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La protection du délégué du personnel en droit du travail camerounais

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par Paulin KAMENI WENDJI
Université de Douala - Master 2 Recherche en Droit Privé Fondamental 2008
  

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Conclusion de la deuxième partie................................................................. 86

CONCLUSION GENERALE .....................................................................87

RESUME

Tout homme à droit au travail. L'exercice de ce travail se fait généralement dans un milieu aménagé à cet effet appelé entreprise. Cette dernière est une organisation de forme juridique destinée à la production et à la vente des biens et des services. En effet, dans les entreprises de petite taille, un contact direct existe entre les travailleurs et les employeurs. Cette situation n'est pas toujours aisée dans les entreprises de grande envergure. C'est sans doute pour cette raison que la représentation des salariés est indispensable compte tenu des intérêts en présence.

En droit camerounais du travail, la représentation salariale est assurée à travers l'institution des délégués de personnel. Ces derniers, porte - parole des travailleurs à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'entreprise sont le plus souvent voués aux rétorsions diverses de leurs employeurs. C'est certainement en raison de cette situation de précarité que la loi leur a conféré un statut protecteur particulier. Ainsi, le délégué du personnel est-il suffisamment protégé dans le code du travail ?

Pour essayer de tempérer les humeurs patronales, le législateur camerounais a institué un acteur central : l'Inspecteur de travail. Avant de prononcer le licenciement ou toutes autres mesures frappant les délégués du personnel, il doit s'assurer que l'action projetée n'est pas en relation avec l'activité professionnelle de ce représentant des salariés. C'est d'ailleurs pour cette raison que le législateur est plus exigeant quant il dispose sans ambiguïté à l'article 130 alinéa 1 du code du travail du 14 Août 1992 que « Tout licenciement du délégué du personnel, titulaire ou suppléant, envisagé par l'employeur est subordonné à l'autorisation de l'Inspecteur du travail du ressort ».

Bien qu'étant assurée par la loi, la protection reconnue au délégué du personnel n'est pas sans lacunes de divers ordres. Ainsi, le législateur affirme par exemple qu'il est protégé ; mais curieusement on se rend compte qu'il lui donne encore des possibilités de démissionner même s'il est bien vrai que nul ne peut demeurer définitivement au service d'autrui. De plus, la durée de cette protection nous semble être brève et ce travailleur est quasiment sans assistance fondamentale alors qu'il est la partie faible du contrat qui le lie à son employeur. Vu sous cet angle, il est généralement la « proie » des employeurs véreux qui puisent leur force sur leur surface financière considérable.

Pour la pérennité de l'institution des délégués du personnel, le législateur devrait « voler » à son secours. Il est alors souhaitable que les textes en la matière soient reformés et qu'une lutte acharnée contre les divers fléaux qui menacent notre société soit intensifiée à tous les niveaux et avec une implication de tous les acteurs.

Entendu comme l'ensemble des règles qui régissent les rapports entre les individus dans une société donnée et sanctionne les violations, le droit1(*) est divisé en deux grands domaines : le droit public et le droit privé. Cette dernière branche comporte plusieurs disciplines notamment le droit commercial, le droit civil, le droit du travail. En effet, le droit du travail est une discipline régissant les relations individuelles et collectives de travail.

Par relations individuelles, nous entendons toutes les règles qui concernent le recrutement du travailleur dans l'entreprise, les conditions de travail2(*), le déroulement de la carrière du travailleur, la suspension, la rupture3(*), la modification du contrat de travail et la procédure de règlement des différends individuels de travail.

Les relations collectives de travail sont l'ensemble des règles qui concernent l'organisation et la gestion des intérêts de tous les travailleurs notamment l'administration du travail, les commissions paritaires de travail, les syndicats et les institutions représentatives du personnel.

Ainsi, le droit du travail camerounais dans son contenu actuel définit un ensemble de règles qui protègent le travailleur dépendant dans sa relation de travail, subordonné, donc inégal. Il prévoit une seule institution4(*) pour assurer la représentation du personnel auprès de l'employeur ou de l'administration : il s'agit de l'institution des délégués du personnel.

Les délégués du personnel sont des salariés élus par leurs collègues de services au sein de l'entreprise ou de l'établissement où ils exercent leurs activités professionnelles sous l'autorité et la direction de l'employeur. Ils représentent l'intérêt collectif des travailleurs de l'entreprise ou de l'établissement. Ces deux notions ne doivent pas être confondues. En effet, l'arrêté n°019/MTPS/SG/CJ du 26 mai 19935(*) fixant les modalités de l'élection et les conditions d'exercice des fonctions des délégués du personnel définit l'entreprise comme une organisation économique de forme juridique déterminée, constituée par une collectivité de biens destinés à la vente ou à la fourniture d'un service rémunéré ou non. Une entreprise peut comporter un ou plusieurs établissements. L'établissement est un groupe de travailleurs exerçant en commun, en un lieu déterminé, sous l'autorité d'un ou plusieurs représentants d'une même autorité directive.

Du fait de la lourde mission des délégués du personnel, la loi leur accorde une protection spéciale dans le cadre de l'exercice de leur fonction représentative. L'idée de protection suggère un ensemble de règles dont la violation doit être sanctionnée. La protection renvoie à un ensemble de mesures destinées à protéger quelqu'un ou quelque chose. Il s'agit des représentants des travailleurs dans le cadre de notre travail. Le délégué du personnel à besoin de stabilité et de sérénité dans l'exercice de ses fonctions. L'expression institution représentative du personnel et plus spécialement des délégués du personnel est d'origine doctrinale6(*). C'est de l'action ouvrière que naît la délégation chargée de « parler » à la direction au nom de tous. Elle a vu ses origines en droit français avant d'être introduite dans la législation camerounaise par l'arrêté n°4911 du 05 Octobre 1953. Elle a toujours fait partie intégrante des dispositions des divers codes du travail qu'a connu notre pays7(*). Aujourd'hui, elle est régie par la loi n°92/007 du 14 Août 1992 portant code du travail camerounais ainsi que par l'arrêté n°19/MTPS/SG/CJ du 26 mai 1993 précité. Cette institution représentative en droit camerounais participe de la démocratisation des communautés socioprofessionnelles et se fonde sur le respect des règles électorales.

Ainsi, comment devenir délégué du personnel ? Cette question parait banale, mais regorge tout son sens. Contrairement à certaines institutions où les membres sont nommés, les délégués du personnel, « porte-parole » des travailleurs au sein de l'entreprise8(*) sont issus des élections. Il existe deux types de scrutin : le scrutin de liste à deux tours et le scrutin de liste majoritaire à deux tours9(*) avec représentation proportionnelle. Ce dernier type est celui prescrit actuellement par la réglementation camerounaise.

En effet, à l'issu du premier tour, si aucune liste n'obtient la majorité absolue des suffrages exprimés, il est procédé dans un délai de 15 jours à un second tour entre les deux premières listes. Est élue la liste qui obtient la majorité simple à l'issu du second tour. En cas d'égalité des voix entre deux listes, les sièges à pourvoir sont attribués à la liste dont la moyenne d'ancienneté dans l'entreprise est la plus élevée10(*).

Les conditions d'électorat, d'éligibilité ainsi que l'effectif à prendre en compte sont rigoureusement encadrées par la loi. En effet, peuvent être électeurs tous les travailleurs de deux sexes, âgés de dix-huit ans révolus et ayant travaillés au moins six mois dans l'entreprise, à l'exception du chef d'établissement. Cette disposition de l'article 123 du Code de travail camerounais est claire et lourde de précision. Ce texte ressort deux conditions qui sont cumulatives : l'âge et l'ancienneté dans l'entreprise. Ceci étant, ne peut être électeur un travailleur qui remplit seulement l'un des critères. La suspension du contrat de travail a-t-elle d'effet sur la computation de ce délai de six mois ? Aucune précision ne ressort de l'alinéa 1 de l'article 123. Nous pouvons déduire de l'esprit du texte que la suspension du contrat de travail est sans effet car « tout ce qui n'est pas interdit par la loi est permis ».

Contrairement aux conditions d'électorat, le législateur camerounais a rigoureusement règlementé celles de l'éligibilité ; dans la mesure où la suspension du contrat de travail peut paralyser la candidature d'un travailleur qui aimerait faire acte de candidature aux élections des délégués du personnel au sein de l'établissement ou de l'entreprise. Ainsi, d'après l'article 123 alinéa 2, « sont éligibles, les électeurs âgés de vingt (20) ans révolus, sachant s'exprimer en français ou en anglais, ayant travaillés sans interruption dans l'entreprise pendant douze mois au moins ». Le législateur du 14 Août 1992, il nous semble, estime qu'à l'âge de vingt ans, le travailleur qui désire faire acte de candidature aura certainement les aptitudes nécessaires pour s'exprimer au nom de tous ses collègues et que ces derniers et l'employeur auront déjà une idée de sa personne au sein de l'entreprise.

Les entreprises et les établissements sont des lieux de prédilection d'élection du délégué du personnel. Mais, toutes les entreprises ne sont pas tenues d'en avoir un11(*)si le seuil légal n'est pas atteint. A contrario, il s'agit d'une obligation pour l'employeur d'organiser les élections si les conditions de l'article 122 du code du travail sont réunies. D'après ce texte, « les délégués du personnel sont obligatoirement élus dans les établissements installés sur le territoire national, qu'elle qu'en soit la nature et quel que soit l'employeur, public ou privé, laïc ou religieux, civil ou militaire, où sont habituellement occupés au moins vingt travailleurs relevant du champ d'application de la présente loi »12(*). Le personnel de l'entreprise ou de l'établissement doit être suffisamment important pour justifier la création des institutions représentatives légales. Dans les petites entreprises, un contact direct existe entre le personnel et la direction. L'établissement fut-il national ou de droit étranger est astreint à cette obligation dont la violation est passible des sanctions. Il s'agit là d'ailleurs de l'une des manifestations du principe de territorialité.

Une fois les conditions sues évoquées remplies, commence la phase de la propagande électorale qui s'achève par l'ouverture du scrutin proprement dit. Le vote se déroule un jour ouvrable, et à des heures de service au sein de l'entreprise. L'employeur joue une part active dans le processus électoral. En effet, il est tenu de fournir les bulletins de vote de couleurs différentes selon qu'il y a de candidat par collège électoral13(*). Alors qu'en matière politique ou il n'existe qu'un seul collège électoral, le législateur a ici divisé les électeurs en collèges distincts afin d'assurer en tout état de cause la représentation de certaines catégories professionnelles de salariés minoritaires dans l'entreprise ; d'où de délicates questions de répartition des salariés entre ces collèges et répartition des sièges à pourvoir entre les catégories distinctes. De même, l'employeur préside le bureau de vote. Mais en cas d'empêchement, il peut se faire assister par un représentant. Il contrôle la régularité et le secret du scrutin. C'est sans doute pour cette raison qu'il lui est prohibé d'exercer ou de faire exercer une pression quelle que soit sur les travailleurs électeurs.

Le vote s'achève par la proclamation des résultats. Dès ce moment, l'employeur est tenu de dresser un procès verbal pour chaque collège électoral, et ce en trois exemplaires au moins. Ces procès verbaux doivent être signés par le président du bureau de vote et par les représentants des personnels membres du bureau qui mentionnent les anomalies constatées et les incidents survenus au cours du vote d'où la délicate question du contentieux électoral. Aux termes de l'article 128 du Code du travail, le contentieux électoral pour l'élection des délégués du personnel se déroule devant le Tribunal de Première Instance qui statue d'urgence compte tenu de la brièveté des délais14(*). Le Tribunal de Première Instance dont il est question est celui dans le ressort duquel se déroulent ou doivent se dérouler les opérations électorales.

Le contentieux peut porter sur l'électorat, l'éligibilité ou même sur la régularité des opérations électorales. Ainsi, le contentieux électoral concerne entre autres les opérations de vote15(*), le nombre et la composition des collèges électoraux. La contestation sur la régularité des opérations électorales doit être faite au secrétariat du greffe du tribunal de première instance compétent dans un délai de quinze jours à compter de la publication des résultats sous peine de forclusion. Dès que le tribunal a été régulièrement saisi, le juge se prononce en dernier ressort. Quelle que soit la solution prononcée par le juge du fond, le seul recours possible est d'exercer un pourvoi devant la cour suprême. Le pourvoi en question n'est pas suspensif.

Les délégués du personnel élus exercent non seulement une mission très exaltante mais aussi très astreignante. Ils représentent la collectivité des travailleurs qui les ont élus et sont appelés à signaler les actes anormaux constatés dans l'exercice de leur fonction à l'administration de travail. Cette dernière, la plus proche d'eux, est l'inspection du travail territorialement compétente.

