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La requalifiacation des contrats d'assurance vie

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par Michel Justancia ILOKI
Université du droit et de la santé Lille 2 - Master 2 professionnel Droit des assurances 2005
  

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B/ Enjeux matrimoniaux et successoraux : la question des primes manifestement exagérées

En matière d'assurance vie, les querelles de famille finissent souvent par des querelles doctrinales. Que les disputes soient matrimoniales comme dans le trop célèbre arrêt Praslicka, ou successorales comme dans le récent arrêt Leroux, les passions sortent du prétoire pour atteindre la communauté juridique (1(*)05). Aujourd'hui ces querelles portent sur les primes manifestement exagérées.

En effet, bien souvent, les litiges viennent d'héritiers qui s'estiment lésés par un contrat d'assurance vie souscrit par leur(s) parent(s) au profit d'un tiers. Pour défendre la thèse de leurs clients et avoir prise sur ce patrimoine, les notaires s'appuyaient sur les techniques de gestion de ces contrats aujourd'hui empruntées aux opérations de capitalisation. Et pourtant, la question semble réglée par l'article L. 132-13 al 2 du Code des assurances, atténuant ainsi son caractère dérogatoire vis à vis du droit civil.

Dans sa note du 30 juin 2003 (p.1), le Président du Conseil supérieur du notariat, a fait valoir que : "l'assurance vie a parfois pour résultat de déshériter les proches du souscripteur en contrariété avec le respect de l'ordre public successoral, notamment la réserve héréditaire , générant selon lui un contentieux abondant et croissant. Il renchérit en ces termes : tant en matière successorale que de liquidation de communauté, le recours à la notion de primes manifestement exagérées est périlleux et sources d'incertitudes". Ces observations ont été prises en compte par la FFSA, le ministère des Finances de l'Economie et de l'Industrie et ont influencé la décision de la Chambre mixte de la Cour de cassation.

Il pouvait être déduit de la jurisprudence antérieure que, la Cour de cassation abandonnait au pouvoir souverain des juges du fond l'appréciation du caractère manifestement exagéré des primes eu égard aux facultés du souscripteur (1(*)06). Cela ne signifiait toutefois pas qu'elle écartait tout contrôle quant aux critères retenus par les juges du fond pour opérer leurs déductions. L'arrêt de la première chambre civile rendu le 1er juillet 1997 le montrait. De lui, nous retenons quatre enseignements :

La première chambre civile de la Cour de cassation affirmait à nouveau le pouvoir souverain des juges du fond pour l'appréciation du caractère manifestement exagéré des primes. Il n'existait pas de seuil légal de l'excès, ce qui laissait aux juges du fond une importante marge de manoeuvre.

Le montant du rapport ou de la réduction était également laissé à la sagesse des juges du fond. Ils pouvaient ainsi prononcer le rapport ou la réduction pour la totalité des primes payées ou seulement pour une fraction.

Le critère légal n'était pas d'ordre exclusivement économique puisque la Cour de cassation autorisait expressément les juridictions inférieures à se référer à l'utilité de l'opération pour le souscripteur et à l'âge de celui-ci.

Enfin le rapport ou la réduction des primes excessives n'était pas subordonné à la démonstration de l'intention frauduleuse du souscripteur (1(*)07). L'article L. 132-13 du Code des assurances se distinguait ainsi de l'action paulienne prévue à l'article 1167 du Code civil qui suppose la preuve de l'existence d'une fraude.

La chambre mixte n'a pas entendu, semble t-il, modifier de façon très importante ce contrôle de proportionnalité dont la souplesse permet une application à chaque cas particulier, c'est à dire une adaptation du fait au droit. Elle a voulu toutefois, répondre aux attentes du notariat, qu'elle a tenues comme partiellement justifiées sur ce point, en améliorant la sécurité juridique par un renforcement de son contrôle de la motivation des arrêts se prononçant sur le caractère manifestement exagéré des primes versées.

Il n'est plus question dans ces arrêts du pouvoir d'appréciation souverain des juges du fond. La Cour de cassation entend maintenant contrôler, sur le fondement du manque de base légale, la qualification des primes manifestement exagérées.

En d'autres termes, on peut dire que la Cour vient de combler une lacune en posant en principe dans ses attendus que : "le caractère exagéré ou non d'une prime s'apprécie au moment du versement, au regard de l'âge ainsi que des situations patrimoniale et familiale du souscripteur". Il a été par ailleurs précisé, dans le communiqué accompagnant ces arrêts, que "afin de s'assurer de la compatibilité des dispositions contractuelles en cause avec le droit successoral, la Cour de cassation a vérifié que lorsque la qualification d'assurance vie avait été justement retenue par les juges du fond, le caractère manifestement exagéré des primes versées avait été examiné, au moment de leur versement, au regard de l'âge et des situations patrimoniale et familiale du souscripteur". Les précisions ainsi apportées confortent sans nul doute les praticiens en définissant les critères à la lumière desquels les juridictions devront contrôler les primes manifestement exagérées. Il appartiendra donc aux assureurs de contrôler les souscriptions afin d'éviter des remises en causes qui, si elles doivent prendre en compte la situation des souscripteurs au moment du versement des primes, interviendront néanmoins après leur décès.

Finalement, les praticiens de l'assurance ne peuvent être là, encore, que satisfaits de la position prise par la Cour. Ils estiment en effet depuis longtemps que le Code des assurances prévoit des solutions d'une grande partie des difficultés juridiques qu'ils peuvent rencontrer dans leur activité. Mais la Cour laisse aux assureurs une grande responsabilité, puisqu'il leur appartient de déterminer, au cas par cas, et quand la question se pose, dans quelle mesure une prime est ou non exagérée, ceci sous le contrôle du juge.

La question des primes manifestement exagérées qui demeure aujourd'hui au centre du débat au détriment de celle d'aléa, provisoirement close; venant d'être étudiée, reste à réaliser la portée de la décision de la Cour dans le droit positif.

* (105) L. Mayaux, Op. cit

* (106) Cass. 1re civ., 11 mars 1997: Bull.civ., 1997, I. n° 94

* (107) Cass. 1re civ., 1er juillet 1997 et 26 juin 2001.

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