§ 2. - La détermination de la loi applicable au
contrat initial en tant que point de rattachement de l'action directe
Si l'action directe contractuelle, quant à la
détermination de la loi applicable, dépend du contrat initial, il
n'est pas moins important de distinguer deux hypothèses, suivant
lesquelles à savoir si le contrat initial est un contrat interne (A) ou
un contrat international (B), afin de déterminer la loi applicable au
contrat initial.
A. - Le contrat initial à caractère
interne
Supposons qu'un individu italien achète, auprès
d'un concessionnaire italien installé en Italie, un véhicule
automobile. Cet acheteur revend ensuite son véhicule à un
Français. Sachant que ce véhicule est atteint d'un vice
caché lors de la première vente. L'acheteur final français
souhaite porter plainte contre le vendeur initial italien. Quelle est donc la
loi compétente pour gouverner le contrat initial en tant que point de
rattachement ? La loi italienne est-elle forcément compétente ?
D'ailleurs, le vendeur et l'acheteur qui ont la même nationalité
italienne peuvent-ils, par leur commun accord, s'entendre de désigner
une loi étrangère autre que leur loi nationale ? Le juge saisi
doit-il recourir au mécanisme de conflits de lois ?
45 Vincent Heuzé, « la loi applicable aux
actions directes dans les groupes de contras », Rev. Crit. DIP
1996, p. 243
Selon Frédéric Leclerc46, si le
contrat initial présente un caractère interne (absence
d'élément d'extranéité), nul recours au
mécanisme de conflits de lois ne s'impose et l'on peut noter avec
intérêt que pour une fois, un litige de nature internationale
échappe aux mécanismes du droit international privé. De
même,
M. JACQUET plaidait dans sa thèse que les contrats
internes à rattachements homogènes doivent être soumis
à « la loi dans la sphère d'influence naturelle dans
laquelle ils se situent et qui est applicable sans intermédiaire
d'aucune règle de conflit, car il n'y a, en réalité, pas
de conflit ». Mais, cette opinion a été contestée
par
M. HEUZE qui affirme que « le jeu de la règle
bilatérale de conflit n'est habituellement pas subordonné
à la condition que la situation à régir présente un
caractère international, qui n'a, au contraire, aucun sens puisque c'est
la règle de conflit elle-même qui permet de décider si
cette situation doit être réglementée par le droit interne,
ou par celui d'un Etat étranger qu'elle détermine
précisément »47.
Le même auteur, M. JACQUET, exclut du domaine du
principe d'autonomie les situations contractuelles à rattachement
homogènes. En effet, le contrat initial se soumet directement,
c'est-à-dire sans l'intermédiaire d'une règle de conflit,
au droit du pays dont les parties ont la nationalité. En revanche, une
règle de rattachement n'a de sens que si, la possibilité d'un
rattachement du rapport litigieux à plus d'un système juridique
étatique, est constatée. Le contrat interne, qu'il soit du for ou
étranger, ne relève ni du principe d'autonomie, ni d'une autre
règle de conflits, parce qu'il n'y a pas lieu à son propos de
désigner ou de choisir une loi étatique parmi celles qui
apparaissent avoir vocation à s'appliquer.
En matière contractuelle, la convention de Rome du 19
juin 1980 dispose dans le paragraphe 3 de l'article 3, consacrant au principe
d'autonomie que « le choix par les parties d'une loi
étrangère, assorti ou non de celui d'un tribunal étranger,
ne peut, lorsque tous les autres éléments de la situation sont
localisés au moment de ce choix dans un seul pays, porter atteinte aux
dispositions auxquelles la loi de ce pays
46 F. Leclerc, « les chaînes de contrats en
droit international privé », JDI 1995, p.243
47 F. Leborgne, L'action en responsabilité
dans le groupe de contrats, Renne I, 1995
ne permet pas de déroger par contrat ». En
s'appuyant sur cette disposition, la convention de Rome n'autorise-t-elle pas
les parties à un contrat interne à effectuer un choix de droit
international privé, c'est-à-dire choisir la loi qui
régira leur contrat ? M. LAGARDE apporte, très clairement, une
réponse affirmative48.
Si la détermination de la loi applicable au contrat
initial à caractère interne n'est pas très
compliquée, le contrat initial à caractère international,
en revanche, rend la situation plus délicate puisque le juge saisi doit
recourir, à défaut de choix par les parties, aux
mécanismes de droit international privé quant à la
détermination de la loi applicable.
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