WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Quelle politique de formation mettre en oeuvre dans les établissements de santé pour accompagner la transition numérique et les possibles usages de l'intelligence artificielle (IA) ?


par Elisabeth Berthelot
IGS - Master Ressources Humaines 2020
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

89

Partie 2 : métiers concernés et accompagnement

En fonction des impacts (positifs/négatifs) des nouvelles technologies et de l'intelligence artificielle sur leur métier, comment les médecins sont-ils / seront-ils accompagnés ?

Il y a 2 choses la première c'est que les médecins sont des scientifiques et sont assez naturellement portés à jouer avec tout ce qui est innovant à partir du moment où la spécialité s'y prête. En général ils ont été abreuvés durant toute leur scolarité d'éléments physiques, chimiques, mathématiques qui leur disaient : « si on arrivait à faire ça ce serait génial ». Même si tous les médecins ne sont pas des geeks, il y a quand même une proportion plus importante chez les médecins à accepter le changement même sur d'autres métiers à haute qualification.

Il y a trois choses qui peuvent les pousser à changer la première c'est que :

· L'innovation et les nouvelles technologies peuvent les amener à avoir un positionnement plus sécurisant dans leur diagnostic. S'appuyer sur l'intelligence artificielle c'est aussi avoir une démonstration mathématique que la décision que l'on prend à un instant T a une valeur mathématique et scientifique qui est plus importante que la décision d'un médecin seul dans son bureau. Il y a un aspect médico-légal et de sécurisation de la décision qui leur plait.

· La deuxième chose, c'est la conviction que si eux ne le font pas d'autres le feront à leur place dans l'environnement de concurrence qui est le leur et cela peut avoir des conséquences sur leur positionnement. C'est aussi une façon pour eux de réaffirmer leur positionnement en tant que médecin. La maîtrise des technologies extrêmement complexes reste l'apanage du médecin. Dans un monde où le sachant et la connaissance sont très importants, savoir maîtriser tel ou tel outil est un marqueur social.

· La troisième c'est l'attrait pour l'innovation elle-même.

En fonction des impacts (positifs/négatifs) des nouvelles technologies et de l'intelligence artificielle sur leur métier, comment les professions paramédicales, infirmiers plus spécifiquement sont-ils / seront-ils accompagnés ?

Concernant les paramédicaux, la logique est différente : on est sur des transformations de métier. On est obligé de faire un accompagnement externe. Là où les médecins vont se former eux-mêmes, chercher l'information à l'extérieur. Avec les paramédicaux on est obligé de

90

mettre en place des plans de formation pour l'adaptation à l'évolution prévisible des emplois comme le prévoit la réglementation sur la formation à l'hôpital. C'est plus compliqué parce qu'on va sur des transformations de métiers qui sont consubstantiels. L'infirmière devra faire de l'assistance à prédictions de diagnostic en lien avec l'intelligence artificielle avec laquelle travaille le médecin. Elle se rapproche progressivement de la profession médicale là où elle était la petite main parmi les petites mains il y a encore 50 ans.

On ne met pas un plan de formation unique en place. C'est du sur-mesure et de la couture. C'est le plus souvent un médecin qui vise à l'implantation de nouvelles technologies dans son service qui demande à ce que les infirmières soient formées. On est très suiveurs pour le moment. Cela peut être le médecin qui demande directement à l'infirmière qui accepte et ils arrivent tous les 2 avec une solution clé en main. Aujourd'hui il n'y a pas de plan systémique de l'intégration de l'innovation. Ce n'est pas la direction qui porte : on reste prestation support. Si ce n'est pas le médecin qui propose à l'infirmier.e, le problème n'est pas tant la définition de l'action de formation en faisant de l'achat mais plutôt de trouver le bon profil pour accompagner le changement. Il y a un ticket en matière de compétences qui est élevé. On change de métier : on a fait des études à l'Institut de Formation en Soins Infirmiers (IFSI) pour un certain métier et quand on arrive à l'unité médico-chirurgicale cardiologique de [tel hôpital] on ne fait pas son métier d'infirmière comme on l'a appris à l'école. On va faire de l'analyse de mesure, de l'accompagnement du médecin, dans de la coopération sophistiquée. Ensuite il y a une raison financière. A l'hôpital public, en France, on ne paie pas assez. Chez Bioserenity à la clinique du sommeil par exemple, ils payent leurs infirmières entre 3200 et 3400 euros nets mensuels là où on les paie entre 2200 et 2400 euros à l'hôpital public. D'autre part il y a des difficultés dans le fait de faire venir les bons paramédicaux à [tel hôpital]. Bioserenity, en tant qu'opérateur privé peut faire venir des paramédicaux de partout puisque leur contrat les autorise à le faire. Il y a un problème de statut de la fonction publique qui ne nous permet pas de trouver forcément de bons profils.

Il y a également un problème de formation initiale qu'on va essayer de résoudre partiellement. Dans le pôle de ressources humaines de [tel hôpital] il y a 14 écoles et instituts dont 2 IFSI111 qui forment à eux deux 1000 infirmiers chaque année, 3 promotions de 350. On a engagé depuis que je suis arrivé un grand plan de restructuration des écoles avec la création d'un établissement d'enseignement supérieur, une structure unique qui forme tous les professionnels et tous les métiers avec une équipe pédagogique unique, ce qui aujourd'hui n'est pas le cas. L'objet est de faire émerger une identité de formation, c'est-à-dire donner une

111 Institut de Formation en Soins Infirmiers

91

formation à haute valeur ajoutée à tous les professionnels quelle que soit la formation dans laquelle ils s'engagent à [tel hôpital]. Aujourd'hui chaque IFSI a son propre tropisme. On restructure tout en les rassemblant, on fait remonter le niveau de productivité et on égalise la quantité de travail de chacun. Cela permet d'économiser des ETP, notamment chez le corps enseignant.

Avec l'argent qu'on économise on travaille sur la simulation avec SimforHealth ou avec Laerdal, assez connu pour ses mannequins en simulation avec des corps qui réagissent. On prévoit avec eux du e-learning et de l'apprentissage en présentiel à réalité augmentée. Les agents peuvent se former sur des mannequins de simulation de patient Laerdal avec un casque de réalité augmentée dans une salle comme s'ils étaient dans un bloc opératoire. L'enseignant peut même être à distance en dehors de la pièce avec un contrôle retour directement dans l'environnement numérique. L'ensemble sera mis en application à échéance septembre 2021.

En fonction des impacts (positifs/négatifs) des nouvelles technologies et de l'intelligence artificielle sur leur métier, comment le personnel administratif, dont les secrétaires médicales/agents d'accueil, sont-ils / seront-ils accompagnés ?

Avec le personnel administratif, c'est encore plus compliqué. Ils sont peu enclins au changement. On travaille sur 2 axes la première c'est la conduite du changement et la conduite de l'outplacement des personnels qui ne sont pas forcément adaptés à accompagner de nouveaux processus administratifs avec un rajeunissement à la clé des équipes qui est très important. On va également travailler à la réduction des effectifs. On change complètement l'organisation (voir la ci-dessus la modification des processus de validation par exemple) avant de pouvoir parler de personnes qui sont compatibles avec le changement. Quand on annonce un changement, 70% ne suivent pas. On doit d'abord envisager ces transformations sous l'angle de la GPEC : telle personne qui part à la retraite dans 2 ans va rester sur son poste, telle autre dans 10 ans donc on va lui proposer d'aller aux admissions ou à l'accueil plutôt que dans le service des ressources humaines, untel qui ne souhaite pas s'orienter de cette manière souhaite-t-elle se reconvertir comme assistante sociale ou apprendre un nouveau métier qui n'a rien à voir avec le secteur sanitaire. On fait ensuite du suivi individuel des agents. Une fois que la nouvelle organisation est posée, on met l'IA ou la nouvelle technologie en relation avec le besoin.

92

Les formations de conduite du changement sont pour les managers. Au-delà de la conduite du changement, c'est quasiment de la formation culturelle. La formation de conduite du changement est une formation culturelle et mentale : qu'est-ce que le changement ? Comment peut-on faire ? Quelles sont les recettes d'un changement réussi ? Après on décline en fonction des populations et des objectifs. Il faut qu'ils oublient les canevas intellectuels dans lequel ils ont travaillé : le spectre du juridique n'est pas prioritaire dans l'organisation de l'hôpital : on est là pour soigner les gens, on n'est pas là pour émettre des décisions. Quand on dit qu'il faut émettre une décision en urgence, on ne peut pas faire appel à telle ou telle procédure interne qui dit qu'il faut 6 semaines sur tel type de demande. Il y a des patients derrière. Il faut rappeler au quotidien au personnel administratif qu'il y a des patients derrière. On essaie de les tremper dans un environnement culturel qui est très différent de celui dans lequel ils ont évolué. Certains disent « chouette », d'autres « pourquoi pas » et encore d'autres « surtout pas ». On ne les laissera pas ces derniers sur le bord de la route mais il faut néanmoins que l'institution avance. S'ils ne changent pas il va falloir leur trouver une place qui soit à la hauteur de leurs attentes mais qui ne les mette pas en difficulté dans la conduite des nouveaux process mis en en place.

93

Annexe 5 : Interview DRH Nicolas Delmas

ENTREVUE NICOLAS DELMAS, Directeur adjoint des Ressources Humaines - Hôpital Bichat / APHP. Nord - Université de Paris

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon