débit du compte de son client, a consolidé le découvert sans vérifier si des mesures de redressement étaient mises en oeuvre et sans se faire remettre des comptes certifiés issus d'un rapport d'audit antérieur.

Enfin, une autre décision permet d'illustrer les contours de la responsabilité du banquier dans l'arrêt de la Cour de cassation du 24 Septembre 200237(*).

L'équilibre dans les relations contractuelles est de plus en plus recherché. S'agissant du cautionnement, il apparaît que la protection du banquier ne doit pas conduire à des excès. Un principe de proportionnalité tend ainsi à s'imposer dans notre droit.

* 29 V. l'octroi abusif de crédit par I. Urbain - Parleani, revue de Droit Bancaire et Financier n° 6, novembre/décembre 2002, p. 365.

* 30 J. L. Coudert et P.H. Magot : « Appréciation par l'expert du comportement du banquier dans la distribution de crédits. » Conférence du 12 Février 1983 présidé par le Doyen Rouger sur « la responsabilité du banquier. »

* 31 Cf. P. Simler, n° 394.

* 32 Com., 07 Avril 1992 ; J. C. P., 1993, II, 22009, note Y. Picod.

* 33 Loi du 01 Mars 1984, n° 84 - 148 sur « La prévention des défaillances d'entreprises » parue au J.O du 02 Mars 1984

Elle met en place des règles de prévention des difficultés par l'information et crée une procédure d'alerte destinéée à porter à la connaissance du chef d'entreprise les risques de défaillance afin que des mesures puissent être prises en temps utile.

* 34 Loi relative à « l'initiative et à l'entreprise individuelle », loi n° 94 - 126 du 11 Février 1994, J.O du 13 Février 1994

* 35 C.A. Versailles, 02 Octobre 1991, R. J. D. A., Mars 1992 n° 263 p. 200.

* 36 Cass. com., 26 Mars 1996, Bull. civ. IV, n° 95.

* 37 Cass. com., 24 Septembre 2002, Bull. Civ. IV, n° 128 p. 136.

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