4 Compatibilité des
éléments de l'agriculture de type Ikigai aux yeux des acteurs
En tenant compte de l'héritage de la modernisation
agricole productiviste, les trois éléments constitutifs de
l'agriculture de type Ikigai que nous avons établi dans le schéma
représentationnel de celle-ci (Qualité de vie ; Lien social et
territorial ; Production matérielle), pourront-elles être
compatibles non seulement aux yeux des agents gestionnaires et partenaires du
Projet, mais également à l'épreuve des divers
intérêts des stagiaires de la formation Nô-Life ?
Question de rééquilibrage global et
d'identité du bien commun
D'abord, cette question de compatibilité des
éléments représentationnels de l'agriculture de type
Ikigai nous amène directement à reprendre la direction
proposée par Boltanski pour surmonter la fragilité du compromis :
il s'agit justement de la nécessité d'envisager la
compatibilité des « êtres et objets »
hétérogènes relevant de mondes différents afin de
consolider le compromis. A cet effet, il faut doter le compromis
d' « une identité propre » tout en mettant au
service du bien commun ces élements hétérogènes a
priori incompatibles. Et ceci de sorte que la forme de ces
éléments hétérogènes ne soit pas
reconnaissables, sous une nouvelle identité.
Concernant le contexte du Projet Nô-Life, il s'agit
de doter l'agriculture (bien commun) d'une nouvelle identité, à
savoir Ikigai, afin de renforcer l'agriculture comme un bien commun. Et afin de
consolider ce bien commun face à la fragilité du compromis
basé sur celui-ci, nous devrons envisager un rééquilibrage
(ou ajustement) global de la relation déséquilibrée de
représentation, de pratique et de pouvoir qui constitue la source de
cette fragilité. Et ceci au travers d'une revalorisation des
éléments dévalués dans cette situation.
Pour des propositions concrètes...
Mais comment s'y prendre ? Revenons ici à notre
dernier constat de la réalité pour repérer les
éléments en question : du côté des agents
gestionnaires et partenaires, c'est l'orientation productiviste du Projet
Nô-Life qui reflétait leur rapport de forces
déséquilibré dans le dispositif de la mise en oeuvre du
Projet, à savoir l'emprise de l'ensemble des agents du monde agricole
professionnel. Et derrière cette orientation, nous avons constaté
une certaine divergence de points de vue entre les agents appartenant au
secteur agricole (CAT, ECV), l'agent gestionnaire principal (BPA) ayant une
double appartenance au monde agricole professionnel et à celui des
services publics locaux, et les agents appartenant au monde plus public (ou
civil), l'un au monde des services publics locaux du vieillissement (SCI) et
l'autre au monde syndical et salarial (CFLS).
Du côté des stagiaires, non seulement cette
orientation s'avérait techniquement et économiquement
inadaptée à la capacité productive des stagiaires, mais
surtout elle ne tenait pas compte de leurs divers besoins complexes aux niveaux
socio-culturel et économique représentés dans leurs
motivation et engagement. D'où l'effet de marginalisation de cette
orientation à l'égard des stagiaires sur les plans
représentationnel (idées qui n'ont pas pris sens), pratique
(activités de la formation inadaptées) et relationnel (perte
éventuelle de confiance dans les gestionnaires).
En suivant la direction de Boltanski sur le bien commun, il
serait intéressant d'envisager ici quelques propositions
concrètes destinées aux acteurs du Projet Nô-Life vers une
redéfinition de l'agriculture de type Ikigai qui serait possible et
pertinente aux yeux de ces acteurs. Et ces propositions visent à
modifier l'orientation du Projet Nô-Life qui sera susceptible de
régler la situation de marginalisation, et ainsi de rendre
réellement compatible les éléments
représentationnels de l'agriculture de type Ikigai.
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