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Dynamique des représentations sociales de l'agriculture et de la ruralité dans un contexte territorial du vieillissement de la population : Le cas du « Projet Nô-Life » de la Ville de Toyota au Japon


par Kenjiro Muramatsu
Université de Liège
Traductions: Original: fr Source:

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Plan de la Zone spéciale

Ensuite, en se centrant sur ces deux éléments de situation de crise d'un côté rural et de l'autre urbain, le Plan de la Zone spéciale est expliqué en trois points suivants : Spécificité spatio-historique de la Ville ; Valeurs du Plan de la Zone spéciale ; Effets socio-économique du Plan de la Zone spéciale sur la zone concernée. Ces explications nous montrent un travail de contextualisation, effectué du point de la Municipalité de Toyota, des éléments préparatoires du Projet Nô-Life.

Dans la partie sur la spécificité spatio-historique de la Ville de Toyota, en montrant d'abord l'importance de la superficie naturelle et agricole dans le territoire de la Ville de Toyota (forêt-montagne soit 36.8%, champs agricoles soit 21.9% sur 29 012ha de la superficie totale de la Ville), le Plan met l'accent sur la richesse de la nature et de l'agriculture, ce qui est en contraste avec la richesse de l'industrie très dévelpppée de la Ville.

Ensuite, le Plan retrace brièvement l'évolution du développement industriel de la Ville de Toyota depuis l'ère de Meiji (1868-1912) : développement de l'industrie textile et du commerce des cocons des vers à soie produits par les foyers ruraux depuis l'ère de Meiji dans le Bourg de Koromo ; déclin de cette industrie à partir de l'ère de Shôwa (1926-1989) suite à une stagnation du marché de cocons des vers à soie ; arrivée de l'industrie automobile des années 30... Comme nous l'avons vu dans le chapitre précédent, ce plan fait un rappel historique de la Ville de Toyota : changement du statut du « Bourg (machi) » à celui de la « Ville (shi) » en 1951 ; changement du nom de Koromo à celui de Toyota en 1959, un des plus grands évènements historiques de la Ville de Toyota392(*). D'où le slogan de la Ville de Toyota qui est permanent jusqu'à aujourd'hui : « Ville de la Voiture (Kuruma no Machi) ». Puis, le Plan de la Zone spéciale explique l'évolution de la Ville de Toyota suite à l'essor de l'industrie automobile entre 1955 et 1975 qui a abouti à une série de fusions avec les collectivités environnantes. La Ville de Toyota est ainsi devenu 7.5 fois plus grande que la superficie initiale du Bourg de Koromo. Le Plan de la Zone spéciale met l'accent sur le fait que la prochaine fusion aura lieu en 2005 avec six communes rurales et montagnardes. Ce qui va, cette fois-ci, agrandir la superficie de la Ville trois fois grande393(*).

Et le Plan de la Zone spéciale explique également que la population de la Ville de Toyota augmenta non seulement avec la fusion des collectivités rurales mais plutôt avec l'arrivée massive d'émigrants ruraux de partout dans le Japon à partir des années 60394(*). Puis, à partir des années 90, le rythme de l'augmentation démographique de la Ville de Toyota s'est adouci. Aujourd'hui, elle est ainsi confrontée au vieillissement de la population dû à l'arrivée massive de retraités du secteur industriel dont beaucoup d'entre eux étaient, justement, les émigrants ruraux des années 65-75.

Enfin, le Plan de la Zone spéciale aborde la situation agricole de Toyota, notamment son évolution de la dernière décennie marquée par une série d'aspects de crise qui ont déjà été mis en cause depuis le Plan de 96. En donnant des chiffres de la statistique agricole, le Plan réexplique cette situation de crise en quatre points suivants : diminution progressive de la surface agricole utilisée dû à l'urbanisation, l'industrialisation et l'abondon de terrains agricoles (friches et jachère) ; diminution de la population agricole ; fragilisation de la structure d'exploitations agricoles ; manque de porteurs de l'agriculture.

Concernant la diminution progressive de la surface agricole utilisée, de 1995 à 2000, la surface a diminué de 548ha soit 14.3% de la surface totale de 1995 (3845ha à 3297ha). Et cette tendance est commune à tous les quartiers de la Ville. La surface en friche (kôsaku hôkichi) augmente, de 1995 à 2000, pour 32ha soit 9.9% de la surface totale en friche en 1995 (322ha à 354ha), puis la surface en jachère (husakutsuke chi) augmente davantage, 1995 à 2000, pour 103ha soit 43.2% de la surface totale en jachère (238ha à 341ha)395(*).

Puis, la diminution de la population agricole se traduit par la diminution du nombre des foyers agricoles pour 10.2% de 1995 à 2000 (5474 à 4918). Et la population agricole active 9.9% (5822 à 5246).

Cependant, la pluriactivité des foyers agricoles s'accentue de plus en plus : les foyers de la catégorie de la « ferme auto-productive (jikyû teki nôka) » et des foyers agricoles pluriactifs de la deuxième catégorie sont 90.7% du nombre total des foyers agricoles396(*). En plus, le nombre des foyers qui n'ont moins de 0.3ha de la surface agricole utilisée augmente, 1995 à 2000, pour 96 foyers soit 6% (1611 à 1707). Et la population agricole vieillit : le taux de vieillissement est de 25.1% parmi elle397(*).

Concernant le manque de porteurs, l'explication du Plan montre l'aspect extrèmement stagnant de la politique de la modernisation agricole : en 2003, le nombre d' « agriculteurs qualifiés (nintei nôgyô sha) »398(*) est 66, et le nombre d'entreprises agricoles est 18. Cependant, le nombre de ces deux types d'exploitations agricoles n'augmentait guère depuis 2000. D'ailleurs, il n'y a eu que 4 nouveaux agriculteurs en 2002 dont l'un a déjà quitté son exploitation l'année suivante.

Ensuite, dans la partie sur les valeurs du Plan de la Zone spéciale, le Plan reprend des éléments historiques sur d'autres projets liés au Projet Nô-Life pour montrer qu'existent déjà des actions et des pratiques liées à la construction du Projet Nô-Life, à savoir l'Ecole de l'agriculture vivante (Ikiiki nôgyô juku) amorcée en 2000 ; la Ferme école des Personnes âgées (kônen daigaku taiken nôjô) amorcée en 2002.

L'Ecole de l'agriculture vivante étant co-gérée par la Municipalité et la Coopérative agricole, elle a 41 stagiaires en 2004. Il y a déjà 23 personnes sur 112 anciens stagiaires qui se sont organisées comme un groupement de producteurs dans la Ville de Toyota. Puis, il y a 30 élèves dans la Ferme-école des Personnes âgées en 2004.

Puis, le Plan explique quelques éléments du résultat de L' « Enquête de la Conscience sur l'Agriculture de Toyota » montrant des attentes élevées sur des possibilités de location de terrains agricoles, aussi bien au sein des foyers agricoles qu'au sein des travailleurs. La réussite de jardins familiaux et citoyens y est également citée.

Tous ces éléments permettent au Plan de montrer une nécessité de créer un nouveau système pour une mise en valeur des friches et une formation de porteurs de l'agriculture d'un nouveau type en tenant compte du contexte du vieillissement de la population rurale comme urbaine.

Dans la partie sur les « Effets socio-économique du Plan de la Zone spéciale sur la zone concernée », le Plan tente surtout de mettre l'accent sur des aspects quantitatifs et économiques du Projet Nô-Life. Cette partie se divise en deux points suivants : formation de nouveaux agriculteurs ; réalisation de la création d'Ikigai.

D'abord, dans le premier point, le Plan compte, le nombre de nouveaux agriculteur susceptibles d'être formés par le Projet Nô-Life ainsi que la surface agricole susceptible d'être cultivée suite au lancement du Projet Nô-Life, dans les cinq années à venir à partir de l'année 2004 dont l'inauguration du Centre Nô-Life.

Plusieurs types de nouveaux agriculteurs sont attendus : stagiaires du Centre Nô-Life (environ 90 sur 200 stagiaires en cinq ans), anciens stagiaires de l'Ecole de l'agriculture vivante et usagers de jardins citoyens (environ 5 personnes par an). Finalement, l'arrivée d'environ 100 nouveaux agriculteurs est escomptée jusqu'en 2009. Puis, la surface agricole susceptible d'être cultivée par ces nouveaux agriculteurs pour 0.1ha par personne, soit 10ha au total jusqu'en 2009.

Ensuite, il est à noter que, par la suite, un nouvel élément économique du Projet Nô-Life apparaît dans cette partie : il s'agit de l'objectif d'avoir un revenu agricole d'un million de yens399(*) par an au moyen de la vente de produits agricoles avec 0.1ha de terrains. A cet effet, le Plan envisage d'introduire de nouveaux produits aptes à dégager ce chiffre-là. Ainsi, est escomptée une augmentation de 225 000 000 yens400(*) pour le revenu total des nouveaux agriculteurs jusqu'en 2009. En plus, s'y ajoute une prévision de 102 500 000 yens401(*) de côuts d'investissement (achat de machines agricoles, plantes etc) comme effet économique direct.

Ce dernier élément n'ayant pas été prévu jusqu'alors402(*), semble être quelque peu opportuniste. D'ailleurs, Monsieur K a dit à l'enquêteur (rédacteur) qu'il était, lors de l'élaboration du projet, contre cette idée d'établir un tel critère économique. En effet, il pensait que l'objectif final du Projet Nô-Life est après tout la satisfaction individuelle de chaque participant via ses propres pratiques agricoles. D'après lui, fixer une telle norme économique aux stagiaires ne correspondrait pas à ce besoin de satifaction individuelle.

Cependant, cet élément semble paradoxalement constituer un élément convergent non seulement avec l'intérêt économique du secteur agricole dont la Coopérative agricole fait partie, mais également avec l'objectif de la Politique des Zones spéciales de la Réforme structurelle de l'Etat : relance économique du pays via déréglementation.

Le deuxième point sur la réalisation de la création d'Ikigai ne concerne, en fait, que la promotion d'ouverture de jardins citoyens via déréglementation du droit d'ouverture. Le Plan prévoit 6.5ha de jardins citoyens ouverts par des propriétaires de terrains agricoles jusqu'en 2009. Le nombre d'usagers est également escompté pour 1950 personnes jusqu'en 2009 en créant 30 parcelles par 0.1ha.

Le plan escompte pour l'utilisation de ces jardins citoyens non seulement des éléments non productifs comme la santé et Ikigai, mais également la possibilité d'avoir de futurs producteurs susceptibles de rejoindre les nouveaux agriculteurs, engendré par le premier point, qui pourront utiliser ainsi plus de 0.1ha par personne.

Certains effets économiques sont également escomptés comme les frais d'utilisation des jardins versés aux propriétaires constituant 3000yens de revenu par parcelle en un an, cela fait donc 90 000 yens pour 0.1ha403(*), et la consommation de matériels agricoles par les usagers des jardins, ce qui profitera également la coopérative agricole qui vend ces matériels.

Autrement, en terme d'Ikigai, est également escompté l'effet de l'ouverture de jardins citoyens suscitant des échanges entre les usagers urbains et les propriétaires ruraux.

* 392 Voir le détail dans le chapitre 1.

* 393 La superficie totale de la Ville est ainsi 91 847ha aujourd'hui.

* 394 Voir le détail dans le chapitre 1.

* 395 Selon les définitions données par la statistique nationale, les Friches (kôsaku hôki-chi) désignent les terrains non cultivé depuis plus d'un an, et dont leurs cultivateurs (husakutsuke-chi) n'ont pas l'intention de les cultiver dans quelques années. Les jachères désignent également les terrains non cultivés depuis plus d'un an, mais dont leurs cultivateurs ont l'intention de les cultiver dans quelques années (Nôrinsuisan-shô, 2005)

* 396 Selon la statistique nationale, « foyers agricoles auto-productifs (jikyû teki nôka) » désignent les foyers agricoles possédant moins de 0.3ha de terrains agricoles et dégageant un chiffre d'affaires annuel de moins de 500 000 yens (près de 3333 euros) (Nôrinsuisan-shô, 2005)

* 397 Ce taux de vieillissement est celui de la population de plus de 65ans sur la population totale concernée. Nous ajoutons que le taux de vieillissement parmi la population totale de la Ville de Toyota est encore de 11.1% en 2000, ce qui est relativement bas en comparaison avec les chiffres national et départemental : 17.3% et 14.5%

* 398 La politique d' « agriculteurs qualifiés » est la politique nationale pour les « poeteurs ». Dans la partie de l'Acteur 5, l'ex-centre départemental pour la vulgarisation agricole, on verra le travail de cet acteur pour cette politique de la modernisation.

* 399 Un million de yens soit environ de 6666.6 euros (150 yens fait environ de 150-160 euros aujourd'hui) Le revenu agricole (nôgyô shotoku) est le montant dont on enlève le montant du coût pour la gestion agricole du revenu agricole total.

* 400 Près de 1 500 000 euros.

* 401 Près de 683 333 euros

* 402 En tous cas, il n'est pas explicité dans les documents officiels et disponibles au public.

* 403 3000 yens soit d'environ 20 euros, 90000 yens soit d'environ 600 euros.

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