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Un monde sans droit d'auteur

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par Chan chamnan THAN
Université Lyon 2 - Master 1 droit 2005
  

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A. L'encadrement de la copie privée

L'exception de copie privée est celle au droit d'exploitation exclusif de l'auteur ou ses ayants droit. Prévue par l'article L122-5, 2° du CPI, elle permet à un individu de reproduire une oeuvre protégée et divulguée, sans l'autorisation de son auteur, dans le cadre de l'usage strictement privée du copiste et pas collectif. En contrepartie, les bénéficiaires de cette exception doivent s'acquitter de la taxe sur les supports numériques servant à la reproduction. Cela signifie que la copie privée n'est pas « une liberté gratuite ». Les recettes provenant de ladite taxation constituent une rémunération au profit des auteurs ou ses ayants droit pour réparer son « préjudice légalisé ».

Nous constatons que, dès son instauration, la copie privée est une notion énormément floue et comporte une signification très vaste. A ce propos, nous pourrions nous interroger de son étendue, sa nature, ses méthodes d'application etc. La question se complique de plus lorsqu'elle porte sur une possibilité de la copie privée par voie numérique. Donc, pouvons-nous fonder le téléchargement d'un fichier de musique sur la copie privée ? En s'appuyant sur les pures dispositions de l'article précité, il nous paraît sans doute possible. Mais, si nous admettons une telle possibilité, sans aucune restriction, il y aurait beaucoup de conséquences regrettables vis-à-vis des auteurs. Il nous convient donc d'en trouver immédiatement des solutions.

A cause de caractère imprécis de l'exception légale, les juges ont connu des difficultés dans leur décision, notamment l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 10 mars 200539(*). Cet arrêt faisant d'ores et déjà l'objet de nombreux débats a été vivement critiqué pour avoir relaxé le prévenu, poursuivi pour avoir téléchargé ou copié de plus de 500 films, en se fondant sur l'exception de la copie privée. Selon les parties civiles (dont principalement le Syndicat national de l'édition vidéo « SEV »), les juges n'ont pas cherché si le téléchargement ou la copie effectué par le prévenu portait sur les oeuvres dont la source est licite ou pas. A dire vrai, les juges montpelliérains n'ont pas procédé à déterminer si la copie en cause était faite sur l'original d'une oeuvre ou via P2P. Cette décision a contredit celle, rendue le 2 février 2004, d'un tribunal de première instance qui a condamné Alexis, un jeune, pour avoir téléchargé illégalement sur le réseau P2P. En plus, elle a adopté une position différente de celle du tribunal de grande instance de Paris (jugement du 4 mai 2004) qui avait énoncé que « la copie d'une oeuvre éditée sur support numérique peut porter atteinte à son exploitation normale ».

De toute façon, nous ne pouvons pas reprocher totalement aux juges de la cour d'appel de Montpellier car leur décision a été évidemment rendue dans l'absence de précision légale sur les problèmes du téléchargement et de la copie privée. Il est donc indispensable que le législateur intervienne.

L'alinéa 1er de l'article 8 du projet de la loi DADVSI semble également en apporter une solution à sa manière. Il prévoit que « l'auteur d'une oeuvre autre qu'un logiciel, l'artiste-interprète, le producteur de phonogramme ou de vidéogramme, l'entreprise de communication audiovisuelle peuvent mettre en place des mesures techniques de protection des droits qui leurs sont reconnus par les Livres Ier et II du CPI ». Cette nouvelle possibilité consistant à limiter la copie de l'oeuvre est ouverte également aux producteurs de base de données. Grâce à une telle disposition, on pourrait tout d'abord se demander pourquoi la liste n'inclut pas les éditeurs de logiciel. Aucune réponse à cet égard n'est établie suffisamment. Ensuite, la nouvelle mesure de protection est octroyée tant aux titulaires du droit d'auteur que ceux des droits connexes. Cela est bien justifié, d'une part, par le fait que la notion de copie privée s'applique également aux oeuvres nécessitant la participation des artistes-interprètes (ou exécutants), des producteurs de phonogrammes et vidéogrammes et des entreprises de communication audiovisuelle. D'autre part, on observe que les problèmes de copie numérique affectent aussi considérablement ces titulaires.

D'après plusieurs bénéficiaires habituels [les internautes] de l'exception, la mise en place des mesures techniques de protection (MTP)40(*) telles que l'anticopie serait une massive atteinte à la copie privée. De plus, certains d'eux n'ont pas hésité à dénoncer la nouvelle loi comme celle « liberticide » (par rapport aux libertés d'expression et de jouissance culturelle). Leur contestation nous ferait songer au caractère réel de cette fameuse exception. Nous nous demanderons si la copie privée relève d'un droit ou une simple exception, tolérée par le bon vouloir des auteurs ? Encore, aucune réponse précise de la part du législateur ni celle doctrinale ou jurisprudence n'est formée. Il faut noter, de surcroît, qu'aucun texte international ne qualifie la copie privée comme un droit ou autrement. Mais, la Directive du 22 mai 2001 a évoqué « une faculté » liée à l'exception.

Pour autant, cela ne signifie pas que l'exception de copie privée est en voie de disparition sur le plan juridique si l'on examine la suite de l'article 8 du projet la loi DADVSI. L'alinéa 2 de cet article prévoit, quant à lui, que « les mesures de protection doivent permettre au bénéficiaire des exceptions prévues deuxièmement de l'article L122-5 et deuxièmement de l'article L221-3 d'en jouir, lorsqu'il a un accès licite d'oeuvre ». Or, que signifie l'accès licite ? Le téléchargement fait-il partie de cet accès licite ? Encore, la loi ne parvient pas à éclaircit ces points sensibles. Elle ne précise ni énumère des formes de restrictions de l'utilisation que les auteurs et ses ayants droit peuvent mettre en place. D'ailleurs, elle s'abstient de déterminer les méthodes pour les utilisateurs d'une oeuvre de se rendre compte des mesures protectrices (notamment l'anticopie). Même si la question « est-ce que la copie privée est une simple exception ou un droit ? » ne soit pas définitivement résolue, nous pouvons estimer que les mesures techniques de protections, quelque soit leur forme, ne doivent pas supprimer totalement la faculté pour les utilisateurs de faire la copie conformément aux règles posées par les articles L122-5 et L221-3 du CPI. Notre idée est bien sûr inspirée par certaines décisions judiciaires, notamment celle de la Cour d'appel de Paris dans la fameuse affaire « Mulholland Drive ».

En définitive, il nous paraît également important de savoir si le nouvel encadrement de la copie privée s'appliquera d'une même façon à tous les domaines de l'oeuvre de l'esprit sans distinction. A défaut d'une précision du nouveau texte, nous pouvons estimer qu'il concernera toutes sortes de l'oeuvre régies par l'effet numérique. Cela signifie donc que les MTP seront susceptibles d'être érigées analogiquement tant pour un fichier musique ou vidéo-film que pour un article journal affiché sur le Web. Mais, si l'on analyse un peu plus soigneusement des différents buts et avantages de chaque oeuvre pour le public, on serait convaincu que les limitations techniques ne doivent pas être de la même nature. A dire vrai, on doit assouplir, à titre d'exception, la rigidité des MTP pour certains éléments qui comporte l'importance éducative, d'enseignement ou de recherche etc. Ainsi, l'accès à une oeuvre par des étudiants, dans le cadre de leur étude ou recherche, devrait être facilité et la copie privée devrait pouvoir se réaliser avec moins de restrictions.

Bien que le dernier alinéa de l'article 8 du projet en question confie la protection de l'exception aux juges, cela ne pourrait pas constituer une bonne solution. Autrement dit, la décision qui est tributaire du pouvoir souverain des juges ne suffira pas à résoudre les problèmes de la copie privée dans le contexte actuel. Il faut, en revanche, avoir recours essentiellement aux dispositions législatives comme le fondement le plus stable et le plus solide.

A part la question de copie privée, nous devons également envisager des solutions pour lutter contre les autres menaces numériques.

* 39 DUMOUT E., « La copie privée légitimée par la Cour d'appel de Montpellier », ZDNet France, publié le vendredi 15 mars 2005.

* 40 Les mesures techniques de protections sont techniquement et juridiquement conçues dans le cadre de « la gestion des droits numériques » (GDN). En Anglais, la GDN est connue sous le nom de Digital Rights Management (DRM).

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault