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Les compétences du juge étatique dans l'arbitrage OHADA

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par Francis NGUEGUIM LEKEDJI
Université Catholique d'Afrique Centrale - Master en Contentieux et Arbitrage des Affaires 2007
  

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§ III : L'INTERPRETION ET LA REPARATION DES ERREURS ET OMISSIONS MATERIELLES AFFECTANT LA SENTENCE ARBITRALE

La sentence arbitrale marque en principe le terme de l'instance arbitrale parce qu'elle dessaisit l'arbitre118(*). Cependant, il peut arriver que bien que la sentence soit rendue, qu'elle soit sujette à interprétation, ou qu'elle soit affectée d'erreurs ou d'omissions matérielles. La compétence pour statuer appartient d'abord aux arbitres119(*). Cela peut aussi faire l'objet d'une intervention éventuelle du juge étatique (B). Il ne peut néanmoins intervenir que si certaines conditions sont réunies (A).

A- LES CONDITIONS DE L'INTERVENTION DU JUGE ETATIQUE

L'AU.A pose essentiellement une condition liée à la reconstitution du tribunal arbitral. On ne peut néanmoins occulter le problème des délais pour agir.

S'agissant des délais, l'AU.A120(*) dispose que la requête en vue de l'interprétation ou de la rectification doit être introduite dans un délai de trente jours à compter de la notification de la sentence121(*) ; le tribunal disposant d'un délai de quarante cinq jours pour statuer. Il s'agit là d'un délai non franc parce que la formalité doit être accomplie au trop tard le jour même de l'expiration du délai. La conséquence du non respect de ce délai est la forclusion, c'est-à-dire la déchéance du droit d'agir ou de former un recours. La sentence, en restant en l'état, acquiert aussi un caractère définitif.

Quant à la condition liée à la reconstitution du tribunal arbitral, il s'agit d'une condition essentielle qui traduit à suffisance le caractère subsidiaire de l'intervention du juge étatique. En effet, l'AU.A dispose que : « si le tribunal arbitral ne peut à nouveau être réuni, ce pouvoir appartient au juge compétent dans l'Etat-partie ».

Quelles peuvent être les circonstances pouvant empêcher le tribunal arbitral de se réunir ? Ces circonstances n'étant pas expressément prévues par l'AU.A, on peut spéculer en avançant quelques hypothèses :

-décès d'un arbitre survenu entre le prononcé la sentence et la demande de rectification ;

- perte des conditions exigées pour être arbitre, notamment les droits civils122(*) ;

- ou encore refus d'un arbitre de siéger à nouveau dans la cause précédemment jugée123(*).

Il nous semble que l'hypothèse du décès est la plus radicale, parce qu'étant un empêchement définitif alors que l'arbitre peut éventuellement être relevé d'une déchéance de ses droits civils. Dans tous les cas, l'impossibilité de reconstituer le tribunal arbitral doit être dûment constatée pour que le juge étatique puisse valablement statuer.

B- L'OBJET DE L'INTERVENTION DU JUGE ETATIQUE

Le juge étatique interviendra pour interpréter la sentence (1) ou pour réparer les erreurs et omissions matérielles l'affectant (2).

1- L'interprétation de la sentence arbitrale

L'interprétation d'une norme permet de dégager son sens exact lorsqu'il est peu clair, flou ou que sa portée est imprécise notamment dans son champ d'application. L'interprétation de la sentence ne sera nécessaire que si elle est sous forme de dispositif et souffre d'une ambiguïté telle que les parties peuvent légitimement diverger sur sa signification. Certains pensent que l'obscurité éventuelle des motifs n'appelle pas une action en interprétation124(*).

En cas d'interprétation effective de la sentence, celle-ci fait désormais partie intégrante de la sentence initiale125(*).

L'arbitrage sous l'égide du Règlement d'arbitrage du CIRDI126(*) présente quelques particularités dans la mesure où il n'enferme la demande d'interprétation dans aucun délai ; et surtout, en cas d'impossibilité de reconstitution du tribunal arbitral initial, un nouveau tribunal arbitral peut être constitué pour connaître de l'affaire. Il en a déjà été ainsi dans l'arbitrage sous l'égide de la CCI127(*).

2- La réparation d'erreurs ou d'omissions matérielles affectant la sentence

Il existe plusieurs types d'erreurs pouvant affecter une sentence arbitrale : on imagine une erreur de calcul dans le total général des dommages-intérêts. Cette erreur peut soulever de sérieux problèmes dans la mesure où une partie se trouve condamnée à payer une somme supérieure à celle qui correspond à la volonté du tribunal arbitral. Le système d'arbitrage du CIRDI permet la correction de telles erreurs128(*). Les tribunaux français ont aussi eu à rectifier une erreur à l'occasion d'une instance en annulation, le juge restituant alors à la sentence son sens réel129(*). Toutefois, le tribunal arbitral, ou le juge compétent dans l'Etat-partie ne doit, sous couvert de rectification ou d'interprétation, procéder à une modification de la sentence.

Le problème est beaucoup plus délicat quand il s'agit d'une omission. S'agit-il d'une omission mineure, c'est-à-dire par exemple celle où le tribunal a calculé le montant des dommages et intérêts sans le porter sur le dispositif de la sentence ? Là, le juge étatique est naturellement compétent pour statuer. Mais s'agit-il d'une omission portant sur un chef de demande que le tribunal n'a pas considéré dans la sentence ? Nous pensons que le juge étatique doit surseoir à statuer. En effet, l'AU.A130(*) reconnaît au tribunal arbitral le pouvoir de rendre une sentence additionnelle pour compléter une omission. Il ne s'agit non plus dans ce cas de corriger une sentence qui aurait statué au-delà ou en-deça de la demande formulée par les parties.

Il demeure un dernier problème relatif à la détermination du juge compétent pour interpréter ou réparer les omissions matérielles. Les législations ivoirienne131(*) et sénégalaise132(*) sur l'arbitrage ont désigné le juge qui aurait été compétent à défaut d'arbitrage.

Le législateur camerounais désigne le président du TPI du lieu de l'arbitrage ou le magistrat qu'il délègue à cet effet133(*). Il est saisi comme en matière de référé, et sa décision n'est susceptible d'aucun recours sauf s'il s'agit d'une sentence additionnelle134(*).

* 118Article 22 alinéa 1 AU.A.

* 119Article 22 alinéa 2 AU.A. Pour une application dans l'espace OHADA, V. sentence rendue par un tribunal ad hoc le 22 juin 2005 complétant celle du 11 avril 2005, aff. Cicam c/ Sodecoton.

* 120Article 22 alinéa 4 AU.A.

* 121Cette disposition est identique à celle que prévoit le Règlement d'arbitrage de la CNUDCI en son article 35.

* 122L'article 6 AU.A exige en effet que l'arbitre jouisse de ses droits civils pour pouvoir exercer la fonction.

* 123Tel a été le cas dans l'aff. Cicam c/ sodecoton précitée où le troisième arbitre avait refusé de siéger à nouveau. Ce qui n'avait pourtant pas empêché les deux autres de rendre la sentence corrective en son absence.

* 124Ph. Fouchard et alliés, op. cit. no 1415.

* 125V. sentence rendue le 31 Mai 1988 dans l'aff. Wintershell c/ Quatar, Yearbook, 1990.30, spéc. No 89, p. 57.

* 126V. notamment les articles 50 et 51 dudit règlement.

* 127V. sentence CCI no 6233 rendue en 1992, Yearbook, 1995.58.

* 128V. pour une application, la rectification le 10 Octobre 1990 de la sentence rendue le 31 Mai 1990, aff. Amco c/ Indonésie, JDI, 1991.173, spéc. p. 181, obs. E. Gaillard.

* 129Paris, 2 Février 1978, Rev. arb., 1978.501, note Roland- Lévy.

* 130Article 22 alinéa 3 AU.A.

* 131Article 33 Loi 93/671 du 09 Août 1993.

* 132Article 819 al. 9 du décret 98/492 du 05 Juin 1998.

* 133Article 2 loi no 2003/009 précitée.

* 134Article 3 alinéa 1- 2èmement loi ibid.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote