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Les attributions sociales du capitaine de navire.

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par Darly Russel KOUAMO
Université de Nantes - Master droit et sécurité des activités maritimes et océaniques 2014
  

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B- La responsabilité pénale.

D'entrée de jeu, il est nécessaire de rappeler ici que, ces dernières années, la responsabilité pénale du capitaine, a connu un essor particulier. Notamment en ce qui concerne la pollution. De ce fait, avec le développement des marées noires, un nouvel élément est venu alourdir le fardeau déjà pesant des responsabilités du capitaine : la responsabilité pour pollution, puisque nous verrons qu'il s'agit ici d'une responsabilité pénale du fait d'autrui dans la mesure où le capitaine peut être déclaré responsable d'une pollution, même en cas de faute d'un de ses subordonnés, la sanction pouvant être très lourde. Cependant, l'on s'intéressera ici à la responsabilité qui pourrait découler de l'exécution de ses fonctions sociales.

La responsabilité pénale du capitaine, quant à elle, sera recherchée principalement en cas de faute dans sa mission essentielle qui est celle de conduire le navire en sécurité. La responsabilité pénale est engagée lorsqu'il y a violation d'une disposition pénale. De plus, en vertu du principe de la légalité des délits et des peines, seuls les faits incriminés et répréhensibles pourraient déclencher l'action publique. Il faut dire ici que ces faits ne visent pas, pour la plus part, spécifiquement les attributions sociales du capitaine. Mais l'on remarque qu'elles ont les incidences sur lesdites attributions.

Par le passé, les dispositions relatives à la responsabilité pénale du capitaine de navire étaient contenues dans le Code disciplinaire de la marine marchande. Mais avec l'affaiblissement du particularisme du droit pénal maritime, la majorité des incriminations est contenue dans le code pénal, le Code des transports et le Code du travail. A cet effet, Patrick CHAUMETTE a pu écrire que « le Code disciplinaire et pénal de la marine marchande n'est plus la matrice du droit pénal du travail maritime»166(*). Il y a lieu de noter que désormais les dispositions du code disciplinaire et pénal de la marine marchande ont été intégrées dans l'ordonnance n° 2012-1218 du 2 novembre 2012 portant réforme pénale en matière maritime, mais surtout dans le Code des transports. Mais jusqu'ici, seule la partie législative dudit Code a été publiée, et l'on attend encore la publication de la partie réglementaire. En raison de cela, l'on mentionnera de temps en temps les dispositions du Code disciplinaire.

Sans prétendre faire une liste exhaustive des toutes les incriminations dont le capitaine peut être l'objet dans l'exercice de ses attributions sociales ;nous constaterons qu'elles peuvent consister en des omissions ou des actes posés. Ce sont les infractions touchant à la police intérieure du navire. Il peut s'agir des actes d'abus d'autorité, de la mise en danger de la vie d'autrui; bref des actes de négligence ayant entrainé des préjudices aux marins. Nous en donnerons quelques illustrations.

Traitant des obligations en matière de tenue des documents sociaux, l'article 72 du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande167(*) dispose que « Tout capitaine qui embarque ou débarque une personne de l'équipage sans faire mentionner cet embarquement ou ce débarquement sur le rôle d'équipage par l'autorité maritime est puni, pour chaque personne irrégulièrement embarquée ou débarquée, de l'amende prévue pour les contraventions de la 5e classe, si le bâtiment a une jauge brute dépassant 25 tonneaux, de l'amende prévue pour les contraventions de la 4e classe dans le cas contraire. Les mêmes peines sont encourues pour chaque passager admis à bord sans avoir été inscrit à la suite du rôle d'équipage. Toutefois, des dispositions spéciales pourront être établies par décret pour certaines navigations ; les infractions à ces dispositions seront punies de l'amende prévue pour les contraventions de la 3ème classe». L'article 76 ajoute que « Tout capitaine qui, hors le cas d'empêchement légitime, ne dépose pas son rôle d'équipage et son livre de discipline au bureau des affaires maritimes ou à la chancellerie du consulat, soit dans les 24 heures de son arrivée dans un port français ou dans un port étranger où réside un consul général, un consul ou un vice-consul de France lorsque le bâtiment doit séjourner plus 24 heures dans le port (jours fériés exclus), soit dès son arrivée, si le bâtiment doit séjourner moins de 24 heures dans le port, est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 5ème classe ». Etant entendu l'importance que revêt le rôle d'équipage pour les marins, il est aisé de constater que ces dispositions visent à les protéger.

Le capitaine est toujours considéré responsable si le marin qui embarque arrive à bord sans un certificat de validité médicale. L'Article L5523-6 du Code des transports puni de 6 mois d'emprisonnement et de 3.750€ d'amende le fait d'admettre à bord un membre de l'équipage ne disposant d'aucun certificat d'aptitude physique valide. Cette infraction ne vise pas l'armateur mais uniquement le capitaine car c'est lui qui supervise à bord l'accueil de l'ensemble des personnels venant y travailler, qu'ils soient directement salariés ou non de l'armateur.

Pour le commandant Hubert ARDILLON, cette responsabilité est injustifiée car le capitaine ne choisit pas les membres d'équipage qui doivent embarquer, ils lui sont imposés par le manager, et le fait de refuser l'embarquement d'un membre d'équipage revient à appareiller sans avoir l'équipage au complet. Ce qui est encore grave pour la sécurité du navire168(*). Ce professionnel estimerait qu'il serait préférable de naviguer avec un marin n'ayant pas de certificat de visite médicale valide, au lieu de prendre la mer avec un équipage insuffisant et constituant de ce fait un risque pour toute l'expédition. Il s'agit en fait d'accepter le moindre mal. Malheureusement, le capitaine qui agirait ainsi serait frappé par la loi;ce qui est manifestement incohérent.

Pour ce qui est de l'obligation de respecter l'effectif minimal des marins à embarquer, l'on notera que le capitaine en court aussi des sanctions. Ainsi, l'article L5523-5 du Code des transports dispose que : « Sont punis de six mois d'emprisonnement et de 4 500 € d'amende l'armateur ou le capitaine qui font naviguer un navire avec un équipage sans être muni de la fiche d'effectif minimal mentionnée à l'article L. 5522-2 ou dont l'effectif est inférieur au minimum prescrit en application de ce même article. Ces peines sont portées à un an d'emprisonnement et à 6 000 € d'amende s'il s'agit d'un navire à passagers.» Le capitaine devra donc tenir tête à son armateur, si ce dernier veut l'inviter à embarquer sans effectif minimal. La finalité sociale d'une telle norme n'est plus à démontrer.

Le capitaine est tenu de prendre soin des marins. Sous peine des sanctions, il coordonne les mesures dubien-être, s'assure du respect des règles d'hygiène et de sécurité à bord du navire, s'assure de la disposition des bons soins médicaux à bord du navire. Pour lui permettre d'asseoir son autorité, il est doté aussi d'un pouvoir disciplinaire. Mais, il lui est interdit d'abuser de l'usage de ce pouvoir. Ainsi, est puni de six mois d'emprisonnement et de 3 750 € d'amende le fait, pour le capitaine ou un autre membre de l'équipage titulaire de l'autorité, d'abuser de son autorité ou d'ordonner, d'autoriser ou de tolérer un abus d'autorité vis-à-vis d'une personne embarquée169(*).

Le capitaine du navire dans l'organisation du travail à bord doit être assez diligent et il doit observer une certaine prudence. Si un marin est atteint d'un dommage dans l'exercice de ses fonctions, la responsabilité du capitaine pourrait être retenue en cas de mise en danger de la vie d'autrui. En effet, l'article 121-3170(*) du Code pénal dispose que : « Il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre.

Toutefois, lorsque la loi le prévoit, il y a délit en cas de mise en danger délibérée de la personne d'autrui.

Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d'imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s'il est établi que l'auteur des faits n'a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait.

Dans le cas prévu par l'alinéa qui précède, les personnes physiques qui n'ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter, sont responsables pénalement s'il est établi qu'elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer ».

Ainsi, il est fait référence aux fautes exposant autrui à un risque d'une particulière gravité.Par exemple, dans l'affaire du navire Snekkar171(*)le capitaine d'un bâtiment de pêche a été condamné par le Tribunal correctionnel de Dieppe, le 25 juin 1996, à six mois de prison avec sursis après un accident qui s'est avéré fatal pour l'un des marins. Alors que plusieurs membres de l'équipage s'affairaient pour mettre en place les apparaux de pêche avant le départ de la campagne, l'un des câbles de manoeuvre se rompait, et venait frapper à la tête l'un des marins.

Pour les juges, le capitaine était responsable de l'organisation du travail à bord du navire, notamment en application des dispositions du décret du 6 septembre 1983. Il aurait donc dû prévoir l'affectation des membres de l'équipage à des emplacements définis, et s'assurer que la tâche entreprise ne mette pas le personnel en situation de danger, comme il aurait dû prévoir une vérification systématique des câbles avant leur utilisation.

En droit maritime, la loyauté du capitaine est d'une vitalité remarquable. De cette loyauté, dépend la bonne marche, l'efficacité et la sécurité des affaires du vaisseau et de l'équipage. Les actes et la personnalité d'un capitaine doivent inspirer de la loyauté à tous ceux qui le servent. Si l'équipage ne respecte plus les décisions de son Chef, la désaffection et la mutinerie ne seront pas longues à suivre. En ce sens, vis-à-vis de son armateur, le capitaine est tenu à une obligation de loyauté indéfectible. Une fois le voyage entamé, il est obligé de l'achever, sous peine de poursuites pénales. L'article L5642-2 du Code des transports dispose à cet effet que, sera puni de deux ans d'emprisonnement le fait, pour tout capitaine, de rompre son engagement et quitter le navire avant d'avoir été remplacé. Cette disposition vise par ricochet à protéger les marins. Car un navire sans capitaine constituerait un grave danger pour eux.

* 166Patrick Chaumette, « La responsabilité pénale de l'armateur vis-à-vis de la protection des marins », ADMO, 2003, p. 187.

* 167 L'Ordonnance n° 2010-1307 du 28 octobre 2010 en son article 9 abroge cette disposition, désormais transposée dans le code des transports: L'abrogation des dispositions mentionnées à l'article 7 ne prendra effet qu'à compter de la publication des dispositions réglementaires du code des transports.

* 168Hubert Ardillon, « Rôle, statut, contraintes, responsabilité du Capitaine de Navire », Texte de la communication faite à l'IFDM en juillet 2012, disponible sur le lien http://afcan.org/dossiers_juridiques/expose_ifdm_2012.html, consulté le 22 avril 2014 à 05h07.

* 169Article L5531-10 du code des transports Créé par Ordonnance n° 2010-1307 du 28 octobre 2010 - art. (V).

* 170Cet articlé a été modifié par Loi n°2000-647 du 10 juillet 2000 - art. 1 JORF 11 juillet 2000.

* 171 Martine LE BIHAN GUÉNOLÉ, obs. sous jugement dutribunal correctionnel de DIEPPE 25 juin 1996 V. DMF n°567 du 01/1997, disponible sur Lamyline.fr, consulté le 13 mai 2014 à 15h41.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld