§ 2. - La détermination de la loi applicable et
la considération
hypothétique : l'exemple de sous-traitance
internationale
On prend le cas de l'action directe en responsabilité
exercée par le maître d'ouvrage à l'encontre du
sous-traitant.
La question se pose à savoir si la demande doit
être placée sur le terrain délictuel ou contractuel. Pour
en savoir, on revient donc à la lex fori, loi de la
qualification. Il est certain que quelle que soit l'identité du
demandeur, l'action ne peut être qualifiée que de contractuelle,
dès lors qu'elle tend à la sanction d'un manquement du
défendeur aux obligations nées pour lui d'un contrat. Et cette
conclusion est d'autant plus assurée que se rallier ici aux
critères du droit civil français et, en conséquence,
décider que les recours des tiers sont de nature délictuelle
pourrait parfois conduire à des résultats aberrants puisque l'on
aboutirait à apprécier la responsabilité du
défendeur par application d'une loi, la lex loci delicti, qui
pourrait concevoir les obligations de celui-ci d'une manière très
différente de celle qui régit le contrat conclu par lui.
On sait que l'article 14-1 de la loi française du 31
décembre 1975 impose au maître d'ouvrage qui a connaissance de la
présence sur le chantier d'un sous-traitant, de mettre en demeure
l'entrepreneur principal, de soumettre les conditions de paiement de celui-ci
à son agrément et, aucun contrat n'unissant à ce
sous-traitant le maître d'ouvrage. La jurisprudence qualifie de
délictuelle la violation, par ce dernier, d'une telle obligation,
lorsqu'elle est invoquée par le second.
Mais, il est évident que retenir la même analyse
pour la mise en oeuvre des règles de droit international privé
serait une absurdité : elle aboutirait à refuser, par application
de la loi étrangère du lieu du délit, toute indemnisation
pour la perte du bénéfice de l'action directe que la loi
française du contrat principal, compétente pour régir
celle-ci, offrait au sous-traitant, tant dis qu'inversement, elle conduirait
à
condamner, en vertu de la loi française du
délit, un maître d'ouvrage que la loi étrangère du
contrat principal n'obligerait en rien à faire agréer le
sous-traitant, faute d'accorder une quelconque action directe à
celui-ci. Aussi bien, il ne paraît pas douteux que quelle que soit
l'identité de la victime, la responsabilité doit être
qualifiée de contractuelle, au sens du droit international privé,
lorsqu'elle tend à la réparation d'un dommage résultant de
la violation d'une obligation contractuelle et que la loi applicable à
cette responsabilité est celle qui régit le contrat duquel
découle l'obligation en question. Il faut en déduire que toutes
les actions directes en indemnisation exercée entre le maître
d'ouvrage et le sous-traitant, dès lors qu'elles sont fondées sur
la violation des obligations nées du contrat auquel le défendeur
est partie, relèvent de la seule compétence de la loi gouvernant
ce contrat.
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