Les délégués du personnel sont des correspondants de l'inspecteur du travail. Ceci participe de ce que « l'inspecteur du travail n'a pas toujours la possibilité matérielle de s'assurer par lui-même que les prescriptions légales et réglementaires sont observées dans toutes les entreprises de son ressort : les délégués du personnel sont alors ses yeux et ses oreilles»16(*). Plus que l'inspecteur du travail, les délégués du personnel sont des « hommes de terrain ».

Vis-à-vis de leurs collègues travailleurs, les délégués du personnel ont la lourde et délicate mission de présenter à l'employeur toutes les revendications et réclamations individuelles ou collectives qui n'auraient pas été directement satisfaites. En dehors des obligations non exhaustives sus mentionnés, la loi reconnaît aux délégués du personnel dans l'optique de leur permettre de bien exercer leurs fonctions représentatives certains droits. En effet, à l'intérieur de l'entreprise, le chef d'établissement est tenu de mettre à la disposition des délégués du personnel le local nécessaire pour leur permettre de remplir leur mission et se réunir17(*). De même, il doit permettre les délégués du personnel d'afficher des renseignements qui ont pour rôle de porter à la connaissance de tout le personnel. Ils ont droit de tenir des réunions d'information avec leurs collègues travailleurs, droit de disposer d'un registre spécial, droit de circuler dans l'entreprise et le droit d'être reçu par le chef de l'entreprise18(*).

Relativement aux droits à l'extérieur de l'entreprise, les délégués du personnel bénéficient d'un crédit d'heures. D'après l'article 124 du Code du travail, le chef d'établissement est tenu de laisser aux délégués du personnel, dans les limites d'une durée qui, sauf circonstances exceptionnelles ou convention contraire, ne peut excéder quinze heures par mois, le temps nécessaire à l'exercice de leurs fonctions. Ce crédit d'heures doit être payé comme temps de travail et à la même échéance que le salaire. Le délégué du personnel bénéficiaire ne peut prétendre à un report d'heures en arguant par exemple qu'il n'avait pas épuisé les heures d'un mois passé. L'employeur qui s'opposerait à ce droit au crédit d'heures commettrait de ce fait le délit d'entrave à l'exercice normal des fonctions des délégués du personnel.

En raison de leur lourde et astreignante mission, la loi a accordé aux délégués du personnel une protection spéciale dérogatoire au droit commun, enlevant ainsi à l'employeur le droit de résilier d'une manière rapide leur contrat de travail. Cette protection se justifie dans la mesure où « ils rappellent fréquemment l'employeur à l'ordre, lorsque ce dernier se rend coupable de violation des règles prescrites en matière de droit du travail... Un tel état de chose plonge inexorablement les délégués du personnel dans une situation délicate »19(*).

Pour certains auteurs encore, la protection dont jouissent les délégués du personnel trouve tout son fondement « parce qu'ils sont exposés aux sanctions plus que les autres salariés, parce que la mission qui leur est confiée inquiète l'employeur et parce qu'ils sont les militants syndicaux, les représentants du personnel doivent être protégés contre les licenciements dans l'intérêt des institutions qu'ils incarnent »20(*). Il ne suffit pas de protéger ces personnes contre les licenciements, il convient aussi de les protéger contre les mesures, plus ou moins voisines des licenciements21(*). Dans cette logique, le législateur camerounais en retenant à l'article 130 alinéa 1 du Code du travail l'expression « tout licenciement » avait pensé à ces mesures voisines notamment les mutations, la révocation, la mise à pied conservatoire entre autres. Telles sont là en général les mesures contre lesquelles les délégués du personnel doivent être protégés. L'étendue de cette protection est donc large en ce sens qu'elle couvre non seulement leurs personnes mais aussi leurs actes.

Dès lors, se pose le problème de l'efficacité de la protection des délégués du personnel. Cette protection spéciale dont jouissent ces salariés ne rencontre-t-elle pas des obstacles dans sa mise en oeuvre ? Autrement dit, le délégué du personnel est- il suffisamment protégé dans le code du travail ? Ainsi, comment se prémunir des lacunes de cette protection ?

Pour plus d'efficacité en matière de protection des délégués du personnel, il faut protéger non seulement les titulaires, mais aussi les suppléants et les candidats malheureux à ces élections contre les licenciements, les mesures voisines de ceux-ci pendant et après leur mandat. L'intervention de l'inspecteur du travail en la matière constitue un point fondamental. Lorsqu'il est saisi des différends mettant en cause ces salariés à statut particulier, il doit respecter les prescriptions de l'article 130 du Code du travail. Le législateur camerounais en a fait une condition de validité du licenciement des délégués du personnel quand il précise que tout licenciement du délégué du personnel intervenu sans autorisation de l'inspecteur du travail est nul et de nul effet.

Bien qu'étant assurée par la loi, la protection dont bénéficient les délégués du personnel est difficultueuse à plusieurs niveaux. On assiste à une lourdeur procédurale, parfois à une domination de ce salarié protégé en raison de sa « casquette » de partie faible au contrat. Vu sous un autre angle, le délégué du personnel ignore plus d'une chose notamment ses droits, la procédure à suivre en cas de litige. Dans certains cas, il s'abstient d'ester en justice en raison des faramineuses sommes d'argent à débourser et le temps que dure le procès en droit camerounais. Toutes ces remarques laissent croire qu'il est un « salarié partiellement protégé ». Il est donc judicieux, voire urgent que le législateur prenne en considération tous ces paramètres pour doter les délégués du personnel d'une protection plus solide. Cette prise en compte passera nécessairement par un meilleur toilettage de la loi n° 92/007 du 14 août 1992 portant code du travail camerounais actuellement applicable. Ainsi, on tend déjà vers une refonte22(*) ; nous encourageons cette posture du législateur communautaire dans l'APAUDT.

Ainsi, il nous a donc paru d'une importance indéniable de leur accorder une étude particulière. En effet, le choix d'un tel thème se justifie dans la mesure où l'institution des délégués du personnel est parfois remise en cause dans certaines entreprises en raison de leur relation souvent difficile avec les employeurs.

Pour mieux comprendre l'efficacité de la protection des délégués du personnel, nous ferons nécessairement recours à une analyse comparée des textes en vigueur au Cameroun et en France, laquelle analyse débouchera sur une projection dans l'Avant Projet de l'Acte Uniforme de l'OHADA23(*) sur le droit du travail. Certainement, cette analyse comparative nous permettra dans le cadre de notre travail de montrer qu'il est une réalité au regard des textes que les délégués du personnel sont protégés (Première partie) ; cependant, cette protection spéciale dérogatoire au droit commun s'avère lacunaire sur certains points (Deuxième partie).

PREMIERE PARTIE

Le contrat de travail24(*) met généralement en présence deux parties, l'une l'employeur et l'autre le travailleur, subordonné25(*) au premier en raison de son pouvoir économique. Dans le cadre de notre travail, le travailleur dont il est question est élu par ses collègues de service. Il bénéficie par rapport à ces derniers d'une protection dérogatoire au droit commun dans la mesure où il gère les intérêts qui le dépassent énormément.

En effet, l'exercice des prérogatives reconnues au délégué du personnel peut occasionner certains heurts, voire des résistances entre l'employeur et cet employé à statut particulier. Certains employeurs sont souvent tentés de se débarrasser des délégués du personnel jugés trop « encombrants » et de les licencier sous prétexte d'user du droit de résiliation unilatérale, caractéristique du contrat à durée indéterminée. Pour certains auteurs26(*), l'exercice de la délicate mission du délégué du personnel ne va pas sans risque ; lesquels peuvent être financiers, en termes de carrière, d'éviction de la part de l'employeur.

Le législateur camerounais du 14 aout 1992, face à toutes ces humeurs patronales, n'a pas plongé le délégué du personnel dans une insécurité notoire. Il est alors une réalité d'après les textes qu'il est protégé. Cette protection particulière dont il bénéficie en raison de son statut représentatif le couvre non seulement contre les licenciements (chapitre 1), mais aussi contre d'autres mesures plus ou moins voisines des licenciements (chapitre 2).

* 1 _ Dans la plupart des Etats, on retrouve le droit objectif et le droit subjectif.

* 2 _ Il s'agit entre autres de la rémunération, de la durée du travail, de l'hygiène et de la sécurité, la maternité.

* 3 _ Le contrat de travail peut cesser par démission du salarié, le licenciement, le départ négocié, la mise ou le départ à la retraite, la force majeure ou le décès du salarié.

* 4 _ Contrairement en droit de travail français où il existe trois institutions distinctes : le comité d'entreprise, les délégués syndicaux et les délégués du personnel.

* 5 _ Ce texte comporte 29articles.

* 6 _ Cf. Jean Pélissier, Alain Supiot et Antoine Jeammaud : Droit du travail, Dalloz, 22e éd. 2004, p.699.

* 7 _ Il s'agit des codes du travail de 1952, du 12 juin1967, du 27 novembre1974 et du 14 août 1992.

* 8 _ Le statut de l'entreprise est indifférent. Il suffit seulement que les travailleurs relèvent du code du travail et que le seuil légal soit atteint.

* 9 _ Lire Léon Noah Manga, Le délégué du personnel : mission délicate, Imprimerie Saint Paul, Yaoundé 2002, p.77 et s.

* 10 _ Cf. article 12 de l'arrêté du 26 mai 1993.

* 11 _ Le nombre de délégué du personnel à élire dépend de l'effectif des travailleurs occupés au sein de l'entreprise ou de l'établissement. Dans tous les cas, il y aura de délégué titulaire que de suppléant.

* 12 _ Sont à exclure de l'effectif à prendre en considération, tous ceux que le code de travail en son article 1er al 3 ne considère pas comme travailleurs. Il s'agit notamment des travailleurs régis par :

- le statut général de la fonction publique ;

- le statut de la magistrature ;

- le statut des militaires ;

- le statut spécial de la sûreté nationale ;

- les dispositions particulières applicables aux auxiliaires de l'administration ;

- Le statut spécial de l'administration pénitentiaire.

* 13 _ Il existe deux collèges pour ce qui est de l'élection des délégués du personnel. Le premier collège est celui des manoeuvres, des ouvriers et employés. Le second, celui des agents de maîtrise, cadres et autres hauts responsables. Le nombre de délégués à élire, titulaires et suppléants dépend de l'effectif des travailleurs.

* 14 _ La liste des électeurs doit être publiée vingt jours avant le scrutin et celle des candidats six jours avant le vote.

* 15 _ Il s'agit entre autres de la date du scrutin, des bulletins de vote.

* 16 _ Cf. Paul Gérard POUGOUE (sous la direction de ...) et autres, Code du travail camerounais annoté, P.U.A, Yaoundé 1997, pp. 188-189.

* 17 _ Voir article 21 de l'arrêté n° 019/MTPS/SG /CJ du 26 mai 1993 fixant les modalités de l'élection et les conditions d'exercice des fonctions des délégués du personnel.

* 18 _ Il peut s'agir de la réunion mensuelle obligatoire ou de la réunion sur demande de l'employeur ou des délégués du personnel.

* 19 _ Lire TOUMEGNE TSOTAP C.G, « Le licenciement du délégué du personnel impliqué dans une procédure pénale », Mémoire de DEA, FSJP, Université de Douala, 2003-2004, p.

* 20 _ Cf. G.H. Camerlyinck et G. LYON CAEN, droit du travail, Dalloz 11e éd. Paris 1982, p. 689.

* 21 _ Cf. Jean PELISSIER, Alain SUPIOTet Antoine JEAMMAUD, Droit du travail, op.cit.

* 22 _ Voir art. 165 à 183 APAUDT.

* 23 _ L'OHADA, c'est-à-dire l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires a été créée par le Traité de Port-Louis (Ile Maurice) du 17 octobre 1993. Elle regroupe aujourd'hui seize (16) pays le dix-septième (la République Démocratique du Congo) en cours d'adhésion. En plus de l'adoption des actes uniformes (sept actes depuis le 1er Janvier 1998), le Traité de l'OHADA a également institué une Cour de Cassation Interétatique, la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (C.C.J.A), chargé d'assurer l'unité d'interprétation et d'application des actes uniformes ayant son siège en Côte d'Ivoire (Abidjan).

* 24 _ Voir art. 23 de la Loi n° 92/007 du 14 août 1992 portant code du travail camerounais en vigueur.

* 25 _ Le contrat de travail est le seul qui permet à l'une des parties d'exercer sur l'autre un pouvoir. Le lien de subordination qui est consubstantiel au contrat de travail rend en effet légitime le pouvoir de l'employeur sur le salarié.cf TCHAKOUA Jean Marie, Dignité et droits fondamentaux des salariés : réflexion à partir des droits camerounais et français, Thèse pour le doctorat d'Etat en droit, Université de Yaoundé 2, 1998/1999, p.34.

* 26 _ cf. Léon NOAH MANGA, « Le délégué du personnel : une mission délicate », Imprimerie St Paul, Ydé 2002, p.139.

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